Bataille d’Alésia : l’armée gauloise de secours arrive. Explication du militaire
Commios l’Atrébate et les autres chefs auxquels avait été confié le commandement de l'armée de secours arrivent devant Alésia. Ils s’établissent sur un versant <1> à moins de 1 km 500 des fortifications romaines (du camp K). Le lendemain, ils font sortir leurs cavaliers. Toute la plaine en est couverte <2>. Ils disposent leur infanterie légèrement en retrait sur des positions plus élevées <3>.
De l’oppidum (l'ovale noir, à la pointe du mont Auxois) on voit tout le champ de bataille. Dès que l’armée de secours est en vue, on se rassemble, on s’embrasse et la joie éclate dans les cœurs.
Les assiégés viennent prendre position en avant de l’oppidum <4>. Ils lancent des claies dans le fossé (romain du retranchement) et le comble avec tout ce qui leur tombe sous la main. Ils se préparent à tenter une sortie générale. (DBG VII, 79).
Les légionnaires se portent aux emplacements de combat qui leur ont été fixés les jours précédents, sur les deux lignes de défense <5>.
La cavalerie romaine sort alors des camps <6> et attaque. Les soldats qui s’étaient retirés dans leurs camps <7> sur les hauteurs, suivent avec attention les péripéties du combat et en attendent patiemment l’issue.
Les Gaulois avaient disséminé au milieu de leurs cavaliers des archers et des fantassins armés à la légère. Leurs cavaliers reculent-ils, ils arrivent aussitôt derrière pour les aider. Quand les cavaliers romains chargent, ils tirent sur eux et brisent leur élan. Ils en mettent ainsi un certain nombre hors de combat.
De toutes parts, les Gaulois placés en spectateurs, voyant que les leurs prennent l’avantage, les encouragent par des clameurs et des hurlements. Aucun exploit, aucune lâcheté ne peuvent passer inaperçus. L’amour de la gloire et la crainte du déshonneur forcent les courages.
Le soleil se rapproche de l’horizon et le combat qui dure depuis midi est toujours indécis. Alors, les Germains se forment en escadrons serrés ; ils chargent sur un seul point. Ils repoussent les cavaliers gaulois qui s’enfuient. Ils entourent les archers et les massacrent. De toutes parts, les Romains se précipitent et ils les poursuivent jusqu’à leurs camps sans leur laisser le temps de reprendre leurs esprits. DBG VII, 80.
Deuxième engagement, de nuit (condensé de DBG VII, 81, 82).
Un jour se passe pendant lequel les Gaulois de l'armée de secours préparent un grand nombre de fascines, d’échelles et de harpons.
Au milieu de la nuit, ils sortent en silence de leurs camps (1) et (3) et se dirigent vers les retranchements romains de la plaine. Ils poussent une grande clameur pour signaler leur approche aux assiégés (4). Ils amènent au plus près les fascines pour combler les fossés. Ils sortent leurs frondes et leurs arcs. Ils accablent les défenseurs du retranchement (5) sous une grêle de pierres et de traits. Ils se préparent à donner un assaut en règle.
Les Romains se portent aussitôt aux emplacements de combat (5). Avec des piques, avec des pieux, avec des frondes, ils repoussent les Gaulois ou les tiennent à distance.
On se bat dans le noir. Des deux côtés, les blessés ne se comptent plus. Les javelots s’envolent des machines à jet multiple. Les officiers supérieurs romains prélèvent des renforts sur les garnisons des redoutes (qui sont entre les deux lignes de retranchement) et les envoient sur les points menacés...
Lorsque les Gaulois se trouvaient assez loin du retranchement (5), la multitude de leurs traits leur donnait l’avantage. Mais quand ils se rapprochaient, ils mettaient les pieds sur les aiguillons, ils glissaient dans les trous et s’empalaient sur les pieux. Ou bien, ils étaient frappés à mort par les pilum lancés du haut des tours et des remparts.
Couverts de blessures, n’ayant pu franchir nulle part le retranchement, craignant une attaque sur leur flanc droit, ils se retirèrent au lever du jour (vers leurs camps de Mussy)
De l’autre côté, les assiégés gaulois avaient transporté à pied d’œuvre le matériel qu’ils avaient préparé en vue de leur assaut. Ils comblèrent les premiers fossés, mais s’étant attardés trop longtemps dans l’exécution de ces tâches, ils n’étaient pas encore arrivés au retranchement <5> quand, en face, leurs compatriotes abandonnèrent la partie. Sans avoir rien tenté, ils retournèrent sur l’oppidum.
Les Romains fléchissent...(condensé de DBG VII, 83, 84,85).
Repoussés par deux fois après avoir subi de lourdes pertes, les Gaulois se concertèrent pour déterminer ce qu’il s’agissait de faire.
Ils interrogèrent les gens du pays pour bien repérer l’emplacement des retranchements et des camps romains.
Il y avait au nord une hauteur que les Romains n’avaient pu englober dans leurs lignes, en raison de son étendue <1>. Les camps de deux légions <2> s’y trouvaient sur un terrain légèrement en pente et dans une situation peu favorable. Après avoir fait reconnaître les lieux, les chefs que nous avons précédemment nommés donnèrent l’ordre de trier 60 000 hommes parmi ceux dont les cités avaient la plus grande réputation de valeur militaire. Ils se mirent ensuite d’accord en secret sur un plan d’action. Après avoir fixé l’heure H à midi, ils donnèrent le commandement des troupes à l’Arverne Vercassivellaunos...
Il sort du camp à la tombée de la nuit <3>. Sa marche s’achève à l’aube derrière la montagne <4>. Il s’y cache. Il ordonne à ses soldats de se reposer des fatigues de la nuit. Avant qu’il ne soit midi, il se met en route en direction de son objectif <5>.
Dans la plaine, en même temps, la cavalerie gauloise s’approche des fortifications <6> et l’infanterie se déploie devant les camps romains H et K <7>.
Vercingétorix, du haut de la citadelle/oppidum d’Alésia <8> aperçoit les troupes en marche. Aussitôt, il sort de l’oppidum (8). Il fait avançer les fascines, les panneaux de protection, les faux de guerre et tout ce qu’il a préparé pour l’assaut.
Il engage le combat partout à la fois. Ses troupes montent à l’attaque de tous les ouvrages de défense. Si un endroit paraît moins bien défendu, elles s’y portent en masse. Devant tant de points à défendre, les Romains placés aux remparts <9> courent en tous sens, et leur tâche devient de plus en plus difficile. En outre, la clameur qui s’élève dans leur dos les effraie, car ils se rendent compte que leur salut dépend des défenseurs de l’autre retranchement et ne sachant ce qui s’y passe, ils en sont profondément troublés.
Quant à César, il s’est installé sur une bonne position <10>. Il suit partout le déroulement des opérations. Il envoie des renforts à ceux qui se trouvent en difficulté <11>.
Des deux côtés, on se rend compte que le moment est unique et qu’il faut redoubler d’efforts. Les Gaulois savent que tout est fini pour eux s’ils n’arrivent pas à percer les retranchements. Pour les Romains, c’est la fin de leurs misères s’ils les en empêchent.
Les Romains fléchissent, reprennent l’avantage et gagnent (condensé de DBG 85, 86, 87).
Au nord, les hommes de Vercassivellaunos <19>, profitant de la pente favorable du terrain, mettent en grand péril les défenses romaines <12>. Les uns, par rafales successives, lancent leurs traits, tandis que les autres s’avancent dans la formation de la tortue. Sans cesse, des troupes fraîches remplacent les troupes fatiguées.
Tout ce qu’ils trouvent sur le sol : bois, pierres, terre, branches, ils l’arrachent ; ils comblent les trous, recouvrent les pièges, avancent sur le corps des morts et se lancent à l’assaut des remparts.
Les Romains ont jeté contre eux tous leurs javelots ; leurs réserves sont épuisées ; les armes leur manquent. Ils sont au bord de la défaillance physique : ils n’en peuvent plus.
Ayant été informé de la situation, César, depuis son PC de Flavigny, envoie Labiénus à leur secours avec 6 cohortes <13>. Il lui donne comme consigne de faire une sortie, s’il n’est plus possible de résister sur le retranchement, mais seulement si c’est vraiment indispensable. De sa personne, il se rend auprès des combattants <14> ; il les conjure de surmonter leur défaillance. Il leur crie qu’en ce jour, à cette heure, ils tiennent entre leurs mains l’acquis de tous les combats précédents.
Sur l’autre front , les assiégés, désespérant de l’emporter dans la plaine en raison des fortifications qui y étaient redoutables, se tournent vers les pentes abruptes pour les attaquer <15>. Ils transportent là tout leur matériel. Ils lancent contre les tours une véritable pluie de javelots. Les défenseurs qui s’y trouvent basculent dans le vide. Ils comblent les fossés. A l’aide de faux de guerre, ils arrachent palissade et parapet.
César, depuis son PC de Flavigny, envoie le jeune Brutus avec ses cohortes, puis le légat Fabius avec d’autres <16>. Le combat atteint une rare violence. César en personne, prend la tête des troupes de renfort et les conduit au combat <17>.
Ayant rétabli la situation et repoussé les Gaulois, il court vers Labiénus <18> ; il a pris au passage quatres cohortes dans la redoute la plus proche. Il a donné l’ordre qu’une partie de la cavalerie le suive et que l’autre, la cavalerie germaine du camp H <22> contourne les retranchements extérieurs et attaque l’ennemi dans le dos <19>.
Labiénus <20>, voyant que ni le rempart ni les fossés ne peuvent arrêter le déferlement des vagues gauloises, tire des postes voisins 39 cohortes. Il envoie à César un officier de liaison pour lui dire ce qu’il pense faire.
César précipite sa marche. Il veut participer à la bataille. On le reconnait à la couleur de son manteau de général qu’il a l’habitude de porter au combat. On aperçoit les escadrons de cavalerie et les cohortes dont il s’est fait suivre <18>. Il s'agit notamment de la cavalerie germaine du camps H <22>. Il descend la pente. Sur les hauteurs <12>, les Gaulois l’ont vu. Ils se rassemblent et ils donnent l’assaut en poussant un cri terrible. Du rempart et des fortifications <20>, une autre clameur leur répond aussitôt. Les Romains abandonnent le pilum et mettent l’épée au poing.
Soudain, les Gaulois aperçoivent la cavalerie adverse qui leur arrive dans le dos <19>. Ils voient également toutes les autres cohortes qui débouchent sur le champ de bataille. Ils décrochent et se replient. Les cavaliers courent à leur rencontre et ils en font un grand carnage. Sedullus, chef et “Premier” des Lémovices est tué. Vercassivellaunos est fait prisonnier. On apporte à César 74 enseignes...
D’une armée si nombreuse, bien peu rentrèrent au camp sans blessure. Les observateurs de l’oppidum <21>, voyant le massacre et le désastre subi par leurs compatriotes <12>, désespérant de leur salut, rappelèrent leurs troupes <15>. De l’autre côté des lignes romaines, les Gaulois qui avaient investi les camps romains les quittèrent <22>(après s'en être emparés et détruit tout ce qui s'y trouvait, notamment le train des équipages romain), et s’en allèrent. Il s’agit des camps romains et germains de la plaine, H et K, et non des camps gaulois de l’armée de secours qu’on a imaginés sur les hauteurs de Mussy-la-Fosse, énorme erreur de traduction et d’interprétation qui a fait dire aux historiens que les Gaulois de l'armée de secours s’étaient enfuis de leurs camps sans combattre !!!
Et César termine son récit par ces mots qui montrent bien le rare degré de violence qu’avaient atteint les combats : Si nos soldats n’avaient pas été harassés par leurs nombreuses interventions et par les efforts de toute une journée de lutte, ils auraient pu anéantir toutes les troupes ennemies. La cavalerie rattrapa les derniers de la colonne vers le milieu de la nuit. Beaucoup furent fait prisonniers ou massacrés. Les autres se dispersèrent et retournèrent dans leurs pays.
L'intention de manoeuvre des Gaulois concernant le dernier engagement.
L'intention de manoeuvre des Gaulois concernant le dernier engagement, telle que César l'explique, était d'attaquer les Romains sur trois fronts : un, dans la plaine des Laumes, l'armée de secours d'un côté, Vercingétorix de l'autre côté, trois, Vercassivellaunos sur la montagne de Bussy. Et cela, de façon que les Romains ayant à défendre en même temps la plus grande longueur de retranchement possible, il ne soit pas possible à César de jouer avec ses éléments d'intervention en les envoyant, au cas par cas, d'un point menacé à un autre.
Il n'est pas envisageable que Vercassivellaunos ait pris à revers les défenses romaines sur le Mont-Rhéa pour quatre raisons :
1) Pourquoi avoir interrogé des gens du pays pour connaître un dispositif qu'on pouvait voir depuis les camps gaulois de la colline de Mussy et le faire reconnaître par des éclaireurs ?
2) Il n'était pas nécessaire de marcher toute une nuit pour exécuter un si petit détour.
3) Le plateau du Mont-Rhéa est beaucoup trop étroit pour une attaque de grande envergure
4) Il est impensable que les Romains n'aient pas sérieusement englobé cet éperon dans leur dispositif.
La thèse que je soutiens est une attaque gauloise sur le plateau de Bussy.
1) La montagne est étendue. Son sommet qui culmine à 422 mètres est en effet trop éloigné pour être inclus dans le dispositif romain.
2) Si le tracé de l'enceinte extérieure est exact à cet endroit (je pense qu'il l'est), les camps se trouvaient bien, comme l'écrit César, sur la pente défavorable.
3) Ce plateau permet un front d'attaque de 2 km 500. On comprend que Labiénus ait pu amener sur un tel front 39 cohortes en renfort. On devine la dimension grandiose de la bataille. Comme César l'écrit, on voit les troupes gauloises prendre la formation de la tortue et monter à l'assaut des lignes romaines. César dit que les légionnaires abandonnèrent le pilum et qu'ils se mirent à combattre à l'épée. Cela signifie que sur un front de 2 kilomètres environ, l'armée gauloise et l'armée romaine se seraient affrontés dans un corps à corps sans merci, sur le retranchement lui-même.
Mais en arrière, le plateau offrait un terrain idéal pour le déploiement d'une cavalerie ; cela n'a pas échappé au regard d'aigle de César.
La tactique de César est d'une rigoureuse logique. Sa manœuvre donne la clef de son dispositif.
1) César se tient sur la montagne de Flavigny, à l'altitude de 420 mètres environ. De là, il a vue non seulement sur l'ensemble de ses troupes mais également sur le Mont-Auxois qui n'atteint que 418 mètres. César ne peut être ailleurs que sur le point le plus haut.
2) L'ensemble du dispositif est tronçonné en zones de défense. Chaque zone est affectée à une légion. Au sein de chaque légion, un certain nombre de cohortes (le minimum) sont réparties sur le retranchement et occupent les tours en bois. Les autres cohortes sont regroupées dans des redoutes situées entre les deux lignes de retranchement : de simples enclos occupés dès l'alerte et judicieusement répartis entre les lignes de retranchement. Leurs missions sont probablement celles-ci :
*Arrêter le déferlement de l'ennemi en cas de franchissement du retranchement.
*Recompléter, renforcer ou relever les personnels aux remparts
*Fournir des réserves locales. Au moment décisif, César et Labiénus n'hésiteront pas à puiser dans ces redoutes les renforts dont ils auront besoin.
3) On devine un glissement des garnisons de redoute en redoute vers les points les plus chauds.
Il est probable que vers la fin des combats, l'armée romaine a été engagée dans sa presque totalité, au pied du Mont-Rhéa contre Vercingétorix, sur la montagne de Bussy contre Vercassivellaunos, et dans la plaine des Laumes contre le reste de l'armée de secours (?).
4) Le génie de César, c'est la mobilité et l'art d'utiliser les réserves. Il a disposé sur le rempart le strict minimum de défenseurs. On les voit courir sur un point menacé, puis sur un autre, débordés bientôt, car ils sont peu nombreux. Le gros des forces romaines se trouve dans les redoutes, en réserve locale et dans les réserves générales d'intervention.
L'emplacement logique des réserves générales explique toute la bataille.
Le premier élément réservé se trouvait sur la montagne de Flavigny, à la botte de César. Il comprenait :
• les six cohortes que Labiénus emmènera en renfort sur le front de la montagne de Bussy,
• les cohortes du jeune Brutus qui interviendront sur le front de la plaine des Laumes et du Mont-Rhéa,
• celles du légat Fabius qui viendront à la rescousse de Brutus. Tout cela représente un maximum de deux légions, auxquelles il faut ajouter plusieurs escadrons de cavalerie romaine dont César se fera suivre quand il se dirigera vers la montagne de Bussy.
Le deuxième élément réservé occupait en toute logique les camps romains fortifiés de la plaine des Laumes, à l'extérieur de la double enceinte. Il comprenait un certain nombre de cohortes auxquelles il faut ajouter toute la cavalerie germaine du camp H. C'est en voyant la cavalerie germaine et ces cohortes descendre les pentes du Mont-Rhéa, à l'extérieur et à l'intérieur de la double enceinte, que les Gaulois de la montagne de Bussy comprirent qu'il fallait donner l'assaut de la dernière chance.
Il était dans l'intérêt de César de placer la cavalerie germaine dans ces camps extérieurs pour deux raisons :
-d'une part, parce qu'on ne met pas les loups dans la bergerie ; les Germains étaient des barbares et ne pouvaient être des alliés de toute confiance ; il valait mieux les laisser “dehors”.
-d'autre part, pour pouvoir les faire intervenir sur les arrières des troupes gauloises, rapidement et brutalement, au moment décisif, à l'endroit choisi, sans qu'il soit nécessaire d'ouvrir une brèche dans les lignes du retranchement.
Le cerveau de César n'est pas comme le nôtre.
Sachant que l’armée romaine comptait son déplacement en journées de marche, à la fin desquelles, elle montait son camp pour la nuit, j’ai fait l’hypothèse logique que les légions s’étaient installées autour du mont Auxois « dans la foulée ». Je précise : en faisant face à une opposition gauloise logique que les traductions courantes ne mettent pas en évidence : la cavalerie romaine éclairant la marche des légions, la cavalerie gauloise assurant la protection et l'alerte en avant du mont Auxois. César parle d’un combat de cavalerie où l’acharnement est extrême. C'est ce qu'on appelle un combat de rencontre. Les premières légions - elles accompagnent César - arrivent. Aussitôt arrivées, elles se mettent au travail pour construire le camp K qui abritera le train des équipages. Quand César dit qu’il range des légions « pro castris » cela ne peut être que pour protéger ce camp K (22 bas) que les cavaliers de Vercingétorix harcèlent. César craint même une attaque de l’infanterie gauloise. Il écrit textuellement qu’il envoie ses légions à ceux qui travaillent (laborantibus), c’est clair. Puis, les cavaliers de Vercingétorix sont mis en déroute par les cavaliers germains qui marchaient en serre-file, quand ils arrivent. Ce deuxième temps est relaté en détails dans le chapitre 70 : repoussés et mis en fuite, les cavaliers gaulois abandonnent leurs chevaux pour franchir le fossé et le mur (en vert). Ceux qui sont derrière pour le défendre se réfugient dans l’oppidum.
Dans la logique de son cerveau, il faut comprendre que César nous explique le dispositif d'encerclement qu'il conçoit avant qu'il ne soit réalisé. Eius munitionis quae ab Romanis instituebatur circuitus XI milia passuum tenebat. Littéralement : il est décidé par les Romains d'un retranchement qui fera 10 000 pas de tour... avec des camps judicieusement placés, des tours, des redoutes, tout un système de guet et d'intervention, etc ...Opere instituto fit equestre proelium : l'ouvrage étant planifié, l'armée romaine arrive, éclairée et protégée par sa cavalerie, d'où le combat de cavalerie de rencontre dont je viens de parler, la cavalerie romaine éclairant la marche des légions, la cavalerie gauloise assurant la protection en avant du mont Auxois. Les cavaliers germains, en toute logique militaire, marchent en queue pour faire sauter une éventuelle embuscade. Quand ils arrivent sur le champ de bataille, ils chargent mettant en fuite les cavaliers gaulois.
De même, en ce qui concerne la dernière phase de la bataille contre Vercassivellaunos.
César envoie Brutus, puis Fabius (16), sur le front intérieur du mont Rhéa qui risque de céder sous les violents assauts de Vercingétorix (15), puis lui-même (17) et (18). En passant à la hauteur du camp H (22 haut) où se trouve la cavalerie germaine, il lui donne l'ordre de contourner le retranchement par l'extérieur de façon à attaquer Vercassivellaunos dans le dos (19). Par quel moyen de transmission, je ne sais pas. L'important est de comprendre que le cerveau de César est ainsi fait qu'il nous raconte les phases de la bataille dans leur suite chronologique logique, ce que nos cerveaux ne comprennent pas toujours.
Qu'on ait pu imaginer et qu'on imagine encore une armée romaine venant tranquillement installer ses camps d'une première nuit en K et H (22) au pied de Gaulois les observant béatement depuis leur oppidum (21), il y a là un manque évident de réflexion.
Oui, ces erreurs de traduction sont absolument incompréhensibles. Elles trouvent leur origine dans une interprétation militaire simpliste des historiens qui se sont imaginés et s’imaginent toujours une armée romaine arrivant comme en promenade et installant tranquillement ses camps de la première nuit, à la vue d’un Vercingétorix et de ses troupes les observant béatement du haut des remparts ; camps de la première nuit qui n’auraient plus eu de raison d’être après l’installation des camps autour du mont Auxois.
Quant aux « castra romains » de la montagne de Bussy, César dit bien au chapitre 83 qu’ils étaient sur un terrain peu favorable et légèrement en pente, ce qui est le cas. Il reparle de la pente défavorable en 85. Il ne peut pas y avoir de confusion avec les camps romains de la plaine ou du Rhéa.
En revanche, à la fin du chapitre 83, il faut comprendre « eodem tempore... » qu’en même temps que les Gaulois de Vercassivellaunos s’attaquent aux camps romains de Bussy, la cavalerie gauloise du reste de l’armée de secours restée dans la plaine s’approche des fortifications romaines de la plaine et que le reste des troupes gauloises de la plaine (fantassins) « ostendere » disons « se mettent à entourer » les camps (romains de la plaine H et K).
Oui, la phrase de César peut paraître obscure. Il faut comprendre que César fait une conclusion pour signifier que les deux actions, l’une au nord, l’autre dans la plaine, se sont faites en même temps, comme il a été dit plus tôt, à midi.
Que le « pro castris » de la fin de 83 ait pu induire en erreur nos historiens, on ne peut pas le reprocher à César. La faute en revient aux historiens qui nous disent que les camps romains H et K de la plaine n’existaient plus lors de l’arrivée de l’armée de secours. Dans le fil du récit de César, à partir du moment où on se met dans l’hypothèse, en effet logique, que le reste de l’armée de secours a attaqué et n’a pas fui, on comprend qu'il s’agissait, à l’évidence, des dits camps H et K et qu’il n’était pas besoin de le spécifier. En revanche, il semble bien que les Gaulois du reste de l'armée de secours n'aient reçu la mission que de s'attaquer aux deux camps romain et germain K et H, sous la protection de la cavalerie gauloise qui, déployée devant le rempart romain, les aurait protéjés contre toute attaque venant de là. Le rapport de forces était alors à l'avantage des Gaulois : Le PC romain de Flavigny n'avait plus de réserves d'intervention : Labiénus était parti sur la montagne de Bussy et Brutus avait suivi César qui s'y rendait.
En revanche, c’est bien la bataille de nuit que les Gaulois auraient voulu décisive. Ils ont passé un jour à la préparer et le récit de César montre qu’elle fut acharnée. C’est cet échec qui a amené les Gaulois à concevoir et à exécuter une attaque sur trois fronts étendus car ils ont bien été obligé de constater que César jouait avec ses réserves en les déplaçant d’un point attaqué à un autre.
Question : cette cavalerie germaine ne semble être sortie du camp H que sur l’ordre de César et c’est pour intervenir sur l’autre front, celui de Bussy. César aurait-il fait le choix d’abandonner aux Gaulois le camp H mais aussi son camp logistique K, préférant intervenir pour sauver sa ligne de défense de la montagne de Bussy qui menaçait d’être percée ? Dans ce cas, on ne peut pas dire qu'il ait remporté une victoire complète. Quant aux effectifs gaulois, il est clair que César donne des effectifs pévus, ou qui ne sont pas venus, ou qui sont arrivés trop tard.
Emile Mourey, 90 ans, ancien militaire, 27 janvier 2023, extraits de mes ouvrages publiés en 1992 et de mes articles Agoravox.
Le présent article s'inscrit dans la suite logique de mes articles récemment publiés sur Agoravox aux dates ci-dessous.
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Mon prochain article expliquera la bataille de Bavay etc...
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