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La taxe sur les transactions financières ou l’inefficacité couplée à l’injustice

Une taxe sur les transactions financières devrait voir le jour en 2016 au sein de la zone euro. Vieux serpent de mer que l'on ressort au gré des maladies de notre économie, cette mesure n'en est pas moins décriée pour ses aspects inefficaces et injustes. Il s'avère qu'une taxe Tobin à l'européenne serait en effet bien loin de dissuader la pratique du trading à haute fréquence, et porterait atteinte, indirectement, aux particuliers.

Il est des mesures qui ne font, et ne feront sans doute jamais consensus. Pire, il en est qui amèneront les plus orthodoxes de la pensée à retourner leur veste avant de la remettre à l'endroit. La taxe sur les transactions financières (TTF) est tout cela à la fois ; une mesure polémique qui ne trouvera jamais de compromis, et fait déjà virer sa cuti à bon nombre d'hommes politiques. A son tableau de chasse, pour la France, Nicolas Sarkozy et Pierre Moscovici, droite et gauche réunies. Le premier s'y oppose catégoriquement en 1999, la qualifiant même d' « absurdité  », avant de relancer le débat qui mènera à l'adoption par le gouvernement Ayrault d'une TTF en 2012. Quant aux vicissitudes du second sur la mise en place d'une taxe à l'européenne, il semblerait que l'appât d'un fauteuil au sein de la Commission Jüncker l'ait considérablement assagi. Est-ce le même homme qui dénonçait en 2013 la proposition de Bruxelles et qui assurait pourtant en 2014 avoir « toujours été dedans  » ? La quête du pouvoir fait dire bien des choses ; des choses dont il convient ici d'extraire l'ardente vérité : pire qu'inefficace, une TTF à l'européenne serait également injuste.

Une TTF plus ou moins harmonisée qui n'empêchera pas les fuites de capitaux

Au départ, en 1972, le prix Nobel d'économie James Tobin envisage une taxe sur les transactions monétaires propre à endiguer la volatilité du marché des devises. Alors que le système monétaire de Bretton Woods est de plus en plus critiqué, voire inappliqué, l'économiste keynésien cherche à limiter les effets néfastes des spéculations à court terme, dans le cadre du système des changes flottants. Des « taxes Tobin » fleurissent alors un peu partout, comme une mode en somme ; mais une mode qui passe plus vite que prévu, désavouée, voire conspuée. En 1990, la Suède abroge le texte instituant cette mesure, après 10 ans de marasme et de fuite des capitaux hors du royaume. Une taxe à l'échelle d'un pays n'est pas la solution.

Pourtant, la France adopte elle aussi une TTF en 2012. Ses intentions sont louables – atténuer les effets de la crise mondiale post subprimes – mais manifestement insuffisantes ; censée rapporter quelque 1,5 milliard d'euros par an, la taxation à hauteur de 0,2 % des actions en France n'en produit que la moitié. Les investisseurs ont vite compris qu'il fallait migrer vers des marchés non taxés pour éviter la hausse des coûts de leurs transactions. Loin de tirer les conséquences de l'inefficacité patente de sa taxe, la France est aujourd'hui partie prenante – et l'une des plus vigoureuses – à la TTF qui devrait être mise en place au sein d'une partie de la zone euro en 2016. Non seulement celle-ci ne s'appliquera pas à l'ensemble des Etats membres ayant pour devise l'euro, mais il semble évident que les fuites de capitaux désastreuses d'hier se répèteront demain.

La TTF loupe sa cible

Ainsi, le trading à très haute fréquence, loin d'être découragé, sera toujours vaillant. Pourtant, c'est précisément l'une des pratiques qu'il convient d'atténuer. Pour certains spécialistes, afin de responsabiliser les marchés financiers et leur rendre un rôle de financement de l'économie, il vaudrait mieux limiter la vitesse de certains échanges plutôt qu'instaurer la TTF. Aujourd'hui, certains traders ont un avantage compétitif considérable due à leur connaissance des fluctuations de valeurs avant les investisseurs finaux, d'après Stéphane Voisin, responsable de la recherche ESG chez Kepler Cheuvreux. Ainsi, cette mesure hautement décriée n'est pas adaptée car « elle vise mal  » selon lui. Au lieu d'affecter les institutions financières, la TTF encouragera des pratiques néfastes, in fine, pour les entreprises et les particuliers.

Pourtant, d'après les termes mêmes du ministre français des Finances, Michel Sapin, « la taxation n'est pas forcément faite pour rapporter, mais pour dissuader  ». La sortie médiatique est habile ; elle légitime les mauvais résultats enregistrés par la taxe française ces deux dernières années, en même temps qu'elle feint de protéger les plus faibles. Seul l'avenir devrait donner raison aux détracteurs de la TTF, qui connait toutefois quelques pierres d'achoppement, au nombre desquelles la taxation des produits dérivés. Cette mesure nourrit de grands débats franco-allemands depuis des mois ; la France, dont les banques sont pionnières en la matière, refuse une telle pratique.

La TTF est donc loin de faire consensus, même au sein des pays qui souhaitent de concert l'instaurer. Pendant longtemps qualifiée de « mesure de gauche », la destruction massive d'emplois et, par là, la déliquescence sociale qu'elle entrainerait, suffisent à lui attribuer au contraire un statut d'apatride politique ; ni de droite ni de gauche. Un simple serpent de mer qui mérite, au fond, de couler sans bruit.


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11 réactions à cet article    


  • sylvie 17 novembre 2014 19:49

    Oui bref, voir le « débat » en Belgique pas de taxes ni impots sur les plus values voilà, tout l’effort est reporté sur le revenu (de plus en plus bas) et sur la tva, pas grave attendons encore les nouveau chiffres sur la conso comme ceux du Japon qui viennent de tomber et ici ( à venir) diagnostique : le navire coule normalement mon capitaine !


    • Captain Marlo Fifi Brind_acier 17 novembre 2014 20:00

      La taxe Tobin verra le jour, si Washington est d’accord...

      Le Directeur du Trésor Américain, Geithner, s’est invité à une réunion des Ministres des Finances européens. C’était en Pologne, à Wroclaw.
      Plusieurs pays européens voulaient cette taxe sur les transactions financières... : « You can’t ! » .

      «  Quand le Trésor américain rappelle les européens à l’ordre »


      Si l’ Europe est comme elle est, c’est que les USA l’ont voulue ainsi, au service de leurs intérêts.
      « Pourquoi l’ Europe est comme elle est ? »

      • lsga lsga 17 novembre 2014 20:12

        mais oui... c’est ça... C’est en instaurant une taxe sur les marchés financiers qu’on va renverser la Finance...

         
        N’importe quoi fifi, n’importe quoi...

      • T.REX T.REX 17 décembre 2014 22:28

        La taxe Tobin se débine devant le lobbying des banques françaises.

        Tobin or not Tobin, mais peut-on ne pas naître et être has-been ?

        Notre Robin des bois se débobine
        et ses électeurs font une drôle de bobine
        Sommes nous dirigés par une sorte de Mister Bean ?
        A nous les haricots !
        Pendant que le robinet de la finance continu à fuir.


      • Spartacus Lequidam Spartacus 17 novembre 2014 21:31

        Avant de mourir Tobin écrivait ceci :
        « J’estime être aujourd’hui mal compris. J’estime aussi qu’on s’est abusivement servi de mon nom pour des priorités qui ne sont pas les miennes. La taxe Tobin n’est en rien un tremplin pour les réformes dont les gens ont besoin. Mais que faire ? » [...] Les intentions sont bonnes, j’imagine, mais les propositions qu’ils font manquent de réflexion. ».....

        Tobin regrettait que son non soit associé à cette taxe  

        • adeline 18 novembre 2014 09:10

          son NOM Spartacus, sinon avant de mourir friedman a dit : « je n’aurais jamais crû que des états mettent en oeuvre mes théories » le lit de mort révèle beaucoup de curiosités non ?


        • charlotte 18 novembre 2014 00:02

          ah ah ah quelle mauvaise fois
          dites nous aussi que les paradis fiscaux sont bons pour l’économie et l’emploi aussi


          • Spartacus Lequidam Spartacus 18 novembre 2014 08:40

            Les paradis fiscaux permettent de sauver les fond destinés aux investissement de la gabegie étatiste ou il finiraient en fumée.

            Or l’investissement est le seul créateur efficient d’emploi. 
            Par exemple la France est le 2eme pays de rapatriement d’investissements de capitaux dont une majorité offshore qui ne sont que de l’argent qui est passé par les paradis au lieu de disparaître dans des pharaonneries de politiciens qui vous expliquent au 20h que ça ne coûte rien c’est l’état qui paye.

            Les paradis n’existes uniquement parce qu’il y a des « enfers fiscaux ».

            La Suisse, le Luxembourg sont des « paradis », vous croyez que les gens y vivent moins bien ou mieux qu’en France.

          • toutounes 18 novembre 2014 13:50

            Si tout le monde faisait comme la Suisse on aurait moins de politiques incapables et corrompus élus et le peuple serait plus souvent impliqué dans les orientations du pays... Attention je ne dis pas que ce serait mieux mais on pourrait moins se plaindre d’élus élus sur des programmes jamais tenus.

            Pour le reste la France n’a plus des masses d’industrie (l’automobile de Renault est fabriquée au Maroc) donc je me demande bien comment on s’en sortirait ...
            Ces pays s’enrichissent car des lois stupides sont votées ... par des incapables que vous mettez et remettez au pouvoir depuis 40 ans, même quand ils tapent dans la caisse.
            Le jour où les français comprendrons que c’est leur faute si on en est là et pas celle des autres on aura fait un grand pas en avant.
            Moi j’ai compris, je suis parti et franchement l’herbe est bien plus verte ailleurs, et pas dans un « paradis fiscal ».
            L’autre solution serait le boycott des entreprises qui ne jouent pas le jeu. Moi j’ai fermé mes comptes dans toutes les banques sauf la banque postale car oui BNP, SG, CA, ... ont toutes des antennes qui marchent très bien dans les paradis fiscaux ...

          • toutounes 18 novembre 2014 13:43

            L’auteur a bien raison ... Autant l’idée de taxer les transactions financières pour :

              - Ramener un peu d’argent dans les caisses
              - Changer les comportements malsains d’une certaine finance
            est une bonne idée sur le fond comme sur la forme, autant nos politiques sont des incapables.

            La TTF mise en place en France ne fait absolument ni l’un ni l’autre car elle a poussé des traders confirmés comme novices à aller « jouer »ailleurs => Perte de rentrées fiscales pour la France. Mais en plus cette TTF s’applique sur des actions de père de famille, autant dire que NI le trading haute fréquence (en fait tout l’intra day), NI les produits dérivés ne sont touchés. Ce sont pourtant ces modes de trading qui font que tout est partie en vrille dans la finance moderne => Trader rapidement pour voir du rendement même minime rapidement, et trader des produits tellement complexe que personne ne comprend rien ...

            Désolé mais cette TTF appliquée en France est une hérésie. Il faudrait taxer, et pas qu’un peu, tous les trades en intra-day et les produits dérivés complexes, ainsi que les trades sur les matières premières qui ne sont pas livrées physiquement (spéculation). Mais non comme les politiciens ne comprennent rien ils font n’importe quoi ...

            • Peretz1 Peretz1 18 novembre 2014 21:12

              Ne pas confondre taxe Tobin et TTF. La première concerne les devises entre elles, la deuxième se ferait pays par pays. Il y a toujours deux efftes à une taxe, la dissuasion et le rapport. Dans le cas de la dissuasion c’est un mauvais calcul car les financiers iront ailleurs pour prêter l’argent dont on a hélas besoin. Ou alors les taux d’interêt seront remontés pour compenser la perte des prêteurs.C’est donc un mauvais calcul. J’en profite pour dire qu’une mesure importante devrait être prise : la disparition progressive de la TVA et son remplacement par l’ancien système, taxe sur le chiffre d’affaires, et I.R repris, comme avant. La TVA ne su justifie plus ! Les U.S.A sont restés à ce système et s’en portent mieux.

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Etienne


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