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Accueil du site > Tribune Libre > Cinéma : l’exemple américain ou le courage politique

Cinéma : l’exemple américain ou le courage politique

Les USA donnent à la France une leçon de cinéma engagée que nous serions bien inspirés de suivre.

Qu’ont en commun des films aussi divers que Syriana, Team America, Borat, Les infiltrés ou encore le documentaire Enron ?

Ils sont nés aux USA en 2005 et 2006, et leurs réalisateurs ont fait preuve d’un courage politique dont sont incapables leurs confrères et autres humoristes français. Alors que Borat ou Team America s’attaquent de front aux maux qui rongent leur pays (racisme, ignorance, propagande gouvernementale, etc.) que se permettent un Michael Youn ou un Karl Zéro dans le même temps ? Bien peu, vous en conviendrez.

Le Français, si prompt à toiser les oeuvres américaines et à ironiser sur leur démarche commerciale, devrait contempler son triste nombril et orienter son ironie à meilleur escient. Le seul courage politique que l’on se permette dans notre pays est de piétiner un homme à terre (Jacques Chirac, pour ne pas le nommer) et encore sans titiller là où cela fait vraiment mal. N’est-ce pas, Messieurs Zéro, FOG (c’est un livre, mais quand même) ou Rotman ?

Pendant ce temps-là des sociétés de production comme Participant (Clooney), des artistes comme Sacha Baron Cohen, ou des maîtres comme Martin Scorcese regardent la société américaine dans les yeux et lui disent les quatre vérités qu’elle voudrait ne pas entendre, à grand renfort de 24 et autres Lost. Le cinéma reprend ses droits, et montre son statut que prétendent lui contester les séries TV, aux dires de certains.

Le Français se plaît à croire à son impertinence ; que dire d’un dcocumentaire comme Enron : the smartest guys in the room, alors ? Le système politico-économique en ressort bouleversé dans ses fondations mêmes. Quelles traces en revanche laissera le catalogue de banalités et de pseudo-révélations de M. Rotman ? A quand un regard pertinent sur une affaire Clearstream, pour parler du plus récent ? Je me laisse sûrement emporter ici par mon enthousiasme en évoquant une société qui vient juste de reconnaître l’apport des peuples colonisés à ses guerres mondiales.

En ces temps de présidentielles, le courage de nos hommes de cinéma semble se limiter à prendre parti pour tel ou telle candidat fédérateur, ou au mieux pour une cause humanitaire. Que ne commencent-ils donc par faire leur travail d’une manière responsable ?

Il est temps que nos artistes, producteurs et réalisateurs aient le courage de se détacher d’un pouvoir politique qui menace de leur reprendre d’une main ce qu’il leur a donné de l’autre. Bien souvent, ce courage politique a été récompensé par les entrées en salle et les ventes en DVD pour les oeuvres américaines, pourquoi en serait-il autrement ici ? Les Français sont d’ailleurs de grands amateurs de ces oeuvres US critiques, ils auraient probablement le même enthousiasme pour des équivalents français. Pour paraphraser Jack Nicholson dans Les infiltrés, le cinéma français semble se dire : « Gauche ou droite ? Quand tu fais face à un flingue chargé, quelle est la différence ? ».


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17 réactions à cet article    


  • Birlouz (---.---.149.152) 15 décembre 2006 14:29

    Je n’ai pas très bien saisi le message des « infiltrés » ... Hormis qu’il s’agit d’un « internal affairs » à-la sauce Scorcese (très bonne sauce d’ailleur ^^ ) !

    Par contre, Sacha Baron Cohen est anglais il me semble ... du coup il apporte une critique exterieur sur les US.

    Et je suis d’accord avec le fait qu’il existe trop peu (voir aucun ...) de film critique sur la société française.

    Birlouz.


    • noireb (---.---.73.94) 18 décembre 2006 18:58

      1 2 3 soleil, la haine, indigene...

      Les films engagés existent, meme si ce ne sont pas les plus réputés.

      Si on compare le nombre de films critiques sortis aux US à la production holywoodienne totale, ca devient aussi negligeable qu’en France.

      Qui peut se targuer en France de voir tous les films d’auteur et affirmer que ceux-ci ne sont jamais critiques ?

      On peut juste dire que ce ne sont pas des block-busters.


    • Cris Wilkinson Cris Wilkinson 15 décembre 2006 15:26

      Il y a une grosse différence entre les Etats-Unis et la France.

      Là-bas, ils font de films pour le fric, quand ce genre de film n’en fera plus, on en verra plus.

      Ici les films sont subventionnés.
      - D’un on fait des films histoire de dépensé l’argent, pour dire que l’année d’après on est au moins le même budget.
      - De deux, c’est peut-être pas des lanternes nos producteurs, quoi que certains savent ce servir de leur tête (à la Zidane), mais ils ne vont quand même mordre la main qui les nourrit.
      - De trois, ces films dont vous parlez marche beaucoup mieux à l’étranger que chez eux, on aime toujours mieux voir la misère chez le voisin que chez nous et d’autant plus si ce voisin est riche, puissant et qu’il fait sa loi dans le quartier.


      • Arturo Bandito Arturo Bandito 15 décembre 2006 17:38

        Cris,

        j’ai pris soin de choisir des films qui ont tout de même rencontré un certain public voire un public certain aux USA :
        - 118 740 373 $ aux USA pour les Infiltrés (toujours en exploitation)
        - 120 266 165 $ aux USA pour Borat (toujours en exploitation)
        - Team America : $32,786,074 (aux USA soit 64.5% du total), à l’étranger : $18,040,824 (soit 35.5%)
        - Enron (nomination pour un oscar) : USA : $4,071,700 (soit 90.1%), Reste du monde : $445,620 (9.9%). Chiffres faibles car c’est un documentaire.

        Je tiens à préciser ces chiffres car ils faisaient partie de mon raisonnement et de ma démonstration. (sources Box Office Mojo et Allociné)


      • Algunet 18 décembre 2006 05:30

        Ben si le cinéma français sort ces films,

        Attendu qu’ils vont être traités façon gauche bobo intellectuelle « tout le monde il est pourri » sponsorisés par les droits de l’hommistes, ONG, et autres moralisateurs stigmatisateurs professionnels le tout avec un humour à la Michael Youn ou Karl Zéro qui nous ferait exceptionnellement sourire,

        Attendu que l’on nous ressortirait toutes les affaires déjà ressassées par les médias depuis des années,

        Attendu l’esprit de repentance de la France à l’égard des proches de notre histoire depuis Vercingétorix, de nos colonisés, nos brimés et autres stigmatisés colorés ou pas de l’État français,

        Attendu que la misère est toujours plus douce chez les autres,

        Attendu qu’après l’hiver, la dépression de printemps précède la canicule (tiens, on pourrais faire un film sur la canicule et la « groce fôte » de l’État, qui au lieu de s’occuper de nos vieux étaient parti bronzer quelques jours…),

        Je déclarerais la France suicidée, sans mot d’excuse…


      • rock.marshall41 (---.---.47.157) 15 décembre 2006 17:11

        Hum, c’est un peut vite généraliser, mais il est vrai qu’un courant est en place.


        • ohlala (---.---.124.230) 16 décembre 2006 00:24

          Mais ce fil a perdu presque tous ses commentaires !!! Alerte Webmaster !

          Et le fil Pete Towsend de DW, et le livre d’Attali, pareil !


          • L'équipe AgoraVox L’équipe AgoraVox 16 décembre 2006 11:56

            Bonjour,

            Désolé on vient de migrer vers un serveur plus rapide... Et à cause de la propagation des DNS pendant quelques heures, les deux serveurs sont restés accessibles (pas d’autre choix pour éviter une coupure du site)... D’où quelques soucis au niveau des commentaires dans quelques articles... J’espère qu’on va pouvoir rétablir ça mais c’est pas super simple. Désolé


          • ohlala (---.---.124.230) 16 décembre 2006 14:41

            Ah bon, merci de vous manifester, et de cette explication. Pourriez-vous passer votre message ailleurs ? Bernard Dugué se pense victime d’hallucinations chez Pete Townshend.


          • ohlala (---.---.124.230) 17 décembre 2006 09:48

            Dites donc, Webmaster, ça swingue terrible ce week-end : hier après-midi ce fil avait retrouvé ses com’s, et ce matin il les a re-re-perdu.


          • Desman (---.---.173.214) 16 décembre 2006 07:56

            Je vais rien dire de nouveau, mais c’est vrai que en France en ce moment c’est assez plat. Pas de critique sociale, pas d’humoriste grincant et provoquant (dans le bon sens du terme). Ou sont passes les Coluche, Desproges, ou meme la troupe du splendid, des annees 80 ? Depuis cette « age d’or » le pays s’encroute. Esperons qu’une nouvelle generation emerge bientot... En attendant ce sont nos cousins d’outre Quievrain qui nous montrent la voie !


            • LULU (---.---.242.122) 16 décembre 2006 14:50

              malheureusement le système Français tant magnifié avec son exception culturelle a une fâcheuse tendance à tuer tous les contres pouvoirs.

              La recette :

              - une économie culturelle sous perfusion d’argent public et donc une création très bien contrôlé par le biais du système technocratique. - quelques personnages clefs sous contrôle ou complice et gardien de la fantastique pensée unique qui étouffe totalement notre pays et couvre ainsi en parti la grande médiocrité de nos élites. Si vous contrôlez les quelques et peux nombreux comptoirs qui financent la création cinématographique française, c’est tout bon smiley

              vive l’exception Française smiley, vive nos élites irresponsables smiley, vive la petitesse d’esprit de notre beau pays et vive le centralisme démocratique smiley


              • Gecka 17 décembre 2006 18:31

                J’ai l’habitude de me méfier des donneurs de leçons !


                • ben (---.---.80.245) 19 décembre 2006 00:01

                  votre raisonnement se tient, le sujet est il est vrai assez interessant. pour rebondir sur un commentaire posté plus haut, il est vrai que les films américains sont faits pour rapporter de l’argent, mais rapporter de l’argent signifie être vu. Les producteurs français devraient peut-etre produire des films interessants dans cette optique là aussi, parce que faire des films qui seront vus par sa maman, aussi bien soient-ils, ne sert a rien. Les américains l’ont compris, et sont prêts a diluer le message afin que celui-ci soit tout de même diffusé à large echelle. Les résultats sont entre autres hotel rwanda, jarhead (réalisé par un anglais mais bon), ou encore minority report. Quant a parler de 24 comme série se voilant la face, je ne suis pas tout à fait d’accord, la dérnière saison étant une critique directe du gouvernement bush, ce qui est rare à la télévision.


                  • wensy (---.---.231.1) 19 décembre 2006 13:04

                    Votre analyse m’apparaît comme très manichéenne et ne prenant en compte que quelques paramètres en omettant beaucoup d’autres. Et demandez à Michael Moore comme il a galéré avant de pouvoir faire diffuser son premier film (diffusé à très petite échelle car considéré comme dérangeant). Que des gars comme Georges Clooney voient un peu plus loin que le bout de leur nez, certes, mais au pays à la façade puritaine, ils ne sont pas encore légion. L’herbe est toujours plus verte chez les autres ... de plus en France nous sommes des latins, pas des anglo-saxons, et ceci se ressent dans tous les domaines, également dans celui de la culture. Regardez comment l’Amérique Latine traite tous ses problèmes, vous y verrez une approche plus proche de celle de la France que des Etats-Unis en général. Les subventions ne sont pas tout, il y a aussi une question de mentalité.


                    • Comité Cicéron 20 décembre 2006 13:32

                      Je souhaiterais ajouter à votre excellent article que, malheureusement pour nous et aussi pour l’image des Américains, nous reprenons trop facilement les critiques faites par les médias américains contre leur pays, et cela nous détourne des critiques à l’encontre de notre pays à nous.

                      Après tout, que nous importe la guerre de Bush à laquelle nous avons été libres de ne pas participer ? Et pourtant ce sujet occupe bien les esprits. Un film comme « indigènes » a le mérite de nous replonger dans notre histoire : encore faut-il relativiser car Chirac a réussi à faire croire que c’était lui qui avait imposé l’égalité de traitement entre retraités européens et retraités vivant en Afrique, alors que c’est le Conseil d’Etat qui a censuré la politique française menée sans discontinuité depuis l’indépendance des colonies...

                      Le problème est peut-être que, avec les quelques scandales que nous avons eus malgré la culture du secret, les relents anti-démocratiques encore présents dans notre pays ne manquent pas de revenir à la surface. Avec des extrêmes représentant 30% de l’électorat, sommes-nous prêts, en France, pour une vraie démocratie, et un vrai courage pour affronter les turpitudes du pouvoir sans tomber dans les bras des extrêmistes de droite ou de gauche ?


                      • Patrick Ferner (---.---.97.172) 21 décembre 2006 18:51

                        Pour les Américains,non seulement leurs institutions font intégralement partie de leur culture, mais elles incarnent les valeurs fondamentales de leur pays ; c’est pourquoi, ils sont très critiques à l’égard de ceux qui ont la charge de les diriger. D’où ce paradoxe : un cinéaste peut se montrer d’autant plus virulent dans la critique du pouvoir qu’il ne remet pas en cause les institutions. Il en va tout autrement en France où le citoyen ne vénère pas les institutions et pour cause, puisque notre pays a connu quinze constitutions depuis la Révolution ; d’où le peu d’intérêt chez nous pour tout ce qui concerne les dessous du pouvoir et comme on demande à l’Etat de prendre en charge les problèmes de la société, on ne s’intéresse pas davantage à elle. J’en donne les raisons profondes sur mon blog. Donc, au-delà de la question ou non de la frilosité, le fossé qui sépare le cinéma américain et le cinéma français est culturel.

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