Jean Michel Sahut : Un hussard noir nous a quittés
Instituteur laïque en Seine Maritime depuis sa sortie de l’École normale de Rouen après 1968, Jean Michel Sahut a longtemps enseigné dans une petite commune rurale du bord de la Basse-Seine où il a créé une amicale laïque très active. Retraité depuis une vingtaine d’années, il a prolongé son action militante en participant à la création d’une association de défense laïque : le CREAL 76 –Comité de Réfléxion et d'Action Laïque– dont il fut le premier président.
Cette association active, unitaire, entendait et entend toujours défendre une laïcité intransigeante sans être sectaire, ouverte au débat et à la recherche de l’unité des laïques, une laïcité, ni ouverte, ni fermée, ni inclusive, ni exclusive... Un ensemble de principes à appliquer et respecter.
Jean-Michel, fils de maître d’école, fut lui-même un instituteur compétent, sérieux, les pieds sur terre, novateur dans le respect de la tradition républicaine, attaché à la promotion des enfants du peuple dont il avait la charge. En dehors de sa classe, il militait pour un syndicalisme dit « révolutionnaire » c'est à dire progressiste en même temps qu’opposé au favoritisme, à la hiérarchie, aux honneurs, dans la fidélité au « refus de parvenir » de ses prédécesseurs
Membre de la vieille tendance des amis de l'Ecole Emancipée, avec ses camarades de toutes les catégories de l’Éducation nationale, il luttait à la fois contre le cléricalisme, contre la bureaucratie et contre le capitalisme.
Militant au sein de l’important groupe de la Seine Maritime, c’était un disciple de Michel Chauvet, instituteur connu par les uns comme un « éternel révolté », et pour beaucoup d'autres comme un homme de conviction, chaleureux, fidèle à ses valeurs humanistes et sociales. Il avait constitué autour de lui un groupe de militants qui était aussi une bande d’amis. Ce groupe, soudé par l’amitié, se réunissait souvent chez Jean-Michel ou dans la salle des fêtes de sa commune, en toute convivialité. On militait alors dans la bonne humeur, sans que la forte personnalité de chacun ou chacune ne nuise à la cohérence du cœur de ce groupe convivial – une vraie famille.
Jean-Michel y tint sa place, plusieurs fois membre de l’équipe responsable de « l’École émancipée ».
En 2001, « l'École émancipée » a éclaté, la cohabitation étant devenue impossible entre les adeptes d'un syndicalisme « apaisé » permettant de participer aux instances syndicales majoritaires avec les avantages afférents et ceux qui étaient favorables au maintien d'un syndicalisme indépendant et sans compromission. Avec d’autres, Jean Michel a lutté jusqu’au bout pour éviter la scission avant d’être contraint de fonder, avec d'autres, une nouvelle tendance autour d’une revue qui prit le nom de l’organe de la première fédération d’instituteurs syndiqués – l'Émancipation – qui se proposait de perpétuer l’esprit de l’ancienne « École émancipée » qui avait réussi à maintenir depuis 1910 l’unité du syndicalisme enseignant radical non inféodé au PCF.
Jean Michel considérait, à juste titre que la laïcité s’appuyait sur un corps de principes et qu’elle n’avait pas s'adapter au goût du jour du public. Il a ainsi participé activement au combat pour l'interdiction du port de signes religieux visibles à l'école. Ce ne fut pas une « mince affaire » car au sein même du syndicalisme révolutionnaire, il y avait des adeptes d’un dangereux relativisme culturel dans la crainte de stigmatiser une population jadis victime du colonialisme.
Jean Michel, militant érudit, construisait ses raisonnements pour bien expliquer dans ses articles et interventions que la stricte laïcité était un moyen de protéger toutes ces jeunes personnes que l'islamisme voulait soumettre à son dieu et surtout aux hommes.
Ce combat, parallèle à la lutte intransigeante contre l'école privée et le cléricalisme sous toutes ses formes, Jean Michel, avec l’aide et soutien constant de sa compagne, l'a mené sans faillir jusqu'à son dernier souffle.
Avec lui, nous perdons un ami et un camarade
J.F. Chalot
En collaboration avec J.Mourot
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