Cette rente immobilière qui sépare deux France… en les entraînant vers une possible catastrophe
À travers sa vidéo du 7 février 2013, Olivier Passet prend la rente immobilière à la gorge… en montrant la pression qu’elle exerce sur la sphère de la production et, conséquemment, sur le niveau des profits réalisables du côté de la création de plus-value au sens marxiste du terme qui n’est, bien sûr, pas du tout ce qu’il compte lui-même mettre en avant ici.
N’empêche…
« Il faut d’urgence faire baisser les prix du logement en France. »
C’est que les travailleurs et travailleuses doivent toutes et tous en passer par là… Quand ce ne serait que pour sauver leur peau et celle de leurs enfants, il leur faut une habitation… qui devra se trouver à une distance raisonnable – selon des moyens de transport qui pourront y ajouter une rallonge quelquefois très conséquente – du lieu où ils iront se faire exploiter, tandis que leur progéniture se trouvera projetée dans un système de tri scolaire qui ne lui fera pas forcément la part belle…
Curieusement, s’ils doivent se loger, ce sera au prix qui permettra à l’ordinaire de la petite spéculation immobilière de soutenir un marché où les grandes manoeuvres internationales ramassent l’essentiel de la mise, en même temps qu’une possibilité redoutable d’influer sur certaines grandes décisions politiques touchant ce qu’en gros on pourra qualifier d’ « aménagement du territoire ».
Or, si l’équilibre du système d’exploitation est bien respecté, la baisse de la « cotisation » à la rente immobilière ne pourra pas profiter directement aux salariés… Il faut qu’elle glisse ailleurs… En effet, le « panier de la ménagère » n’a rien à voir dans cette affaire : que ce soit à la hausse ou à la baisse, la rente immobilière n’est pas une affaire de consommation… Elle ne fait que concerner le rapport qui s’est établi entre les investisseurs dans l’immobilier – ils visent à rentabiliser des biens déjà produits (ou à produire en tant que tels) en vendant les services qu’ils peuvent rendre – et les investisseurs dans la production qui, eux, tentent l’aventure de l’obtention possible de plus-value en exploitant la capacité de création de la richesse économique nouvelle que recèle la force de travail pour autant qu’elle entre en action…
Pourquoi faudrait-il donc, en France tout particulièrement, diminuer le prix du logement ? Voici la réponse d’Olivier Passet :
« D’abord, parce que des prix élevés de l’immobilier aggravent les effets de la modération salariale. Or, ne nous voilons pas la face, rétablir la compétitivité, passe aussi par de la modération salariale. »
Cependant, dans le domaine de l’immobilier, il n’y a pas – comme dans l’entreprise de production – qu’un phénomène de rotation du capital… Il y a des individus, des couples, des familles qui se sont dotés de leur propre habitation. Celle-ci fait partie du marché immobilier sans y être du tout active… Ce qui ne l’empêchera de le devenir en cas de décès, de déménagement, etc.
Que l’ensemble des titulaires d’une rente immobilière (dont certains s’acquittent indirectement du montant auprès d’eux-mêmes) puisse compter en son sein quelques millions d’individus aussi directement engagés dans le rapport de force propriétaires-locataires qui se traduit pour eux par un ressenti de tous les instants présents de leur vie quotidienne (ils sont chez eux), mais aussi du vécu qu’ils ont de l’endroit depuis des décennies parfois, sans compter éventuellement celui de leurs parents, etc…, ne peut qu’avoir un poids déterminant dans la balance des intérêts économiques et politiques plus ou moins supposés qu’ils croient pouvoir et devoir défendre… à l’occasion de ce qui se trouve inscrit dans leur patrimoine…
Pour eux, la baisse des loyers, c’est aussi la diminution d’une richesse acquise et entretenue… quelquefois assez difficilement.
Quant aux autres, à celles et ceux qui engraissent directement la rente immobilière rien qu’au titre de l’usage (et non de la propriété) qu’elles et ils peuvent en avoir…, la moindre hausse vient leur serrer directement la ceinture, ce qui frappe indirectement les fabricants de biens de consommation… et s’ajoute à d’autres petits malheurs que nous signale Olivier Passet :
« Des prix trop élevés impliquent une attrition des budgets que les ménages consacrent aux autres dépenses, ce qui favorise la désindustrialisation. Aussi, parce que des prix élevés de l’immobilier, renchérissent les coûts liés au bâtiment commercial pour les entreprises. »
Or, tout en haut de la pyramide des rapports de force instaurés entre les différents capitaux impliqués ou dans l’investissement immobilier (qui met « en valeur » des propriétés) ou dans l’investissement productif (qui doit engendrer de plus-value), il y a le juge de paix du capital-argent… et c’est ce qui inquiète plus particulièrement Olivier Passet…
« …parce qu’une part croissante du crédit à l’économie est captée par de l’investissement non productif. Pire que cela, la croissance vertigineuse du crédit hypothécaire depuis 20 ans n’a fait qu’alimenter la hausse des prix immobiliers. »
Parce que c’est le déjà bâti qui ramasse l’essentiel de la mise… induisant une raréfaction des productions nouvelles dans les endroits significatifs, ce qui entraîne une hausse des prix de l’existant par restriction de l’offre…
« Les mises en chantier stagnent. Résultat, une pénurie de près d’un million de logements en France. Comment faire ? »
Olivier Passet aborde, alors, l’une des clés permettant de comprendre comment cette classe politiquement déterminante de petits propriétaires immobiliers a pu être constituée à partir d’une France de petites boutiques et d’exploitations agricoles familiales longtemps continuées qui a trouvé, comme pis-aller, à se rabattre sur un investissement locatif qui l’assimilait, décidément, aux possédants en général :
« Cela signifie d’abord démonter un système d’aides complexe dont on sait qu’il a entièrement bénéficié aux bailleurs via des hausses de loyer. Les lois du marché sont implacables. Quand il y a pénurie, l’aide que l’on croît cibler sur le locataire est captée, in fine, par le bailleur. Mais défaire notre Mikado fiscal demande du temps et du doigté. »
On comprend bien pourquoi.
NB. Cet article est le cinquante-huitième d'une série...
« L’Allemagne victorieuse de la Seconde Guerre mondiale ? »
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