L’Europe unie fera-t-elle les frais de la crise en Ukraine ?
De plus en plus de signes indiquent que la division du continent européen s’élargit sur la manière de traiter la Russie dans la période à venir. Il semble que l’hiver prochain apportera de nombreux développements sur ce front. De même, il semble que les sociétés européennes ne seront pas les seules à souffrir des prix élevés de l’énergie.
Mais sur ce front, de graves conséquences géopolitiques se profilent. De plus en plus de voix s’élèvent en Europe pour demander une révision de la politique de sanctions imposée à la Russie. Bien sûr, plus ces voix se font entendre, plus le Kremlin sera déterminé à poursuivre cette guerre, dans laquelle, comme le président Poutine lui-même l’a souligné hier, il n’a pas perdu grand-chose.
Que l’objectif du président Poutine soit de combattre la démocratie, comme on le dit en Occident, ou de préserver la souveraineté de son pays, comme il ne cesse d’insister lui-même, le résultat est que le monde est dans une guerre prolongée ; le malaise énergétique de l’Europe pourrait se poursuivre pendant un bon moment, car les alternatives s’affaiblissent.
Plus dangereusement, l’environnement géopolitique extrêmement troublant pourrait fournir une occasion précieuse pour l’extrême droite dans un certain nombre de pays européens de prendre la tête, ce qui signifierait des changements qualitatifs majeurs dans la politique étrangère européenne et des tournants potentiels dans les relations internationales, puisque la politique européenne a une influence significative sur la structure de l’ordre mondial existant et attendu.
Bien sûr, l’étincelle du changement européen pourrait venir de certaines capitales d’Europe de l’Est, comme ce fut le cas lors des récentes manifestations en République tchèque et en Allemagne contre la hausse des prix de l’énergie. Ces manifestations sont susceptibles de se répéter et de s’étendre à d’autres pays, car les circonstances et les données sont similaires.
Par conséquent, certaines capitales européennes s’orientent timidement vers un contournement progressif de la politique de sanctions imposée à la Russie. On en voit des signes en Bulgarie et en Hongrie. Peut-être aussi en Italie, dont les élections de ce mois-ci seront un moment décisif pour l’Europe.
Les responsables de l’UE à Bruxelles craignent une marée d’extrême droite et un basculement de la balance en faveur de la Russie. En outre, les sondages d’opinion sobres en Europe et ailleurs révèlent une humeur populaire en colère contre l’augmentation du fardeau sur la vie causée par la guerre en Ukraine, indépendamment des calculs stratégiques des politiciens et des dirigeants.
Il existe de profonds désaccords dans le giron européen, notamment les points de vue divergents de la France, de l’Espagne et de l’Allemagne sur le gazoduc MidCat, que Paris s’oppose à activer.
Le projet, lancé en 2013 entre la Catalogne, au nord-est de l’Espagne, et le sud-est de la France, a échoué faute d’accord sur le financement et de soutien de facto de la France, qui n’est pas convaincue de sa faisabilité.
Cela coïncide également avec l’étude de faisabilité commandée par la Commission européenne en 2018, qui a conclu que l’infrastructure, d’un coût de plus de 440 millions d’euros, n’est ni rentable ni nécessaire ; la construction du gazoduc prendra beaucoup de temps et ne résoudra pas la crise énergétique immédiate en Europe.
Certains des rapports qui ont relevé l’impact potentiel sur l’environnement. Mais les médias espagnols ne parlent pas du même point de vue, soulignant le malaise de la France face à l’alliance croissante entre l’Espagne et l’Allemagne.
Il est fait référence ici aux guerres autour des « fraises » espagnoles que les agriculteurs français n’étaient pas autorisés à importer en France, rouvrant de vieux problèmes, comme le soutien au mouvement ETA dans le dernier quart du XXe siècle.
Le ministre russe de l’Énergie, Nikolay Shulginov, affirme que l’hiver montrera à quel point l’UE croit en la possibilité de renoncer au gaz russe, ajoutant que l’Europe ne pourra pas se passer du gaz russe car cela paralysera l’industrie, notamment l’industrie chimique.
Cette vie sera complètement nouvelle pour les Européens qui pourraient ne pas être en mesure de dire non car ce serait « trop » pour eux, a-t-il poursuivi. Josep Borrel, chef de la diplomatie européenne, invite quant à lui l’UE à faire preuve de patience stratégique quant à l’impact des sanctions contre la Russie.
Cela signifie que la Russie continuera à tester les limites de la retenue européenne ; le bras de fer entre les deux parties s’intensifiera dans la prochaine phase. Le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, a déclaré que les politiciens européens ont commis tant d’erreurs pour lesquelles ils devront payer.
Il est peut-être trop tôt pour évaluer l’ampleur de l’impact de la crise gazière russe sur la cohésion de l’Union européenne. Mais il y a quelques indices de ce à quoi il faut s’attendre.
On peut penser ici aux appels du président Macron à rendre l’Europe plus puissante et souveraine, à sa proposition de créer une organisation politique parallèle à l’Union européenne qui inclut l’Ukraine, le Royaume-Uni et la Géorgie pour créer un espace de coopération politique et sécuritaire entre les pays européens, et à l’apparente évolution vers un club politique européen qui s’éloigne de la complexité des normes et des accords de Copenhague qui régissent l’Union européenne.
Cette approche a le soutien et l’enthousiasme de l’Allemagne, qui a montré un grand intérêt pour le renforcement de sa puissance militaire après la guerre en Ukraine.
L’économie et la sécurité ne sont plus des priorités absolues en Europe occidentale, ce qui met en avant les spéculations sur une éventuelle sortie de la France de l’Union européenne (Frexit), notamment au début de la montée en puissance de Marie Le Pen « Madame Frexit », qui a également appelé à une autre organisation européenne basée sur des politiques protectionnistes, notamment en matière de migration et de commerce.
Mais les motivations sont ici bien différentes. Avec la dynamique de l’attitude européenne à l’égard de la Russie et la question de savoir comment façonner les relations avec ce pays à l’avenir, une nouvelle dynamique est en train de s’enclencher.
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