Marine Le Pen est-elle raciste ou sommes-nous tous racistes ?
Le matin du 20 Avril avant le débat E. Macron-Marine Le Pen, le Dauphiné libéré m’apprend qu’une majorité de Français considère que Marine Le Pen est « raciste ».
Pourquoi pas ? Mais une autre question se pose : une majorité de Français, y compris chez ceux qui considèrent la candidate RN comme raciste, n’est-elle-pas aussi « raciste » ? Tout dépend de ce que l’on entend par raciste.
Ainsi, un agent immobilier me disait que quand dans un quartier en France, le pourcentage d’habitants venant d’Afrique dépassait les 20 ou 25%, les prix de l’immobilier se mettaient à décliner rapidement. Cela est vrai selon lui de Dunkerque à Perpignan et de Brest à Colmar. Dans ces quartiers où le taux d’enfants d’immigrés en primaire dépasse parfois les 40%, on voit un nombre grandissant de Français chercher à déménager pour des raisons de scolarité de leurs enfants.
La raison souvent invoquée est qu’ils cherchent un endroit plus calme, plus propre, un appartement plus ensoleillé, la proximité d’une « bonne » école pour leurs enfants. Bien sûr, s’ils disaient ouvertement que c’est parce qu’il y a trop d'immigrés, de noirs et d’arabes, ils passeraient pour d’affreux racistes et risqueraient même une sanction suite à une plainte de SOS racisme ou d’une autre organisation de même type, mais exprimé plus gentiment, cela passe comme une lettre à la poste. Ils font preuve d’un savoir vivre qui leur ouvre grand les portes de notre société du politiquement correct qui est le nôtre. Au final, le raciste, c’est toujours l’autre, nous, nous sommes tolérants et respectueux.
En fait, comme je l’ai souligné dans d’autres articles, le problème n’est pas un problème de race, de couleur de peau mais de culture, de mode de vie, de systèmes de valeurs, de religion etc.. Cela me rappelle la réaction d’une professeure de biologie à un conseil de classe suite à une bataille dans la cour d’un collège de la banlieue parisienne entre enfants d’immigrants noirs et nord africains. « Comment peuvent-ils encore être racistes alors qu’on leur a bien expliqué en cours de biologie que tous les hommes sont génétiquement semblables ? » déclarait-elle devant les autres professeurs et le représentant des parents d'éklèves. La réponse est simple, c’est qu’il ne s’agit pas de génétique mais de culture. Entre autres, ce n’est certainement pas la génétique qui explique les tensions entre palestiniens et juifs et cette professeure qui se croyait intelligente faisait simplement preuve d’un certain aveuglement.
Dans certains quartiers autour d’institutions internationales, comme l’Unesco, les diplomates ou fonctionnaires en poste qu’ils soient noirs, arables ou asiatiques, ne posent pas plus de problème que les autres habitants, ils payent bien leur loyer ou achètent des appartements au prix du marché ou même font monter les prix déjà élevés de l’immobilier.
En fait, ces tensions et problèmes autour du racisme ou de l’immigration ne sont pas particuliers à la France, on les retrouve ailleurs en Europe, aux Etats-Unis, en Asie ou dans les pays du golfe avec de nombreux pays où la situation des immigrés est plus dure qu'en France. On pourrait en conclure que le monde entier est raciste. Mais il s’agit là d’une ambigüité autour du terme raciste entretenue et exploitée politiquement. Dans tout pays, les gens en général aiment leur pays, leurs traditions, leur culture mais en majorité, ils ne pensent pas pour autant appartenir à une race supérieure ni ne veulent l’asservissement ou l’élimination des autres races.
Par contre si l’on regarde l’histoire de guerres de l’humanité, on peut dire que dans bien des cas, les conflits sont à l’origine des conflits de cultures ou de religions, les cultures comportant un noyau religieux qui détermine leur façon de concevoir le monde.
Ainsi, l’Europe a été marquée par un conflit de fond sur plus de mille ans entre l’Islam et le Christianisme. Ce conflit a commencé avec le Jihad islamique en Afrique du Nord puis en Espagne, lequel a suscité la Reconquista (reconquête) chrétienne espagnole jusqu’à la fin du 15ème siècle (1492 avec la prise de Grenade). A l’Est de l’Europe, on a eu le même type de conflit avec la conquête de l’empire byzantin par les musulmans Ottomans, celle de grandes parties de la Russie par les invasions tataro-mongoles et la réaction des orthodoxes chrétiens avec Ivan 3 et ses successeurs dont Ivan le terrible. De même en Méditerranée, la Sainte Ligue catholique a mis fin à l’expansionnisme ottoman lors de la bataille de Lépante (1571), et les incursions et attaques des pirates barbaresques contre les pays chrétiens seront une raison donnée à l’occupation d’une portion de l’Afrique du Nord à partir du port d’Alger par les Français.
Il s’agit là d’un conflit multiforme entre Chrétiens (catholiques et orthodoxes) et musulmans mais à l’intérieur de ces grandes religions, il y a d’autres conflits entre divers sous-groupes religieux, musulmans comme chrétiens. Ainsi l’Europe à partir du 16ème siècle sera marquée par les tensions et les conflits entre protestants et catholiques avec la guerre de trente ans au cours de laquelle autour d'un tiers de la population d'Allemagne périra, guerre s’achevant avec les traités de Westphalie en 1648, la compétition navale entre l’Espagne (l’Invincible Armada) et l’Angleterre puis entre la France et l’Angleterre du 16ème au 19ème siècle se terminant avec la défaite de Trafalgar et une compétition économique et culturelle entre ces différents pays qui a finalement débouché sur la première guerre mondiale suivi par un traité de Versailles qui, selon de nombreux historiens, a jeté les semences de la deuxième guerre mondiale.
On pourrait penser qu’il s’agit là de conflits du passé, que nos ancêtres étaient des racistes intolérants tandis que nous vivons dans une nouvelle ère où règnent les droits de l’homme, la tolérance et l’antiracisme. C’est aller un peu vite en besogne. Ainsi les discours de V Poutine nous rappellent que la dimension culturelle des conflits n’est pas simplement une chose du passé qui aurait disparu. Dans son discours du 22 mars, il en appelle à la préservation des valeurs et traditions nationales et dénonce la politique de puissance des Etats-Unis face à la Russie avec le non respect de la promesse de non extension faite à M Gorbatchev de non extension de l’Otan dans les anciens pays du pacte de Varsovie. Dans un discours plus ancien de 2014, à l'époque des accords de Minsk, il blâme les pays euro-atlantiques pour « le rejet de leurs racines dont les valeurs chrétiennes qui constituent la base de la civilisation occidentale », et pour « renier les principes moraux et leur identité traditionnelle : nationale, culturelle, religieuse et même sexuelle ». Ce ton adopté par Poutine est une façon de situer à tort ou à raison la guerre en Ukraine dans la lignée des conflits du passé avec leur dimension civilisationnelle, culturelle et même religieuse.
Finalement, la guerre en Ukraine devrait nous rappeller que l’on ne va pas résoudre tous les problèmes du monde avec le prisme du « camp du bien » démocratique respectant les droits fondamentaux (vu par V Poutine comme « l’Empire du mensonge ») contre « camp du mal », ce dernier ayant Poutine comme dernière réincarnation d’Hitler, un "criminel de guerre" qui "pour l'amour de Dieu ne peut rester président" et dont il faut se débarrasser au plus vite selon Joe Biden, propos qui il est vrai ont été retirés le jour même par un porte-parole de la Maison Blanche. Ce rôle de nouvel Hitler, point Godwin de la diplomatie internationale, a déjà été pris avant Poutine par Milosevic, Assad, Kadhafi, Saddam Hussein etc., mais on ne pourra se débarasser aussi facilement du président russe, chef d'une grande puissance nucléaire membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, comme de ses prédecesseurs avec quelques bombardements massifs ou "frappes chirurgicales" comme en Serbie, en Lybie ou en Irak, d'autant plus qu'une autre grande puissance, aussi membre permanent au conseil de sécurité de l'ONU, la Chine, a déclaré par la voix de la porte-parole de son ministère des Affaires Etrangères que "Les Etats-Unis ont-ils jamais pensé aux conséquences de la mise au pied du mur d'un grand pays (la Russie au pied du mur" . En effet, les expériences du passé montrent que cette approche de non dialogue engendre souvent plus de difficultés qu’elle n’en résout. Il ne s’agit pas de prendre parti pour un camp ou un autre mais de ne pas nier les enjeux culturels, religieux, historiques, politiques, économiques et militaires de ce conflit.
D'une façon semblable, pour revenir au début de cet article, après des décennies d’accusations de racisme à l’encontre du FN puis de son successeur le RN, de « théâtre antifasciste » pour reprendre l'expression de Lionel Jospin en 2007 sur France culture, il est temps de passer à autre chose et de discuter sur le fond des problèmes auxquels sont confrontés les Français et des solutions à apporter.
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