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Comment Poutine a scellé le sort de Nabucco

 Sous l’égide du premier ministre russe Vladimir Poutine et de son homologue français François Fillon, EDF et Gazprom ont paraphé la semaine dernière un accord assurant la participation à hauteur de 10% du groupe français dans la construction du gazoduc South Stream, marquant le début d’une coopération de long terme entre les deux groupes a précisé le président d’EDF Henri Proglio. South Stream, c’est le projet russe pour approvisionner son gaz en Europe via la Mer Noire, et permettant ainsi à la Russie de contourner la Géorgie. Pour le premier producteur gazier mondial, l’assurance de l’engagement et du soutien de la France dans la construction de South Stream est un pas décisif dans l’objectif de préserver l’hégémonie du gaz russe en Europe , qui souhaite limiter sa dépendance envers les réserves sibériennes : elles représentent aujourd’hui 25% de ses approvisionnements, et, devrait se situer à plus de 70% dès 2020. Or, la nationalisation progressive de Gazprom (2004 et 2006) fait craindre à l’UE une utilisation politique du groupe, tandis que les crises ukrainiennes (cf.article) à répétition au cours des cinq dernières années discréditent la fiabilité de la Russie en tant que fournisseur.

C’est ce contexte qui a favorisé l’émergence du projet "Nabucco", un gazoduc de 3300 kilomètres, qui permettrait d’alimenter l’Europe en gaz, qui ne provienne pas des réserves de Sibérie, en passant par la Turquie. Un projet vecteur d’unité pour l’Europe, qui plus est ! Or, l’Allemagne de Schröder et l’Italie de Prodi puis Berlusconi ont cédé aux sirènes russes qui vantaient dans un même temps les mérites de North Stream et Sud Stream, deux projets sous-marins, qui contournaient ainsi les pays de transit "à risque". En conséquence, le poids stratégique de Nabucco s’en est trouvé amoindri, et seule la France, à qui la Turquie refusait une participation en raison de sa position sur la génocide arménien, avait les moyens de préserver l’attractivité du projet. En son absence, seuls la Bulgarie, la Hongrie, l’Autriche, la Roumanie, la République Tchèque et la Turquie s’embarquent dans l’aventure.

De plus, Vladimir Poutine avait souligné, au début d’année, le flou relatif qui règne quant à l’origine du gaz que transportera Nabucco : la production des pays d’Asie Centrale ne représente que 5% de la production mondiale, sans compter que l’Ouzbékistan et le Turkménistan restent sous protectorat russe de facto : leurs liens avec leur géant voisin restent trop étroits pour que l’Europe y voit l’espoir d’une dépendance gazière moins prononcée vis-à-vis de la Russie. D’autant plus que cette dernière s’active pour s’assurer l’acquisition de champs au Turkménistan ou en Ouzbékistan. Quant à l’Irak, le climat géopolitique l’empêche de l’inscrire au rang des fournisseurs fiables et sécurisés. Sans compter qu’un nouveau pas pourrait être franchi d’un moment à l’autre dans le cadre des tensions liées à la question kurde, alors que les champs gaziers irakiens se situent au Kurdistan. En somme, comme l’assure M.Poutine, Nabucco ne peut être alimenté sans l’Iran. Hors de question pour l’UE, qui n’envisage guère dépendre non plus de la Russie mais de l’Iran : blanc bonnet et bonnet blanc.

En plus de la France, Vladimir Poutine a obtenu, sans que l’accord n’obtienne une résonance médiatique en France, la participation financière de l’Autriche à South Stream, sans que cette dernière ne mette en cause son implication dans Nabucco : quoi qu’elle en dise, le gazoduc européen devient par la même occasion pratiquement caduque. En une dizaine de jours, Vladimir Poutine s’est donc assuré du soutien de la France et de l’Autriche, scellant ainsi le sort de Nabucco. Un coup de maître....

A retrouver dans son contexte original sur http://lenouvelhebdo.com


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4 réactions à cet article    


  • manusan 3 décembre 2009 10:44

    Le prix du gaz s’effondre, c’est le moment des grandes opérations de séductions avec le voisin Russe ; ça tombe bien, les comptes sont dans le rouge foncé. Nabucco était rentable qu’avec un prix du gaz élevé, le chantier restera en jachère en attendant que le prix remonte, et ça peut durer longtemps. Plus que l’UE ou la Russie, c’est le prix qui décide.


    • krolik krolik 3 décembre 2009 14:17

      Ah toujours l’entremet Franco-Russe... !!

      @+


      • wesson wesson 3 décembre 2009 19:53

        Bonjour l’auteur,
        Allez, on va vous le dire pour pas vous faire languir, et vous rendre un petit peu moins naïf !

        Ce que les ex pays de la sphère soviétique ont obtenu de leur allégeance aux Américains : Des armes, des tas d’armes achetés à crédit, et des programmes immobiliers, des tas de programmes immobiliers achetés à crédit. Normal, les armes, l’immobilier et les crédits, c’est ce que les Américains ont de mieux à proposer.

        Les armes, elles ont servi en Géorgie avec le succès que l’on connait. L’immobilier, il fait là bas ce qu’il fait partout ailleurs c’est à dire se casser la gueule.

        Reste plus que les crédits, et trouver de quoi à payer le chauffage pour l’hiver. Et demander de nouveaux crédits pour se chauffer l’hiver, ben les Américains ne sont plus trop intéressé là ...

        Bref, Les dogmes c’est bien joli, les russes sont méchants surement, mais ils ont du gaz, et les autres n’ont visiblement pas les moyens d’en envoyer avant une bonne pincée d’années, qui plus est à un cout plus important .

        C’est dire si il y a finalement une parfaite logique derrière ces accords. Et si il l’avait fallu, c’est même avec Staline que on aurait signé en pareil cas !!!


        • VivreenRussie VivreenRussie 4 décembre 2009 16:12

          le 05/12/2008 oui il y a un an et non 10 jours...
          www.south-stream.info/index.php ?id=38&L=1&tx_ttnews[backPid]=37&tx_ttnews[tt_news]=15&cHash=c96696bc12

          « To implement the onshore section of the Project outside Russia, intergovernmental agreements have been signed with Bulgaria, Serbia, Hungary and Greece. A relevant draft agreement with Slovenia is being coordinated ; another one is to be signed with Austria. »

          Quand a Nabucco, fair play ou humour russe :
          http://www.south-stream.info/index.php?id=30&L=1
          « Is South Stream competing with Nabucco ?
          South Stream and Nabucco are neither competitors nor mutually exclusive pipeline projects. Projections show that Europe will need more additional gas than the combined capacities of South Stream, Nabucco, and Nord Stream. If both South Stream and Nabucco are to be implemented, the South Stream consortium will closely cooperate with Nabucco in order to optimize gas flows and guarantee reliable supplies. »

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AJ


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