Présidentielles 2022 : La démocratie en marche
Je crois que nous sommes au bord du basculement et que les classes dirigeantes sentent le danger et sont très actives et déterminées.
Des élites au clair avec leurs intérêts et des populations entretenues dans l’incertitude.
Il s’agit en fait d’élites économico-financière hyper minoritaires renforcées et soutenues par ceux qui pensent lui devoir quelque chose ou en être ses éternels protégés ou dépendants.
Nous assistons à une tentative qui vient du cœur de l’oligarchie, chargée d’inquiétude, une tentative de bloquer dans ses filets paralysants les plus modestes de nos concitoyens et ceux de la classe moyenne qui prennent conscience de l’impasse en terme d’efficacité économique et de démocratie que constituent les principes du libéralisme et du néolibéralisme économique qui tour à tour s’épaulent. Une économie qui pour avancer et préserver la domination économique de minorités a besoin de secousses et saccades de plus en plus rapprochées et d’entretenir un chantage continu sur l’emploi. Le soutien massif qu’elle apporte au populisme de la droite extrême en témoigne. Ces élites ont la pleine conscience de leurs intérêts qui, atout supplémentaire, se déclinent à des échelles internationales. C’est pour elles à la fois un soutien quasi naturel et une stimulation très forte. Elles s’inscrivent dans une très longue tradition qui dépasse l’histoire de nos sociétés actuelles. C’est celle des castes, des dynasties et maintenant des classes qui considèrent que les autres composantes de la société, l’énergie et l’intelligence collective sont au service de leur mode de vie qui serait indépassable. Des milliardaires se disputent maintenant la maîtrise et bien sûr les objectifs des vols spatiaux en récoltant tout le savoir-faire et les fruits d’un immense travail collectif. Sans surprise au fond. Les exemples pourraient être multipliés dans bien des domaines.
De ce point de vue la compréhension des solidarités, des interdépendances, des axes de coopérations des populations entre elles quant à leurs propres intérêts s’inscrivant nécessairement dans un temps distendu et incertain sont bien plus difficiles à mobiliser. L’énergie et la réserve d’intelligence collective en gestation qui s’y trouvent sont souvent plus latentes qu’actives. Les niveaux de développement différents compliquent également cette prise de conscience. Cette énergie a bien entendu peu d’effet immédiat sur un processus électoral local.
Cela explique pour une part qu’il y ait une course contre la montre pour enfermer les aspirations démocratiques qui montent dans le juridisme supranational de l’UE qui cache mal un fédéralisme d’oligarques ainsi que sa dépendance vis-à-vis du pôle étatsuniens. C’est un bras de fer diffus mais constant. Ce qui tempère et freine cette dynamique, c’est que les oligarques sont aussi en compétition entre eux et que les pays conservent une identité territoriale, historique, politique et culturelle. Cette résistance cependant est fragile parce qu’au gré des élections et au passage d’une génération à l’autre, grâce au détournement des médias et des technologies de l’information beaucoup de choses peuvent être effacées et transformées.
Des enjeux fondamentaux masqués.
Autrement pourquoi tous ces efforts ici réalisés à bas bruits pour avoir la main sur les médias, et avoir perpétrer un renouvellement en masse des journalistes en même temps que la précarisation des statuts ? Un travail méthodique aussi de mutation de l’école qui est peu visible mais bien réel (panne de l’ascenseur social=panne de l’accès à l’autonomie économique, civique et sociale= intelligence collective et aspirations démocratiques tenues en respect).
Il y a également comme une ligne de démarcation médiatique autour de LFI qui n’est pas traité comme un mouvement politique comme les autres alors que nous sommes censés être dans une démocratie. Sur cet aspect, une sorte de fonctionnement œcuménique peut être observé. Nous sommes tous victimes de cette situation. Il y a de temps en temps une partie de tir au casse-pipe plus ou moins intense (c’est calme actuellement mais cela revient toujours aux bons moments) avec la personne médiatique de Mélenchon dont il semble que peu de gens se rendent compte que cela abîme nos réflexes et comportements civiques et installent des habitudes qui ne servent pas la démocratie comme bien commun, matrice du débat public et rempart contre les règlemenst de compte personnels.
Qui n’a pas fait le constat d’une déviance diffuse des médias vers le parti-pris et le séparatisme à l’égard d’une partie de la société. Le mouvement des gilets jaunes en fut un révélateur s’il en fallait un. Double contournement et mise en impasse. Par les élus (les maires) avec les Etats Généraux et l’enterrement de première classe des comptes-rendus dans les archives départementales. Par les médias se prêtant généreusement à la mise en scène des divergences entre des leaders faisant leur apprentissage notamment de cette duplicité. Des leçons évidentes sont à tirer pour tous. Le traitement politique et médiatique de l’épidémie en cours en est aussi une démonstration sur un autre plan.
De quel côté sont en réalité ceux qui ont eu de sévères comptes à rendre à la justice ou dont les affaires ne sont pas encore réglées ? Qu’est-ce qui dérange à ce point chez ce type de leader ? Son charisme, sa pugnacité, sa culture personnelle, historique et politique, atypique de nos jours dans un monde politique nourri aux enquêtes d’opinion et aux tutos des communicants et cabinets de stratégie. Ou plus sûrement la lucidité dont il a fait preuve très tôt vis-à-vis des dérives libérales et européistes de la gauche et de la droite républicaine en en tirant les conséquences politiques. Vis à vis de la trahison des états majors, vis-à-vis d’un recul démocratique rampant puis flagrant.
Ce leader, comme c’est bizarre, contrairement à d’autres n’aspire pas lui à la position pyramidale actuelle qui fait tourner tant de têtes et qui tient de fait en respect l’expression démocratique. Il prévoit tout au contraire de faire de cette dernière une force et un levier en mettant fin à cette autocratie présidentielle.On peut comprendre alors l’exacerbation et la détestation des oligarques, des élus du minimum électoral et des faisant fonction du journalisme gardien du temple et de ses officiants.
Par delà le traitement spécial réservé à LFI-Union Populaire, il y a une tentative de mettre hors du champ du débat démocratique 3 verrous qui conditionnent ce que d’aucuns appellent le régime, d’autres le système, qui sont maintenant au cœur de l’organisation de nos sociétés et qui interpellent à travers toutes les manifestations sociales la conception de la démocratie et notre place en tant que citoyens dans sa mise en œuvre. Trois verrous fondamentaux indissociables à ouvrir : La question du pilotage économique par le politique et non par le marché et ses délégués élus. La question de la mise à jour de nos institutions et de la nécessité de processus démocratiques associant les citoyens. La question de la nécessaire évolution des traités européens.
Avec une vigilance particulière concernant notre implication et participation de citoyens dans les nouveaux processus institutionnels, leçons et expériences tirées de la période des années 80 et de ce qui se passe maintenant depuis ces vingt dernières années.
Un contournement démocratique.
Il y a parallèlement une infinie complaisance et mise en valeur à l’égard des idées d’extrêmes droites qui servent à la fois de faire valoir " démocratique " à nos élites et élus du système, qui est de fait autoritaire et quasi sans contre-pouvoirs dans la pratique, ainsi que de justification morale pour ces élites par assimilation des milieux populaires à ce dévoiement de leurs colères et aspirations mis en musique par d’autres élites tout aussi éloignées de ces milieux.
Comment ne pas constater que la fragilité électorale de ces élites se traduit par un raidissement démocratique qui s’inscrit régulièrement en passant inaperçu pour le plus grand nombre d’entre nous dans la production réglementaire et juridique à l’abri d’un parlement hanté par le fantôme de l’abstention (voir plus bas les conditions d’élections des députés et sénateurs).
Un détour instructif par le laboratoire de la présidentielle 2017.
Le pouvoir actuel a en réalité une dette électorale envers l’extrême droite et le contrat implicite, par la manœuvre d’en faire son adversaire de référence à laquelle participent les médias, est en cours de reconduction.
Toute la machine politico-médiatique alimentée par les sondages et enquêtes qu’elle commande et donc elle garde la moitié confidentielle, tourne pour nous faire oublier que les clefs de l’élection sont dans notre réflexion, notre capacité à prendre du recul et à mobiliser notre mémoire.
Pour rappel, en 1981, l’union de la gauche s’est faite dans les urnes à distance des consignes des états-majors, des éditorialistes, des grands hommes et des tours d’ivoire.
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89lection_pr%C3%A9sidentielle_fran%C3%A7aise_de_1981
* Rappel des résultats au 1er tour
-Il y a eu 5 candidats de gauche au 1er tour (JL Mélenchon 14.84 % des inscrits + total des autres candidats 6.28%)
-En tête E Macron (18.18%) et M LE PEN (16.14%)
* Évolutions des votes entre le 1er et second tour
Votes blancs : de 659 997 à 3 021 499 (x 4.6)
Votes nuls : de 289 337 à 1 064 225 (x 3.68)
Abstentions : de 10 578 455 à 12 101 366 (x 1.14)
* Résultats second tour
E Macron : 20.8 millions M Le Pen : 10.6 millions
Absentions : 12.1 millions Blancs + nuls : 4.07 millions
Abstentions, nuls et blancs lors des législatives 2017 : 62%
Représentativité de l’Assemblée Nationale 2017 :
- LREM avec 14.5% des inscrits au 1er tour a obtenu 350 députés
à l’issue du second tour (AN= 577 députés)
- 4.5% des députés sont des employés (27.4% de la population active)
- 0% ouvriers (20.3% de la population active )
- Un député actuellement a été élu avec un pourcentage compris entre 18 et 22% du corps électoral.
- Taux de féminisation : 38.8% (comme quoi c’est aussi un choix politique d’isoler un taux de féminisation sans y articuler la représentativité sociale, c’est la pratique dominante dans les médias).
Elections européennes 2019 : scrutin de liste bloquée à un tour, taux d’absentions 49.88% (plus de 60% de notre législation découle du droit européen).
Elections municipales : 30 000 maires élus au 1er tour le 15 mars 2020 en l’absence de 55% des électeurs contre 7600 en 2014 appuyés sur 64% de leurs concitoyens. 60% d’abstentions au second tour et des élus qui représentent entre 10 et 20 % du corps électoral.
Elections sénatoriales 2020 : renouvellement de la moitié des mandats de la chambre haute (vote obligatoire) pour un mandat valable jusqu’en 2026 par les nouveaux élus municipaux composant la plus grande part de ce corps électoral.
Repères :
● 2017 : Liste des candidats 1er tour |
Voix |
% Inscrits |
% Exprimés |
M. Emmanuel MACRON |
8 656 346 |
18,19 |
24,01 |
Mme Marine LE PEN |
7 678 491 |
16,14 |
21,30 |
M. François FILLON |
7 212 995 |
15,16 |
20,01 |
M. Jean-Luc MÉLENCHON |
7 059 951 |
14,84 |
19,58 |
M. Benoît HAMON |
2 291 288 |
4,82 |
6,36 |
M. Nicolas D-AIGNAN |
1 695 000 |
3,56 |
4,70 |
M. Jean LASSALLE |
435 301 |
0,91 |
1,21 |
M. Philippe POUTOU |
394 505 |
0,83 |
1,09 |
M. François ASSELINEAU |
332 547 |
0,70 |
0,92 |
Mme Nathalie ARTHAUD |
232 384 |
0,49 |
0,64 |
M. Jacques CHEMINADE |
65 586 |
0,14 |
0,18 |
● Le fait du prince. Comment ne pas prendre de risque avec la démocratie : Donald Tusk, alors président du Conseil européen avait proposé à E Macron en 2017 de maintenir le début de la présidence française du Conseil de l’UE à la date prévue avant le départ des britanniques au 1/07/22 ou d’inverser la présidence semestrielle avec les tchèques (source Marianne n°1291 du 10 au 16/12/21).
● Pourquoi la France est-elle le 34e pays du classement annuel mondial de la liberté de la presse ?
A méditer, même si on peut s’interroger sur les critères de classement et une certaine candeur à confondre liberté des propriétaires de la presse et liberté de la presse. (RSF dévoile son Classement mondial de la liberté de la presse 2021 :
1 : Norvège ,1 : Finlande ,2 : Suède, 3 : Allemagne, 13 : Royaume-Uni, 33 : France, 34 : États-Unis, 44 : Brésil 111…).
● La transition par Quentin Lafay (Le 24/11/2021).« Pourquoi les jeunes journalistes renoncent de plus en plus à leur métier ? »
Au passage, une belle photo qui rend sensible que le journalisme c’est tout un travail collectif de préparation aussi.https://www.franceculture.fr/emissions/la-transition/pourquoi-les-jeunes-journalistes-renoncent-de-plus-en-plus-a-leur-metier
● Pour ceux que l’on a tort de prendre pour des enfants, un peu de contenu d’information s’il est reconnu que prendre du champ et du recul est une méthode qui a fait ses preuves.
250 professionnels de la presse, de la télévision et de la radio alertent : « L’hyperconcentration des médias est un fléau médiatique, social et démocratique » (15/12/21)
● Pourquoi des milliardaires se sont payé la plupart des médias et de la presse qui n’est pas rentable ? Un petit échantillon parmi d’autres. Je vous laisse chercher les autres.
Leçons médiatiques de disqualification économique par Maxime Friot mercredi 8 décembre 2021
https://www.acrimed.org/Lecons-mediatiques-de-disqualification-economique
● En plein dans le sujet. Zemmour, Pécresse et compagnie : Décapant , vous auriez tort de vous en priver. Récit médiatique : un autre Macron est possible ! (10/12/2022 Régis de Castelnau).
…« Macron et Macron.ne, sont dans un bateau. On se moque de qui tombe à l’eau parce que nos intérêts seront garantis … ».
https://www.vududroit.com/2021/12/recit-mediatique-un-autre-macron-est-possible
● "L'autonomie des universités, cheval de Troie des décoloniaux, a été voulue… par Pécresse" L'humeur de David Desgouilles(21/12/2021)
● Les revenus de l'État en France - Faits et chiffres.
"Parce que le milliardaire n'a pas récolté sans peine, il s'imagine qu'il a semé." Jean Jaurès .
https://fr.statista.com/themes/3802/les-revenus-de-l-etat-en-france/#dossierKeyfigures
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