Touche pas à mon jaja, Rosy !
Cette fois, la ligne jaune a été franchie avec le projet de loi "hôpital, patients, santé et territoires" défendu par Roselyne Bachelot, notre ministre de la Santé, qui prévoit notamment l’interdiction des dégustations et de la vente d’alcool dans les stations-service.
Quelle ineptie qu’une loi qui s’attaquerait au fond à l’art du bon vivre à la française, tout autant qu’aux intérêts commerciaux de la nation !
A-t-on seulement pris conscience des répercussions qu’une telle loi pourrait avoir sur le commerce et le tourisme, quand on sait l’attachement que les estivants anglais, néerlandais - comme tant d’autres - portent à la visite de nos caves ?
Peut-on sérieusement concevoir en effet une visite de cave sans dégustation ?
Peut-on rayer d’un trait de texte législatif l’usage qui veut qu’un étranger en villégiature aime à rapporter une bonne bouteille à un ami, un patron, amateur de vin français, que celle-ci provienne de la cave d’un récoltant manipulateur ou de la dernière station-service d’avant la douane ?
Quel intérêt d’écouter le vigneron disserter sur les techniques d’ébourgeonnage, de le laisser poétiser sur l’impact d’un coup de vent glacial sur les nouvelles pousses qui sont tel le cristal, si l’on ne peut juger sur pièce le fruit d’un tel labeur, d’un tel acharnement, d‘une passion aussi dévorante ?
Qui de mieux placé que le vigneron pour témoigner des ravages du productivisme agricole et de son impact sur l’appauvrissement des terres ?
Qui d’autre saura mieux que lui nous convaincre que la typicité d’un terroir peut ressurgir plus fort encore quelques années après une conversion de la vigne au bio et nous expliquer avec luxe détails l’impact sur les sols des traitements naturels de contact et la prophylaxie par les phéromones ?
Qui encore peut mieux que l’œnologue expliquer aux béotiens que nous sommes ce qu’est une verticale dans le noble jargon du métier.
Supporterions-nous toutes ces digressions, cette nécessaire pédagogie avec autant de patience et d‘intérêt, si nous devions rester le gosier sec comme la Lune, une bonne heure durant ?
Boire seulement leurs paroles, et puis quoi encore !
Non, Madame la ministre, nous ne nous chauffons pas de ce bois-là, et moins encore au bois de vigne, que nous réservons à nos barbecues pour le sacro-saint rituel de la côte de bœuf rôtie sur sarments.
Reconnaissez, Madame, que les viticulteurs qui manifestent actuellement contre plusieurs des dispositions de votre projet de loi, sont acculés à utiliser le terme de prohibition, pour mieux se faire entendre et comprendre de vous.
Vous n’êtes pas sans savoir que les forçats de la vigne se nourrissent bien moins de serments que de sarments.
Puissiez-vous comprendre que la route des vins, qui jalonne tant de nationales et de départementales de notre beau pays, risque à jamais de se voir condamnée, tout autant que les coquets villages qu‘elle traverse avec bonheur.
Des villages qui ne sauraient vivre, ni survivre sans la vigne et son précieux nectar.
Documents joints à cet article
54 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON