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Lula : Le jugement

Attendu par les uns, redouté par les autres, le jugement de la candidature de Lula aux élections présidentielles brésiliennes a eu lieu ce vendredi 31 août 2018, en session extraordinaire, bousculant même la procédure. Une date lourde de symbole quand on sait que c’est le 31 août 2016 qu’a été officiellement destituée la présidente Dilma Rousseff.

Après un réquisitoire de deux heures, le juge-rapporteur du dossier d’invalidation de la candidature de Lula rend son verdict : Lula est inéligible au vu de la loi du “casier vierge” (Ficha Limpa) et le recours du Comité des Droit de l’Homme de l’ONU est sans valeur aux yeux de l’ordonnancement juridique brésilien.

À sa suite, le premier juge du Tribunal Supérieur Électoral (TSE) à prendre la parole, juge Edson Fachin, entame une argumentation d’une heure et vingt minutes au cours de laquelle il démontrera, point par point, à la fois la force de la loi de la “Ficha Limpa” rendant Lula inéligible, mais aussi, et surtout, l’obligation de l’État brésilien, signataire d’un traité ratifié par le Parlement, de s’aligner sur la décision de ce Comité onusien et se prononce en faveur de la candidature de l’ex-chef de l’État, et ce malgré sa condamnation, peu importe si justifiée ou non.

Il terminera sa plaidoirie avec une fermeté sans appel en citant le juge de la Cour Suprême américaine, Stephen Breyer : « Les juges peuvent avoir eu une expérience politique, et peuvent personnellement avoir une opinion politique donnée, mais lorsqu’ils revêtent leur robe ils sont politiquement neutres, ils ne favorisent ni une partie, ni l’autre. Si un juge pense agir par idéologie, il sait qu’il fait fausse route, et il essaiera de l’éviter. » Et il conclura par ces mots : « Je suis certain, bien qu’il y ait des divergences sur ce point, que cette leçon s’applique à mon éminent collègue juge-rapporteur, et c’est également par cet éclairage que j’ai arrêté mes conclusions Madame la Présidente. »

Sans voix, celle-ci suspend la séance pour un quart d'heure qui se prolonge une quarantaine de minutes puis, conformément au script préétabli et malgré la voix dissonante du juge Fachin, la candidature de Lula est invalidée par 6 voix à 1. Toutefois, l’avertissement prononcé en session plénière sonne comme une reconnaissance implicite : Lula est l’objet d’une persécution politique.

Quelle sera la suite de cet imbroglio ?

À 36 jours du premier tour des élections, personne ne saurait le dire. Le Parti des Travailleurs va continuer à se battre sur tous les fronts légaux pour faire valoir le droit de Lula à participer aux élections, tout en poursuivant la campagne électorale par le biais du vice-président Fernando Haddad et de Manuela D’Ávila, elle aussi candidate à la vice-présidence et représentante de Lula.

Par ailleurs, des mouvements populaires spontanés pourraient s’organiser, comme cela s’est produit dès ce matin dans la ville de Curitiba où se trouve enfermé de président Lula et où des routes ont été coupées par des barrières de pneus incendiés en signe de protestation.

À mesure que le temps passe, le coup d’État s’embourbe dans ses propres contradictions. La stratégie de Lula et de sa défense fonctionne dans la mesure où elle pousse les putschistes dans leurs retranchements et les force à commettre des actes dont la cohérence échappe à tous les observateurs. En revanche, ce qui n’échappe à personne, c’est le traitement d’exception qui lui est réservé, comme en témoigne encore la visite de l’ex-leader du SPD allemand Martin Schulz, couverte par un article du Der Spiegel. Récemment, c’est Douglas Herbert qui commentait les incohérences du dossier Lula sur France 24 en affirmant : « Je pense que les affirmations de Lula sont très crédibles, car il semble y avoir une tendance profondément enracinée dans une société très divisée et polarisée qui ne veut pas voir Lula de retour à la présidence et tente par tous les moyens de l’en empêcher. »

Alors que la campagne électorale télévisée gratuite commence aujourd’hui, 1er septembre, le PT a maintenant devant lui 10 jours pour désigner le remplaçant de Lula sur les listes électorales, ce dernier n’ayant même plus le droit de voir son nom figurer sur du matériel de campagne. Définitivement, le Brésil est à la dérive et on se demande vraiment comment le pays se relèvera de cette lente agonie, malgré cette affirmation du juge-rapporteur qui pourrait porter à rire, vu que si c’était le cas, il n’aurait certainement pas besoin de le rappeler : « Le Brésil est un État de Droit démocratique. Nous ne sommes pas sous un régime d’exception. Toutes les Institutions fonctionnent normalement et le pouvoir judiciaire est un pouvoir indépendant. »

Face à ce cynisme, je me souviens de la phrase prémonitoire prononcée par le président de la Chambre des Députés, Eduardo Cunha, le 17 avril 2016, lors du vote qui a donné lieu à la procédure de destitution de Dilma Rousseff : « Dieu ait pitié de cette nation ! »


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35 réactions à cet article    


  • midavowake2 1er septembre 2018 21:07

    Ouiii mais... 


    Facebook et youtube sont innaccesibles sans mentir. J’accepte pour la cause de mentir, mais la configuration du terminal ne leur vas pas, faudrais que j’utilise un poste sacrifiable, que je le réinstalle ensuite....

    Le boch est ton seul vrai lien, et la configuration du terminal ne lui vas pas, mais je peut feinter avec l’outil qui vas bien, obtenir la page, l’ouvrir, la traduire, constater que c’est sans source.

    Ou qu’il est mon justiciadesizione.gov.ve/af15788 ? Mon télévisione-natzionale.ve/lulaprocessbuzz ? Mon média officiel ou main stream en portugais ?

    M’enfin c’est pas si mal. 4/5 par ce que c’est bien de rappeler l’existence des sud-américains et leurs péripéties de temps en temps.

    ++

    • Lucas Matheron Lucas Matheron 1er septembre 2018 23:37

      @midavowake2
      Désolé pour les vidéos FesseBouc, mais je n’ai pas réussi à les extraire.
      Quant à l’article du Der Spiegel, en allemand, j’ai pensé que ça pouvait se traduire en mode semi-automatique... La vidéo de Martin Schulz, sur YouTube, elle, complète un peu, non ? (bien que la traduction soit en portugais).
      Évidemment, je n’ai pas beaucoup de sources en français, vu que les médias français semblent avoir adhéré à la cause putschiste. Voir de dernier article de Claire Gatinois sur Le Monde, c’est du gratin !

      Si vous lisez le portugais, voilà un article sur cette visite de Martin Schulz sur le Deutsch Welle Brésil. Il est assez complet mais il n’y a pas de liens non plus. Le lien ne semble pas être une spécialité allemande... smiley 
      https://www.dw.com/pt-br/o-significado-da-visita-de-martin-schulz-a-lula/a-45309565

      En français cette fois, j’ai glané ce commentaire de Maurice Lemoine ici même. Il est de fin juillet, mais l’analyse de M. Lemoine sur la question géopolitique qui assiège Lula est de pleine actualité.
      https://youtu.be/LgnDW863UvA

      Merci pour vos commentaires.


    • Lucas Matheron Lucas Matheron 2 septembre 2018 01:25

      @Michel Maugis
      En effet, vous avez raison.
      Mais je n’ai pas voulu être indélicat dans mon commentaire et je faisais référence à une couverture quasiment « en temps réel » vu que je parle dans cet article d’évènements très récents.
      Il est certain que le Grand Soir publie des analyses tout à fait documentées sur le Brésil et Lula, et certainement sur les autres sujets qu’on y voit traités.
      Je reconnais que je suis tellement outré par les articles de madame Gatinois que j’ai généralisé sans le vouloir.
      Merci pour votre commentaire éclairant ! smiley


    • midavowake2 1er septembre 2018 21:10

      Désolé pour ce .ve inaproprié. Y avais que du ve en amérique du sud ces derniers temps, pas d’amalgames entre les portos :D


      • alinea alinea 1er septembre 2018 21:29

        Ça rend enragé ; on attend la


        • alinea alinea 1er septembre 2018 21:30

          @alinea
          (bug !) revanche : le peuple vote en majorité pour Lula !


        • Fergus Fergus 1er septembre 2018 22:57

          Bonsoir, alinea

          Lula écarté, ils auront l’extrême-droite !


        • Lucas Matheron Lucas Matheron 1er septembre 2018 23:47

          @alinea
          Lula a effectivement 40% des voix acquises. La grande question est de savoir si elles vont se reporter sur son vice-président Fernando Haddad. Le parcours qu’il fait actuellement dans tout le nordeste est encourageant, mais l’incertitude plane.
          Bien que le peuple vote en majorité pour Lula et que c’est quand même la majorité (54 millions) des électeurs qui ont été frustrés par la destitution de Dilma Rousseff, le travail de sape contre le PT a été tellement constant et violent que des pronostics trop optimistes seraient dangereux.
          Le PT va continuer la bataille juridique jusqu’aux dernières ressources, et on attend aussi une réaction de l’ONU, peut-être, et de la communauté internationale au vu du rejet de la décision du CDH par le tribunal électoral.
          Affaire à suivre, en tous cas !
          Merci pour votre interaction.


        • alinea alinea 2 septembre 2018 00:01

          @Lucas Matheron
          Si ces 54 millions n’arrivent pas à avoir le dessus, on n’a plus qu’à se flinguer ! car si même soudé le peuple ne peut rien, que pourra-t-il chez nous où il n’existe plus ?


        • Lucas Matheron Lucas Matheron 2 septembre 2018 00:34

          @alinea
          C’est bien la question qui se pose, et la réponse ne viendra que le jour de l’élection.
          C’est aussi pourquoi je disais, dans l’article précédent sur la dispute de la gauche pour « l’héritage » de Lula, le danger que représente cette division.

          De plus, indiscutablement, ce chiffre (54 millions) s’est peut-être effrité depuis 2014, époque de la dernière élection, et les affaires qui s’en sont suivies.
          C’est à suivre, et sur place les militants travaillent de pied ferme.
          Actuellement beaucoup de micro protestations spontanées éclatent quotidiennement dans tout le pays. Ce sont des protestations pacifiques et chaleureuses qui plaident pour Lula Libre ! Ça éclot ainsi un peu partout dans des lieux publics : gares, aéroports, centres commerciaux, concerts, sur des marchés, etc. 
          Bref ! On se bat ! Avec les armes qu’on a... smiley

        • Lucas Matheron Lucas Matheron 2 septembre 2018 00:37

          @Fergus
          C’est en effet ce qui est à craindre, et c’est pourquoi les militants de gauche se mobilisent pour reporter les voix de Lula sur son vice-président Fernando Haddad.
          Y parviendra-t-il ?
          Réponse le 7 octobre, jour du 1e tour !
           smiley


        • eau-du-robinet eau-du-robinet 1er septembre 2018 23:28
          Bonjour,
          .
          L’invalidation de la candidature de Lula a également suscité des réactions internationales, notamment de la part de ses alliés traditionnels, comme le président bolivien Evo Morales.
          .
          « Nous rejetons cette décision parce qu’elle porte atteinte à la démocratie et à la volonté du peuple brésilien », a-t-il publié sur Twitter.

          • Lucas Matheron Lucas Matheron 1er septembre 2018 23:55

            @eau-du-robinet
            Bonsoir,
            Oui, je suis curieux de voir les réactions internationales à la farce juridique qui tourne au vaudeville.
            Lors du jugement ils ont fait deux erreurs grossières. Une en ne respectant pas les délais légaux de la procédure (le jugement aurait dû avoir lieu la semaine prochaine seulement). Mais ils ne voulaient pas que Lula puisse bénéficier d’un seul instant de propagande électorale télévisée qui commence ce 1 septembre. Et ça a été la seconde erreur du rapporteur qui, dans sa sentence, a voulu interdire à Lula d’apparaitre, ne serait-ce que de nom. Il a dû reculer aujourd’hui car c’était une deuxième erreur de procédure puisque Lula a des recours sur ce jugement.
            Bref !
            Je suis content de savoir qu’Evo Morales a déjà réagi. Je l’ignorais. 
            Merci de votre contribution !


          • Xenozoid 3 septembre 2018 16:09
            @Lucas Matheron

            ils ont acordé le 3eme aquifere mondial,aux grandes multinationales occidentales bien sûr,les dégats sont fait depuis longtemps, certain appelle cela ratos de porao,rats d’égout

          • Lucas Matheron Lucas Matheron 3 septembre 2018 22:05

            @Xenozoid
            Justement, je demande à voir ces rats fuir le navire si le PT remporte les élections. Il va y avoir une sacré débandade !

             smiley

          • zygzornifle zygzornifle 2 septembre 2018 09:40

            Si on se mettait a condamner les présidents pour corruption on devrait organiser des élections planétaire .....


            • Lucas Matheron Lucas Matheron 2 septembre 2018 17:11

              @zygzornifle
              Excellent !
              Mais il faudrait bien que des gens sérieux prennent les choses en main... ou non !  smiley


            • McGurk McGurk 2 septembre 2018 12:13
              * « Lula est l’objet d’une persécution politique. »

              ...tiens ! Je l’attendais cette connerie !

              Lula, c’est Fillon puissance dix. Sa condamnation n’est absolument pas tombée « par hasard » du ciel et avoir un homme totalement corrompu au sommet de l’Etat n’a jamais été une bonne chose - mais c’est une tradition au Brésil.

              Alors non, ce que vous racontez comme quoi c’est une « sorte de complot » politique avec le concours de l’ONU est un tissu de mensonge. Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi on vous laisse écrire des contre-vérités...

              • Lucas Matheron Lucas Matheron 2 septembre 2018 17:10

                @McGurk
                Vous l’attendiez, et le voilà... l’argumentaire qui vous manque ! smiley

                Alors, pour commencer «  une « sorte de complot » politique avec le concours de l’ONU » c’est en effet une erreur grossière... de votre part.
                Aurais-je mal écrit ? J’en doute, vous êtes le premier et le seul avec cette compréhension... erronée !
                Bien au contraire, le Comité des Droits de l’Homme de l’ONU s’est prononcé EN FAVEUR de l’ex-président Lula, au vu et après examen des dossiers le concernant. La requête auprès de l’ONU visant à protéger les droits civiques et politiques de Lula a commencé en 2016.


                Quant au reste, les « contre-vérités » comme vous les appelez, ce sont des contre-vérités de quelle « vérité » ? Celle de la presse putschiste brésilienne ? La Globo, par exemple, qui a soutenu le coup d’État militaire de 1964 ? Sachez, mon bon monsieur, que le groupe Globo a présenté des excuses publiques quant à son « ingénuité » d’avoir cru en le bien fondé de la « révolution de 1964 » comme se plaisent à l’appeler les putschistes de l’époque (qui sont les mêmes que maintenant, ou leurs familles). Télé Globo qui est à nouveau l’artisan du coup d’État parlementaire de 2016, du déchaînement de haine contre le Parti des Travailleurs et contre toute la gauche dans son ensemble et indistinctement, ainsi que de la persécution médiatique de Lula (oui monsieur).

                Il se trouve que la sentence du juge Moro qui a condamné Lula a été exclusivement fondée sur la délation d’un des cadres de l’entreprise de travaux publics OAS, Leo Pinheiro, accusé de corruption dans le cadre de l’enquête sur la Petrobras. En vue d’une réduction de peine, Leo Pinheiro a dénoncé Lula dans une affaire rocambolesque d’appartement acquis par la femme de Lula. Or, toute l’accusation contre Lula ne repose que sur ce « témoignage », sans aucune preuve matérielle du fait.
                La thèse du juge Moro a fait l’objet d’un livre écrit par plus d’une centaine de juristes brésiliens qui démontrent la fragilité des chefs d’accusation et l’absence de preuve matérielle tangible.
                Condamné à 9 ans en première instance par Moro, Lula a vu sa peine augmentée à 12 ans par la Cour d’Appel de 2e instance (composée de 3 juges), toujours sans preuve matérielle ni autre élément supplémentaire.

                Bref ! D’innombrables autres irrégularités dans ce procès spécifique contre Lula, mais aussi dans l’ensemble de l’enquête Petrobras montrent non seulement la partialité des juges impliqués, mais aussi la sélectivité partisane (contre le PT plus particulièrement) de ces mêmes juges, ce qui, dans le contexte plus large de la destitution de Dilma Rousseff et de la campagne anti-PT qui divise encore le pays, constitue un cas tout à fait particulier de lawfare qui est de plus en plus mis en évidence.
                Et je cite pour cela, dans cet article que vous n’avez pas dû prendre le temps de lire attentivement, l’avertissement lancé par le juge Fachin en session plénière et publique, sur l’influence de la politique sur les juges qui n’aurait pas lieu d’être. Si je devais retenir un seul élément pour affirmer la persécution politique de Lula, ce serait celui-ci.

                Merci de m’avoir donné l’opportunité de développer cet aspect des affaires qui secouent le Brésil depuis quelques années et qui peut paraître un peu ubuesque. Je suis sûr que beaucoup de lecteurs apprécieront ce complément d’informations qui est loin d’être un tissu de mensonges.

                Bonne lecture !


              • McGurk McGurk 2 septembre 2018 23:31

                @Lucas Matheron


                Etant donné le degré très élevé de corruptibilité des hommes politiques brésiliens et leur proximité avec de grandes entreprises qui n’hésitent pas à acheter leurs services - voire leur conscience -, le fait qu’il soit coupable « par hasard » (donc innocent) serait vraiment miraculeux. Tout comme la probabilité que l’ex-présidente soit innocente et encore plus la seule dans l’histoire.

                D’autre part, il y a un lien très fort entre les deux qui ont travaillé pendant très longtemps ensemble. Pour accéder aux contrats voulus, l’entreprise a dû arroser tout l’étage et donc de nombreux « collaborateurs » des deux intéressés.

                Si c’est simplement une délation « gratuite » suite à un coup de pression sur un « témoin », la justice n’a pas fait son travail. Mais la Justice a rarement des « soupçons » par hasard.

              • Lucas Matheron Lucas Matheron 3 septembre 2018 16:13

                @McGurk
                Effectivement, quand il y a une réelle « justice », or ce n’est pas le cas et c’est justement celle-ci dont la droiture et l’impartialité sont remises en cause.

                À partir du moment où, comme vous le faites, vous adhérez au discours d’une presse vendue au grand capital et que vous rejettez la possibilité de lawfare, c’est à dire que les agissements de la justice puissent être motivés par des raisons politiques et non plus seulement techniques, vous en arrivez à cette lecture mutilée qui mène à votre conclusion erronée.

                Et c’est pourquoi je cite dans cet article l’avertissement que le juge Fachin, membre de la même justice que vous placez au-dessus de tout soupçon, adresse à ses propres collègues au sujet de cette droiture qui semble être absente chez certains.

                Même si on ne peut pas affirmer que Lula ignorait totalement les travail des lobbyistes (qui sont à la charnière de la corruption et le récent message de Nicolas Hulot le prouve amplement s’il en était besoin), et ce ne serait même pas à son honneur de l’ignorer, on doit s’interroger sur les faits qui entourent toute cette affaire et au minimum douter.


              • JP94 2 septembre 2018 16:24

                Ce jugement inique ne suscite pas les réactions indignés de nos médias prompts à critiquer le Vénézuela quand on touche à un cheveu d’un putschiste financé par la CIA...


                Clairement, mais de façon non avouée, nos médias et le Pouvoir qui en a fait son instrument soutiennent des putschistes néo-fascistes, des fascistes ( en Ukraine notamment) -l’UE semble un terrain à nouveau propice à l’extrême-droite et au fascisme ...alors elle soutient naturellement le gouvernement illégal du Brésil ( il y a un vrai coupable à la tête de l’Etat), et n’exerce aucune pression contre le coup de force démocratique.

                On notera quand même que la première phase est de destituer par des coups d’Etat « constitutionnels » (plus ou moins) les présidents soucieux de justice sociale - les Etats-unis reconnaissant aussitôt le pouvoir mis en place ( Honduras, Paraguay, Argentine avec Macri , Venezuela (sauf que ça n’a pas marché) )
                La seconde est d’empêcher le retour par les urnes des présidents réellement démocrates ...
                ( c’était pareil en Europe de l’Est). On installe un système qui verrouille la société...

                Mais on assistera peut-être, si les élections ne permettent plus l’accession au pouvoir de représentants du peuple, à une prise de pouvoir hors- les -urnes , une révolution...
                On voit la limite des élections : si l’issue du scrutin contrarie l’ordre capitaliste, celui-ci ne reconnaît pas les élections et légitime la violence...
                Mais une révolution n’est pas un acte spontané...

                • Lucas Matheron Lucas Matheron 2 septembre 2018 18:23

                  @JP94
                  Tout à fait, c’est le système de lawfare qui prévaut actuellement sur le putsch militaire.

                  Maintenant on le fait avec vaseline, s’il vous plait !

                  Au Brésil, la situation a commencé à se pourrir dès que Lula a laissé sa place à Dilma Rousseff en 2010. Une femme, dans un monde machiste, c’est une cible de choix.

                  Mais dans ce cadre de lawfare, deux cibles en sont l’objet : le groupe des BRICS dont le Brésil de Lula est un partenaire très actif (et Dilma poursuit cette présence active au sein du groupe) et le « pré-sal », énormes gisements de pétrole découverts sur ses côtes). Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que Dilma et la Petrobras ont été victimes d’écoutes dénoncées par Edward Snowden en septembre 2013.

                  Bref ! Dans un monde 1%-99%, on doit comprendre que l’accès du « peuple » au pouvoir est de plus en plus compromis si ce peuple ne se mobilise pas pour élire de vrais représentants et pas seulement les représentants qu’on lui propose. Mais cela implique que des gens du peuple s’investissent en politique. Lula est l’un d’eux.

                  Merci de votre intervention.

                • Cateaufoncel2 2 septembre 2018 19:31

                  En dépit de ses énormes ressources naturelles, en termes de PIB/hab à parité de pouvoir d’achat, le Brésil se situe entre les îles Palaos – si, si, ça existe _ et la république de Macédoine (FMI, 2017), entre la République dominicaine et l’Algérie (Banque mondiale, 2016), entre la Chine et la Serbie (CIA World Factbook, 2017) On peut donc changer de régime politique autant de fois que l’on veut, ou aller chercher toutes les excuses que l’on veut du côté de Washington, à la base il y a un problème fondamental de population économique peu performante.

                  Dans les années 20-30, les Européens expatriés, principalement des Anglais, disaient en se marrant que le Brésil était « un pays d’avenir qui le resterait longtemps, très très longtemps ». Si ça se trouve, l’ironique observation court toujours dans les soirées des communautés étrangères.

                  Il ne faut donc pas s’attendre à ce que le nouveau président, quel qu’il soit, fasse des miracles, Lula n’en a d’ailleurs pas fait pendant ses neuf ans de présidence. Mais il confirme l’observation selon laquelle, quand on a une excellente image, il est presque aussi difficile de la perdre que d’en rétablir une mauvaise.


                  • Lucas Matheron Lucas Matheron 2 septembre 2018 21:15

                    @Cateaufoncel2
                    Tableau un peu pessimiste, mais réaliste. « Brasil, país do futuro » (Brésil, pays de l’avenir) est le titre d’un livre de Stefan Zweig, juif-autrichien réfugié du nazisme, publié en 1941. Le regard ironique porté jusqu’aujourd’hui sur ce titre-slogan se doit aux régimes politiques qui, depuis la proclamation de la république en 1889, sont des régimes autoritaires et principalement conservateurs.
                    Et ils conservent quoi ?
                    Et bien ils conservent l’âme colonialiste. Les élites brésiliennes sont colonialistes (quand non esclavagistes, car on trouve encore et toujours des gens qui sont exploités dans des conditions « proches de l’esclavage » comme on dit pour ne pas choquer). Colonialistes dans leur façon de penser, colonialistes dans leur manière de vivre, colonialistes dans leur conception de la société.

                    Un sociologue brésilien, Jessé Souza, a écrit un livre récemment qu’il a intitulé « A Elite do Atraso » (qu’on pourrait traduire par « L’Élite Passéiste ») dans laquelle il décrit cette élite brésilienne, riche et nostalgique des fastes du passé colonial. On peut comprendre, sous cette lecture, les nostalgiques, aujourd’hui, de la dictature militaire (qui sont affreusement nombreux !).
                    Il est vrai qu’au vu des dégats accomplis par les putschistes au cours des deux dernières années, le prochain président aura du pain sur la planche.
                    Pourtant, Lula qui n’a pas fait de miracles pour les médias (même les nationaux ne le reconnaissent pas car Lula n’est pas de leur caste) en a fait pour son peuple et j’en témoigne tout au long de mes 33 ans au Brésil. Lula est celui qui a créé le plus d’universités et d’écoles techniques dans le pays, il a réussi à faire faire un bond extraordinaire à l’économie du nordeste qui était une région abandonnée depuis des décennies, il a été un des grands articulateurs du bloc économique sud-américain Mercosul et co-fondateur du bloc des pays émergents, les BRICS, il a restructuré et équipé la police fédérale, il a créé des programmes sociaux importants qui ont permis l’accès à l’enseignement supérieur à des millions d’élèves... et j’arrête là... 
                    Et c’est pourquoi le peuple brésilien s’en souvient et qu’il est crédité de 40% des votes aux prochaines élections alors qu’il est en prison, et c’est aussi pourquoi cette élite passéiste ne souhaite pas le revoir à la tête de l’État.

                    Merci pour votre provocation bien constructive.


                  • Hervé Hum Hervé Hum 3 septembre 2018 09:37

                    @Lucas Matheron


                    Ce n’est pas en changeant de mot qu’on change de condition sociale !

                    Est esclave celui qui, en échange de son travail, ne perçoit que le minimum pour survivre. Peu importe que vous parlez de salarié ou non, c’est accessoire. On ne sort de la condition d’esclave que si on perçoit une rémunération supérieure au minimum de survie, c’est à dire, où se dégage un intérêt, sans cela,vous êtes fondamentalement un esclave, même et surtout si vous êtes un salarié.

                    En France, l’esclavage à pris fin en 1936 avec le front populaire et les accords Matignon, avant cela, une majorité d’ouvriers étaient toujours en état d’esclavage. La manipulation commence et se maintient surtout via le langage où changer un mot sans changer de condition peut faire prendre une vessie pour une lanterne.

                  • Lucas Matheron Lucas Matheron 4 septembre 2018 00:55

                    @Hervé Hum

                    « Ce n’est pas en changeant de mot qu’on change de condition sociale »

                    Tout à fait, est c’est bien d’esclavage qu’il s’agit et il existe des organisations en rapport avec l’OIT qui dénoncent et on découvre de temps à autres des gens qui sont pour ainsi dire « prisonniers » parce que non payés, mal nourris et vivant dans des conditions insalubres.
                    Le problème est que dans un pays 17 fois grand comme la France, il existe des étendues immenses, sans routes, apparemment inaccessibles, qui ne finissent par être découvertes que par voie aérienne ou par satellite. Généralement on rencontre ce genre de situation dans des exploitations forestières, pour le bois, d’abord, puis pour le charbon de bois qui alimente la sidérurgie.

                    Ce n’est pas une majorité, fort heureusement, mais c’est encore trop fréquent.



                  • Cateaufoncel2 2 septembre 2018 22:41
                    « Merci pour votre provocation bien constructive. »

                    Mais il n’y a pas la moindre provocation. Je pense qu’un pays ne peut être pleinement développé que si sa population est pleinement développée. Pour l’Europe, c’est un mouvement qui a commencé au XVIIIe-XIXe siècle.

                    Le Brésil, comme les autres pays d’Amérique latine, est encore loin de compte et il n’y a pas moyen de brûler les étapes. Créer des universités et des écoles techniques ne suffit pas, si ça ne se traduit pas par des gains de productivité et de la création de richesse.

                    • Lucas Matheron Lucas Matheron 3 septembre 2018 16:23

                      @Cateaufoncel2es
                      « Créer des universités et des écoles techniques ne suffit pas, si ça ne se traduit pas par des gains de productivité et de la création de richesse. »


                      Je suis bien d’accord, mais il faut du temps pour que les jeunes qui se forment aujourd’hui deviennent à leur tour des professionnels qui produisent. Actuellement, le gouvernement putschiste et certains des candidats libéraux aux prochaines élections affichent dans leur programme la privatisation de l’enseignement supérieur, contrairement à ce qu’ont fait les gouvernement progressiste de Lula et Dilma Rousseff.

                      Et j’entendais ’provocation’ au sens de déclencher, d’inviter au débat... smiley


                    • Hervé Hum Hervé Hum 3 septembre 2018 23:08

                      @Lucas Matheron


                      faut faire attention, le modèle scolaire occidental (surtout au niveau universitaire) consiste à fabriquer des spécialistes au travail et des abrutis au repos.

                      Faut pas oublier que la citoyenneté se réfléchit surtout au repos et pas du tout au travail... 

                      Sur ce point, effectivement, l’Amérique du Sud est encore en retard de formatage des cogito.

                      Parler de « gain de productivité » et de « création de richesse », certes, mais encore faut t-il savoir à qui cela profite et de quelle manière. 


                    • Lucas Matheron Lucas Matheron 4 septembre 2018 00:40

                      @Hervé Hum
                      « l’Amérique du Sud est encore en retard de formatage des cogito »


                      Je ne saurais généraliser, mais c’est exact pour le Brésil. Il faut dire que 21 ans de dictature militaire (1964-85) avec censure et décomposition du système scolaire n’a pas arrangé les choses. La superficialité était de mise au temps des militaires.
                      Bien sûr, il y a la deuxième partie du problème avec le transfert des modèles, d’enseignement et de société, la mondialisation accélérant et amplifiant ce transfert.
                      Malgré tout, j’ai pu constater que les 12 ans du PT au pouvoir avaient permis une réflexion identitaire assez marquée, ce qui a contribué à déplaire à l’élite passéiste dont je parle dans un autre commentaire qui ne jure que par Miami (le must pour y avoir sa résidence secondaire) les vacances à Orlando avec les enfants et des échappées friponnes à Las Vegas pour s’offrir du rêve. Le ’vieux continent’ est bien entendu un passage obligé, car il est chic de connaître la véritable Fontaine de Trevi, Montmartre et le Tower Bridge.

                      Quant à la « création de richesse », on est hélas bien dans la même vision mercantile avec la même logique de marché qui prédomine au sein de l’élite économique et politique. Une critique d’ailleurs au gouvernement Lula et Dilma, mais est-il possible de faire sans cette élite ?

                      Merci pour votre commentaire. 


                    • Hervé Hum Hervé Hum 4 septembre 2018 08:49

                      @Lucas Matheron


                      « mais est-il possible de faire sans cette élite ? »

                      C’est non seulement possible, mais surtout devenue une nécessité absolue pour les citoyens lambda de tous les pays, sans exception !

                      Mais pour le comprendre, il faut comprendre que l’élite dirigeante, ne se justifie qu’à la condition de vivre dans un monde en guerre permanente, qui au niveau économique s’appelle « concurrence ». Sans cette dernière, l’élite dirigeante devient non seulement inutile, mais l’ennemie intérieur, car elle interdit d’elle même de passer à un monde en coopération.

                      Voilà pourquoi, la paix est un interdit du système actuel et la guerre sa condition de survie. La notion d’élite renvoie à celle de chef de guerre qui mène les troupes au combat. Or, la nécessité de chef naît par la guerre et se meurt par la paix.

                      Maintenant, pour faire sans cette élite propriétaire de l’économie et de la politique, il y a une seule condition, de passer de la propriété à la responsabilité, définie comme la capacité de répondre de ses droits ET devoirs envers autrui (pas envers soi même, cela n’a aucun sens, car vis à vis de soi on est souverain, sans cela, la notion de libre arbitre n’existe pas).

                      Un monde où la grande majorité assume sa propre responsabilité sociale envers autrui, est un monde qui n’a pas besoin de chefs quels qu’ils soient, politique ou économique, donc, pas besoin d’une élite dirigeante. cette dernière est indispensables aux gens immatures et irresponsables.

                      Bonne journée !

                    • Lucas Matheron Lucas Matheron 4 septembre 2018 15:29

                      @Hervé Hum
                      Merci pour cette synthèse édifiante de ce qu’est notre monde, notre bien triste monde.


                      Bien sûr, le portrait de cette hiérarchie sociale n’est qu’une construction qui nous est imposée depuis des millénaires et qui, malheureusement et sans jouer la carte pessimiste, je ne vois pas proche de disparaître. La recrudescence des « églises » et autres sectes est bien lá pour nous montrer que les brebis du seigneur, à quelques exceptions près, sont encore bien immatures et irresponsables.

                      Je lisais récemment que dans un monde de plus de 7 milliards d’être humains, les quelques 500 millions d’anarchistes déclarés n’étaient pas encore prêts à renverser l’ordre des choses. Je n’ai pas vérifié, mais j’ai trouvé 500 millions un chiffre assez flatteur et encourageant.

                      Hélas, les peuples dans leur ensemble ne sont pas prêts à se prendre en main, à s’auto-réguler et s’auto-discipliner dans une société sans autre règle que l’altérité. C’est ce que je soulignais en écrivant la phrase que vous citez, et je rebondis sur un questionnement de Nicolas Hulot : « La société est-elle prête à assumer le changement ? Est-elle prête à descendre dans la rue pour soutenir ce changement ? »
                      Et la réponse est : Non !

                      Mais pour rester dans le cadre du Brésil, je ne crois sincèrement pas qu’il eut été possible à Lula de gouverner et d’imposer les réformes qu’il a résussi à « négocier » (ça me hérisse de penser qu’on doive « négocier » le sort des misérables, mais bon...) les programmes sociaux qu’il a mis en place durant son gouvernement, sans s’accomoder de la structure sociétale en vigueur. Le peuple n’y est pas préparé, ni politiquement, ni intellectuellement, ni idéologiquement.


                      J’espère qu’on y viendra, et je vous remercie d’enrichir ce débat.

                    • Lugsama Lugsama 3 septembre 2018 00:58

                      On appel putchiste un gouvernement arrivé légalement au pouvoir et on trouve anormal qu’un politique condamné lourdement pour corruption ne puisse pas se présenter. Amusant.


                      • Lucas Matheron Lucas Matheron 3 septembre 2018 17:36

                        @Lugsama
                        « un gouvernement arrivé légalement au pouvoir. »

                        « un politique condamné lourdement pour corruption »

                        Si l’on considère un traitre comme une ’personne de bien’ et qu’on ferme les yeux sur les politiciens corrompus qui ont soutenu le coup d’État « constitutionnel » lors de la session honteuse du Parlement qui a donné lieu à la procédure contre Dilma Rousseff le 17/04/2016 et lors du « jugement » du 31/08/2016 ; si l’on fait abstraction des raisons qui ont motivé le gouvernement de Dilma à déplacer certaines réserves budgétaires en attente vers des besoins d’urgence (programmes sociaux) et qu’on omet de dire qu’au lendemain de sa destitution les putschistes ont fait voter une loi qui leur assurait le droit de faire exactement ce pourquoi ils venaient de destituer la présidente en titre ; si l’on oublie tout le travail de calomnie perpétré contre Dilma Rousseff et le Parti des Travailleurs des années durant (à partir de 2010 de façon systématique) afin de conditionner la population à ce moment fatidique ; si on refuse de voir que Lula a été condamné sans preuve matérielle, ce que des centaines de juristes et d’intellectuels de tous bords s’emploient à dénoncer avec toujours plus de véhémence et de fondements ; si on fait la sourde oreille aux prises de position internationales en faveur de Lula parce que le discours accusatoire ne tient pas debout, depuis Noam Chomsky au Pape, en passant par l’ONU et des politiciens espagnols, allemands, portugais, français, et même anglais et américains...

                        Alors oui, si on est bouché à ce point ou vraiment de mauvaise foi, on peut dire que le gouvernement putschiste « est arrivé légalement au pouvoir » et qu’un politique « lourdement condamné » revendique le droit de participer au scrutin.

                        Mais seulement si...

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