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Crise centrafricaine : mondeafrique.com, un site sans mémoire !

La RCA a fait l’objet d’une publication de mondafrique.com, le 27 janvier dernier. Ce site internet affirme, en titre de son article : « le désastre centrafricain, miroir d’une Afrique centrale impuissante ». La volonté de mondafrique.com d’égratigner les dirigeants africains en général et ceux de l’Afrique centrale, en particulier a, visiblement, privé ce site de sa mémoire. 

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18 ème sommet de la CEEAC à Libreville, novembre 2020 (photo d’archives)

 

 Le raccourci 

Les trois décennies qui ont suivi la chute de l’Empire Bokassa (après 13 ans de règne, 1966-1979), n’ont pas particulièrement souri aux Centrafricains. C’est dire combien les origines de la crise centrafricaine sont plus lointaines. Vouloir ramener cette crise à l’année 2013 ressemble à un coup fatal porter à l’histoire, un vrai raccourci, les historiens du présent (les journalistes) devraient s’interdire. En effet, l’instabilité politique dans ce pays remonte au règne du général André Kolingba qui a perdu les élections de 1993 au profit de Ange Felix Patassé. Dans une atmosphère tumultueuse et délétère, François Bozizé réussit un coup d’Etat, le 15 mars 2003. Dix (10) ans plus tard, en 2013, la rébellion se déclare au nord et à l’est de la RCA.

Dans un contexte surchauffé, l’Afrique centrale (CEMAC et CEEAC) organise des pourparlers à Libreville. Ceux-ci aboutissent aux accords qui prévoyaient, entre autres, le départ des forces sud-africaines, la libération de tous les prisonniers politiques et la levée de toutes les barrières à Bangui. La nomination de Nicolas Tchangai comme premier ministre et de Michel Djotodia comme vice-premier ministre, étaient notamment parmi les conditions. Ces accords de Libreville ont ainsi contraint le président Bozizé à composer avec l’opposition.

La CEEAC, vraiment indifférente à la crise centrafricaine ?

mondafrique.com affirme de façon péremptoire : « la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (CEEAC)… assiste indifférente au naufrage de la Centrafrique ». Pourtant, les dirigeants de l’Afrique centrale sont allés au secours de la Centrafrique dès les premières heures du déclenchement de la crise dans ce pays ce, bien avant l’arrivée des militaires français et des forces de l’ONU, contrairement aux allégations de ce site internet reconnu pour ses pamphlets contre les dirigeants africains. 

En effet, quand la rébellion Séléka s’empare du pouvoir en mars 2013, la CEEAC était la première organisation à réagir concrètement, alors que la crise ne se lisait que par les prémices. Libreville, la capitale gabonaise a abrité plusieurs rencontres des dirigeants de l’Afrique centrale sur cette crise. Ceux-ci ont d’ailleurs imposé à François Bozizé, alors président en fonction en RCA de négocier avec les rebelles que dirigeait Michel Djotodia.

Mondeafrique.Com a oublié ou ne veut pas dire que ce sont les chefs d’Etat de l’Afrique centrale qui, après moult négociations sans succès, ont décidé du départ du leader des Seleka, Michel Djotodia du pouvoir, pour instaurer une transition plus consensuelle et dont la direction avait été confiée à Madame Catherine Samba Panza qui représentait la société civile.

Les premières troupes qui se sont déployées en RCA après le coup d’Etat de Djotodia pour arrêter des exactions de la Séléka (alliances de rebelles majoritairement musulmans) et des antibalakas (milices chrétiennes) contre les populations civiles étaient celles de la sous-région Afrique centrale. Ces troupes ont pu éviter le carnage qui a pourtant pris de l’ampleur à l’arrivée des troupes françaises.

Outre ces troupes, la CEEAC avait alors mis en place la médiation dont la direction avait été confiée au chef de l’Etat congolais, Denis Sassou N’Guesso. Il a été plus tard confirmé dans ce rôle par l’Union africaine et même par l’ONU. L’intense travail de cette médiation a, quelquefois été contrecarré par les puissances étrangères dont les intérêts ne reflètent pas toujours les déclarations officielles.

Au terme du processus et en dépit des multiples obstacles, la médiation conduite par Denis Sassou N’Guesso a permis à la Centrafrique d’organiser des élections libres et transparentes qui ont conduit le président Faustin Archange Touadera au pouvoir, en 2016. En affirmant que la CEEAC n’a joué aucun rôle dans la résolution de la crise centrafricaine, mondeafrique.com fait preuve d’un raisonnement calculé dont l’objectif est inavoué. Sauf si ce site internet et l’auteur de l’article prouvent que l’âge ou la durée au pouvoir de tel ou tel autre chef d’Etat a une implication dans la nouvelle crise déclenchée en RCA en décembre dernier. 

Evidemment, comme mondeafrique.com et ses rédacteurs ne voient du côté de la CEEAC que la tête des dirigeants, il est donc impossible qu’ils aient vu le médiateur dans la crise centrafricaine se déployer sur le terrain. De même qu’ils n’ont jamais voulu voir le ministre français de la défense puis des affaires étrangères, Jean Yves Le Drian multiplier des visites à Brazzaville, à Oyo (Cuvette) et même Etoumbi (Cuvette ouest) pour rencontrer Denis Sassou N’Guesso, afin d’échanger et trouver une issue pacifique à la crise centrafricaine.

Les Centrafricains d’abord

Le président Faustin Archange Touadéra, dépositaire légal du pouvoir du peuple centrafricain a pensé agir seul, au nom de la souveraineté de son pays, en signant des accords avec la rébellion. L’échec de ce processus n’incombe en rien à la CEEAC qui n’a été ni consultée, ni associée. De même que le chef de l’Etat centrafricain peut juger mieux se tourner vers les Russes pour assurer l’intégrité de son pays, au moment où malgré de multiples appels de la CEEAC, notamment, le Conseil de sécurité de l’ONU n’a jamais cru utile de lever l’embargo sur les armes qui frappe son pays depuis des années.

Il va de soi – et on ne devrait pas craindre de dire – qu’aucun autre pays africain ou européen ne serait plus touché, plus concerné par la crise centrafricaine que les Centrafricains eux-mêmes. Ils savent qu’aucun pays n’a jamais été construit dans la guerre et que la démocratie a prévu des mécanismes d’accession au pouvoir. Tant que les Centrafricains ne réaliseront pas que la CEEAC, la France et l’ONU n’apporteront pas de solutions miracles à leur conflit, ce pays baignerait toujours dans la violence aveugle, sans avancer vers son développement.

La CEDEAO et l’IGAD deviennent des organisations à citer en exemples, selon mondeafrique.com, parce que les Maliens et les Soudanais du sud ont compris l’intérêt de faire la paix et ont adhéré à la démarche proposée. Ces organisations n’ont pas remplacé ces Etats, ni enfreint à la souveraineté des pays concernés. La CEEAC ne pourrait donc pas se substituer ni au gouvernement dans la gestion quotidienne de l’Etat ni aux acteurs politiques centrafricains dans la nécessité de faire de la paix, la seule alternative à la violence. Le président en exercice de la CEEAC, le congolais, Denis Sassou N’Guesso ne devrait pas prêter le flanc à ce journalisme volontairement sans mémoire.


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