Débats au sein de l’écologie politique française
Mardi soir, EcoRev’ et Jacques Boutault, maire du 2e arrondissement de Paris, organisaient un débat à la mairie du 2e arrondissement de Paris avec Corinne Lepage (Cap 21), Yves Cochet et Dominique Voynet (Les Verts), Franck Pupunat (Utopia, PS) et (sous réserve), José Bové (Via Campesina).
Le thème en était : "Au-delà des stratégies politiques, quels sont les
projets des différents tenants de l’écologie politique ? Quelles urgences ? Sur
quels sujets s’opposent-ils et se retrouvent-ils ? Jusqu’où réformer les systèmes
économiques et politiques ?".
L’idée de voir sur une même tribune trois anciens ministres
qui sont de plus les leaders actuels de l’écologie politique et peut-être de
les entendre confronter leurs points de vue était, vous l’avouerez, alléchante. Je
m’y suis donc rendu.
Malgré la présence de la quasi-totalité des intervenants, un
murmure passe dans les rangs des citoyens participants : « Est-ce qu’il va
venir ? » Il, c’est José Bové qui, joint au téléphone, a dit qu’il ferait son
possible pour être présent.
L’un des intervenants en prenant place à la table le dit aux
autres : "On va laisser une place pour José."
Bien qu’assis côte à côte, Dominique Voynet et Yves Cochet
semblent un peu tendus. On le percevra pendant leurs interventions, chacun
commençant par « Je ne partage pas totalement la vision de... ». Corinne Lepage
donnera le départ de la conférence-débat avec la maîtrise qu’on lui connaît, et
il faudra quelques longues secondes pour que quelqu’un veuille bien lui succéder.
Franck Pupunat, lui, présente Utopia et le rôle que son mouvement (1% au dernier Congrès socialiste) essaye de jouer à l’intérieur du PS en termes d’écologie et
d’économie durable.
Leur vision exprimée, une question leur est posée : « L’écologie
politique est-elle une réalité et peine-t-elle à prendre sa place auprès des électeurs
? »
Réponses unanimes : plus de 60 % des Français apprécient
et soutiennent les causes écologistes, mais peu sont prêts à voter pour les soutenir.
C’est Yves Cochet, de sa voix de stentor, qui propose une réponse
à cet état de fait : "Il faudrait un événement de grande importance pour
que les gens prennent enfin conscience !" On craint le pire, mais il se
reprend : "N’ayez crainte, je n’envisageais pas dans mes propos une grande
catastrophe... " Ouf !
Les autres intervenants seront moins radicaux et indiqueront
que la route est encore longue et que le vote « utile » est en partie
responsable de la situation. On se met immédiatement à penser au deuxième tour
de la présidentielle de 2002 !
A la question : "Et si vous étiez élu, quelles mesures
immédiates prendriez-vous ?"
Yves Cochet n’y va pas par quatre chemins : il faut des
mesures radicales pour éradiquer le carbone et mettre en place le changement
dans les habitudes des citoyens. Tout en regrettant que les efforts allemands
pour sortir du nucléaire et des énergies fossiles depuis quatorze ans ne leur
permettent toujours pas d’autonomie énergétique, il se lance dans la présentation
de quelques mesures.
Afin de mettre fin à la précarité, il propose de verser à tous
les Français un revenu minimum qu’il qualifie de citoyen, qui serait de l’ordre
de 600 € par mois.
Dans un autre genre, il propose, pour combattre l’inégalité des Français devant le prix des carburants, de mettre en place des « quotas » identiques
pour chaque automobiliste. Une fois le quota dépassé, allez hop, à pied !
Evoquant à nouveau la précarité, il parlera des villes situées
du « mauvais côté » du périphérique, prenant comme exemple une ville du 93 (croche-pied à Dominique Voynet sénatrice de ce département ?) reprenant en cela la
vision des écologistes parisiens sur les « sauvages » de banlieusards.
Dominique Voynet sera, quant à elle, beaucoup plus modérée
dans ses déclarations, insistant plutôt sur la PAC européenne et ses subventions
qui étouffent les producteurs des pays en développement. En clair, elle
supprimerait toutes les subventions injustifiées. Elle propose également de
supprimer toutes les subventions à l’industrie pétrolière pour les reporter sur
la recherche en énergies renouvelables. Elle présentera un très court plaidoyer
pour l’économie sociale et solidaire, expliquant que les initiatives (micro crédit
et aides à la création) en région Nord ont créé plus d’emploi que l’usine Toyota.
Corinne Lepage, quant à elle, après avoir regretté que nos
actuels dirigeants envisagent des privatisations des groupes énergétiques au
plus mauvais moment, affirmera la nécessité d’une rupture rupture avec les énergies
fossiles, regrette de ne pas trouver dans le programme de l’UMP la moindre
ambition dans le domaine de l’écologie, et trouve que celui du Parti socialiste
se contente de vagues intentions. Reprenant l’idée d’Yves Cochet sur le revenu
minimum citoyen, elle s’appuiera sur le déficit actuel de la France pour la réfuter.
Franck Pupunat aura bien du mal à expliquer comment,
appartenant aux instances du Parti socialiste, il pourrait influencer celui-ci, mais
pense que la pédagogie est fondée sur la répétition.
Puis deux questions fatales surgiront : "Comment l’écologie
politique peut-elle régler le problème du chômage de masse ?" et "Les
écologistes doivent-ils présenter un seul candidat ?"
Sur le chômage, entre Corinne Lepage qui lira une estimation
fournie par des experts européens et Dominique Voynet qui lancera tout à trac
le chiffre de 200 000 emplois qui pourraient être créés, nous resterons sur
notre faim.
En ce qui concerne une candidature unique, dans la mesure où
les deux candidats des « Verts » sont en pleine campagne, que Franck Pupunat est
au Parti socialiste et que Corinne Lepage ne semble pas faire l’unanimité,
quelqu’un lancera sous les huées le nom de Nicolas Hulot.
En clair, le culte de la personnalité ne sera pas de mise
chez les dirigeants écologistes. Une question du public concernant le fait que
les deux "Verts" sont clairement engagés dans le camp de la gauche
et que Corinne Lepage a été ministre d’Alain Juppé ne fera pas recette, et
aucune voix ne s’élèvera pour proposer que José Bové puisse être le candidat
unique. Mais au fait, il est 21h et la fin de la réunion est proche, mais la
chaise de José est restée vide.
Pour moi, il reste deux questions : l’écologie politique est-elle
une réalité ou un concept ? Et pourquoi José Bové n’est-il pas venu ?
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