Il devient difficile d’écrire sur
Depardieu. Depuis le début de l’hiver, de nombreux plumitifs s’y sont essayés,
avec plus ou moins de talent, pour le défendre ou le vilipender. Et désormais,
toute note à son sujet risque d’avoir un caractère nécrologique.
Ses proches n’ont pas hésité depuis quelques jours à évoquer
son attitude suicidaire.
La mère de ses enfants le dit très justement : « c’est quelqu’un qui a des bourrasques
en lui, qui est extrêmement malheureux, qui est inconsolable - vous savez
pourquoi - et qui se démène pour essayer de vivre encore ».
Plus loin, dans l’entretien, on lui demande : « C’est peut-être le symbole d’une époque où tout va mal ? »
Elle répond : « Qu’il soit le symbole de quelque
chose, c’est évident. Mais vous savez, quand une famille va mal, c’est l’enfant
qui va mal, c’est le symptôme. On peut dire que c’est ça qui se passe.
D’ailleurs, il se comporte comme un grand enfant. C’est vrai qu’il y a un
désamour affiché pour les gens qui ont réussi. »
Evidemment, cette réponse a une résonance
particulière. On entend qu’elle parle aussi de la famille qu’elle avait fondée
avec Gérard Depardieu. Lui-même, quand il semble s’adresser à Jean Marc
Ayrault, il commence par un détournement très cinématographique : « Minable, vous avez dit « minable » ?
Comme c’est minable. »
Mais il en vient très naturellement
à ce qui le ronge réellement : « Je
trouve minable l’acharnement de la justice contre mon fils Guillaume jugé par
des juges qui l’ont condamné tout gosse à trois ans de prison ferme pour 2
grammes d’héroïne, quand tant d’autres échappaient à la prison pour des faits
autrement plus graves. »
On mesure le malentendu. Le
Premier ministre est informé que l’acteur a l’intention de s’exiler à la frontière
belge, un peu au nord-est. Il considère que la démarche est un « peu minable. » L’acteur
aurait pu entamer la tirade des nez, mais non. Il ne sait plus le texte. Il
préfère reprendre en la détournant une formule que Jacques Prévert met dans la
bouche de Louis Jouvet et que chacun a en mémoire. Ce faisant, il fait comme si
Jean Marc Ayrault, ce caïd, l’avait traité de « minable », lui, le grand homme.
Ses amis viennent à son secours.
Ils ont bien entendu, eux aussi, qu’on l’avait traité de « minable ». Ses amis politiques d’abord. Puis ses amis
du cinéma. Mais on ne se fait pas que des amis dans ce milieu. Un acteur
encarté au PS entreprend de lui faire la leçon. La reine Catherine descend dans
l’arène et vient moucher cet insolent.
Mais Depardieu, finalement, avait
bien entendu que c’est sa démarche qui avait été qualifiée de « minable ».
Il décide de s’exilerencore plus loin au nord-est, sous
des cieux plus cléments.
On l’annonçait mardi au
Montenegro. Poussera-t-il jusque sur le chemin de Damas où il aura la
révélation que Bachar El Assad, finalement, est un grand démocrate ?
Comme le dit la mère de ses enfants,
« c’est quelqu’un qui s’enthousiasme
pour des gens assez forts, qui ont du charisme et qui sont pas toujours
irréprochables. »
Elle dit aussi assez
justement : « Je pense qu’il
sert à tout le monde, à dire le mécontentement. D’un côté comme de l’autre,
tout le monde s’en sert. Les gens sont déchaînés parce qu’il
représente beaucoup. Justement, il représente la France. »
Mais elle se trompe peut-être en
concluant : C’est d’autant plus absurde de taper comme
ça sur lui, alors qu’il était peut-être si facile peut-être de le
récupérer. »
Il entame une tournée d’adieux et
ne veut pas être récupéré. Il veut finir irrécupérable, même pour « le
président des riches » qui avait provoqué son enthousiasme l’an
passé.
Après le tour de Gaule d’Astérix,
ce n’est pas le tour du globe d’Obélix. C’est celui de Gros Corps Malade qui
déclare sans rire : « Je pars
parce que vous considérez que le succès, la création, le talent, en fait, la
différence, doivent être sanctionnés. ».
S’il était encore capable de rire de lui, nous lui
rappellerions deux dialogues.
L’un de Goscinny :
Numérobis : […] Amonbofis, un architecte concurrent qui veut
toujours me nuire … Il a beaucoup de talents... Astérix : Il est doué ? Numérobis : Non il est riche. Il a
beaucoup de talents d’or. C’est la monnaie que nous utilisons.
Et un
autre que Jacques Prévert (toujours lui), met dans la bouche d’Arletty, celle
qui avait le cœur français et le cul international :
« Vous êtes extraordinaire, Edouard. Non seulement vous êtes riche,
mais encore vous voulez qu’on vous aime comme si vous étiez pauvre ! Et
les pauvres, alors ! Soyez raisonnable, mon ami, on ne peut tout de même
pas tout leur prendre, aux pauvres !
J’ai rarement lu un article si prétentieux et ridicule. Cinq ans de sarkozysme, et vous hésitez à vois déclarer simplement de droite et décomplexé.
Je ne suis pas un chaud partisan du mariage « pour tous ». Je vois bien les postures de ses défenseurs. Mais ce sont des gens comme vous, ou comme votre petite soeur Frigide, qui me donne envie de le défendre.