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La lutte contre la pandémie dans les zones de guerre et de conflit

Alain Délétroz, directeur général de l’Appel de Genève, sur la protection des régions du monde les plus problématiques contre le Covid-19. 

Tandis que le monde entier est à la recherche d'un remède contre la pandémie de Covid-19, les régions les plus vulnérables restent sans la moindre aide. Avant que la pandémie ne commence le système de la santé était déjà affaibli dans les zones aux prises avec des guerres, des conflits armés et où l'Etat ne contrôle pas une grande partie de son territoire. De telles régions peuvent devenir des foyers d'épidémie. De nombreux conflits armés se sont transformés en zones où les ministères de la Santé déjà surchargés s'avèrent impuissants, et leurs collaborateurs sont souvent considérés comme des représentants de la partie hostile. 

Dans plus pays touchés par des conflits, jusqu'à la moitié de la population vit sur des territoires incontrôlés par le gouvernement central sous le pouvoir de structures armées illégales ou d'entités non reconnues. Dans ce contexte d’une pandémie qui réclame une approche sanitaire rigoureuse et systématique, ces trous dans la couverture anti-Covid-19 sont des bombes à retardement. 

Depuis le début de la pandémie l'organisation Appel de Genève appelle les groupes armés à évaluer à part entière son ampleur et le risque aussi bien pour eux-mêmes que pour la population sous leur contrôle. Tout en multipliant ses efforts pour lutter contre le Covid-19 qui consistent à : 

- proposer des conseils légaux et techniques aux acteurs armés non étatiques (AANE) sur leurs obligations en temps de pandémie, tout en conscientisant les combattants de base sur leurs obligations à assurer, maintenir et faciliter l’accès aux soins ; 

- lancer ensuite des programmes spécifiques santé et hygiène dans les zones contrôlées par des acteurs armés non étatiques ; 

- appuyer les agences de santé et humanitaires en posant l’Appel de Genève comme interface entre agences et AANE, afin de permettre et de faciliter la distribution du matériel médical ; 

- tenir un registre des mesures prises par les AANE de manière à pouvoir en informer la communauté humanitaire. 

L'Appel de Genève a déjà persuadé de nombreux AANE dans les pays comme la Syrie, l'Irak, la Birmanie, le Yémen et le Mali à prendre des mesures d'hygiène renforcées pour empêcher la propagation de la maladie. 

Dans d’autres contextes, au contraire, il cherche à juguler la tentation d’un confinement autoritaire, imposé par les armes et qui serait désastreux pour des populations civiles particulièrement fragilisées. Notamment lorsque les personnes doivent sortir de chez elles régulièrement afin d’assurer leur survie, l’approvisionnement en eau des familles ou le maintien du travail agricole. 

Les Etats doivent comprendre que le maillage de la couverture mondiale anti-Covid-19 ne peut supporter aucune béance. Les acteurs humanitaires doivent donc impérativement avoir accès aux groupes armés non étatiques, sans craindre de tomber sous le couperet de législations antiterroristes rigides. 

Les équipements nécessaires à l’endiguement de la pandémie doivent pouvoir atteindre l’entièreté d’un territoire national, y compris les zones disputées. 

Les groupes les mieux organisés ont pris rapidement conscience de l’ampleur du défi posé par la pandémie et se sont engagés à mettre en place déjà des mesures d’endiguement. D’autres n’ont pas les moyens de poser une réelle analyse de la situation, mais ont une relation suffisamment confiante avec nos collègues pour écouter et s’engager à soutenir les mesures conseillées. 

Ainsi, trois groupes armés d'Irak, le chiite Harakat Hezbollah al-Nujaba, la Force de protection d'Êzîdxan et les Unités de mobilisation populaire, ont signé en avril une déclaration sur la protection de la santé en période de crise de coronavirus élaborée par l'Appel de Genève. Ainsi, ils se sont engagés à garantir un accès de la population à l'aide médicale, à prendre des mesures pour prévenir la prolifération de la maladie et à ne pas attaquer le personnel et les sites médicaux. 

Un nombre fort restreint d’AANE, en revanche, pose un regard idéologique sur la pandémie, interprétée comme une punition du ciel confinant leurs ennemis dans leurs garnisons, et leur offrant un possible avantage tactique à saisir. Ces derniers se sont montrés fermés à toute discussion sur le sujet. 

Le défi posé par l’arrivée du Covid-19 dans les camps de déplacés et dans les zones de combat dépasse probablement les prévisions les plus pessimistes. 

Agir dès maintenant avec ceux qui sont en position d’acteurs sur ces territoires, quel que soit leur camp, relève d’un impératif moral.

L'Appel de Genève interagit depuis vingt ans avec des AANE à travers le monde. Dans le cadre de sa mission appelée à pousser ces groupes à respecter les normes humanitaires en temps de guerre et de conflit, l'organisation parvient à travailler dans les régions les plus difficiles d'accès. De nombreux AANE écoutent les conseils de l'Appel de Genève, mais, malheureusement, souvent ces efforts ne suffisent pas.

 

Source : http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=1581


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1 réactions à cet article    


  • confiture 15 mai 2020 10:38

    Lutter contre le covid dans les zones de combats, c’est pas un peu shadock ?

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Patrice Bravo

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