Le tri sélectif est entré dans les mœurs. Si cela n’est pas toujours parfait c’est que la motivation première pourrait être améliorée. En effet, le citoyen responsable qui fait correctement son tri travaille en réalité pour un recyclage effectué parfois par une communauté de commune, mais en règle générale par le secteur privé ce qui n’est pas forcément la panacée. Donc, il fait un travail gratis pour une entreprise qui est bien heureuse de voir une partie du boulot réalisée par un consommateur bonne poire qui en plus paye pour qu’on lui ramasse ses déchets. Cependant, personne ne râle de trop car on avance alors que le tri sélectif est un geste citoyen aidant à sauver la planète, ce qui sert bien les intérêts du privé et aide à faire passer la pilule.
Toutefois, après le tri, le traitement des déchets reste un sujet récurrent puisque l’on entend des tollés indignés lorsque s’installent ou sont en prévisions de nouveaux incinérateurs, à juste titre d’ailleurs. Il est alors évident que la réduction des surplus de consommation et un autre mode consumériste sont les priorités, que ce soit dans l’espace ménager, industriel ou autre.
Cependant, des solutions simples allant dans le sens de la relocalisation s’offrent à nous si l’on veut bien s’y attarder. D’abord il faut éviter le piège des produits de substitution à la poche plastique usuelle, à la bouteille du même matériau traditionnellement issus des substrats du pétrole car ceux qui sont préconisés comme produits biodégradables sont issus des polymères tirés des amidons de céréales pour la plupart, ce qui revient une fois de plus à détourner l’agriculture nourricière de son but initial à l’instar des agro-carburants. Pour ne pas retomber dans ce travers qui crée automatiquement un déséquilibre alimentaire sur la planète nous chercherons ailleurs des solutions. Et si on doit remplacer en partie les anciennes poches, bouteilles, etc., par d’autres issues de l’agrobusiness cela doit se faire avec modération.
Cela nous permet de dire sans contestation possible que la surconsommation voulue par le productivisme capitaliste ou communiste est néfaste aux bons rééquilibres consuméristes. Pour aller vers de vraies solutions on privilégiera le verre consigné par exemple, qu’il soit recyclé ou fabriqué, ceci ayant l’avantage de pouvoir remettre en activité de petites verreries coopératives comme celles courantes en début du XXéme siecle, l’avantage subsidiaire étant un transfert de main-d’œuvre et une localisation de celle-ci. On peut aussi utiliser un conditionnement appartenant à l’acheteur, ce qui remet tout à fait en cause les formes de commerces actuels dans la mesure où l’on va aussi favoriser le commerce de proximité. Ce sont quelques idées autour desquelles il est intéressant d’engager un travail de réflexion. On peut d’ailleurs s’inspirer de l’amateur de légumes frais et gouteux qui va à l’Amap de proximité plus facilement avec un panier d’osier plutôt qu’avec un vulgaire cabas en plastique réservé aux achats dans un supermarché éloigné, celui d’une banlieue déshumanisée.
Il y a aussi et surtout les sempiternels déchets papier que l’on doit à une publicité intempestive, le pire c’est que les démagogues de la surconsommation ont le culot de faire remarquer qu’ils utilisent du papier recyclé pour nous en abreuver sous prétexte qu’ils ne « déforestent » pas, sans doute ont-ils oublié de dire que l’encre utilisée n’est pas recyclable et pour beaucoup assez nocives. La meilleure solution est incontestablement une éradication de la pub, ça réglera beaucoup de problèmes et ouvrira aussi la porte à une autre conscience sur nos besoins, nécessitant l’exclusion du système marchand des ressources alimentaires, de santé, d’éducation, de transport…
Après avoir diminué le tonnage de nos déchets, les avoir limité dans la mesure du possible, pour le reste ceux-ci se concentreront autour des déchets périssables et ceux recyclables dont les préférences iront vers le verre, le papier, les métaux ferreux et non ferreux, en éliminant progressivement ceux issus de la transformation du pétrole dans la mesure où se sont eux les plus polluants et peu recyclables à long terme. N’oublions pas les biodégradables qu’il faudra manipuler avec prudence ainsi que nous en avons déjà parlés. Privilégions surtout une consommation moindre et plus responsable, il en dépend de l’avenir de la planète. Reste maintenant le traitement de nos déchets.
Comme on commence à connaître les systèmes à rejeter comme les incinérateurs, les décharges à ciel ouvert, pour ne pas faire un tour complet autant qu’inutile nous nous arrêterons sur une façon de faire d’avenir, la méthanisation.
Sans entrer dans des détails techniques très poussés, un petit rappel du principe nous permettra d’en comprendre les intérêts. On prend simplement les déchets organiques que l’on fait digérer par des bactéries méthanogènes dans un réacteur. Bactéries présentes dans les déjections animales par exemple et qui ont la particularité de vivre sans oxygène. Digestion donc en anaérobiose qui permet la production de méthane. Biogaz qui va servir pour la production d’électricité ou de chaleur, le résiduel, sous forme de matière sèche, fait quant à lui un excellent compost. Néanmoins, le procédé n’est intéressant que dans la proximité car compresser le gaz pour le transport serait très onéreux et ne comporte que peu d’intérêt puisque la matière première est disponible un peu partout.
Le principe est simple, une cuve hermétique appelée digesteur où le contenu y est chauffé entre 40° et 50° pendant qu’un brassage s’effectue épisodiquement pour éviter la formation d’un croute gênant les émanations de gaz, on estime la durée de cette opération entre 30 et 40 jours. On obtient ainsi un biogaz où le méthane occupera la part belle que l’on estimera aux alentours de 60%.
Comme on le voit, le système n’est pas compliqué et s’il n’est pas encore la panacée car par exemple coûteux lorsque l’on veut l’introduire dans un réseau de chaleur collectif à grande échelle et pour la production d’électricité est encore un peu polluant, mais beaucoup moins que le charbon et les déchets sont réutilisables à l’inverse de ceux du nucléaire que l’on doit les enfouir puisqu’ils sont particulièrement dangereux, alors que les autres font pousser les salades…
Une autre erreur de plus en plus courante à propos de la méthanisation c’est de vouloir l’industrialiser, ce qui pour l’instant est peu rentable et abscons comme raisonnement. Cela par contre nous dirige vers de petites unités qui vont permettre aux citoyens de s’approprier la chaîne de traitement de leurs déchets. En installant des unités locales gérées par exemple par des coopératives de quartiers où de villages on maîtrise alors complètement nos rejets, allant même jusqu’à produire de l’énergie ce qui est par conséquence tout bénéfice pour la collectivité. On pourrait même espérer que le produit de la revente permette de payer la collecte, les poubelles et containers, d’ailleurs un ramassage différent, ainsi qu’il commence à se faire dans quelques communes qui utilisent le cheval, va en complément et s’adapte bien à ce concept.
Comme on le voit, il s’agit d’une conception tout à fait différente du traitement de nos déchets, une prise en charge directe par le consommateur, afin de sortir du système marchand qui fait que l’on va payer deux fois une boiîe de conserve, à l’achat et dans le coût des ordures ménagères après l’avoir en sus triée et parfois nettoyée.
Justement, la boîte de conserve, que va-t-on en faire ? Naturellement, on va la recycler, mais au lieu de la diriger vers une grande entreprise qui va la compacter, le stocker, puis l’expédier vers une fonderie éloignée, pourquoi ne la traiterions nous pas sur place ? Rien de plus facile…
Ce qui est dommage, c’est que l’on ne regarde pas plus souvent autour de soi trop bercé par le ronronnement productiviste des grandes unités de productions capitalistes ! En Italie, par exemple, il n’est pas rare de voir de petites unités de fabrications qui vont de la fonderie au produit fini. En France, récemment, j’ai eu l’heureuse surprise de découvrir une petite fonderie familiale qui fabriquait allégrement dans un petit village de campagne. Le seul reproche que l’on pouvait faire à cette petite affaire c’est qu’elle utilise du coke comme combustible. Il eut sans doute été préférable de fonctionner avec un four Martin, four électrique, électricité qui pourrait être fourni par la méthanisation locale. Donc, en relocalisant, pourquoi ne pas traiter directement nos métaux ferreux et non ferreux pour une production locale, une fois de plus le déchet trié rapportera à la collectivité.
Mais toutes ces réflexions, ce concept ne sont envisageables que si l’on sort du système marchand, d’un ultralibéralisme galopant et d’une mondialisation dont le seul but est l’exploitation de l’individu, pour concevoir une société plus sobre et plus solidaire, où l’humain passera avant le profit. Il en est aussi de même avec l’air, l’eau, le soleil que le citoyen doit se réapproprier, l’exploitation par la collectivité et pour la collectivité et non réservée à une oligarchie dominante en tirant seule les bénéfices. Il s’agit alors d’une façon toute autre de voir nos sociétés et ce rééquilibrage ne peut se faire qu’à travers une décroissance soutenable des pays développés.
On peut conclure aussi, que les axes de la recherche doivent être tout à fait différents de ceux des chercheurs inféodés au capitalisme vert, à une aberrante croissance verte, mais aller véritablement vers une amélioration de l’environnement en dehors de toute contingence mercantile. C’est pourquoi que, lorsqu’un grand patron finance un film, un documentaire qui se veut de portée écologique par la dénonciation de nos erreurs, l’on ne peut que rester dubitatif sur sa motivation profonde, et surtout n’apporter que peu de crédit à cette sorte d’écologie spectacle qui n’est qu’une forme d’exutoire.
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