Le grain de sable dans l’ordre mondial ?
Que se passe-t-il en Iran ? Il est bien difficile pour les observateurs de garder la tête froide devant le flot de nouvelles dont l’origine est parfois suspecte ou en tout cas orientée.
Ce qui est certain, c’est que l’Iran est confronté à de graves pénuries provoquées par les écueils mis à la commercialisation de son pétrole par le blocus américain et aggravées par la pusillanimité de l’Europe encore une fois incapable de secouer sa dépendance au roi Dollar.
Ces pénuries entraînent des manifestations de mauvaise humeur que le régime réprimerait dans le sang.
L’Europe butte sur des difficultés énormes pour commercer avec la Perse qui est un marché porteur où les élites sont bien formées, ce qui explique d’ailleurs les avancées en matière de physique nucléaire.
Les ingénieurs iraniens n’ont rien à envier à leurs homologues d’autres pays dits avancés.
Ce gel imposé à l’Union Européenne souligne crûment l’échec de l’Euro qui n’a pas réussi à s’imposer comme monnaie d’échange au niveau international mais dont le lancement, il y a vingt ans, avait pourtant là une de ses raisons d’être au-delà des discours larmoyants sur l’Unité européenne, jusqu’ici restée une fiction en-dehors de l’ajustement de normes diverses et variées qui ne sont d’ailleurs pas nécessairement ressenties comme des progrès par la population.
Il est vain aujourd’hui de pleurer sur le lait renversé et l’on se rend bien compte qu’une marche arrière, à savoir une sortie de l’Euro, est quasi impossible et apporterait aux populations concernées son lot de misères face auxquelles la situation de détresse que connaissent beaucoup trop de citoyens européens s’approfondirait de manière dramatique.
C’était au moment où les pays ont décidé de se dessaisir de leurs droit de battre monnaie pour en transférer l‘usage à une banque Centrale Européenne (dont on voit bien aujourd’hui qu’elle poursuit ses propres objectifs qui n’ont plus rien à voir avec l’intérêt général), c’était alors que la population aurait dû exprimer avec beaucoup plus de hargne son attachement aux droits régaliens qui fondent l’esprit d’une nation et sont garants de son indépendance plutôt que de se laisser attirer, achalander, pourrait-on dire, par les lendemains de la nouveauté.
Aujourd’hui qu’il est bien tard pour se lamenter, il faut chercher à tirer le meilleur d’un mauvais choix en exigeant que la BCE revienne dans le giron des états (même si l’on ne voit pas bien comment collectivement les états pourraient parler à l’unisson) et mène sa politique monétaire de manière à relancer partout en Europe (et surtout en Allemagne d’ailleurs où l’état des infrastructures est déplorable) des investissements nationaux.
Un volontarisme politique est d’une nécessité absolue visant à rattraper le retard pris par rapport à nos compétiteurs internationaux chez qui la défiance vis-à-vis des secteurs étatiques n’est pas endémique comme elle l’est devenue en Europe où l’horizon est plutôt aux privatisations sauvages comme si le système capitaliste pouvait se soucier de maintenir des services publics dans des endroits où ils sont par nature et nécessité déficitaires.
Pour en revenir à l’Iran, le régime des ayatollahs semble aux abois qui fanatise ses supporteurs derrière un Islam qui n’en peut mais : on peut certes voir derrière les manifestations de la faim des agitateurs stipendiés par les USA, Israël ou l’Arabie saoudite, les pêcheurs en eaux troubles affectionnent particulièrement les malheurs des peuples pour faire avancer leurs objectifs qui sont à l’opposé de ce que réclament les affamés de justice.
Personne ne peut pourtant garantir que la fin du régime est proche et, dans cette hypothèse, que l’évolution serait à la mesure des attentes des citoyens : on a vu avec le régime du Shah – qui n’avait rien à refuser aux « majors » occidentaux – que ce que l’on croit pérenne n’est en réalité jamais que provisoire.
Le nom de Mossadegh, Premier Ministre qui avait osé s’opposer aux intérêts de la Grande-Bretagne et des USA en nationalisant le secteur pétrolier et renversé en-1953 à l’occasion d’un coup d’état dans le cadre de l’opération Ajax concoctée, avec l’accord de la dynastie des Pahlavi, dans les officines conjointes de la CIA et du MI6 britannique reste encore vivace dans l’esprit des Iraniens et il semblerait peu pertinent quoique pas impossible qu’au régime théocratique succédât une clique à la dévotion des puissances impérialistes occidentales.
On voit bien que partout dans le monde du Chili à Hong-Kong, de l’Algérie à la France des Gilets jaunes, des formes nouvelles de lutte s’engagent mais qui, toutes, rendent plus actuelles que jamais les constats de l’inéluctable lutte des classes qu’avait dressés Marx et Engels.
Relire le « Capital » aujourd’hui c’est coller à l’analyse des remous de notre société contemporaine et trouver dans cet ouvrage (dont l’édition définitive parachevée par Friedrich Engels il y a près de 150 ans) les mots qui caractérisent des situations subies dans des contextes ou de nouveau la misère fait des progrès constants tandis que le capital détenu par quelques uns s’accroît de manière quasi exponentielle.
La logique capitaliste va vers la concentration et trouve son apogée dans la mondialisation par la participation imposée de tous les peuples comme acteurs du marché universel.
La misère s’étend avec la dégradation des conditions d’existence dans tous les aspects de la vie, une « involution » à laquelle tendent de répondre ces formes inédites de résistance.
La théorie du ruissellement ne se vérifie que de manière exceptionnelle, c’est en fait l’exception qui confirme la règle qui veut que l’avidité soit le seul moteur qui permette au capitalisme de se perpétuer.
Ainsi par un effet boule de neige les riches sont toujours plus riches tandis que les pauvres glissent toujours davantage dans les profondeurs du déclassement.
Les structures de l’état sont colonisées par l’oligarchie en vue de rendre impossible une véritable alternance : on a vu que quand des têtes se mettaient à dépasser – comme Mélenchon opposant numéro un du début du quinquennat de Macron – tout était fait pour les rabaisser.
Ce dernier a commis, lui-même, l’erreur de ne pas contrôler son tempérament en signant des débordements de langage qui vont le poursuivre tout au long de sa fin de carrière.
L’orateur de talent, le tribun admirable, le programme de la France Insoumise qui était un des meilleurs et des mieux structurés, tout cela a été balayé du moins provisoirement par le coup de sang de son promoteur le plus populaire.
Cette perte de contrôle du leader de la France Insoumise a ainsi permis d’occulter ce qu’il y avait de fondamentalement inique dans la saisie des fichiers d’une organisation politique qui n’était pas une structure terroriste.
Aussi bien médias de toute nature, associés à l’establishment ont-ils décrété que désormais il fallait à tout prix polariser la société entre deux pôles, celui qui est rationnel, sensé et dont la loi est dure mais nécessaire et celui dont la déraison est l’art de fonctionner, à savoir d’un côté le ou les partis macronistes et de l’autre l’héritier du FN, le Rassemblement National, que personne ne peut raisonnablement imaginer gouverner sinon pour conduire le pays dans les tréfonds de la décadence.
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