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Accueil du site > Tribune Libre > C’est le moment de reparler du Business Plot de Butler en 1933 (...)

C’est le moment de reparler du Business Plot de Butler en 1933 !

Avec les dernières informations en provenance des USA, une atmosphère étrange semble s'être abattue : celle annonçant une fronde possible d'une partie des armées contre la réélection d'un président ayant interrompu les affaires florissantes de certains. Ceux qu'on appelle les membres du lobby militaire, qui comprend aussi bien des industriels que des banquiers, semblent toujours être aussi défiants vis à vis de Barrack Obama, au point que le remue-ménage actuel au sein des armées laisse entrevoir une possibilité de cabale, comme évoqué déjà ici. Obama, taxé de "communiste" par la frange la plus extrême de l'électorat US, celle du Tea Party, est aussi actuellement souvent comparé à Roosevelt et à son New Deal, par ses aspects interventionnistes en économie ou pour son côté social. Si bien qu'une comparaison vient immédiatement à l'esprit face à ce qui semble bien être une fronde de militaires qui pourraient être tentés par un coup de force. Un événement historique, remontant à l'entre deux guerres, l'histoire d'un coup d'état avorté de banquiers, d'industriels et de militaires, appelé fort justement le Business Plot, et d'où émerge un personnage singulier appelé Smedley Butler. Plongée dans les années 30, aux USA... alors en pleine dépression économique.

Le personnage de Smedley Butler demeure aujourd'hui encore assez énigmatique à vrai dire, car peu de gens se sont penchés sur l'étude de son cas, hors-normes, à part la thèse relativement récente (elle date de 2008) dont je vous donne l'adresse en fin de texte. Ironie de l'Histoire, le futur général avait commencé sa carrière militaire en 1898 ... en intégrant une garnison située sur la base militaire américaine de la Baie de Guantánamo, à Cuba (quelle étrange coïncidence !). Lors de sa carrière, il devint une sorte de globe-trotteur en uniforme, suivant déjà les désirs de l'Amérique de regenter le monde, allant tout d'abord en Chine pour combattre la Révolte des Boxers (avec déjà une société secrète derrière, la secte du Yìhéquán, qui luttait contre les "étrangers" ayant "envahi la Chine"), puis se retrouver en Amérique Centrale ou du Sud (en 1903, est au Honduras, en 1909 au Nicaragua, pour parvenir au Mexique en 1914. Là encore à la suite d'une ingérence, celle des marins US du Tampico, capturés par les mexicains, les américains répondant illico par l'occupation du port de Veracruz (*) Le but à peine déguisé de l'opération maritime d'envergure était d'empêcher la Révolution Mexicaine de réussir. Butler sera photographié sur place, triomphant (voir le cliche joint). Il sera décoré pour ce haut fait d'armes (il n'y avait eu aucune opposition ou presque !) de la Medal of Honor (l'une des 56 décernées pour l'événement ! Plus tard, Butler, soldat honnête, tentera bien de la rendre en déclarant qu'il n'avait rien fait d'héroïque, mais rien n'y fera. On le retrouve aussi à Haïti pour le massacre sanglant de rebelles haïtiens, les "cacos", juste avant d'être expédié en France en 1917 lors de l'engagement américain dans la Grande Guerre. A Haïti, l'excuse donnée avait été l'hégémonie économique dans l'île d'une communauté... allemande. L'usage d'un port pour la marine allemande étant un sujet de préoccupationc aux USA. C'est Frankin Roosevelt qui mettra fin à l'occupation débutée en 1915 par 330 Marines, dont Butler, qui avaient été envoyés par Woodrow Wilson, le 15 août 1934 seulement. A Haïti, Butler avait hérité d"une seconde Medal of Honor  (la plus haute distinction militaire des États-Unis !).

Mais l'occupation brutale d'Haïti avait choqué notre homme, une occupation qui n'avait pas été pas sans en rappeler d'autres plus récentes :  "les attitudes racistes envers le peuple haïtien par les forces d'occupation américaines ont été flagrantes et sans doute très répandues. Le secrétaire Herbert J. Seligman du NAACP le 10 juillet 1920 dans le journal NATION, les décrit : « Les camps militaires ont été construits dans toute l'île. La propriété des indigènes a été prise à des fins militaires. Les Haïtiens portant une arme ont été pendant un certain temps abattus à vue. Les mitrailleuses ont été mises à feu sur foules d'indigènes non armés selon des Marines des États-Unis comme plusieurs d'entre eux me l'ont expliqué dans une conversation informelle, intutile de rechercher combien ont été tués ou blessés. ". Après guerre, démobilisé, il se retrouve trois ans après directeur de sécurité publique de la ville de Philadelphie, en quelque sorte le super-policier au milieu de la lutte des gangs de "bootleggers", où il acquiert très vite une réputation digne de celle d'Eliott Ness.

L'homme surprend, par ses capacités à évoluer au milieu d'une économie en pleine dépression qui jette à la rue des milliers de personnes, ou plutôt des millions. Très attaché au fait militaire, il se bat alors pour que les soldats démobilisés puissent eux aussi obtenir un travail, en devenant le leader des groupes d'anciens combattants US, qui le chérissent et le louent : si bien qu'il se retrouve embarqué alors qu'il vient juste de prendre sa retraite dans des mouvements de vétérans flirtant avec les thèses d'extrême droite : une des causes les plus célèbres défendues par Butler retraite sera celle de la "Bonus Expeditionary Force" (BEF), communément connue sous le nom des "Bonus Marchers". En 1932, après avoir beaucoup marché, 20 000 anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale se retrouvent en effet à camper sur les terrains boueux d'Anacostia, à Washington DC, dans l'espoir de faire pression sur le gouvernement pour faire avancer des primes en espèces qui n'étaient pas officiellement attendue avant 1945. Butler appelé sur place y fera un discours plutôt poujadiste et racoleur, mais d'anthologie : « Vous entendez les gens vous appellent les "clochards boursiers" mais ils ne vous ont pas appelé ainsi en 17 et en 18 . Je n'ai jamais vu d'aussi bon militaires que vous. Je n'ai jamais vu une telle discipline .... Vous avez autant le droit d'exercer des pressions ici comme le fait la United States Steel Corporation ....  Il s'agit de la plus grande manifestation d'américanisme jamais vue". Malgré son enthousiasme, le président Hoover ne laissa pas la manifestation perdurer et enverra le 28 Juillet les troupes fédérales (menées par le général Douglas MacArthur !) pour mater l'opposition et expulser les vétérans avec des chars, l'infanterie casquée, les baïonnettes et même (déjà ?) les gaz anti-émeutes. Eparpillés par la confrontation policière, certains manifestants se retrouveront à Johnstown, en Pennsylvanie, où Butler sera invité à rejoindre et même diriger les "chemises kaki", un groupe paramilitaire luttant pour la « justice économique », mais qui était en fait dirigé par un néo-nazi en herbe, Art Smith (ici au centre sur la photo). Un homme qui faisait alors la promotion de ce qu'il a appelait lui-même la "manocracy" :  une "nouvelle philosophie de l'économie" selon lui, qui comprenait en politique l'abolition du Congrès, le paiement immédiat de la prime des vétérans, une monnaie à base de métal argent (Roosevelt ayant abandonné l'étalon-or le le 19 avril 1933), et une Armée de Terre et une Navy gigantesques (ce qui aurait donc plus à Mitt Romney !). Effrayé, Butler déclinera l'invitation à prendre la tête du mouvement. Politiquement, sans trop le rechercher semble-t-il, Butler se retrouvait néanmoins ainsi avec des millions d'individus prêts à le suivre, si une carrière politique le tentait. Mais il n'en aura ni le temps ni le loisir, car son engagement pour les vétérans va le rattraper d'une drôle de façon.

Mais auparavant, notre insaisissable ex-général va publier un court ouvrage qui va en étonner plus d'un : de ses divers tribulations militaires dans le monde, et surout semble-til de l'expédition grotesque de Veracruz, ou marqué par les massacres gratuits en Haïti, il était entretemps devenu franchement... anti-militariste, lui, l'ancien général, et l'avait dit et écrit sans ménagement, en mettant en parallèle son double passé de militaire et de policier  : "J’ai effectué 33 ans et 4 mois de service actif, et durant cette période, j’ai passé la plupart de mon temps en tant que gros bras pour le monde des affaires, pour Wall Street, et pour les banquiers. En bref, j’étais un racketteur, un gangster au service du capitalisme. J’ai aidé à sécuriser le Mexique, plus particulièrement la ville de Tampico, au profit des groupes pétroliers américains en 1914. J’ai aidé à faire de Haïti et de Cuba un endroit convenable pour que les hommes de la National City Bank puissent y faire des profits. J’ai aidé au viol d’une demi-douzaine de républiques d’Amérique centrale au bénéfice de Wall Street. J’ai aidé à purifier le Nicaragua au profit de la banque américaine Brown Brothers de 1902 à 1912. J’ai apporté la lumière en République Dominicaine au profit des entreprises sucrières américaines en 1916. J’ai livré le Honduras aux entreprises fruitières américaines en 1903. En Chine, en 1927, j’ai aidé à ce que l’entreprise Standard Oil fasse ses affaires en paix." La tirade restée célèbre étant agrémentée d'une sentance encore plus percutante, destinée aux banquiers  : "Quand je repense à tout ça, je pourrais donner à Al Capone quelques conseils. Le mieux qu’Al Capone pouvait faire, c’était de racketter trois quartiers. Moi, j’agissais sur trois continents." Aujourd'hui encore, son pamphlet-réquisitoire est tenu à bout de bras lors des manifestations antimilitaristes US, qui ignorent le plus souvent que son auteur avait flirté une bonne partie de sa vie avec des mouvements d'extrême droite qui lui avaient déroulé des ponts d'or. Le 5 décembre 1931, lassé de l'armée, Butler prend une retraite tonitruante, en titrant de manière provocante dans la presse "que les Amiraux aillent se faire voir ! Pourquoi j’ai pris ma retraite à 50 ans. »

A l'époque (quelque temps après 1929), c'est partout la crise économique, et les gens cherchent des solutions politiques à leurs problèmes. On lorgne du côté de l'Europe, ou l'Allemagne a son fervent admirateur en la personne d'Henry Ford, dont les publications violemment antisémites comme le Deaborn Independent seront une source d'inspiration pour Mein Kampf (à Nuremberg, Baldur von Schirach, des jeunesses hitlériennes et le chef de la propagande radio Hans Fritzsche, citeront Ford comme "influence majeure" de leurs discours). Mais les américains se fichent d'Hitler : "l'Allemagne nazie d'HItler n'était nullement comprise par l'Amérique des années 193 comme étant le monstre totalitaire que nous avons appris plus tard. Certains ont même fait l'éloge ce que Hitler avait fait avec l'Allemagne. Après avoir visité l'Allemagne nazie, nul autre que William Randolph Hearst avait eu des paroles aimables pour Hitler, en disant que « Hitler est certainement un homme extraordinaire. Nous l'avons estimé trop à la légère en Amérique." Hearst a été particulièrement impressionné avec la revendication d'Hitler d'avoir protégé l'Allemagne du communisme. Mais la plupart du temps, les Américains ne se souciaient pas ce que qui se passait en Allemagne. Alors qu'Hitler gagnait le pouvoir exécutif seul en 1934, tenant à la fois la chancellerie et la présidence, une grande partie de l'Europe a commencé à mobiliser diplomatiquement contre l'Allemagne nazie. Amérique n'en a rien fait. Les Américains étaient tout simplement plus intéressés par le base ball et les exploits de la mafia et encore moins pour faire quelque chose au sujet de l'imbroglio qui régnait en Europe" précise Emily Lacy Marshall. Ford, Hearst, Joseph Kennedy (le père de JFK), John Rockefeller, Andrew Mellon (secrétaire au Trésor US et à la tête du géant de l'alumimium Alcoa), General Motors, ITT, Allen Dulles, la National City Bank, et General Electric sont tous de fervents admirateurs d'Hitler.

Si le public aux States ne penche pas vraiment pour Hitler, Musssolini recueillait alors plus de suffrages :  "la réponse décisive de Mussolini à la crise économique en Italie a suscité un peu plus d''intérêt aux États-Unis. Son approche, pour beaucoup, semblait être une version plus efficace de l'approche de début de Roosevelt qui avait mis l'accent sur la cooptation de l'Etat sur les affaires, le contrôle des salaires et des prix, et l'isolationnisme commercial. Ceci, couplé avec son caractère imposant, sa puissante apparence physique, et un nationalisme nostalgique bien conçu lui a donné l'aura assuré d'un chef qui savait ce qu'il faisait. Pour les Américains, qui n'avaient pas compris les revirements rapides de Roosevelt en politique. Mussolini semblait en effet une figure attrayante. Seward Collins, rédacteur en chef de l'American Review, un périodique conservateur qui a été décrit comme fasciste, écrivait en 1933 que Mussolini était « l'homme d'État le plus constructif de notre époque." Pour les observateurs de la gauche américaine, l'Italie de Mussolini était un exemple effrayant vers lequel les États-Unis pourraient se diriger. Le leader socialiste Norman Thomas, par exemple, a critiqué le New Deal, la NRA en particulier, comme étant un « capitalisme d'Etat », et a noté que Mussolini aurait vivement approuvé la politique au début de Roosevelt de « contrôle dictatorial de l'industrie sans l'abolition de la propriété privée ou l'expropriation de bénéfices. " Pour un grand nombre de la gauche, Mussolini a semblé être un dangereux précédent pour la politique économique américaine. Mais pour des millions d'Italo-Américains, Mussolini était un héros. Aimé par les femmes et les hommes, Il Duce "est devenu un héros masculin à la fois des muscles et de l'esprit », et leur a offert un certain sentiment de fierté de leur patrie et les valeurs de « devoir », d'« obéissance », de « loyauté », et du « patriotisme qu'il representait. comme nous le verrons, certains Américains ont été tellement émus par Mussolini qu'ils organiseront des répliques intérieures des célèbres chemises noires du dictateur" (Emily Lacy Marshall, déjà citée).". Symbole de cet engouement, en 1934, le numéro de Fortune de juillet est intégralement consacré à la gloire de Mussolini (en 1938 Hearst proposera la villa d'Hitler dans une de ses publications sur les "meilleurs jardins du monde !).

Chemises kaki, chemises brunes, qui défilent dans les rues amércaines accompagnées par le KukuxKlan qui réalise avant guerre de gigantesques parades en pleine capitale (ici en 1925). Tout est mûr pour l'avénement aux USA d'un pouvoir fascisant. Contre les syndicats honnis, les patrons soutiennent des organisations paramilitaires franchement fascistes, briseuses de grèves, comme les "Silver Shirts" de William Dudley Pelley, grand admlirateur d'Hitler, et les "Crusaders" (ou "White Shirts"). Ces derniers tous issus de la firme Du Pont. Chaque entreprise fonde son groupuscule musclé : la Sun Oil, par exemple, fonde et finance ses "Sentinels of the Republic". Le modèle que l'on s'arrache est français : c'est celui des Croix de Feu et de leur tentative de coup d'Etat raté !!!  Et c'est là que tout va basculer, dans la vie de Butler. Depuis plusieurs années les banquiers, dont JP Morgan Jr (ici son père, en photo, en train de s'en prendre aux photographes),  qui finançait aussi ouvertement Mussolini, qui s'estiment lésés par Roosevelt songent à le renverser et à mettre à sa place une dictature calquée sur l'italienne. Mais pour cela il leur faut un pouvoir militaire. Leur choix se porte tout d'abord sur l'American Legion, ce groupe de vétérans très actif et très proche de l'extrême droite, par anticommunisme viscéral. Son dirigeant, Alvin Owsley (ici à gauche), en 1923 a déjà annoncé la couleur : "si jamais il en est besoin, déclara-t-il, l’American Legion est prête à protéger les institutions de son pays et ses idéaux tout comme les fascistes ont traité les forces destructrices qui menaçaient l’Italie. N’oubliez pas que les fascistes sont aujourd’hui pour l’Italie ce que l’American Legion est pour les Etats-Unis. » Des contacts sont pris également avec le grand rival de l'American Legion, la Veterans of Foreign Wars (née en 1936). Deux dirigeants de l'American Legion Bill Doyle et Gerald McGuire, liés étroitement aux banquiers complotistes sont donc envoyés en éclaireur pour tester le ralliement de Butler. McGuire travaillait chez le colonel Grayson Mallet-Prevost Murphy, qui avait été décoré par Mussolini. Comme Butler résiste aux appels des sirènes envoyées, on lui en envoie d'autres : R.S. Clark, membre éminent du groupe Morgan et surtout l'héritier de la famille Singer, et John S. Mills, envoyé de la famille Du Pont (on compte alors sur elle chez les complotistes, car elle détient la firme Remington, qui fabrique des armes !). Clark ira même jusqu'à proposer à Butler de régler l'hypothèque de sa maison... ce qui eût l'art , dit-on, de le mettre en colère et de le décider de ne pas se laisser ainsi recruter. 

Butler était loin d'être idiot, et il avait choisi de ne pas se laisser embrigader. Méfiant, il alla rencontrer discrètement Tom O’Neill, qu'il connaissait bien en tant que directeur du journal Philadelphia Record. Celui-ci, tout aussi méfiant, demanda à sa meilleure plume, Paul Comley French, d'enquêter pour vérifier les dires de Butler qui paraissaient en effet assez surprenants, sinon monstrueux. Pas complexé, celui-ci alla directement interviewer McGuire qui lui avoua tout de go que "nous avons besoin d’un gouvernement fasciste pour sauver ce pays des communistes". Il découvrit aussi avec effroi que le plan prévu de prise de pouvoir lorgnait davantage vers l'Allemagne que vers l'Italie : ce qui avait été prévu pour le chômage, c'était en effet la création de "camps de travail" sur le modèle hitlérien ! Le but final étant de lever une armée de 500 000 partisans et même d'assassiner Roosevelt ! Pour Butler, le moment était venu de tout dénoncer. Il n'éprouva aucune difficulté à le faire : Roosevelt était déjà à moitié au courant par ses informateurs, et il décida très vite de réunir une commission d'enquête dont les premières auditions débutèrent dès le 19 novembre 1934. A peine commencées, Butler dût faire face à un déluge de textes l'attaquant, en provenance surtout du magazine Time qui le roula littéralement dans la boue. Il disparaîtra peu de temps après de la scène poliitique en mourrant en 1940 d'un cancer du pancréas.

Au final, il en ressortit hélas une sorte de statu quo, car pas un des grands patrons cités n'alla en définitive en prison, faute de preuves tangibles."Dans le rapport McCormick-Dixtine de 1935, le Congrès a constaté que les plans de coup d'Etat militaire impliquant une armée privée dirigée par le général Butler a bien existé. Le Congrès a constaté que certains individus avaient été prévus pour ce coup, mais n'a pas précisé quand le plan a été conçu, ni quand ou il serait sérieusement mis en œuvre. Alors, qui étaient les meneurs présumés de ce complot ? Bien que l'enquête du Congrès s'est concentrée sur seulement deux hommes, M. McGuire et M. Clark, des dizaines d'autres personnes ont été désignés comme contributeurs à l'intrigue, avec des preuves à l'appui. Les noms des conspirateurs incluaient certaines des familles les plus riches des États-Unis, dans le secteur bancaire, les médias, y compris les Dupont, les Remington, ou Prescott Bush, le père de George H. Bush et grand-père de George W. Bush. Il était évident que les personnes en charge de la planification de ce coup d'Etat manqué avait fait une erreur en contactant Butler. Le seul objectif du général était de protéger la démocratie américaine et il a déclaré à plusieurs reprises qu'il ne pouvait pas comprendre les objectifs contradictoires de ces conspirateurs affairistes". La présence de Prescott Bush, partisan de l'eugénisme et pro-hitlérien et grand ami de la famille Thyssen, n'étant pas une surprise, à vrai dire. Son petit fils a été tellement digne de lui en huit années de pouvoir !

L'analogie avec la période actuelle est évidente, avec un climat économique déplorable, un mouvement du Tea Party derrière lequel se dissimulent un bon nombre de fascisants et de profonds réactionnaires, des militaires à cran, excédés par une défaite annoncée en Afghanistan (et par effet domino de l'Irak, très certainement) et tentés par un coup de force. L'économie à la Roosevelt, celle du New Deal n'est pas non plus sans analogie avec ce vers quoi tend Obama : les américains acceptent à nouveau aujourd'hui un rôle de l'Etat au dessus des seules décisions des grands groupes industriels et financiers, ce que les partisans d'extrême droite du Tea Party ne supportent pas en parlant d'un Obama "communiste" : car le New Deal de Roosevelt, c'était bien cela, une nouvelle façon de faire brisant des tabous économiques et idéologiques nous rappelle un historien : "nous étions une économie de grandes sociétés, avec un degré élevé de contrôle concentré. C'était une économie qui n'était en aucune façon décrite par la théorie classique. Ce que Roosevelt et le New Deal ont fait a consisté à se détourner des théories pour affronter les réalités. C'est ce qui a produit une expérimentation sans farts qui a fait du New Deal de quoi il s'agissait. " avait conclu Gardiner C. Means dans "Hard Times : An Oral History of the Great Depression" paru en 1970. Obama a fort à faire, en ce moment, avec ces événements qui en rappellent trop d'autres... Qui ira tenter de soudoyer des militaires cette fois ? A lui surtout de savoir présenter un autre New Deal à ses concitoyens. Vu les abysses de la dette américaine, cela paraît hélas ... infaisable ! 

PS  : "A la fin de son livre, Butler fait trois recommandations, qui sont tombés dans l'oreille d'un sourd alors", comme le précise l'article cité," comme aujourd'hui, et le désenchantement qui nous à la conduit à la faillite économique et morale qui est maintenant notre héritage" :

1. Faire devenir la guerre non rentable. Butler suggère que les propriétaires du capital devrait être « enrôlés » avant les autres citoyens : "ce ne peut être détruit efficacement qu'en s'en prenant au profit de la guerre. Le seul moyen de briser ce racket est de mettre la conscription des responsables de l'industrie et du travail avant l'âge adulte. Que les dirigeants et les administrateurs et les cadres de haut rang de nos usines d'armement et de nos entreprises et de nos décideurs pour l'acier et les munitions et nos constructeurs de navires et de nos constructeurs d'avions, et les fabricants de toutes les autres fournisseurs des bénéfices en temps de guerre ainsi que les banquiers et les spéculateurs, doivent être enrôlés - pour 30 dollars par mois, le même salaire que les gars dans les tranchées".

2. Les actes de guerre doit être décidée par ceux qui combattent. Il propose également un plébiscite limité pour déterminer si la guerre doit être faite. Le droit de vote seraient pour ceux qui risquent la mort sur ​​les lignes de front.

3. Limitation des forces armées à l'auto-défense. Aux États-Unis, Butler recommande que la marine doit se limiter, par la loi, à moins de 200 miles de la côte, et l'armée doit être restreinte aux limites territoriales du pays, assurant que la guerre, si elle devait être faite, ne pourra jamais être d'agression.

(*) à ce sujet on peut écouter la chanson du même nom de Warren Zevon, sur son troisième album Excitable Boy.

En voici le texte par Warren Zevon et Jorge Calderon :

I heard Woodrow Wilson's guns 
I heard Maria crying 
Late last night I heard the news 
That Veracruz was dying 
Veracruz was dying

Someone called Maria's name 
I swear it was my father's voice 
Saying, "If you stay you'll all be slain 
You must leave now - you have no choice 
Take the servants and ride west 
Keep the child close to your chest 
When the American troops withdraw 
Let Zapata take the rest"

I heard Woodrow Wilson's guns 
I heard Maria calling 
Saying, "Veracruz is dying 
And Cuernavaca's falling"

Aquel dia yo jure (On that day I swore)
Hacia el puerto volvere (To the port I will return)
Aunque el destino cambio mi vida (Even though destiny changed my life) 
En Veracruz morire (In Veracruz I shall die) 
Aquel dia yo jure (On that day I swore)

I heard Woodrow Wilson's guns 
I heard them in the harbor 
Saying, "Veracruz is dying"
By Warren Zevon and Jorge Calderon

I heard Woodrow Wilson's guns 
I heard Maria crying 
Late last night I heard the news 
That Veracruz was dying 
Veracruz was dying

Someone called Maria's name 
I swear it was my father's voice 
Saying, "If you stay you'll all be slain 
You must leave now - you have no choice 
Take the servants and ride west 
Keep the child close to your chest 
When the American troops withdraw 
Let Zapata take the rest"

I heard Woodrow Wilson's guns 
I heard Maria calling 
Saying, "Veracruz is dying 
And Cuernavaca's falling"

Aquel dia yo jure (On that day I swore)
Hacia el puerto volvere (To the port I will return)
Aunque el destino cambio mi vida (Even though destiny changed my life) 
En Veracruz morire (In Veracruz I shall die) 
Aquel dia yo jure (On that day I swore)

I heard Woodrow Wilson's guns 
I heard them in the harbor 
Saying, "Veracruz is dying"

documents :

le documentaire de la BBC

1) http://www.youtube.com/watch?v=UXGUgFXoRu4

2) http://www.youtube.com/watch?v=UGPb6ulVEK0&feature=relmfu

3) http://www.youtube.com/watch?v=Mav69K2zkgw&feature=relmfu

un second documentaire :

http://www.youtube.com/watch?v=hTdx6vEUtIA&feature=related

-sur les "Bonus Marchers" :

http://www.worldwar1.com/dbc/bonusm.htms

-sur la crise de 1929 :

http://www.gcsehistory.org.uk/modernworld/usa/impactofdepression.htm

sur le fascisme aux USA :

http://www.thirdworldtraveler.com/Fascism/Support_Hitler_US.html

-sur le combat de Roosevelt contre la finance et le fascisme

http://www.agora-erasmus.be/Franklin-Delano-Roosevelt-ou-comment-gagner-la-bataille-contre-Wall-Street_03372

-sur le mouvement nazi aux USA " Insidious Foes" (The axis fifth column and the american home front) de Francis Macdonnel (Oxford Press, 1995)

sur le "Plot" :

http://realhistoryarchives.blogspot.fr/2005/02/war-is-racket-for-rich.html

-Référence de base : la thèse d'Emily Lacy Marshall déposée en 2008 :

http://wesscholar.wesleyan.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1058&context=etd_hon_theses

Enfin on peut trouver des réminiscences de cette affaire dans le film "Seven Days in May", de John Frankenheimer, que je conseille de revoir également, même si l'action se passe plus tard, en 1960.


Moyenne des avis sur cet article :  3.56/5   (39 votes)




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18 réactions à cet article    


  • LE CHAT LE CHAT 15 novembre 2012 10:41

    Il est parent avec rhett Butler  ? c’est un sudiste , donc un facho alors ...  smiley  smiley - :))


    • morice morice 15 novembre 2012 11:05

      vous vous enfoncez, le chat...


    • morice morice 15 novembre 2012 11:06

      Dommage que les docus en liens ne soient pas dispo en FR


      ah on ne peut pas tout avoir ; mais le texte est superbe en en effet !

      • frugeky 15 novembre 2012 11:09

        Excellent article ! Avec un effort sur l’écriture qui vous honore. 

        Quel bonhomme tout de même que ce Butler. Que les fauteurs de guerre soient les premiers au front...

        • Georges Yang 15 novembre 2012 12:42

          Tout à fait d’accord avec vous

          Quelle surprise, un article cohérent, lisible, sans délire, de la part de Morice. Soit il est enfin arrivé à être compréhensible, soit.... vous avez compris, inutile d’insister

           


        • morice morice 15 novembre 2012 11:40

          Avec un effort sur l’écriture qui vous honore. 


          et des fautes qui demeurent, pris par le temps, hélas, de correction !

          • morice morice 15 novembre 2012 11:52

            on peut ajouter à la liste des documents le livre de Jules Archer, resté longtemps introuvable et disponible ici sur le net 




            • morice morice 15 novembre 2012 11:56

              réédité ici avec un excellent résumé :




              • frugeky 15 novembre 2012 13:09

                Je n’ai pas cru lire dans ce texte que morice soutenait la politique d’Obama. Il fait part d’une possible tentative de renversement de la part du complexe militaro-industriel avec un précédent historique. On se doute que ces intérêts là auraient préféré Romney.


              • Georges Yang 15 novembre 2012 12:58

                Morice

                Ce n’est pas par ce que j’écris que votre article est mieux écrit que d’habitude que je vous encense !

                J’ai peur d’une rechute qui vous fera avancer l’enquête sur les potagers


                • Pyrathome Pyrathome 15 novembre 2012 14:21

                  .......Bill Doyle et Gerald McGuire, liés étroitement aux banquiers complotistes sont donc envoyés en éclaireur pour tester le ralliement de Butler......

                  Vous avez voulu dire « comploteurs » ??.....( complotiste, ça veut rien dire, sauf dans la bouche des négationnistes 911...)

                  Une belle analogie avec la situation actuelle, effectivement, mais peut-être pas la même issue, du moins je l’espère vivement....

                  Maurice Schumann déclarait :

                  « Quiconque rêve d’une liberté sans limites et sans frein porte en soi le germe du fascisme, même s’il crie son antifascisme à tue-tête . »

                  C’est pas ce qu’on essaye de nous vendre depuis longtemps ? avec ce nauséabond néo-libéralisme.... ?


                  • morice morice 15 novembre 2012 14:30

                    « Quiconque rêve d’une liberté sans limites et sans frein porte en soi le germe du fascisme, »


                    genre les négationnistes en effet !

                    • morice morice 16 novembre 2012 17:44

                      c’est du Meyssan, qui est un MENTEUR. Point barre.


                    • Pyrathome Pyrathome 15 novembre 2012 21:49


                      Et pendant de temps là, Cassini œuvre...
                      Saviez-vous que Saturne pond des œufs maintenant ?
                      Il s’appelle Méthone, un nom bien approprié !!... smiley
                      http://www.cidehom.com/apod.php?_date=121106
                      ..combien de poussins à l’intérieur ?, se demandent les gars de la nasa....


                      • Zubitxu 15 novembre 2012 22:32

                        Quelle putain de misère smiley


                        • CARAMELOS CARAMELOS 16 novembre 2012 00:36

                          Bonsoir
                          Intéressant bien documenté et étayé. Merci.
                          Il est à noter que l’apparente absence intellectuelle du président OBAMA lors de son premier face à face avec son principal concurrent est troublante.

                          Je n’ai pas l’habitude de remercier MORICE qui est souvent brocardé sur ce site mais l’impartialité le commande.
                          Pour conclure, on peut être d’un avis contraire mais émettre systématiquement des avis négatifs sans qu’ils ne soient motivés je ne comprends pas trop. Tachez d’argumenter avant de jeter le bébé avec l’eau du bain.


                          • morice morice 16 novembre 2012 07:53

                            Rétrospectivement, cette absence est peut-être due à ce qu’il venait d’apprendre sur ses généraux : il venait de couper des têtes et on lui présente celle au sommet. Il y a de quoi déstabiliser !

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