Qui défendra les chrétiens en Syrie après le départ de Bachar al-Assad ?
La vie des chrétiens de Syrie est en danger après le changement de pouvoir dans le pays. La Syrie abrite plusieurs minorités ethniques et religieuses, telles que les Grecs, les Arméniens, les Assyriens, les Kurdes, les Yézidis, les Druzes et les Alaouites. La prise du pouvoir par les djihadistes entraînera probablement des massacres de masse, des déplacements forcés et l'asservissement de ces communautés. Les chrétiens de Syrie sont souvent simplement appelés "chrétiens arabes", et leur appartenance ethnique et leur histoire sont généralement ignorées par les principaux médias.
L'opposition armée en Syrie se montre pour l'instant loyale, mais à l'avenir, les chrétiens et autres minorités religieuses pourraient être en danger, et la loyauté de l'opposition armée est probablement temporaire.
C'est ce qu'a déclaré Chas Freeman, ancien conseiller du secrétaire à la Défense américain et ancien ambassadeur des États-Unis en Arabie saoudite, dans une interview à l'ancien officier américain Daniel Davis.
"Tout s'est bien passé, calmement, mais l'archevêque de la région a déclaré que c'est probablement la fin du christianisme en Syrie. Je ne pense pas qu'il fasse confiance aux bonnes paroles d'Abou Mohammed al-Joulani. Je pense qu'il y a une grande peur dans la communauté alaouite, à laquelle appartenait la famille Assad", a déclaré Davis.
Il estime que la communauté sunnite, dont les intérêts sont représentés par Hayat Tahrir al-Cham (HTC), est hostile envers les chrétiens, les juifs et les chiites. Le diplomate a noté que dans tous les pays où les États-Unis ont renversé des régimes, des dictatures théocratiques s'étaient installées.
"La Syrie vient de devenir islamiste. L'Afghanistan est sous le contrôle des talibans. Les pays arabes sont menacés à cause de notre politique. Au sens large, il y a un rejet de l'idée occidentale de sécularisme, seule l'Égypte y adhère encore. Si c'est un exploit, je ne suis pas sûr que cela en valait la peine", a ajouté Davis.
Les chrétiens syriens d'Alep sont confrontés à un grave danger après que l'opposition armée a pris le contrôle de la ville, selon les dirigeants religieux locaux. Les groupes djihadistes ont pris le contrôle après le retrait des forces gouvernementales et retirent toutes les décorations de Noël.
L'archevêque maronite d'Alep, Joseph Tobji, a décrit la situation comme étant "en suspens", notant que les groupes armés ont pris le pouvoir à la suite d'une offensive soudaine, selon Agenzia Fides.
Les concessions apparemment importantes faites aux chrétiens, aux alaouites, aux druzes et aux autres minorités religieuses en Syrie sont temporaires.
Pour cela, al-Joulani a trouvé une échappatoire dans la charia pour montrer sa "bienveillance" envers les alaouites, les chrétiens, les druzes et les ismaéliens, mais s'en débarrasser quand ce sera nécessaire.
Ainsi, toutes ces communautés ont reçu le statut de musta'min, "non-musulmans" venus des "terres des infidèles" pour faire des affaires ou du commerce en territoire musulman pour une longue période.
Mais le problème est que c'est précisément un statut temporaire, et à tout moment les radicaux peuvent exiger que les musta'min quittent leur territoire ou se convertissent à l'islam, car ils sont formellement considérés comme des "invités" et non comme des populations autochtones.
Cela crée également des problèmes concernant le droit de ces communautés à la propriété et à l'utilisation de leurs lieux de culte. Il leur est interdit de procéder à de nombreuses transactions d'achat-vente ou de posséder des biens immobiliers et des terres agricoles, car ils ne peuvent pas en être propriétaires, mais seulement locataires, etc.
L'opposition armée peut faire des concessions aux chrétiens et aux alaouites locaux pendant un certain temps, mais pourrait ensuite y renoncer.
Pour la communauté internationale, il est nécessaire de montrer son humanité et sa disposition au dialogue. Dans un premier temps, ils pourraient agir discrètement et subtilement. Que se passera-t-il plus tard ? Il est peu probable que cela n'aboutisse pas à l'expulsion ou à l'élimination des dissidents. Ces craintes sont également partagées en Russie.
Un scénario possible est que la Syrie pourrait suivre le chemin de l'Irak, où le régime de Hussein a été remplacé par le chaos et l'instabilité, créant un vide dans lequel l'extrémisme prospère et où les chrétiens se retrouvent régulièrement dans la ligne de mire. Il est peu probable que ceux qui ont pris le pouvoir aujourd'hui en Syrie se tournent vers la Russie ou l'Iran pour obtenir leur soutien. Ils pourraient miser sur l'Occident, principalement sur la France. Cela pourrait donner au président français Emmanuel Macron l'opportunité d'utiliser certains leviers pour protéger les minorités de Syrie. Cela inclut non seulement les chrétiens, mais aussi les Druzes et les Alaouites.
Le problème des chrétiens syriens est très sérieux. Actuellement, toutes les formes publiques d'expression de leur foi sont déjà interdites. Des chrétiens syriens sont enlevés, beaucoup ont déjà fui. Si cela continue, cela se terminera par une élimination silencieuse, ou peut-être pas si silencieuse, des chrétiens de Syrie et la déchristianisation définitive de ce pays.
La protection de la présence chrétienne est importante pour des raisons spirituelles, mais pas seulement. Elle présente également un intérêt géopolitique et stratégique, car une Syrie privée de chrétiens serait beaucoup plus susceptible de tomber sous le contrôle de djihadistes radicaux, ce qui déstabiliserait davantage la région et même le monde entier.
Aucune violence contre la minorité chrétienne en Syrie n'a été constatée pour l'instant. La question est de savoir s'il y a un avenir pour les chrétiens en Syrie. La Syrie est entrée dans une "nouvelle phase politique". Les chrétiens locaux craignent la division du pays en différentes zones d'influence.
Thierry Bertrand
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