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Accueil du site > Tribune Libre > Lettre au père Noël asymptomatique

Lettre au père Noël asymptomatique

Très cher père Noël, ne te fie pas aux apparences.

Tu pourrais avoir l’impression que nous n’avons pas bien travaillé cette année, en témoigne la chute ahurissante de nos PIB et le nombre hallucinant de personnes planquées à la maison. Tu pourrais te dire qu’un si faible engagement de notre part dans l’œuvre collective ne mérite pas ta considération, et que nous pouvons faire une croix sur la liste de cadeaux que nous t’avons adressée. Pourtant, c’est tout le contraire. Si nous avons si peu œuvré, c’était à l’insu de notre plein gré comme dirait l’autre. On appelle cela le confinement. Et tous ces gens masqués n’étaient pas en train de faire la fête, ou de cacher leur honte de ne pas avoir bien travaillé. Ils étaient juste en train de faire ce qu’on leur demande. 

En fait, bien au contraire, nous avons très bien travaillé. Beaucoup ont dû sacrifier des lendemains qui chantent pour rester confinés dans un présent à durée indéterminée. Et là nous parlons des plus chanceux, car d’autres ont payé un lourd tribut à la cause nationale : fermeture jusqu’à nouvel ordre, circulez il n’y a rien à voir. Qui aurait cru que ne plus rien faire pouvait constituer un acte aussi exigeant. Il faut aussi dire un mot des jeunes qui se voient priés de rester jeunes, puisque l’avenir n’a pas de place pour leur faire des rides. Vraisemblablement, cet instant singulier que nous vivons produira quelques stigmates : « Il avait plus de cheveux blancs que de cheveux », Jules Renard. Quant à ceux qui ont perdu leur emploi ou qui n’en avaient déjà pas : l’anonymat conjugué au confiné n’est malheureusement pas une tautologie, il produit bel et bien un double effet, comme s’il était possible de rendre l’invisible encore plus invisible.

Ainsi donc, oui père Noël nous avons bien travaillé, et nos politiques aussi d’ailleurs. On pourra reprocher beaucoup de choses à l’autorité bienpensante, mais pas son agitation sympathique : elle propose, tente, explique, se défend, s’énerve, se muscle… mais elle ne reste pas tétanisée par l’évènement. Il est vrai que c’est un peu ce qu’on lui demande. D’ailleurs, tu devrais te méfier père Noël, car il se dit en coulisses que ces politiques pourraient te faire concurrence : leur hotte n’aurait rien envier à la tienne, elle serait même sans fond dit – on ! Plonges-y tes mitaines, et tu y trouveras deux objets qui volent la vedette à tous les autres : de la dette et de la monnaie, désormais indistinguables l’une de l’autre, telle une belle paire de chaussette.

L’investisseur a fait tombé le masque

Nous comptons donc sur toi père Noël, surtout les marchés financiers d’ailleurs. Il faut dire qu’un vaccin sous le sapin, ca en a fait jaser plus d’un. Depuis l’annonce de résultats d’une efficacité à peine jugée suspecte, les marchés ne jurent que par l’arrivée prochaine de la potion magique. Et miracle de la finance, il suffit de parler de vaccin pour être vacciné : déjà plus de + 15 % pour les marchés d’actions de la zone euro, et même + 20 % pour le marché français. L’investisseur a donc fait tomber le masque, dé-confinant un présent trop absent pour en faire un futur qui ait un avenir. Pourtant personne n’est dupe, car tout père Noël que tu es, tu ne pourras pas garnir ta hotte de tous ces vaccins pour Noël. Tu as seulement mis en demeure les labos de nous les livrer en cours d’année, sinon ? Sinon, les marchés se rappelleront d’où ils sont partis, et y reviendront aussi vite.

En effet, les marchés sont binaires, c’est leur métier : tout est tout noir ou tout blanc, ca monte ou ca baisse. Et lorsqu’on a que deux choix possibles, on les exacerbe, c’est l’anamorphose financière. Ainsi, les marchés ont-ils surinterprété la bonne nouvelle de vaccins prochains, habillant déjà 2021 d’un retour de la confiance des consommateurs et des entreprises capables de gommer le passé : un véritable simulacre des jours heureux enfin retrouvés. Mais non, la théorie du dés-effondrement n’existe pas, on n’inverse pas le cours des évènements en le vaccinant. Ainsi, nos économies sont bien moins cyclothymiques que les marchés. L’agent économique, qu’il soit salarié ou chef d’entreprise, a lui vécu dans le monde du gel hydroalcoolique, du chômage partiel, et des faillites, pas dans le monde de la prime de risque de l’investisseur ou celui des liquidités injectées par les Banques Centrales. L’agent économique sait bien que la hotte du père Noël ne contient jamais tout ce qu’il y a dans la liste qu’on lui a adressée. Il aime bien entendre les bonnes nouvelles comme tout le monde, ca le fait sourire mais pas guérir. Le père Noël fait des cadeaux, pas des miracles.

L’attestation du père Noël

En attendant, prends bien soin de toi. Bon, je ne me fais pas trop de soucis pour ta santé. En tant que mythe, tu dois probablement bénéficier des mêmes privilèges que les divinités ou les extraterrestres, une immunité parfaite aux maux du genre Humain. Certes, tu as l’apparence du commun des mortels, mais tu serais plutôt du genre Pollux que Castor. Par construction, tu es forcément asymptomatique. En effet, comment imaginer un père Noël en réanimation le jour de Noël, ce serait presque un oxymore. Non, le père Noël est toujours là le jour J, puisqu’on l’a inventé pour ça ; il est toujours là, partout et nulle part à la fois puisqu’on ne le voit jamais, ubique et nusquam.

Tu es donc hors de dangers. Hélas ton immunité parfaite nous le fait payer cher. En effet en tant que père Noël, tu es ce que l’on appelle LE super-contaminateur puisqu’en une seule nuit tu vas rendre visite à un nombre considérable de foyers. Certes, tu ne croiseras personne si ce n’est les petits malins qui tentent de te coincer sur le fait. Mais quand même, il ne faudrait pas que tu laisses trainer tes mitaines. D’ailleurs, ne nous en veux pas si on ne te laisse pas le traditionnel verre de lait, on ne sait jamais. Et puis viens masqué, la barbe ne suffira pas.

Bon, et puis Covid ou pas, d’autres dangers te guettent. Rappelle - toi qu’il n’existe pas d’attestation spéciale pour le père Noël, toi aussi tu devras verser 135 euros au-delà d’une heure. Rappelle toi aussi que tu l’as échappé belle puisque tu as failli être qualifié de « non – essentiel » : tu aurais pu toi aussi te retrouver en chômage partiel, voire confiné au chalet. Quand même un comble, alors que la venue du père Noël est considérée comme un droit imprescriptible du genre enfant. Comment imaginer que tu ne sois pas là le seul jour où l’on t’attend. Et pas là peine de venir plus tard, toute intervention sera jugée forclose. Remarque, ton confinement aurait été une bonne occasion de clouer le bec à tous ceux qui ne t’imaginent qu’hypostasié. En effet, quelle meilleure preuve de ton existence que celle de ton absence : c’est lorsque l’alarme ne sonne plus, que l’on sait qu’il y a un rodeur.


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4 réactions à cet article    


  • LeMerou 29 novembre 2020 08:57

    Cette année, le Père Noël passera dans toutes les chaumières récompenser les ch’tites n’enfants. Il sera masqué bien sur, ainsi que ses rennes. Sait-t-on jamais, ce C19, circulant de la chauve souris, vers le pangolin, puis fort récemment aux visons, infectant 1 chat sur terre (d’après les médias)..Donc pourquoi pas les rennes....

    Mon dieu....


    • Rinbeau Rinbeau 29 novembre 2020 11:39

      CHANT DE NOEL


      PETIT MACRON ROTHSCHILD

       

       C’est la belle nuit de Noël,

      La neige étend son blanc manteau

      Et les yeux levés vers le ciel,

      A genoux les petits prolos,

      Avant de sauter les taulières

      Font une dernière prière.

       

      Petit macron Rothschild,

      Quand tu descendras du ciel,

      Avec des milliards par milliers,

      N’oublie pas mon petit billet.

      Mais avant de partir,

      Il faudra te repentir

      Dehors, si les chômeurs ont froid

      C’est un peu à cause de toi.

       

      Il me tarde tant que le jour se lève

      Pour voir si tu m’as apporté

      Tous les beaux boulots que je vois en rêve

      Et que je t’ai commandés.

       

      Petit Macron Rothschild,

      Quand tu descendras du ciel,

      Avec des ordonnances par milliers,

      N’oublie pas de les oublier.

       

      Le marchand de sable est passé,

      Les prolos vont faire dodo,

      Et tu vas pouvoir commencer,

      Avec ton coffre sur le dos

      Au son des cloches des églises,

      Ta distribution de surprises.

       


       

       

       

       

       


      • Rinbeau Rinbeau 29 novembre 2020 11:39

        SUITE


        Petit Macron Rothschild,

        Quand
        tu descendras du ciel,

        Avec des milliards par milliers,

        N’oublie pas mon petit billet.

        Si tu dois t’arrêter,

        Sur les toits du monde entier

        Tout ça avant demain matin,

        Mets-toi vite en marche, en chemin.

         

        Et quand tu seras sur ton beau nuage,

        Et que tu cherches ma maison

        Je n’ai pas été tous les jours bien sage,

        J’habite un bien petit carton.

         

        Petit macron Rothschild,

        Quand tu descendras du ciel,

        Avec des milliards par milliers,

        N’oublie pas mon petit billet.

         

        Petit Macron Rothschild.


        • I.A. 1er décembre 2020 15:45

          C’est plutôt superbe, comme texte, en plus d’être de saison.

          Bon, nous savons quand même qu’il risque d’avoir un petit coup de mou, le Père Noël, vu l’avenir incertain... 

          Avec le masque, peut-être cela ne se verra t-il pas ? 

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