S’unir, pour résister et gagner
Emmanuel Macron a gagné, en 2017, l’élection à la présidentielle avec 66,1 % des voix au second tour, suivie d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale (AN) ce qui lui a donné de larges possibilités et donc de grandes responsabilités. En 2022, avec 58,55 %, sa réélection est moins confortable (1ère alerte), accompagnée d’une majorité relative à l’AN (2ème alerte). En 2024, de mauvais résultats pour ses troupes aux européennes (3ème alerte).
Insensé, présomptueux, sans tenir compte de chiffres qui valent plus que des sondages, il dissout l’AN, perd sa majorité relative et entraîne l’institutionnalisation de l’instabilité politique pour un an aumoins alors que la situation économique et sociale s’est détériorée sous son autorité continue de 2017 à 2024.
Le pays est désormais en période préélectorale. Les prochaines élections auront lieu pour la présidentielle en 2027, plus tôt en cas de démission du président. Pour les législatives après une nouvelle dissolution quand la situation paraîtra favorable au président.
Les dernières législatives ont donné une AN sans majorité de gouvernement avec une extrême droite, forte, le Rassemblement National (RN), parti le plus important à l’AN.
Malgré un front républicain qui a limité le nombre de ses élus.
Emmanuel Macron a appelé, pour former le gouvernement et garder la main (?), 2 personnalités des groupes parlementaires de droite les plus faibles : Michel Barnier (Les Républicains), François Bayrou, (Modem) !
Tout le monde se souvient du nous sommes en guerre d’Emmanuel Macron, lors de l’épidémie, et de son hommage aux travailleurs essentiels, de la première et de la deuxième lignes. Peu concrétisé (1).
Le pays n'est guèr mieux préparé face à la prochaine épidémie.
La réindustrialisation promise n’a pas eu lieu (2).
Depuis 2017, avec en responsabilité Emmanuel Macron, président, et Bruno Lemaire, ministre de l‘Économie, la situation sociale ne s’est pas améliorée. Celle de l’État non plus. Les plus favorisés n’ont pas souffert.
Le taux de pauvreté a évolué de 14,1 % en 2017 à 14,4 % en 2022, soit 9,1 millions de personnes (3) et en 2024, 14,5 %, pourcentage inédit depuis 1996.
Taux de chômage moyen en France, UE27 et Allemagne (2017-2024)
Année |
France (%) |
UE27 (%) |
Allemagne (%) |
---|---|---|---|
2017 |
9,5 |
7,6 |
3,8 |
2018 |
9,1 |
7,0 |
3,4 |
2019 |
8,1 |
6,3 |
3,2 |
2020 |
9,0 |
7,5 |
4,0 |
2021 |
7,6 |
7,0 |
3,6 |
2022 |
7,0 |
6,4 |
3,0 |
2023 |
6,8 |
6,0 |
3,1 |
2024 |
6,8 |
6,7 |
3,8 |
Le chômage en France a certes diminué mais reste toujours supérieur au taux moyen de l’UE27 et très supérieur à celui de l’Allemagne.
La politique de la France en Afrique, domaine réservé du président de la République, n’est pas franchement un succès. Malgré des déclarations reconnaissant les crimes de la colonisation en général et en Algérie, en particulier, Emmanuel Macron n’a pas normalisé les relations de la France avec les pays anciennement colonisés.
En Algérie, avec l’aide d’une droite, pour laquelle la guerre n’est toujours pas finie et qui prend plaisir à lui rendre la tâche plus difficile !
En Afrique noire, par incapacité à établir de nouvelles relations avec les anciens pays colonisés par la France, indépendants depuis 1960, les troupes françaises ont été remerciées dans plusieurs pays : échec de la politique néocoloniale !
Cette expulsion est suivie d’une sortie de 3 pays (Niger, Burkina Faso, Mali) de l’Organisation internationale de la francophonie !
La dette publique est passée de 98,7 % du PIB en 2017 à 109,9 % en 2023, soit une hausse de 11,2 points. Pendant la même période, celle des États de l’UE27 a baissé de 81,5 à 80,8% (4). En 2025, la dette publique de la France devrait atteindre 112,9 % du PIB.
Le déficit public était de 3,4 % du PIB en 2017, il est prévu entre 5 et 5,5 % pour 2025.
La France comptait 39 milliardaires en 2017 et 53 en 2024, au classement de Forbes., Le patrimoine des 500 plus grandes fortunes françaises a bondi de 17 % en un an (5) et 26 ministres ou proches de Macron sont impliqués depuis 2017, dans différentes affaires (6).
Tandis que François Bayrou, premier ministre depuis peu, premier ministre enfin, premier ministre toujours, ne savait rien de ND de Bétharram, ne savait rien des emplois fictifs du Modem…
Ce n’est pas pour rien qu’Emmanuel Macron a été qualifié de président des riches. Les citoyens, méprisés (ils ne sont rien, ils n’ont qu’à traverser la rue...), ont quelques raisons de ne pas être satisfaits et pourraient le faire savoir.
Y aura-t-il une explosion sociale, politique ? Quand ? Où ?
Les prévisions sont difficiles, surtout lorsqu’elles concernent l’avenir ! (Pierre Dac)
Après l’événement, nombreux sont ceux qui en décrivent les signes annonciateurs. Rares sont ceux qui ont prévu mai 68 ou les gilets jaunes !
Toutes les sociétés démocratiques sont ébranlées. La politique de l’Union européenne (UE) a les mêmes conséquences dans tous les pays : décrochage par rapport à la croissance aux États-Unis, montée de l’extrême droite...
Le complexe capitalisme-démocratie libérale n’est plus l’horizon indépassable de la fin de l’histoire. Il est fortement contesté par un capitalisme autoritaire depuis la Chine, qui ne cache pas ses ambitions sur tous les plans, jusqu’au capitalisme illibéral désormais incarné par Donald Trump qui ne manque pas de séduction pour certains Européens en plus de Viktor Orbán, au pouvoir depuis 2010.
En cas d’élections législatives anticipées, le RN espère obtenir une avancée substantielle en voix et en sièges.
Dédiabolisé malgré ses relations douteuses avec Vladimir Poutine (aide financière pou les élections), contrariées, peut-être heureusement, avec Donald Trump (Éric Zemmour invité au sacre).
Légitimé par les partis, dits du centre ou de gouvernement, qui reprennent ses éléments de langage et de programme tandis que les personnalités enchérissent dans leur alignement sur l’extrême droite.
Légitimé par de nouvelles relations avec Israël de l'héritier du Front national créé par des nazis (7).
Dans les conditions actuelles, connivence-concurrence, droite-extrême-droite, un front républicain à l’efficacité incertaine est peu probable.
Le fruit est-il mûr ? La prochaine élection sera-t-elle la bonne ?
Le RN caresse l’espoir d’une majorité absolue à l’Assemblée, seul ou après un accord avec une droite extrême ?
La situation française n’est pas une exception en Europe. Aux dernières élections européennes ou législatives, les partis de la droite extrême ont progressé dans tous les pays. Y compris dans les pays nordiques, renommés pour leurs traditions modérées, démocratiques.
Pendant ce temps, Emmanuel Macron se répète : nous sommes en guerre. Ce n’est plus contre une épidémie mais contre la Russie. Devant ce risque, il veut révigorer le budget de la défense nationale avec la même politique financière : diminuer la protection sociale, accentuer les inégalités pour n’augmenter ni le déficit de l’État, ni les impôts : maintenir les rabais fiscaux, consentis aux plus riches.
Face à une politique économique et sociale continuée, le moment est venu pour la gauche de reprendre le rôle de seule opposition véritable en soutien des catégories sociales les plus à la peine.
La gauche ? Combien de divisions sans troupes et combien de subdivisions ? Se diabolisant les unes les autres ! Sans programme commun. Demain sans électeurs ?
Les partis de gauche ont pourtant réussi à s’unir dans le Nouveau Front Populaire (NFP) lors des dernières élections. Les électeurs ont, relativement, suivi. Le NFP a obtenu le groupement le plus important à l’AN. Qui leur a permis, le soir des élections, de poser un acte politique en tant que première force d’opposition : revendiquer le poste de premier ministre pour initier une politique différente de celle battue dan les urnes.
Sans être capables d’avancer immédiatement un nom et de faire campagne, ensemble : nom annoncé en retard, sans enthousiasme et à usage unique.
Les citoyens ont suivi la gauche, unie. Ils peuvent encore la suivre. Malgré leurs multiples déconvenues. Trop souvent, son programme consiste à dénoncer celui de la droite et à le reprendre une fois au pouvoir : Mon véritable adversaire, c’est le monde de la finance. Inoubliable Bourget !
La gauche doit répondre et donner espoir à trois groupes de citoyens :
abstentionnistes, racisés et nombre de citoyens, détournés de leurs vrais adversaires, qui votent pour le RN, sans connaître son passé, son programme, son projet de société.
Ces groupes ne sont pas homogènes. Certaines personnes peuvent partager un sentiment d’appartenance, peu ou prou, avec l’un et l’autre ou être en opposition.
Tous sont des victimes à de degrés divers des politiques actuelles.
Sur 54 millions d’adultes en France, 2,9 millions ne sont pas inscrits sur les listes électorales et 7,7 millions sont mal inscrits, enregistrés dans une ville où ils ne résident pas. La gauche, comme tous les partis, devrait inciter à vérifier les inscriptions sur les listes électorales.
Les abstentionnistes sont souvent désignés soit comme le premier parti de France, soit soupçonnés d’être indifférents à la politique : contradictoire et probablement inexact.
Lors des élections de 2022, présidentielle et législatives, 36 % des inscrits ont participé à tous les scrutins, aux 2 tours de la présidentielle et aux 2 tours des législatives.
Pour les 48 % qui ont participé à un tour au moins de la présidentielle ou des législatives, il n’est pas possible de dire qu’ils ne s’intéressent pas à la politique. Au contraire. En plus d’éventuels empêchements, leur non participation peut s’expliquer par une offre qui ne les satisfaisait pas. Avec des motivations différentes pour le 1er ou le 2nd tour.
D’autre part, certains participent en fonction de l’importance supposée de l’élection. La participation plus forte pour la présidentielle que pour les législatives va dans ce sens (83 % contre 58%).
L’abstention est plus importante dans les quartiers prioritaires et touche plus les employés et les ouvriers. Probablement moins par désintérêt que par déception des changements de gouvernement non suivis pour leur situation.
Dans le même sens, la quadruple abstention de 16 % des citoyens qui n’ont participé à aucun des 4 scrutins, n’est peut-être qu’un désespoir démocratique. Rien ne peut être dit de leur participation à des scrutins antérieurs ou futurs.
Les catégories sociales qui s’abstiennent le plus sont celles qui ont le plus à gagner dans un changement de politique : important réservoir d’électeurs potentiels pour la gauche.
Dans un pays qui affiche la devise nationale, liberté, égalité, fraternité, dont la Constitution comprend la Déclaration de droits de l’homme et du citoyen, avec l’article 1er proclamant les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit, la notion de racisés ne devrait pas exister ou devrait être très marginale. Malheureusement, elle est là, utilisée pour disqualifier une partie de la population aux yeux d’une autre et au bénéfice de ceux qui veulent se faire une place, éventuellement continuer la Guerre d’Algérie par d’autres moyens. Ils s’attaquent à des citoyens, nationaux, Français, qui peuvent être enfants d’une histoire mouvementée dont ils ne sont en rien responsables. Et qui subissent les mêmes effets de la politique que les autres, quelquefois plus que les autres, à travers des discriminations. Ils doivent pouvoir, comme tout le monde, se regrouper en fonction de leurs d’intérêts, participer à toute organisation politique, syndicale, associative, religieuse (dans le respect des lois sur la laïcité comme toute la religion)...
En clair, il faut leur assurer, comme à tout un chacun, la protection de la loi dans le respect de la loi. Sans privilège, sans restriction.
La gauche doit rétablir sa crédibilité, s’adresser à tous les citoyens, redonner une raison d’espérer. À tous, y compris à ceux qui n’ont pas voté pour elle, même à ceux qui ont voté pour le RN. Qui ne sont pas tous des colonialistes, des racistes, des fascistes. Comme beaucoup d’abstentionnistes, ils se sentent abandonnés par les politiques de droite et de gauche. Courtisés surtout à l'heure aux seules élections. Ont-ils totalement tort ?
Ils ne peuvent résister : tous pareils, tous pourris. Ils ont voté pour le seul parti qui n’a pas été au pouvoir, qu’on n’a jamais essayé, leur façon de se révolter. Qui, malheureusement, les oriente non contre les responsables de la situation qu’il faut combattre mais contre ceux qui, comme eux, en sont les victimes, affaiblissant leur propre camp social.
Qui devrait être aussi politique.
Tout les citoyens ont un droit égal à la liberté d’expression. Dans le respect de la loi. Dans le respect des personnes. Il faut les écouter et plutôt que de les accuser, les enfermer dans une identité incertaine, la renforcer peut-être, les aider à connaître les vrais responsables. Ceux qui détiennent le pouvoir depuis longtemps. Pas ceux qui le subissent, en sont les victimes idéologiques. Leur façon de se révolter.
Devant la montée des communautarisme, petits ou grands, qui divisent, reconnecter, avec l’espérance tous les travailleurs, tous les mal logés, tous les méprisés tout en tenant compte des particularismes. Ce qui compte, c’est ce qui est dans le porte-monnaie.
La liberté, l’égalité et la solidarité dans le respect de chacun et de tous est de plus en plus nécessaire.
1 - https://www.alternatives-economiques.fr/de-monde-dapres-travailleurs-essentiels/00114289
2 - https://www.alternatives-economiques.fr/masques-medicaments-machines-lusine-france-na-rattrape-retard/00114442?utm_source=emailing.
3 - https://www.publicsenat.fr/actualites/economie/plus-de-9-millions-de-personnes-pauvres-en-france-emmanuel-macron-na-rien-fait-pour-arranger-les-choses-regrettent-les-senateurs)
4 - https://www.insee.fr/fr/statistiques/3281639?sommaire=3281778#consulter
5 - https://www.leparisien.fr/economie/le-patrimoine-des-500-plus-grandes-fortunes-francaises-a-bondi-de-17-en-un-an-05-07-2023-SN5XZ3THH5DIZEDCM2XYO3KOXE.php
6 - https://fakirpresse.info/Corruption-26-ministres-ou-proches-de-Macron-impliques-depuis-2017.html
7 - https://blogs.mediapart.fr/jean-marc-b/blog/240417/les-piliers-fondateurs-du-fn-sont-des-nazis
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