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Accueil du site > Tribune Libre > Paoli : humain after all ?

Paoli : humain after all ?

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L’actualité me donne enfin une occasion de parler de Stéphane Paoli, figure historique du 7-9 de France Inter. J’ai un rapport très spécial avec Paoli. A vrai dire, ce type ne me revient pas du tout. D’abord, il s’appelle Pas Au Lit. Quand j’en parle en « société », on me répond souvent « Ah tiens, je ne l’avais pas remarqué ».

Pas Au Lit, donc. Alors, quand on est à l’antenne à 7 h du matin (et donc probablement debout entre 2 h et 0 h), c’est normal. Mais pour moi, c’est inhumain. Inhumain d’être en pleine forme comme il l’est tous les jours, sans exception, sans jamais faillir. Dans l’état où je me trouve quand le réveil sonne, c’est inhumain d’avoir une pêche pareille. Inhumain d’être aussi bon, aussi au courant de tout, de poser exactement les bonnes questions, de faire autant de bonnes remarques. Inhumain d’élever le débat à ce niveau.

Bref, Stéphane Paoli est le cauchemar de mes débuts de journées. Et hier, qu’apprends-je en lisant Gilles Klein ? Que Stéphane Paoli est peut-être plus humain qu’on ne le croit.

Les faits (datant de mardi) relatés par Gilles Klein sont très précisément (étonnamment précisément ?) relatés sur le site d’Action Critique Médias (Acrimed), puisque la conversation y est retranscrite, et que le fichier sonore y est disponible.

Un auditeur, Patrick (décrit par Acrimed comme agissant probablement pour la compte de PLPL), plutôt que de poser sa question aux invités d’ATD Quart Monde, interpelle Paoli sur ses « ménages ». Dans le jargon journalistique, un ménage est un travail effectué par un journaliste pour le compte d’une entreprise (souvent via des agences), moyennant rémunération : on prend souvent l’exemple de l’animation d’une conférence ou d’un séminaire interne.

laser_programmeL’auditeur argue donc que Paoli avait invité Philippe Lemoine, patron de Lafayette Services, le jour même où il allait animer une conférence pour son compte, en décembre 2004. Rebelote avec Yves Jeanneau, directeur de l’unité documentaire de France 2 à l’époque, en juillet 2005.

Réponse immédiate de Paoli : il reconnaît cet auditeur, qui a usurpé une autre identité, il lui a déjà répondu précisément sur ce sujet, l’auditeur abuse de la liberté de l’antenne, et nous sommes ici pour parler du refus de la misère. Plein de bons points, mais n’empêche : on a envie d’en savoir plus.

Un mot sur les ménages, d’abord. Ils sont pratique courante chez de nombreux journalistes, et Paoli n’est d’ailleurs pas le seul dans le 7-9 à arrondir ses fins de mois. De plus, un ménage, ce n’est pas forcément que de l’animation de conférence. De nombreux journalistes offrent leurs services pour entraîner les dirigeants d’entreprise à la prise de parole avec les médias. On est ici à l’intérieur, ou à la limite, du domaine de la formation, donc du conseil, et donc de l’éthique professionnelle.

Est-il juste que des journalistes pratiquent ce type d’activité ? Il me semble que les ménages sont, dans une certaine mesure, une menace à l’indépendance des journalistes. Une goutte d’eau, à côté de l’actionnaire et des annonceurs ? Peut-être.

Mais la notion d’indépendance m’est chère, et même si les journalistes font ces ménages de façon très professionnelle et très éthique, ils jettent un doute. Un doute sur « l’auto-censure préventive » dont nous avions parlé dans Annonce Tout Risque, c’’est-à-dire qu’un journaliste pourrait, même inconsciemment, passer sous silence les ennuis d’une entreprise « amie », alors même qu’il ne le ferait pas si l’entreprise n’était pas « amie ».

Mais il serait encore plus grave, à mon sens, de valoriser volontairement une entreprise qui achète vos services. C’est précisément ce qui est reproché à Paoli. S’il s’est déjà expliqué sur ce sujet, qu’a-t-il dit ?

Acrimed est une nouvelle fois très détaillé sur ce sujet. L’animateur a répondu à une intervention similaire d’un auditeur (le même ?) il y a un peu plus d’un mois. Il reconnaît parfaitement effectuer des ménages, qui correspondent à son métier de journaliste : débats de société ou débats économiques.

Pas de vraie réponse, en revanche, sur la question du « favoritisme » : « mon travail, ici, à la rédaction de France Inter, consiste à faire en sorte que tous les sujets soient traités, équitablement traités, dans un esprit, je dirais, républicain, c’est ce qui anime aussi ce service public, et je pense que jusqu’à présent, le travail est plutôt pas mal fait ».

Difficile d’imaginer que Lafayette Services et France 2 auraient été précisément invités sans leur « relation commerciale » avec Paoli. Voilà donc qui entache l’image très droite qu’on lui connaît.

Plus généralement, est-il sain que le monde de l’entreprise et celui des médias se rapprochent ? Qu’ils se comprennent est une chose, qu’ils se rapprochent en est une autre. Les liens qu’ils tissent doivent être des nœuds faciles à défaire, et non des nœuds de marins.

Ou bien, faut-il considérer que PLPL et Acrimed s’acharnent sur la meilleure émission du service public, à laquelle on peut pardonner un écart de temps en temps ? En tous cas, Paoli n’en ressort pas grandi, mais au moins, à mes yeux, humain.


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