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Accueil du site > Actualités > Politique > Bayrou, Modem et Européennes : les raisons d’un échec

Bayrou, Modem et Européennes : les raisons d’un échec

De 18,5% au premier tour de la présidentielle à un peu moins de 9% lors de ces élections européennes le score du parti dirigé par François Bayrou a fait une descente vertigineuse en peu de temps, perdant 6% dans la dernière semaine de campagne.
Pourtant tout était bien parti, avec le lancement réussi de son livre à succès (et d’ailleurs vraiment intéressant à lire) « Abus de Pouvoir », plus de 80 000 exemplaires vendus en moins de deux semaines, et une forte présence médiatique. Mais contrairement aux dernières élections présidentielles la dynamique ne s’est pas maintenue et n’a, pour ainsi dire, même pas vraiment existé.

Nous allons voir dans cet article en quoi F. Bayrou n’a visiblement pas compris l’engouement qu’il y a eu derrière sa candidature en 2007 et de quel façon il s’est, cette fois-ci, retrouvé pris au piège des médias et des autres partis sans pouvoir se défendre.

Alors que l’excuse de la diffusion du film "Home" se fait de plus entendre, elle est effectivement très commode, elle n’explique en rien le pourquoi de la descente du score du Modem lors des deux dernières semaines. Il s’agit en réalité d’une conjonction de facteurs et d’erreurs dont la clé de voûte est Internet.


1) Internet représente une force politique

F. Bayrou n’a de cesse de dénoncer, à juste titre, la collusion entre les grands médias et le pouvoir actuel. Radios, Presse, Télévision font partis pour les 3/4 de grands groupes industriels ou financiers dont les directeurs et actionnaires sont très proches du pouvoir en place.

Un média résiste pourtant encore et toujours à l’envahisseur, et ce média c’est Internet. Internet échappe (pour l’instant...) à tout contrôle d’une quelconque puissance politique, il permet l’expression et la visibilité d’une diversité d’opinions qui n’accèderaient jamais à une tribune dans les autres médias. Evidemment il y a des inconvénients, on peut le voir avec la multiplication des sites extrémistes, des théories complotistes etc.... mais Internet permet aux citoyens de se réapproprier le débat politique et de court circuiter les acteurs habituels du milieu qui perdent chaque jour de plus en plus de crédibilité aux yeux des internautes.

Grâce à sa démocratisation, Internet est sorti du milieu des passionnés de l’informatique pour devenir un outil courant d’information et de communication. Internet a aujourd’hui un réel poids politique. Toute la dynamique de la campagne du "non" à la constitution européenne vient de ce média. L’exemple le plus frappant est la diffusion du texte d’Etienne Chouard qui a fait le tour du web et ensuite de la France. C’est aussi de ce média qu’est venu la dynamique de la campagne du Modem lors des dernières présidentielles. Car Internet a beau être un média où les opinions les plus diverses peuvent s’exprimer, un certain nombre de valeurs rassemblent fortement les internautes et dépassent les clivages politiques. Ceci est très visible avec la formidable progression du Parti Pirate en Suède qui est devenu la troisième force politique du pays et la première parmi les 18-25 ans !

De par son fonctionnement, Internet est déjà à la base un média contestataire. Les internautes sont fortement attachés à leurs droits, au respect de leur vie privée... bref à toutes les spécificités qui font d’Internet un espace médiatique passionnant et aux possibilités encore inexplorées pour tout ce qui touche à la démocratie participative.
De part leur fonctionnement, les communautés des internautes privilégient le débat de fond sur les idées plutôt que les empoignades superficielles des débats radios ou télévisuels.

La campagne de F. Bayrou durant les présidentielles a trouvé un très fort écho auprès des internautes, son engagement pour la défense des libertés numériques à l’heure de la loi DADVSI l’ont rendu populaire, son programme bien moins archaïque que ses concurrents au niveau des nouvelles technologies a trouvé de nombreux soutiens sur la Toile, enfin le dépassement voulu des clivages politiques et la volonté de privilégier le fond à la forme a été soutenue par de nombreux internautes. F. Bayrou n’avait l’appui d’aucun média traditionnel, mais il faisait le buzz sur Internet et avait grâce à ça une très importante visibilité.


2) Le tournant de la loi Hadopi

Quoi de plus normal pour les internautes, en ces temps où notre gouvernement cherche à mettre la main sur Internet par des lois posant les bases d’un filtrage du web, que de penser voir F.Bayrou et son parti se poser en ardents défenseurs des libertés des internautes ? La loi Hadopi était, de plus, l’illustration parfaite de ce qu’il dénonçait dans son livre "Abus de pouvoir". Et bien rien, nada, en pleine tournée de promotion pour son livre, il n’a jamais abordé ce sujet.

Nous avons seulement eu finalement droit à une prise de position extrêmement tardive, au moment où il n’y avait plus aucun risque tellement il était évident que les français étaient opposés à cette loi. Le Modem a extrêmement déçu les internautes et a perdu son rang de parti "in" en ce qui concernait les nouvelles technologies.

Dans le même temps, au parlement européen Daniel Cohn-Bendit était le co-signataire de l’amendement "Bono" (dans le paquet télécom) qui reconnait Internet comme un droit fondamental et rend donc de facto sa coupure, façon Hadopi, illégale au regard du droit européen. Ceci n’a pas fait la "une" des journaux ni les gros titres, et pourtant les internautes sont bien au courant et promettent de se rappeler le moment venu qui les a défendu qui les a lâchés. F. Bayrou perd ainsi l’appui de ce média, au profit de la liste que va mener Cohn-Bendit, "Europe-Ecologie". Dès lors son impact sur l’opinion disparaît.


3) Le mauvais ciblage de l’électorat F. Bayrou l’a souvent répété durant cette campagne, il voit un mouvement de la France profonde, de la France rurale... bref du petit peuple, attaché aux valeurs républicaines et jacobines contre le bling-bling néolibéral de la droite décomplexé au pouvoir. Pourquoi pas après tout.

Déjà il y a fort à parier que cette France ne vote pas, ou alors très peu, aux Européennes, mais c’est surtout se tromper sur ce qui faisait la force de son mouvement. Les statistiques de l’ifop le prouvent :
 http://www.ifop.com/europe/analyses/UDFModem.pdf

L’électorat du modem se rajeunit et s’urbanise largement. Ce n’est pas un hasard, ce sont ces électeurs qui ont été attirés par le discours des présidentielles à la fois sur la politique, sur l’écologie et le numérique. Tous ces internautes qui voyaient en ce parti la possibilité de sortir du débat archaïque gauche/droite et d’avoir des argumentaires politiques plus approfondis.

Hors il n’en est rien resté durant cette campagne. On attendait de Bayrou qu’il continue dans cette voie, qu’il ait un débat de fond, qu’il propose, argumente. Il est resté volontairement plus porté sur la critique en voulant jouer sur l’anti-Sarkosysme .Erreur, ce n’était pas du tout les attentes de son électorat et c’est finalement "Europe-Ecologie" qui a fait la campagne qu’on attendait qu’il fasse.


4) Le "lynchage" médiatique

F. Bayrou était l’homme à abattre pendant cette campagne, pour l’UMP, c’est le plus gros risque aux prochaines élections présidentielles car s’il arrive à se glisser à un deuxième tour, il est quasiment certain de l’emporter. Pour le PS, plus il existe, plus il leur pique des voix, pour Europe-Ecologie, c’est dans ses électeurs qu’ils peuvent récupérer le plus de voix. Ayant perdu une bonne parti de son soutien sur Internet, il était à la merci du moindre faux pas et il ne l’ont pas loupé.

Lors du "débat" (les guillemets sont importants) télévisé sur France Télévision diffusé jeudi soir, le buzz se fait dès l’après-midi. Bayrou aurait craqué, se serait lâché et aurait insulté Cohn-Bendit de pédophile, ça aurait chauffé entre les deux et il serait parti en vrille.

Ce sera la principal moment du débat, le point fort qui fera la une de tous les journaux jusqu’au dimanche, la grosse polémique de cette fin de campagne. L"UMP se dit dégoûté, le PS qualifie le niveau de minable... bref c’est la fête et on se fait plaisir, tu parles l’occasion est trop bonne.
Un tel emballement médiatique, un telle exagération des faits, occultant dans les médias tout le reste du débat... F. Bayrou a effectivement craqué, il a fait un hors sujet et on ne l’a pas raté.


Reste maintenant à savoir si le Modem sera capable de tirer les véritables leçons de cet échec et vers quel orientation politique ce parti se dirigera notamment vis-à-vis des nouvelles technologies. Les attentes des internautes sont grandes vis-à-vis de leurs revendications politiques naissantes et le parti qui les défendra sans opportunisme politique s’assurera une assise médiatique auprès d’un média de plus en plus influent notamment dans les plus jeunes générations. Les blogueurs, les journalistes citoyens, les forums sont devenus de véritables réseaux d’influences, des leaders d’opinions, et prendront, je l’espère, encore plus d’importance dans l’espace politique futur car ils sont par nature incontrolâbles et porteurs d’idées nouvelles.

Internet est le média du peuple, par le peuple et pour le peuple, et il le restera.
 

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7 réactions à cet article    


  • Jean-Pierre Llabrés Jean-Pierre Llabrés 10 juin 2009 11:25

    Bayrou et la manipulation des sondages

    Chacun se souviendra que François Bayrou a annoncé qu’il révélerait les preuves de la manipulation médiatique, causée par les instituts de sondage, dont lui et son parti auraient été les victimes.

    Je lui ai donc écrit afin de lui demander de nous fournir les preuves qu’il détient.

    J’invite chaque lecteur à lui envoyer le même message (ci-dessous).

    QUOTE

    Objet : Manipulation médiatique
     
    De :
    « Jean-Pierre Llabrés » <[email protected]>
    À :
    [email protected], [email protected]
     

    Date : mardi 9 juin 2009, 12:07:13

    Cher Monsieur Bayrou,

    Quand allez-vous nous révéler les preuves de la manipulation des sondages que vous nous promettiez avant les élections européennes ?

    Vous abstenir vous décrédibiliserait totalement.

     

    Bien cordialement,

     —

    Jean-Pierre Llabrés
    UNQUOTE


    • Jean-Pierre Llabrés Jean-Pierre Llabrés 26 juin 2009 08:40
      Bayrou : décrédibilisé, lâche et menteur ! ! !

      Retour sur la manipulation médiatique tentée par Bayrou

       
      De :
      « Jean-Pierre Llabrés » <[email protected]>
      À :
      [email protected], [email protected]
      Date : 16 juin 2009, 11:24
       
      I) Premier courriel du mardi 9 juin 2009, 12h07.

      Cher Monsieur Bayrou,

      Quand allez-vous nous révéler les preuves de la manipulation des sondages
      que vous nous promettiez avant les élections européennes ?

      Vous abstenir vous décrédibiliserait totalement.

      Bien cordialement,

      — 
      Jean-Pierre Llabrés
       ===============
       Il faut penser en héros pour, simplement, se comporter en être humain digne de ce nom.
       May Sarton.
       ===============
       
      II ) Deuxième courriel du mardi 16 juin 2009, 11h24

      Cher Monsieur Bayrou,

      Vous n’avez pas daigné répondre à mon courriel ci-dessus. J’en tire une première conclusion : votre silence est la preuve d’une insigne lâcheté.

      Quant à la seconde conclusion, elle implique un retour en arrière.

      Le 5 juin, Richard Robert écrivait, sur « slate.fr » :
       le "4 juin, intervenant sur France Inter à trois jours des élections européennes, François Bayrou fustigeait les sondages qui signalent en cette fin de campagne un repli du Mouvement démocrate. « Il y a une manipulation de la vie politique par les sondages », expliquait-il, réagissant à une enquête selon laquelle la liste Europe Écologie menée par Daniel Cohn-Bendit ravirait la troisième place au MoDem. Si le scrutin montre « que cette affaire était une vaste entreprise pour essayer de créer un courant, ou en tout cas des mouvements d’opinion qui n’existent pas en réalité (...) je dirai tout ce que je sais des sondages et des manipulations. Et je dirai qui et je dirai comment », a-t-il ajouté. « S’il y a au pouvoir, ou proche du pouvoir, des gens qui sont les grands organisateurs de tout cela, alors il va falloir que l’on regarde de près et que la démocratie se défende. »

      On notera votre précaution oratoire :
       "Si le scrutin montre « que cette affaire était une vaste entreprise pour essayer de créer un courant, ou en tout cas des mouvements d’opinion qui n’existent pas en réalité (...) je dirai tout ce que je sais des sondages et des manipulations. Et je dirai qui et je dirai comment ».

      Dans le cadre de votre accusation contre les sondeurs, en vue de votre victimisation pré-électorale, il vous fallait bien prendre cette précaution oratoire afin, post-électoralement, de n’avoir pas à rendre de comptes sur votre accusation.

      Le scrutin du 7 juin a bien confirmé la tendance des sondages et vous êtes piteusement resté silencieux. Pas tout à fait silencieux, cependant, car, selon « Rue 89 », "François Bayrou a été jusqu’à appeler Brice Teinturier, directeur adjoint de la TNS Sofres, pour reconnaître que ses soupçons contre les sondages étaient « infondés ».

      Beaucoup pensent que vos excuses à Brice Teinturier closent cette affaire.
      Je ne partage absolument pas ce point de vue.

      En effet, le 4 juin, vous affirmiez disposer de preuves relatives aux sondages et aux manipulations.
      Le scrutin n’a aucunement détruit ces preuves.
      Ces preuves, vous les déteniez encore le lendemain du scrutin et rien ne vous interdisait de les révéler.

      Vous vous êtes refusé à cette révélation. Non parce qu’elle aurait été inopportune mais parce que, tout simplement, vos prétendues preuves du 4 juin n’ont jamais existé !

      Ma seconde conclusion est donc que vous êtes un fieffé menteur ! ! !

      Bien cordialement,

      — 
      Jean-Pierre Llabrés
       ===============
       Il faut penser en héros pour, simplement, se comporter en être humain digne de ce nom.
       May Sarton.
       ===============
      III) mardi 23 juin 2009, 11h00
       
      En vertu du principe selon lequel « qui ne dit mot consent », l’obstiné silence de Bayrou légitime la publication de mes courriels.

    • c.d.g. 10 juin 2009 15:30

      Bayrou, c est Mitterrand 2.
      Venu de la droite mais n y ayant pas trouvé une place digne de l opinion qu il a de lui meme, il va a gauche.
      Mais peu importe, tout ce qui l intéresse c est sa carriere personnelle.
      Les idees, les principes, il s assoie dessus !

      Bayrou n a pas hesite a s allier avec un repris de justice UMP (Juppe) pour tenter de gagner la mairie de Pau.
      Comme ministre de l education, sa seule politique etait de ne rien faire pour presever ses chances d etre un jour president

      Et dire que j avais vote pour lui (car en effet, il paraissait plus ouvert que les autres aux nouvelles technolgies, mais c etait que du pipeau. Son attitude vis a vis d Hadopi en est la preuve) ...


      • Vieux Sachem 10 juin 2009 18:16

        Le départ de Quitterie Delmas n’était-il pas annonciateur de cette débâcle espérée par l’UMP ?


        • Pourquoi ??? 11 juin 2009 06:15

          Bahal,

          Vous présentez internet comme un terrain de liberté d’expression. Je le pensais aussi. Mais j’ai eu 2 post censurés hier : les deux parlaient de DCB comme un pantin de Sarko.

          Je commence à m’interroger sur la censure qui pointe le bout de son nez sur ce site


          • Hibou Provence 13 juin 2009 10:42

            Il ne faut sans doute pas non plus negliger les conséquences de l’ « Affaire Marseillaise » : D’abors les protagonistes locaux (FX DE Peretti, le magistrat cogneur du CCC, soutenu par Benahmias-Madrole-Muller etc ...) ont tenté d’imposer la loi locale du silence, l’ omerta.
            Puis F. Bayrou lui même, puisque l’ « humanisme c’est de donner la priorité à l’homme », a refusé de répondre aux correspondances à ce sujet, même à celles des victimes !
            Puis le CCC qui a refusé de donner des garanties de traitement equitable ( F. Bayrou ayant, entre-temps, reconfuit DE Peretti au CCC et l’ayant même nommé Président, avec l’accord du BUREX et de l’unanilmité des Conseillers Nationaux sauf 6). Silence du « Médiateur des adhérents ».
            F.Bayrou a refusé les 2 recours statutaires, devant le Conseil National et devant le CCC.
            Aucune réponse de F.Bayrou aux courriers ! Comme s’il ne s’était rien passé.
            Sauf que 2 adhérents ont été agressés et ont reçu des coups de DE Peretti 2 jours successifs ( résultat : plainte et 8 jours d’ ITT) et que F. Bayrou abuse de son pouvoir pour couvrir tout cela.
            Tant de blogs et articles ont relatés les faits qu’ils sont une épine dans le pied de l’appareil local et national.


            • Tietie007 15 juin 2009 06:59

              Le problème de Bayrou est son obsession présidentielle qui a fait de son Parti une machine à son service.

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