Quartier d’affaires de La Défense, un mode de gestion dépassé
Le quartier d’affaires de La Défense, par sa place en Europe et en Ile-de-France, ne peut être propriété des seuls communes de Courbevoie et Puteaux et Conseil général des Hauts-de-Seine. S’il est indispensable que l’ensemble des recettes fiscales qui en proviennent soient partiellement dédiées à son entretien, il est tout aussi nécessaire que la gouvernance de ce site prenne en compte les enjeux économiques des entreprises présentes et aussi les enjeux urbains de toute l’Ile-de-France. La proposition de loi déposée par le sénateur Karoutchi le 20 décembre 2006 au Sénat va exactement en sens inverse : elle renforce les pouvoirs dérogatoires de l’Etat, écarte la Chambre de commerce, le Conseil régional et la Ville de Paris et donne à ce site unique en France une gouvernance autoritaire et centralisée, sans concertation ni mesure d’impact, avec un projet urbain dépassé en termes de spéculation foncière et de conséquences environnementales. Précision donne bien la tonalité de ce mode de gouvernance altosequanais : les administrateurs n’ont pas été destinataires de la proposition de loi qui n’a donc fait l’objet d’aucune présentation ni débat en CA...
N. Sarkozy, ministre de l’Intérieur et
des Collectivités locales, a enfin abandonné la présidence de
l’établissement public de La Défense, qu’il occupait depuis deux ans
alors qu’il en exerçait, par ses fonctions au gouvernement, la tutelle.
La
fin de ce conflit d’intérêts marque aussi l’abandon officiel des grands
projets de développement, le ministre de l’Equipement D. Perben ayant
mis un frein aux ambitions pharaoniques de développement de ce quartier
d’affaires qui doit d’abord être rénové en termes d’enjeux de
développement durable (chauffage, climatisation, transports et
circulation des salariés, des fournisseurs et des visiteurs) et de
qualité du bâti (câblage haut débit, normes de sécurité, conditions
d’accueil des salariés, coûts de fonctionnement et de gestion).
Toutefois,
l’établissement public est dans une situation financière très
délicate puisque les recettes fiscales vont aux communes de Courbevoie
et Puteaux et les dépenses d’entretien... à l’EPAD.
R. Karoutchi,
sénateur UMP, vient donc de déposer le 20 décembre une proposition de
loi ahurissante au Sénat, dont vous trouverez le texte intégral
ci-dessous et qui sera débattue en accéléré le 18 janvier, pour essayer
de faire passer en fin de mandature ce que son chef bien-aimé n’a pas
réussi à négocier :
- concentrer la gestion du site entre les seules mains des communes de Puteaux, Courbevoie et du Conseil général, oubliant au passage qu’il s’agit d’un site d’intérêt économique régional et européen (le conseil régional et la chambre de commerce et d’industrie sont au CA actuel) et que la loi n’a pas le doit d’obliger des collectivités locales à s’associer entre elles, c’est anticonstitutionnel
- transformer les règles d’urbanisme qui prévalent sur un périmètre d’intérêt général, bases juridiques de la création d’établissements publics d’aménagement, en règles d’intérêt public, ce qui reviendrait à essayer de transformer la construction de bureaux, opérations privées en général très rentables pour les promoteurs en opérations assimilables à celles de lycées ou de transports, opérations d’intérêt public sans but lucratif.
La Commission des affaires économiques du Sénat, que nul n’oserait
qualifier de gauchiste - le Sénat ayant été de majorité de droite tout
au long de la Ve République, demande d’ailleurs purement et simplement
la suppression de la première partie dans le rapport présenté par Dominique Braye, sénateur UMP des Yvelines.
Elle
propose par ailleurs de modifier de façon très particulière le code de
l’urbanisme pour sécuriser les risques financiers et juridiques
inhérents à une telle opération. En effet, que se passerait-il si les
habitants de Courbevoie ou de Puteaux, par exemple, n’acceptaient pas des
immeubles de grande hauteur supplémentaires dans leur plan local
d’urbanisme, ou bien si le Conseil régional se fâchait de voir des
bureaux supplémentaires construits sans que le nombre de logements
prévus par la loi soit réalisé en parallèle...
La loi n’étant pas
faite pour régler des situations particulières, il vaudrait mieux
revenir à ce qui avait été prévu par le gouvernement Jospin : la fin de
la mission de l’Etablissement public d’aménagement, la mise en place
d’une gouvernance publique cohérente et négociée de ce site majeur et
le financement partagé des travaux de remise en état nécessaires. Après
tout, ce serait moins coûteux que la couverture de l’avenue du général
de Gaulle à Neuilly, et combien plus profitable et pour les entreprises
et salariés de La Défense, et pour les habitants des communes autour
qui sont saturées par les circulations générées par le site, et pour les habitants de communes de l’Est ou du Sud de Paris qui préfèreraient
une répartition plus équilibrée de l’offre d’emplois...
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