Non ! Les Palestiniens ne peuvent pas marcher sur l’eau !
Ou pourquoi une partie de la gauche française s’attaque-t-elle à la laïcité républicaine ?
Il n'y a pas si longtemps, un éditorial de Jean Daniel dans le Nouvel Observateur, "Dieu partout", offrait une bonne occasion de s’interroger sur un phénomène rarement évoqué mais assez inquiétant.
Pourquoi la gauche semble-t-elle s’attaquer de façon assez systématique à notre pacte républicain et laïc au mépris de la loi de 1905, de notre constitution et de la déclaration des droits de l’homme ?
http://tempsreel.nouvelobs.com/actu...
Morceau choisis pour ceux qui auraient la flemme d’ouvrir le site.
Jean Daniel
« Le principe de la laïcité est d’empêcher toute espèce de domination de la religion sur l’Etat et toute confusion entre la religion et la politique."
"Opposer la diversité et la démocratie, la diversité ne peut être composée que d’éléments acceptant la démocratie."
"Nous ne pouvons accepter au sein de notre communauté que les individus ou à la rigueur des communautés qui rejoignent les principes fondamentaux de notre constitution »
Retour historique
Au moment de la rédaction des droits de l’homme, le fils du Pasteur Rabaud Saint Etienne a vainement tenté d’éviter la rédaction « pour ses opinions, même religieuse » prévenant qu’avec ces mots, on mettait l’intolérance au cœur du texte.
Deux poids deux mesure, la religion considérée comme à l’extrême limite du provisoirement tolérable, en tous cas, pas une opinion comme une autre ?
Peu de choses ont changées dans ce débat.
La laïcité française dans sa traduction juridique est a l'origine, largement d’inspiration protestante.
Elle est à double sens, conformément aux idées de Locke.
Protéger l’Etat contre l’emprise religieuse, mais peut être surtout protéger le croyant contre l’Etat notamment parce que l’Angleterre, comme tous pays protestant était un pays de diversité religieuse sans que cela l’empêche d’être démocratique contrairement aux idées assez césaro papistes de Jean Daniel.
En accord avec Jean Daniel, Locke considère à l’époque que l’église catholique mérite un traitement particulier puisqu’elle se veut l’unique détentrice de la vérité et affirme sa volonté d’hégémonie. Dont acte.
« la diversité ne peut être composée que d’éléments acceptant la démocratie »
1905, c’est l’acceptation par l’église catholique de cette perspective.
Notre laïcité est largement fondée sur le texte de 1905 et sur la déclaration universelle des droits de l’homme.
La loi de 1905 sépare l’Etat de l’église, mais impose également un devoir pour l’Etat de garantir les possibilités d’expression publique des églises (aumôneries, service public de l’audiovisuel en sont des applications)
La DUDH, Art 18 Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites.
On voit bien que Jean Daniel en donne une interprétation erronée mais pas neutre et qu’il prend soin d’éviter de rappeler que la laïcité s’est aussi l’absence d’influence de l’état sur le religieux, sans être nécessairement l’absence de lien entre politique et religieux.
Surtout et encore une fois, la laïcité à la française, républicaine ne consiste en aucun cas à refouler le religieux dans la sphère privée.
Mais aujourd’hui, de quoi parle-t-on concrètement ?
Le rapport 3057 enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 12 décembre 2006, fait l’état des cas réels, relevés, de dérives sectaires en France par Ministères et administrations. C’est-à-dire des cas ou des comportements de type religieux auraient transgressés les lois de la République.
Résultat ? Entre zéro et quelques dizaines de cas suivant les administrations. Un bon exemple, le voile, en gros 10 exclusions de filles par ans depuis 10 ans dont 5 réintégrées. La non scolarisation ? Zéro cas sur trois ans...
Voir aussi http://www.agoravox.fr/article.php3...
Il n’y a pas, en pratique, de mise en danger de la laïcité statistiquement observable, de la part des religions dans la société française.
Bon, il y les Islamistes, les vrais, les durs, ceux qui exigent de femmes médecins, et des voiles à l’école. D’après les RG un bon millier de « barbus » militants, entourés de quelques sympathisants et les fameuses 5 filles exclues.
Qu’est ce qu’on en parle ! Plus en tous cas que des 38 000 enfants handicapés non accueillis par l’éducation nationale. On y reviendra, ce n’est pas par hasard. 5 filles voilées permettent surtout de rappeler qu’il est peu vraisemblable que Jésus Christ ait marché sur l’eau, si tant est qu’il ait existé, ce qui est le véritable enjeu.
En revanche les cas de transgression de la laïcité « administratives » ou de « gauche »se multiplient.
Dans les discours :
Qui ne remarquerait le caractère récurrent de l’affirmation antirépublicaine et anti laïque , au sens de nos lois laïques, que la religion doit être reléguée dans l’espace privé.
Jean Daniel ne dit pas autre chose, quand il parle de confusion entre politique et religion. Certes l’état ne reconnait aucun culte. Mais cela ne veut pas dire par exemple qu’un parti catholique serait illégitime dés lors qu’au pouvoir il s’en tiendrait à un strict respect des lois laïques.
Ou alors, il faudrait deviner l’horizon d’une conception élargie de la laïcité de gauche. En politique comme en religion, vous pouvez démocratiquement penser autrement que nous mais il serait préférable que cela ne sorte pas de la sphère du privé....
Dans les pratiques :
Et là la liste est sans fin. On consultera avec profit la jurisprudence administrative et les sites ou les protestants en recensent quelques uns.
Mais ce sont des discours et par définition non neutres dira-t-on. Les comportements concrets des intéressés confirment l’existence du problème.
Les églises évangéliques sont soucieuses d’indépendance. Pourtant elles sont en train d’adhérer en masse à toutes les structures plus ou moins officiellement reconnues par l’état à un titre ou à un autre ? Pourquoi ? Pour « cesser d’être en but à des persécutions administratives ».
Les scouts d’Europe sont des modèles de respect des règlements parce que, réputés catholiques, ils sont beaucoup plus contrôlés que qui que ce soit d’autre, ...
On pourra lire avec profit également le rapport Obin sur « l’école face à l’obscurantisme religieux », riche d’enseignement. A titre d’exemple, il constate que dans le primaire, la question ne vient ni des parents ni des enfants, mais des enseignants qui cherchent assez systématiquement des poux dans la tête des familles qui semblent avoir des pratiques religieuses.
On comprend encore à peu prêt pourquoi des enseignants refusent d’apprendre aux enfants au clair de la lune (pour l’amour de dieu), moins pourquoi ils s’insurgent contre les sapins de noël jugés trop chrétiens, mais en tout état de cause, on atteint des sommet rarement vu même avant 1905. Et surtout, en visant explicitement à éradiquer le religieux de toute expression publique au deux sens du terme, ces comportements sont en contradiction avec les lois laïques.
Enfin Il suffit d’interroger ses propres enfants pour avoir une idée de ce que les enseignants entendent en pratique par l’enseignement du fait religieux à l’école. On est loin de la préconisation de Jules Ferry, tourner 7 fois sa langue dans sa bouche et s’abstenir si on risque par son discours de choquer un enfant par référence à ce qu’il entend dans sa famille.
Bien sur, en général, la justice administrative finit par condamner les administrations. Compte tenu de ses lenteurs et complications, l’effet dissuasif a en général eu le temps de jouer à plein.
L’initiative d’une remise à plat de notre pacte laïque dans un sens restrictif, voir intolérant, vient bien de la gauche.
C’est en 1981 et non en 1905 qu’elle a voulu éradiquer un enseignement catholique pourtant similaire comme jamais au système public.
Ce sont les administrations qui ont voulue une liste de "sectes". Elle fut condamnée par la justice, mais les personnels de la Miviludes avouent benoîtement qu’elle circule sous le manteau car comme il n’existe pas de critères fiables, elle reste leur principal instrument de travail.
Elle transgresse ainsi doublement la laïcité, en labellisant du religieux et en ne respectant pas une décision de justice le lui interdisant.
Ce sont les administrations qui utilisent les ambiguïté des lois de 1905 et 1901 pour s’immiscer dans des questions religieuses. Récemment encore,elles ont contraint L’armée du Salut à des acrobaties juridiques pour distinguer son action sociale de son action de témoignage.
Et tous cela dure depuis un certains temps. A tel point que l’on peut se demander si le débat développé par Nicolas Sarkozy n’est pas plus un discour de réaction qu’une innovation.
Il ne s’agît peut être pas, au fond, de créer une laïcité positive, mais bel et bien de revenir à la pratique de notre laïcité telle qu’elle est définie par les textes et telle qu’elle est dévoyée par une certaine gauche.
Pourquoi cette offensive pratique des milieux de gauche contre notre consensus laïc républicain.
La réponse est partiellement dans l’éditorial de Jean Daniel.
Tous ce qu’il affirme serait bien gentil s’il l’appliquait également hors du champ religieux.
Après tout les alter mondialistes fixent comme condition à « une autre vie possible », la destruction de la société telle qu’elle existe aujourd’hui. On ne sache pas que les différents partis trotskistes adhèrent à la vision constitutionnelle de la république française, et même si le PCF est moribond ses présupposés idéologiques ne sont ni républicains ni démocratiques.
Et à la limite, en contestant aux églises une place dans le débat public qui leur est reconnu par la déclaration des droits de l’homme, on peut se demander si Jean Daniel lui-même ne s’exclue pas de la « communauté » des gens qui rejoignent les principes fondamentaux de notre constitution. (Au moins tels qu’ils existent réellement et non tel qu’il se les imagine).
On reste bien dans la problématique posée par Rabaud Saint Etienne, pourquoi « même religieuse ? »
« Mais pourquoi tant de haine ?! » En matière religieuse, le très fort développement des églises évangéliques, le réveil catholique, ne peuvent cacher que le fait majeur, c’est quand même la baisse régulière du nombre global de pratiquants. Pourquoi alors un tel raidissement face à un danger « peau de chagrin » tant dans la masse, les églises traditionnelles reconnues, que dans les marges, les églises nouvelles qu’elles soient sectaires ou non ?
La gauche se veut composée « d’intelligents ». Qu’elle soit raisonnable, ou scientifique ou les deux, une de ses auto définitions est « d’avoir raison » et de représenter le peuple.
Que constate-t-on. Le petit peuple vote Le Pen. D’une manière générale, toutes les nouvelles formes politiques ou religieuse plus ou moins populaires, évangéliques, islamistes, Le penistes, ont pour caractéristiques de prendre un contrepied systématique et parfois jusqu’a l’absurde des idées généralement prêchées par la gauche. Les éleveurs du middel west, spécialistes de sélections génétiques du bétail vont jusqu’a affirmer que : Non ! L’évolution n’existe pas ! Les frontistes, qui si on en croit Emmanuel Todd sont en pratique en train d’intégrer les migrants musulmans par mariage , que : Si ! ils sont racistes !
En économie, même si elle ne tient pas trop à en parler, la gauche ne peut s’empêcher de douter. « Malgré tout au bout du compte, quoi qu’on en ait, le marché, par ailleurs détestable par définition, semble bien plus efficace que le plan ». Et même Ségolène proclame qu’elle va choquer les militants en leur apprenant qu’ils y sont comme des poissons dans l’eau....
Le "peuple" les exècre de plus en plus et les "élites ultralibérales mondialisées" rigolent avec une condescendance mêlée d’un peu d’inquiétude de ce qui leur reste de pensée économique....
Insupportable !
Pourtant il reste un domaine de certitude.
"On ne peut raisonnablement croire qu’un palestinien ait pu marcher sur l’eau il y a 2000 ans !"
Ici, on retrouve enfin un terrain solide ou la gauche peut se convaincre elle-même de ses supériorités intellectuelles natives. Enfin une certitude ! Une raison raisonnable !
Si les sectes ou même les croyants tous courts n’existaient pas, il faudrait les inventer car ils rassurent la gauche sur elle-même
Et c’est bien ce qui se passe. On va rechercher avec minutie les traces de ces abus religieux. Et comme ils sont rarissimes, on va en inventer, quitte à transgresser nos lois laïques.
« La religion doit rester dans la sphère du privé.... » CQFD et la mention même qu’il existerait ou qu’il a pu exister des religions devient une entorse à la laïcité. Confère la polémique sur les racines chrétiennes de l’Europe.
On a presque le sentiment de se retrouver dans le contexte de la révocation de l’Edit de Nantes. Pourquoi tolérer "l’intolérable" si les protestants n’existent pas ou plus ou ne devraient pas exister tous cela étant un peu pareil...On connait la suite.
Il suffit, mais il faut, faire un tour des blogs autour du thème de la laïcité pour constater qu’on a affaire non seulement à un vocabulaire de combat, mais aussi de provocation.
Tout n’est qu’obscurantisme, massacres, intolérances, crimes, pillage, meurtre, du religieux et des religions.
« Notre président, négligeant les guerres de religion et les parcours souvent criminels de l’Eglise » ( Jean Daniel)
Tous les excès de toutes les sociétés de toutes les époques ou la religion existait comme phénomène social dominant dans le domaine spirituel lui sont porté à charge. On a brulé des sorcières à l’époque ou il y avait des catholiques ! Eglise coupable ! Et peu importe que l’église ait toujours réaffirmé avec force que pour elle, les sorcières ne pouvaient pas exister. Les évêques, le Roi et les seigneurs ne sont pas très chaud pour persécuter les musulmans espagnols qui les servent bien, malgré les exigences d’un peuple stressé, comme l’a montré Braudel. Eglise à nouveau coupable. Les ouvriers parisiens s’indignent qu’avec les Saints, leurs patrons protestants leur suppriment des jours fériés.
Oubliés tout les marxismes et leur lutte des classes ; le caractère contingent des superstructures et puisque le prétexte est religieux, coupable encore.
Les mêmes qui nous ont longtemps doctement expliqué que les idées, idéologies et discours n’était jamais que le paravent d’intérêts bassement matériels découvrent soudainement que si, il est une idée qui elle aurait une réelle réalité intrinsèque et nuisible
On hésite entre les qualificatifs, incitation à la haine, révisionnisme ? Ou tous simplement contradiction dans la pensée ?
Curieusement on n’impute pas à l’église les lumières, nées dans une société dominée par le catholicisme, mais on ne doute pas que tôt ou tard, quelqu’un se souviennent que Staline était au départ séminariste.
Mais ce serait un peu comme si on prétendait que l’idée de socialisme n’est peut être pas entièrement étrangère aux morts du National Socialisme et des goulags....
L’horizon théorique n’est pas le respect du pacte laïc mais l’éradication finale d’un phénomène quasi criminel au moins autant qu’aberrant.
Comme il est douteux, ou du moins espérons le, que la gauche française contienne en elle-même assez de violence pour conduire à leurs conséquences logiques ces affirmations, force est de conclure que le soi disant débat sur une laïcité positive n’est qu’une recherche de relégitimation intellectuelle au moins dans ce champs là.
C’est pourquoi elle est en train de raviver délibérément la querelle autour de la laïcité.
Face à ces provocations, il ne saurait être question d’une laïcité positive mais bien d’un retour à notre laïcité tout court et notamment à son respect par les agents de l’état et par les grandes consciences de gauche.
- La place des religions dans le débat public est un droit de l’homme art 18 DUDH
- Il est du devoir de l’Etat de le garantir et ce de manière concrète Loi de 1905
- Il ne saurait être question pour lui de s’immiscer dans les affaires de religions dès lors qu’elles ne transgressent pas la loi.
- L’appartenance religieuse ne saurait jamais être un motif pour une administration à refuser l’exercice d’un droit public.
- Ceux qui, notamment à gauche, et à commencer par Jean Daniel, ne sont pas d’accord avec ces principes Républicains, laïcs et constitutionnels devraient se demander si , « ils sont acceptable par notre communauté » et en tirer toutes les conséquences.
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