Avez-vous lu « Sapiens » ? Un nouveau visage pour le « vivre-ensemble »
Après le Greening of America de Reich, le Future Shock de Toffler, la Prophétie des Andes et tous les bouquins en mode révélation des années ‘’70, Sapiens, de Yuval Noah Harari, est le dernier en date de ces bestsellers qui proposent de nouveaux paradigmes à notre nouvelle société. La société née de l’industrialisation et de l’abondance qui en a résulté. C’est le dernier de ces messages et le plus ambitieux, car il clôt sur l’immortalité, la quête du bonheur éternel, met fermement Dieu au rancart sans aucune équivoque… et dit à l’Homme que Sa place est à prendre. Rien que ça…
On aime ou on n’aime pas le bouquin, mais il devrait être lu. Il y foisonne tant d’idées, que l’on y trouve, annoncées sans plus, des prévisions auxquelles l’auteur ne fait qu’allusion mais qui mériteraient bien plus d’attention…. Au cours des prochaines semaines, je veux souligner quelques-unes de ces prévisions quasi-laissées pour compte, parce que l’auteur avait déjà tant à dire. Tenez, aujourd’hui, une digression sur la façon dont évoluera la constitution des ménages, définissant ménage comme l’ensemble de ceux qui se partagent un logis. La façon dont des individus cohabitent dans un logis n’est pas anodin. Elle va se transformer. Il est bon de penser aux conséquences de cette transformation.
Pourquoi penser à une transformation ? C’est que les circonstances changent.
La société prindustrielle intégrait l’individu à une collectivité et à une structure familiale souvent élargie au sein de laquelle son rôle évoluait selon son âge. L’industrialisation exigeant une mobilité professionnelle accrue et une urbanisation croissante, c’est la famille nucléaire, réduite aux géniteurs et leurs enfants, qui est devenue la norme.
Et alors ? Alors, il est évident que la « vie à deux » conduit normalement à un veuvage, veuvage d’autant plus long que la différence d’espérance de vie entre les sexes est importante. Pour cette raison surtout, mais aussi parce que le mariage a cessé socialement d’être compris comme un engagement permanent, même la vie à deux est devenue plus précaire, et c’est vivre seul qui est devient de plus en plus l’option la plus probable et la situation par défaut.
Une catastrophe. Car le ménage ‘’à un’’ constitue non seulement une solution économique calamiteuse - en forçant une multiplication inutile des équipements et en réduisant les occasions d’économies d’échelle et d’échanges de services - mais il est plus ardu, en notre époque trouble d’assurer la sécurité de ceux qui vivent isolés… Comme aussi de se protéger du risque accru de déviance chez ceux qui sont ainsi privés de la pression subtile pour la conformité qu’exerce sur chacun la simple présence des autres. Et ajoutons qu’il est désormais avéré que l’espérance de vie est moindre pour ceux qui vivent seuls !
Objectivement, il n’est pas bon de vivre seul. Il n’est donc pas étonnant de constater que, dès que les conditions le permettent, il se produit un ressac de la ‘’demande pour la solitude ’’ imposée par l’industrialisation. Parmi les facteurs qui contribuent au ressac, il y a un passage progressif au tertiaire de la main d’œuvre du secteur secondaire, il y a l’amélioration des moyens de communications et de transport qui permettent que le travailleur s’éloigne de son lieu de travail, mais il y a surtout le vieillissement de la population.
Pourquoi le vieillissement influe-t-il sur la structure de l’habitat ? Parce que la solution de regrouper les ainés qui sont en perte totale ou partielle d’autonomie, pour leur assurer les meilleures conditions de vie, au meilleur coût pour la société est de BEAUCOUP la plus raisonnable. Le maintien a domicile, sauf pour qui le choisit librement et en assume le prix caché (qui est énorme), est une arnaque sociale qui vise à faire porter hypocritement aux aidants naturels un poids que la société devrait assumer sans discussion. Si elle ne le fait pas, ce poids est intolérablement mal réparti et le deviendra de plus en plus.
Vivre en groupes serait une aubaine. Cela dit, peut-on penser que l’individu lambda, après des générations à devoir s’isoler, soit aujourd’hui devenu ouvert à se regrouper spontanément selon le modèle traditionnel de la famille élargie ? Tous les sondages indiquent que NON. Les exemples d’habitat intergénérationnel suscitent fort peu d’enthousiasme. Est-ce à dire que nous sommes condamnés à seuls Vivre ou au scénario actuel du regroupement odieux des vieux par décisions bureaucratiques ?
Peut-être pas… Il y a une troisième voie. On a dit que « Dieu nous donne des parents, mais qu’on peut choisir ses amis… » ? Pourquoi, des amis vieillissant ne choisiraient-ils pas, au lieu d’attendre que les circonstances les y obligent, d’acheter ou de louer en commun de leur propre chef un espace pour y créer un logis sur mesure en y investissant selon leurs moyens ? Ils pourraient alors, individus ou couples, organiser ensemble ce qui pourrait être la dernière étape de leur vie, mettant leurs intérêts communs et leurs affinités à profit pour que celle-ci soit mieux à leur convenance… Ne vaudrait-il pas mieux se retirer avec avec des amis plutôt que des étrangers ?
Dans un société où les changement pourront encore s’accélérer, l’avenir de l'habitat ne sera-t-il pas a des regroupements ‘’intra-générationnels’’ générations X, Y ou celles qui suivront privilégiant de vivre en retraités avec ceux de la même cohorte, et réduisant ainsi les inévitables malentendus avec ceux des autres cohortes dont ces changements auront fait pour eux des ‘’Martiens’’ ?
Si cette tendance se manifeste, des groupes seront créés où chacun trouvera un environnement plus convivial, puisque les modalités de fonctionnement de chaque groupe seront différentes, infiniment adaptables, pourront répondre à la demande de copains millionnaires comme de copains smicards, pourrot regrouper aussi bien une demi-douzaine d’amis intimes qu’une trentaine de personnes unies pas une commune passion pour la musique…. ou quoi que ce soit. Ces groupes n’auraient touts en commun que deux (2) caractéristiques, les distinguant de simples maisons de retraite.
Leur première spécificité sera c’est que ce sont les participants, les commensaux eux-mêmes, ou leurs tuteurs en cas d’incapacité, qui en serontnt les administrateurs et les patrons. Chacun ne serait donc jamais dépendant que des règles qu’il aurait lui-même acceptées au départ… et dont on peut penser qu’elle lui seraient donc plus acceptables que les tracasseries imposées par des fonctionnaires.
La seconde serait la règle de l’unanimité. Rien ne serait changé des conditions initiales d’adhésion sans que tous y consentent. Quand l’inévitable fera que quelques-uns ‘’n’en soient plus’’, c’est toujours à l’unanimité des survivants que devraient être accueillis ceux qui aspireront alors à se joindre au groupe.
Quel serait le résultat le plus immédiat et le plus visible d’un engouement pour cet habitation en commun ? Une hausse de la qualité de vie de ceux qui feront ce choix. Une baisse du cout de l’hébergement, bien sûr, mais aussi des économies d’échelle et une amélioration spectaculaire des services accessibles. J’en donne ici deux (2) exemples seulement, mais imaginez-en une multitude. A) Un groupe de dix (10) retraités a revenus moyens pourra facilement s’offrir la présence permanente en résidence d’une infirmière… et l’accord d’un médecin généraliste à venir y faire des visites à domicile…. B) Plutôt que d’acquérir une dizaine de véhicules, ils passeront un contrat avec un service de limousine avec chauffeurs de type Uber qui seront disponibles à tous en tout temps…
Si vous êtes un peu cynique, pensez aussi au non-dit qui va de soi : le groupe est un gros client. Comprenez que tout participant à un tel groupe sera perçu sur le marché comme disposant du revenu de tout le groupe… et jouira de la considération qui y correspond. Il ne fera plus la queue chez l’agent de voyage et c’est à lui qu’irra toujours le dernier billet ….
Pour que les habitudes se modifient et que de tels groupes se constituent, il suffirait qu’un moyen pratique existât qui permette à ceux qui ont des besoins communs et des affinités de se rencontrer. Dans un monde parfait, l’État mettrait en place une structure pour faciliter ces rencontres…. Dans un monde d’Internet, on peut prévoir qu’un entrepreneur avisé le fera rapidement… Il y a là un service à rendre et un profit à prendre. Moi-même, plus jeune… . « Il eut suffi de presque rien, peut-être de dix ans de moins… » J
Cette idée tout à fait pratique m’est venue à la lecture de « Sapiens ». Je crois que ce livre m’en proposera d’autres... Et à vous aussi, sans doute.
Pierre JC Allard
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