Les handicapés, oubliés des drames du confinement et le « validisme »
Les handicapés, oubliés des drames du confinement et le « validisme »
« Aide-toi et le ciel t’aidera »
Fin mars 2020, nous nous indignions des mesures terribles infligées à nos ainés en EHPAD et aussi à domicile, tel le décret du 26 mars[1] refusant le transfert en hôpital en cas de pneumopathie ou autre pathologie, doublé d’une interdiction de traitement précoce par chloroquine et/ou antibiotiques et l’injonction d’injecter du Rivotril en cas d’aggravation entrainant une mort plus ou moins rapide. L’horreur de ce décret signé par le premier ministre et le ministre de la santé complétait l’interdiction de visites pour ces vieillards auxquels le ministre interdisait tout soin actif, l’absence totale d’accompagnement familial pendant ces derniers moments, le refus de montrer les corps à la famille et même qu’elle puisse les accompagner au cimetière. Ceci fut particulièrement mal vécu par des aides-soignantes attachées à ces résidents. Elles racontèrent au fil des mois leur souffrance de voir leurs patients abandonnés sur ordre ministériel et beaucoup déserteront une profession où les autorités les ont transitoirement transformées en bourreaux.
La sidération qui avait envahi la population, brutalement enfermée, et soumise au lavage de cerveau télévisuel quotidien, expliqua probablement son silence et sa soumission. Et aussi la résignation des ainés enfermés dont certains auraient pu se sauver tout simplement, ils n’étaient ni en prison, ni en camp de concentration. Et l’absence de révolte des familles acceptant l’inacceptable, invraisemblable encore quelques jours plutôt est tout aussi mystérieuse.
On a beaucoup parlé de l’incompétence des responsables du gouvernement, mais concernant la mise en condition du peuple, ce furent des gourous exceptionnellement efficaces, au point que certains citoyens ne veulent plus sortir de leur cabane[2], malgré la fin de l’épidémie et la fin officielle du confinement.
Les ainés furent sacrifiés, et avec le recul, nous mesurons l’ampleur du désastre[3]. Le réveil sur ce génocide organisé[4] commence à se faire, avec de nombreuses plaintes personnelles ou collectives pour non-assistance à personne en danger, mise en danger de la vie d’autrui et d’autres allant plus loin, crime contre les vieux, voire crime contre l’humanité.[5]
Les handicapés, sacrifiés invisibles
Si quelques rares tweets évoquaient, de temps à autre, le sort des handicapés, les témoignages et articles dans la presse manquèrent encore plus. Silence, on maltraite.[6] Le 10 avril parut un communiqué « intercollectifs », intitulé « validisme et Covid19 ». C’est là que nous découvrîmes que cette horrible notion de validisme qui nous rappelait les années de la montée du nazisme en Allemagne, avait une application réelle en France, en ce 21ième siècle. L’horreur, tout simplement ; l’horreur déjà insupportable pour nos ainés se renforçait par celle touchant les handicapés. Jusqu’où cette crise soi-disant sanitaire allait-elle nous conduire dans la négation de notre humanité ?
Ce communiqué trop peu partagé émanait de : CLE Autistes, CLHEE, Handi-social, Les Dévalideuses. Le début du communiqué commençait par un concept imposé par nos gouvernants, l’absence de lits qui aurait justifié la nécessité de « trier » qui on traite ou pas. Comme nous avons eu l’occasion de dire, ce manque de lits fut un prétexte, une mise en scène car le plan blanc décrété début mars par le premier ministre avait vidé les services publics et privés de tout malade non Covid19. Avec interdiction de prendre en charge d’autres malades que les urgences, celles-ci devant être reconnues comme urgences par les agences régionales de santé ! Dans leur quasi-totalité les cliniques privées vidées depuis cette date le restèrent et le sont encore, les ARS refusant de leur transférer des patients ; en public, idem.
« Les profits ont été favorisés au détriment des vies humaines, ce qui conduit dans un contexte pandémique à un triage des individus dans l’accès aux soins. Les idéologies validistes et eugénistes qui sous-tendent la société trouvent alors un essor sans précédent et se dévoilent au grand jour sans aucune limite. »
Ce communiqué apparut sur tweeter grâce au Dr Gonzo, et la dénonciation de théories validistes et eugénistes habituelles nous paralysèrent. Certes en pédiatrie néonatale, nous avions eu connaissance, depuis une trentaine d’années, d’avortements « décidés trop facilement » pour de petites anomalies, facilement curables, [7] mais énoncer à froid la théorie eugéniste et l’appliquer de manière routinière prêtait à réfléchir.
Des tris chez les ainés et dans les établissements accueillant des handicapés
Même si le gouvernement l’a nié, les tris ont été effectifs et anticipés. Les circulaires et fiches adressées aux médecins et directions le prouvent.
« Le mardi 17 mars 2020, un texte est remis à la Direction générale de la Santé qui doit aider les médecins à faire des choix en cas de saturation des lits de réanimation pour les malades du coronavirus ». Et on commence à parler de « morts plus acceptables que d’autres » et de « tri nécessaire ».
« Un score de fragilité est mis en place qui classe les patients et patientes en s’appuyant sur leur état de santé avant le Covid19. La dépendance dans les actes de la vie quotidienne est un élément majeur de refus en réanimation, tout comme les cas de démence. »
Les normes validistes, privilégient les personnes aptes à vendre leur force de travail. On s’étonne ensuite et on se révolte d’apprendre que des personnes handicapées à domicile ayant des algies de la face se voient retirer leurs bouteilles d’oxygène pour les éventuels malades du Covid.
« L’égale considération de toutes les vies humaines indépendamment de toute considération associée aux personnes » est bafouée et niée par les politiques et le défenseur des droits interpellé à plusieurs reprises par les associations. Nous avions connu pareille expérience en 1996 à l’hôpital parisien R Debré aujourd’hui en grève, (mais bien trop tard), la directrice nous demandant de fermer les lits de cancérologie pour caser les enfants atteints de bronchiolite. Les cancéreux rejetés, le patron avait rétorqué : « nous n’allons tout de même pas nous jeter nos morts à la figure ». La logique était la même, déjà en 1996. Qui a le droit de vivre ?
Les manques, de personnels, d’équipement permettant de lutter contre la transmission du virus (masques, visières, charlottes, blouses, sur-chaussures, comme dans les EHPADs et de nombreux hôpitaux), de place pour isoler les infectés constituèrent le quotidien des structures prenant en charge les handicapés. Et comme le pouvoir interdisait de traiter les malades, ou de les transférer dans des établissements de quarantaine (les interdits d’hôpitaux aurait pu être mis en quarantaine dans les hôtels qui étaient vides), la peur prit le dessus et on infligea le pire à ces personnes, l’absence de visites, la diminution drastique de leur prise en charge par disparition sur ordre, de leurs intervenants.
Le communiqué poursuit en ce 10 avril :
« Souvent confinées dans leurs chambres, privées de tous contacts avec leurs proches et de tout moyen de communication alternatif tels que ceux déployés dans les institutions pénitentiaires, les personnes handicapées se retrouvent dans une situation de grande détresse psychique et de danger physique, livrées à toute sorte d’abus potentiels, dans des institutions opaques qui échappent à tout contrôle indépendant. En situation de crise, elle se trouvent à présent privées de leur droit à la liberté à l’accès aux soins, à la dignité, à la vie. Les institutions se révèlent être un piège épidémiologique ».
La violence de la situation décrite dans ce paragraphe aurait dû alerter et entrainer des réactions médiatiques majeures. Mais rien, silence dans les médias, on hiberne et les vieux et les handicapés peuvent mourir dans l’indifférence et la maltraitance générale ; je respecte le confinement et mon cerveau aussi.
Les témoignages de maltraitance, d’automutilations, de suicide par anorexie majeure, de cris continus, n’ont réveillé personne. Les protocoles de soins seront abandonnés de fait, malgré le déni du pouvoir. Pourtant les documents émanant des agences régionales de santé sont les preuves écrites de ce tri imposé dans ces établissements.
Incroyable perversion du pouvoir
Le Conseil d’Etat saisi par CLE Autistes le 28 mars, contestant la légalité de ces décisions par rapport à la Convention européenne des droits de l’homme et de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, a rejeté la requête en justifiant la supériorité des droits des directeurs d’établissements, plutôt que les droits des personnes handicapées.
L’assistance personnelle à domicile, seul moyen pour les personnes handicapées de vivre de manière autonome a subi le même désintérêt de la part du gouvernement. Aucune mesure n’a été prise pour soutenir les salariés, aucune protection (masques, gants, visières, charlottes, blouses, sur-chaussures...) ne leur a été spécifiquement dédiée, leur laissant les « restes » des stocks déjà insuffisants distribués aux pharmacies ».
Le confinement délétère, policier, sans adaptation à chaque cas
Chaque personne est unique, chacun est différent. Quelle folie, à moins que cela ne soit une perversion volontaire et organisée, a pris les autorités pour interdire les visites de leurs proches aux personnes fragiles, âgées, handicapées, qui ont beaucoup plus risqué de l’isolement que du Covid19.
Résultat, nous l’avons vu, des suicides, des conduites alimentaires perverties.
Un exemple tragique : « Elwood avait 31 ans. Il adorait la musique, le métal. Le 31 mai dernier à Trégueux dans les Côtes d’Armor, sur un parking près d’un conteneur à poubelles, il s’est aspergé d’un liquide inflammable et de gel hydroalcoolique. Elwood s’est immolé par le feu sur son fauteuil roulant électrique, à moins d’un kilomètre de l’appartement où il vivait, seul. »
« Malgré la présence des auxiliaires de vie, le confinement a été une période très difficile à vivre pour lui, c’était trop lourd, trop de pression", poursuit sa mère. Au téléphone, il me disait, j’en ai marre, on ne peut pas se voir, on ne peut pas sortir. »[8]
Ces mesures policières appliquées à tous sont le contraire de la médecine et je doute qu’un vrai médecin ait pu croire que ces privations de liberté éviteraient des malades et « sauveraient des vies » selon la formule publicitaire de la secte régnante. Brutalement les visites familiales, bénévoles et professionnelles s’arrêtent et les personnes handicapées comme les ainés se retrouvent seuls, isolés, abandonnés, déprimés. Qui ose prétendre les protéger d’un virus et les condamner à la prison au mitard, sans visite.
Pour les plus jeunes, les instituts ferment
Pour les plus jeunes, les instituts ferment carrément et les enfants expédiés dans leur famille, pas forcément organisée pour les recevoir. Improvisation à tous les niveaux au nom de la prévention. Imposture !
Brutalement des instituts fermés avec comme exemple les enfants handicapés hébergés en Belgique : « Les aidants familiaux, comme les parents, à qui l’on a demandé du jour au lendemain de reprendre à domicile leur enfant, ou pour certains un frère ou une sœur, avec une perspective de 15 jours de confinement, n’avaient déjà pas eu le temps de s’organiser. Mais après quatre semaines avec une perspective de 15 à 30 jours supplémentaires, sans aide technique, sans aide humaine extérieure, sans consommable lié au handicap et sans possibilité de se fournir dans des délais raisonnables…. C’est l’implosion qui guette certaines familles. Près de 700 enfants lourdement handicapés hébergés en Belgique ont rejoint un domicile familial non adapté et non préparé. Doit-on encore creuser le sujet ?!!! »[9]
On a abandonné depuis des années les handicapés aux mains d’associations, composées souvent de bénévoles souvent âgés de plus de 70 ans et brutalement on les confine ! « L’improvisation a mis en lumière la faiblesse de nos administrations en termes d’organisation de notre société dans le secteur du handicap, lequel reste grandement sous la tutelle du ministère de la Santé.
Du jour au lendemain, nombre de services ont fermé, et on a dit à cette population vulnérable et à leurs proches : « Aide-toi et le ciel t’aidera ».
Rien, pas même une épidémie plus grave ne justifiait la fermeture brutale de services administratifs.
Alors on a pu lire des récits terribles et émouvants à la fois :
« Ça a été parfois difficile, voire très difficile. On a trébuché, on a failli parfois sombrer. On a aussi découvert en nous des réserves de patience et d’amour. On a découvert nos enfants, leurs capacités qu’on avait un peu oubliées, mais la réalité brute de leur handicap aussi. On était doublement confinés, confinés dans notre appartement et confinés dans le handicap !
On était englués dans la routine. On était obsédés par la peur de tomber malade et de ne pas pouvoir s’en occuper. La vie qui nous portait s’est parfois étiolée, la source qui nous alimentait a parfois failli se tarir, mais on a tenu, et la vie est revenue. »[10]
Le confinement fut une épreuve terrible pour les handicapés et leurs familles, leurs intervenants. Il faudra dresser le bilan humain catastrophique de cette perte brutale de soins et d’accompagnement.
[2] Le journal El Pays a décrit la fréquence du “sindrome de la cabana” syndrome de la cabane qui a été très largement observé en Espagne au moment du déconfinement et qui traduit la peur de sortir après avoir été longtemps enfermé
[3] On peut évaluer à près de 50000 français le nombre des victimes du mode de gestion de crise adopté par le gouvernement : 20000 à 25000 morts évitables du Covid19 si on avait adopté une attitude à l’allemande (quinzaine des infectés, dépistage), et continuer de traiter les plus âgés au lieu de leur refuser les hôpitaux et les soins. Plus 25000 à 30000 victimes directes de l’arrêt des soins des maladies chroniques (cancer, cardiopathies), et du retard du diagnostic et de traitement des maladies qui auraient pu être diagnostiquées si le plan blanc n’avait pas interdit les activité chirurgicales (parmi les 90000 cancers, dizaine de milliers de coronaropathies, accidents vasculaires cérébraux.)
[4] Denis G. Rancour All-cause mortality during COVID-19 : No plague and a likely signature of mass homicide by government response (https://www.researchgate.net/profile/D_Rancourt)
[5] Plaintecovid.fr et association des victimes du Covid et [email protected]
[7] Comme une petite communication interauriculaire par exemple. Le bébé parfait doit naitre, rien que le bébé parfait.
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