Auf Wiederssehen Mutti
Après 16 ans et quatre mandats successifs, Angela Merkel a définitivement mis fin à sa prestation comme chancelière d'Allemagne, pays que l'on présente souvent comme leader de l'Europe libre.
Quatre présidents français se sont succédé depuis son arrivée, le 22 novembre 2005 à l'âge de 51 ans.
En 2020, elle devenait "la femme la plus puissante du monde de 2020", selon le magazine américain Forbes
Les médias se sont pliés en quatre pour la présenter au mieux de sa personne lors de sa sortie prochaine de piste aux étoiles.
Je ne vais pas chercher à exprimer des idées personnelles à son sujet. Je vais seulement tenter de rassembler ce que disent les médias par l'intermédiaire de politologues, d'analystes politiques et financiers et de ses proches que l'on retrouve dans la presse officielle.
En 2014 déjà, dans la presse non officielle d'Agoravox, un rédacteur écrivait "Mutti Merkel, la reine du monde ?".
Première femme au poste de chancelière, première scientifique physicienne de formation à gouverner l'Allemagne.
Dans mes billets, je trouve la phrase "Merkel a voulu montrer qu’une démocratie mature peut gérer la critique et les désaccords". "Elle a constaté l'échec total du modèle multiculturel allemand". C'est en effet une experte en gestion de crise en corrigeant les erreurs de l'une dans la suivante.
Rien à voir avec une révolutionnaire. Elle a souvent anesthésié les débats avec sa boussole de la morale, son sens du pouvoir dans la loyauté.
Avec intelligence, elle n'a jamais rien promis pour convaincre des électeurs.
Une de ses citations : « Il y a des hommes politiques éclairés en France et en Allemagne qui ont dit que des pays qui ont la même monnaie ne s'enferment plus jamais dans des querelles. ».
En 2012, Gertrüd Höhler, conseillère en communication de plusieurs grandes entreprises et de responsables politiques, comme l'ancien chancelier Helmut Kohl militante du CDU.
Elle a écrit une nouvelle plutôt brûlot avec le titre "La Marraine". En allemand, "Die Patin" qui est en fait le féminin de "parrain" (der Pate), au sens mafieux du terme.
Pas étonnant qu'elle ait une dent contre Merkel puisqu'elle a assassiné politiquement Kohl par la publication d'un seul article accusé de détournement de fonds.
Sa thèse, Angela Merkel en train d'établir une dictature dans un "système M, crypto-autoritaire", qui mine la démocratie allemande en ne gardant autour d'elle que des béni-oui-oui, grâce la crise de l'euro pour retirer au Parlement l'essentiel de ses pouvoirs et devenir "la reine de l'Europe" vers une économie planifiée.
Evidemment, le Parlement de la Bundestag dispose de tous les pouvoirs.
Pour justifier sa thèse, Mme Höhler rappelle Marie-France Garaud qui a été une brillante conseillère de Georges Pompidou puis de Jacques Chirac pour laquelle le temps semble s'arrêter dans les années 1970.
Elle avait affront dans un calme exemplaire, Gérard Schroeder qui l'avait vue regardée de très haut lors de la dernière "Ronde des éléphants" qui rassemblait les partis et les candidats.
Pendant trois de ses quatre mandats, elle a eu à affronter une opposition dans des coalitions à priori contre nature avec le SPD.
En 2005, à 51 ans, elle remporte la mise et devient chancelière et c'est pendant 16 ans qu'elle le reste.
La rigueur de son père, pasteur protestant, est resté son fil rouge dans sa vie et dans sa politique.
Après ses études de physicienne en RDA, elle a été fasciné par la politique de la RFA et a refermé ses goûts pour la science. La politique exerce des règles et des formules de fonctionnement plus physiques que analogiques.
On dit surtout de Merkel qu'elle est austère. Cette austérité se retrouve dans sa manière de s'habiller toujours identique avec seulement des couleurs différentes.
Partisane de la fourmi dans la fable de La Fontaine "La cigale et la fourmi". Dans la crise de la dette de la Grèce, elle a résisté dans la mutualisation de la dette en tenant les cordons de la bourse en soutenant son ministre des finances, Wolfgang Schauble. Elle a fini par lâcher du lest, seulement contrainte et forcée par les événements.
Dans un esprit face à une urgence humanitaire et son souvenir de jeunesse pendant 35 ans derrière le mur de la RDA, elle a ouvert ses frontières aux émigrés, bien plus que les autres Etats ne l'ont fait. Ce qui lui a valu une foule de reproches par le parti NPD d'extrême-droite .
Elle a eu la vision d'un futur de l'Allemagne quand l'âge moyen des Allemands s'allongeant, la main d'œuvre disparaitrait et que l'immigration d'aujourd'hui apportera une façon de combler le vide créé par les retraités.
Les autres pays européens ont payé la Turquie pour faire le travail de rétention des émigrés syriens à leur place. Turquie qui les a maintenus dans des camps.
Prolonger le nucléaire de la fission, malgré les dangers potentiels, elle l'a fait pour rester au maximum dans les normes imposées pour répondre au changement de climat tout en étant en contradiction avec le parti écologique qui ne voit que l'énergie renouvelable comme source d'énergie.
Foncièrement européenne, plus récemment, elle n'a pas hésité à lancer l'idée d'un plan de relance de 500 milliards d'euro pour sauver l'économie européenne suite à la crise du Covid.
Aucun hasard donc que les Allemands l'ont appelée "maman" (Mutti) dans la presse.
Fondamentalement optimiste, elle rassure avec son "wir shaften das" (on va le faire) en calmant le jeu des excités par la raison et la capacité de l'adaptation aux situations exceptionnelles.
Son principe de base : contraindre quand c'est nécessaire mais pas avant.
Sortant d'Allemagne de l'Est, partisane de la liberté de choisir, elle n'avait aucune l'intention d'introduire l'esprit communiste avec une politique ouverte qui cache des indices de classicisme, de protestantisme avec courage et opportunisme. Elle sait que la santé de l'Allemagne dépend des exportations vers les pays limitrophes, la Russie et la Chine. Ses liens avec la Russie se retrouve dans la connaissance de la langue russe.
Grandeur d'âme pour une Europe solidaire par défaut et intérêts propres propres pour l'Allemagne en espérant obtenir un résultat win-win par des consensus et des compromis.
Son parti la CDU, l'Union Chrétienne Démocrate est un parti politique allemand, libéral-conservateur, fondé en 1945.
Libéral et conservateur, cela veut tout dire de la marche à suivre et sa marge de manœuvre.
Au pouvoir entre 1949 et 1969 avec Konrad Adenauer, Ludwig Erhard et Kurt Georg Kiesinger, de 1982 à 1998 avec Helmut Kohl.
Depuis 2005, Angela Merkel, la CDU détient le record de longévité à la direction du gouvernement fédéral.
L'Allemagne est la première puissance européenne avait-elle besoin d'autre chose que de conserver ses acquis et pas de changements trop profonds.
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Les élections du 26 septembre
Sur 60 millions d'électeurs, 2,8 millions de jeunes se sont ajoutés dans les votes pour une première fois avec leurs propres problèmes économiques, de la numérisation, des réseaux sociaux de communication et du changement climatique.
Le parti CDU d'Angela Merkel a subi sa première chute importante.
Est-ce dû à l'abandon de Merkel ou l'arrivée de nouveaux votants plus jeunes ?
A cause du changement d'époque ?
La stabilité de l'après Merkel inquiète.
Les indispensables existent dans tous les cimetières.
Une coalition "Jamaïque" avec les couleurs comme en Belgique mais sans formateur, pourrait en naître.
Plusieurs options tripartites sont possibles mais cela risque de prendre des mois.
Il n'est pas sûr que le gouvernement soit formé au moment des élections françaises.
Olaf Scholz est cité comme premier ministre, alors qu'il est réputé pour son manque de charisme et sa pâleur.
Un "new deal" révolutionnaire se justifie-t-il en Allemagne ?
La fiscalité et les salaires sont toujours dans la balance comptable maintenue avec des élastiques et des blocages peut-être sans autant de pouvoir qu'avait Angela Merkel.
Il ne faut pas minimiser ce changement de leader.
Un pompier sans connaissance de l'architecture globale et de l'ossature complexe de l'Allemagne, construites suivant des règles disparates entre Lender de la Bunderstag, est loin d'être une tâche facile.
Heinrich Beta a utilisé la formule "Arbeit macht frei" en 1845 dans un écrit intitulé Argent et esprit (Geld und Geist) : « Ce n'est pas la foi qui rend heureux, pas la foi en des curetons égoïstes et nobles, mais c'est le travail qui rend heureux, car le travail rend libre. Ce n'est ni protestant ou catholique, ni allemand ou chrétien, ni libéral ou servile, c'est une loi générale de l'humanité et la condition sine qua non de toute vie et aspiration, de tout bonheur et accomplissement »
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Pourquoi la longévité d'Angela Merkel ?
En finale de ses quatre différents mandats, elle termine avec 64% de satisfaits. Ce qui est rarissime de se retrouver parmi les top de politiciens en gardant un capital inchangé se sympathie dans une démocratie multipartite.
Avoir une renommée inversement proportionnelle à ses réalisations pour pallier le déficit de visions des autres par son pragmatisme et son opportunisme surprenant en faisant le moins possible et le plus tard possible.
Comme raisons de sa longévité, les raisons invoquées sont généralement cités par sa stabilité, sa rigueur, sa patience, sa facilité de synthèse et son écoute.
La conservation de ce qui fonctionne au moment le plus opportun, lui a apporté la confiance de ses administrés.
Restée sans prétention en phase avec la société allemande, elle a gardé la confiance de ses administrés avec un choix stratégique du moindre mal.
Elle a réussi à rapprocher le PIB par habitant du Bonheur National Brut de chacun.
Elle s'est assuré d'avoir proche d'elle, deux conseillères sans complaisance, en Beate Baumann et Eva Christiaensen.
Dans la série des documentaires de "Le temps d'une histoire", Angela Merkel reste malgré tout une énigme.
Dans "Recherche Merkel désespérément" sinon qu'elle avait compris qu'il fallait utiliser la vanité des hommes pour aller à contre-courant avec un devoir de réserve et de discrétion.
La CDU n'aurait probablement pas perdu de plumes aux élections, si elle avait rempilé. On ne change rarement une équipe qui gagne.
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Le futur d'Angela Merkel
Encore une fois, très secrète, elle n'en dit pas grand chose.
On image qu'elle va tourner la page de la politique pour prendre sa retraite à l'âge de 67 ans.
Avec 15.000 euros de pension mensuelle, elle va évidement vivre de ses rentes.
Elle dit vouloir lire et dormir dans son appartement à Berlin et profiter de sa retraite pour réfléchir et prendre des vacances dans sa datcha du Brandebourg.
Revenir peut-être à sa formation de physicienne et qui sait, avec éclectisme.
Et puis, écrire son livre dans lequel elle expliquera, sans interprétation des médias, sa philosophie, ses succès et ses échecs comme l'ont toujours fait des personnages comme Obama ou d'autres.
La dérive des continents se demandait "Comment oublier Angela Merkel"
Allusion
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