1. Troisième guerre mondiale : nous y sommes
La « crise de l’euro », tout comme la « bulle du dollar » que nous concocte la réserve fédérale, sont les armes de destruction massive d’une guerre mondiale qui se déroule sous nos propres yeux. Cette guerre a trois objectifs qui ne sont pas financiers : faire perdurer autant que possible l’hégémonie américaine sur le monde d’une part ; d’autre part, imposer aux plus démunis et aux classes moyennes la fatalité d’une régression nécessaire du coût de leur force de travail et, enfin, en finir avec l’essence même de l’Etat de droit ne lui laissant que ses aspects formels.
Dans cette guerre, le marché manipule le politique, les spéculateurs les fonds de pension et autres institutions qui gèrent les retraites de millions d’individus depuis que, dans un autre combat plus ancien, les services collectifs ou étatiques ont été remplacés par les assurances privées et les fonds de pension. L’épicentre de cette guerre reste le marché obligataire, « travaillé au corps » par l’action aussi bien financière que politique des fonds spéculatifs et autres hedge fonds.
A tous ceux qui pensent que le monde marche sur la tête ; à tous ceux qui considèrent que les options se résument entre les choix de la croissance et celui de la rigueur budgétaire ; à tous ceux qui opposent des Etats bons gestionnaires à d’autres sensés être dépensiers ou frivoles ; à tous ceux qui opposent l’humanité des solutions politiques au cynisme mortifère du marché ; à tous ceux enfin qui se croient en paix dans un monde rationnel et cohérant et dont le seul défaut réside dans l’inconstance d’un marché qui fait passer ses intérêts gloutons avant le bien commun et obstrue la route paisible vers le progrès, il faudrait leur rappeler, par des images de Guadalcanal, d’Hiroshima ou de Stalingrad, que la guerre, quelle que soit, a sa propre logique qui vise la suprématie d’un camp sur un autre, et qu’en l’occurrence, exiger de l’humanité de la cohérence, de la justice ou du bon sens, c’est comme demander à ses troupes, lors d’une offensive stratégique à Verdun, de déposer les armes, mettre les mains dans la poche et rentrer chez soi.
Toute guerre est le résultat de plusieurs facteurs : volonté d’hégémonie, constat d’une impasse, besoin de se défendre ou de défendre un projet politique ou/et idéologique. Besoin aussi d’en finir, en donnant le coup de grâce, à un monde que l’on considère comme moribond et qui ne tient qu’au fil de ses certitudes, de ses croyances ou de ses habitudes acquises au fil de temps mais qui empêchent votre propre vision des choses. La force des armes faisant l’économie d’un effort pour convaincre ou séduire. Elle permet aussi à ne pas s’embarrasser des « détails de l’Histoire », à soudoyer des Éphialtès pour indiquer les points faibles de l’ennemi, à utiliser la propagande pour semer le trouble et neutraliser les forces adverses.
Est-il besoin de mettre un mot, un exemple, derrière chacun de ces concepts guerriers ?
Tout au plus, indiquons que si les armées conventionnelles (et leur armature technologique moderne) sont bel et bien engagées là où il semble nécessaire de le faire, les armes de destruction massive utilisées dans cette troisième guerre mondiale sont essentiellement issues de l’arsenal financier.
Que cette guerre ait été conçue et préparée, qu’elle ait commencé par identifier les points faibles de l’ennemi ; qu’elle suive une logique implacable de conquête, comparable aux guerres coloniales, loin du regard des peuples qui la subventionnent ; qu’elle ne se déclare pas ou si peu utilisant des guerres périphériques comme la Guerre Froide ; qu’elle utilise à sa guise les notions du bon droit, de l’évidence ou de l’appel au secours là où ça l’arrange comme Rome le faisait ; qu’elle impose ses besoins en tant qu’évidence universelle, tout comme le Troisième Reich ; qu’elle parle d’efforts surhumains à accomplir pour un monde meilleur occultant les raisons économiques qui la sous-tendent comme durant la guerre de Sécession, celle de Crimée ou de l’intervention des Alliés sur les terres soviétiques. Qu'elle fait le bonheur des maîtres de la finance, comme jadis elle faisait celui des maîtres des forges…
A suivre : 2. Pourquoi cette guerre ?
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