L’affaire Clearstream pour les NULS !
Ce procès, le plus célèbre de l’année 2009, se tiendra du 21 septembre au 21 octobre et représente une bataille juridique, médiatique et politique.
Rappel des faits officiels
Nicolas Sarkozy porte plainte le 1er décembre 2006 car son nom figure sur une liste de personnalités censées détenir des comptes bancaires secrets à l’étranger. A priori, son nom aurait été porté sur les listings par Imad Lahoud à la demande de Jean-Louis Gergorin lui-même sous la pression de Dominique de Villepin.
L’enjeu
Nuire à Nicolas Sarkozy qui se place alors comme le principal rival de Dominique de Villepin pour les présidentielles.

Il était une fois... le début d’un scandale politique
Ainsi va le monde politique ! Quel mandat présidentiel pourrait ne pas connaître son lot de scandale et de corruption ?
Ils ont plus ou moins leur importance et sont plus ou moins mis en lumière par les médias.
L’affaire Karrachi ? Bof, elle ne suscite pas beaucoup d’intérêt. C’est une affaire d’Etat qui implique notre président de la république, mais la presse actuelle n’estime pas qu’il faille trop en dire.
La grippe A passionne beaucoup plus !
Par contre l’affaire Clearstream, elle, intéresse... Peut-être parce que pour le moment, Sarkozy en est la victime la plus connue. Peut-être parce que parler de clearstream, c’est le meilleur moyen de taire l’affaire des Frégates de Taiwan, corruption pourtant estimée à des centaines de millions d’euros.
Il n’en reste pas moins, qu’Acturevue a décidé de revenir sur l’affaire Clearstream.
D’abord pour tenter d’éclairer nos lecteurs perdus dans la cacophonie générale qui agite cette affaire.
Ensuite, parce que bientôt sera entendu par la justice, Dominique de Villepin, personnage clé de l’affaire.
Ce qui ,de facto, entraînera un emballement médiatique sur le sujet. Emballement, qui, l’on peut le craindre, n’ira pas de paire avec un éclaircissement sur l’affaire, des précisions et des réponses sur les multiples énigmes que recèle l’affaire Clearstream.
Tout commença en 2001
L’affaire Clearstream peut se diviser en deux.
La première, que l’on surnomme « clearstream 1 » remonte à 2001, lorsque le journaliste Denis Robert publie 2 livres (Révélation et Boîte noire) accusant la société luxembourgeoise « clearstream » de dissimuler des opérations financières illégales. Celles-ci concerneraient, entre autre, les rétro-commissions illégales de l’affaire des frégates de Taiwan qui transiterait par cette société.
Mais c’est avec « Clearstream 2 », que tout va éclater.
En effet, en 2004, Le Point et Le Monde révèlent que le juge chargé d’enquêter sur les frégates de Taiwan, Mr Van Ruymbeke, aurait reçu plusieurs courriers anonymes. Ces courriers prétendent révéler l’existence d’un réseau international d’influence et de malversation ainsi que celle de 895 comptes bancaires occultes appartenant à de nombreuses personnalités (Sarkozy, Fabius, Strauss-Khan...). Ces derniers étant accusés d’avoir fait transiter l’argent des frégates.
Ceci aurait eu pour conséquence, entre autre, de nuire à Sarkozy et d’anéantir sa carrière politique.
Le juge Van Ruymbeke s’est très vite aperçu de la supercherie et de la manipulation qui se cachait derrière ces envois anonymes.
En d’autres termes, c’est un petit groupe de politiciens et d’industriels qui a tenté de manipuler le juge afin d’évincer des concurrents potentiels comme le futur président Sarkozy et d’autres personnages de haut rang.
Apportons quelques précisions qui peuvent avoir leur importance :
Cette tentative d’accusation intervient dans un contexte particulier, fait de conflits, de concurrence et d’intérêt. Les accusés sont le n°2 d’E.A.D.S (J-L Gergorin), et I.Lahoud.
En effet, les dirigeants d’E.A.D.S (industrie d’armement) et d’AIRBUS se livrent une cruelle bataille de pouvoir et d’influence. Mais s’ajoute à cela, la féroce adversité qui oppose N.Sarkozy et de Villepin, à l’approche des élections présidentielles de 2007.
Les lettres anonymes de celui que l’on appellera désormais le« corbeau » dénoncent un « comité » international composé de français, d’oligarques russes et de narco-traficants qui seraient à l’oeuvre pour contrôler de grandes entreprises et blanchir de l’argent sale. Il est fait état d’une liste révélant le nom de toutes les personnes qui auraient un compte occulte ouvert à la société luxembourgeoise.
Le juge ouvrira donc plusieurs enquêtes et établira immédiatement que cette liste est une pure invention. Il innocentera dans le même temps Sarkozy et d’autres qui avaient leur nom sur cette liste ou « listing ».
Puis en Avril 2006, deux des responsables d’E.A.D.S sont impliqués dans l’établissement de ce faux listing..
Jean-Louis Gergorin , directeur d’une branche d’E.A.D.S chargé de la stratégie, avoue alors, être l’auteur des 2 premières lettres anonymes envoyées au juge Van Ruymbeke.
Ensuite, Imad Lahoud, directeur scientifique d’E.A.D.S, est accusé par le général Rondot (qui avait enquêté le premier sur ces faux listings, sous ordre de de Villepin) et J-L Gergorin, d’avoir envoyé lui aussi des lettres anonymes avec de fausses accusations. Celui-ci avait nié toute implication dans cette affaire qu’il reconnaît pourtant aujourd’hui.
En effet, c’est la première fois qu’Imad Lahoud, qui est soupçonné d’avoir falsifié les listings de Clearstream reconnaît les faits en y implicant Jean-Louis Gergorin et l’ancien locataire de Matignon. « J’ai recopié ces deux noms sur une feuille Excel vierge avec 5 ou 6 colonnes, noms, pays, banque, numéro de compte, ouverture ; C’est Gergorin qui m’avait donné le modèle manuscrit et je n’ai fait que recopier sur une feuille Excel Je m’en voudrais toute ma vie », aurait-il avoué. « Jean-Louis Gergorin a fait pression sur moi pour que je rajoute ce nom. Il m’a dit que cette personne était dangereuse pour la France et qu’il fallait à tout prix l’écarter » aurait poursuivi l’informaticien, à propos du nom de Sarkozy.
Mais pourquoi le pauvre de Villepin se trouva tourmenté quand l’affaire fut révélée ?
De Villepin, alors ministre des affaires étrangères en 2004, prend connaissance des fausses listes qui accusent certaines personnes (dont Sarkozy, alors compère gouvernemental) de détenir des comptes occultes.
Villepin, qui aurait dû en informer l’existence, préfère commanditer une enquête au général Rondot pour vérifier la véracité des listes, soi-disant....
Il exigera une seconde enquête à la D.S.T, sans préciser qu’il en avait déjà demandé une au général Rondot.
Problème !
Rondot lui même, et Imad Lahoud accusent l’ancien premier ministre d’avoir envoyé une note plus que compromettante à Rondot. Cette note indiquerait que de Villepin aurait donné instruction à Jean-Louis Gergorin de « balancer Sarkozy ».
En somme, de révéler à tous la fausse liste et ainsi de tuer la carrière politique du petit Nicolas, qui venait tout juste de se relever des déboires balladuriens.
Plus tard, J-L Gergorin, auteur de quelques lettres anonymes, révélera même qu’il était sous unique instruction de Dominique de Villepin.
C’est pourquoi, le 27 juillet 2007, Villepin est mis en cause sous 4 chefs d’accusation différents :
- Complicité de dénonciation calomnieuse
- Recel de vol
- Recel d’abus de confiance
- Complicité d’usage de faux
Et est depuis ce jour, interdit de rencontrer les principaux protagonistes de l’affaire, comprenant entre autre Chirac. Jouissant d’un simple statut de citoyen lambda (puisque ne faisant plus parti du gouvernement), il est renvoyé en correctionnelle en novembre 2008.
Notre ancien premier ministre aurait pu être jugé par la Cour de Justice et invoquer la raison d’Etat pour se débarrasser des accusations qui pesaient sur lui. Mais il a choisi une voie plus périlleuse, celle d’être jugé comme n’importe quel citoyen, ceci afin d’être pleinement réhabilité.
Pourquoi Père Chirac peut craindre de jouer le premier rôle dans cette affaire ?
Les rumeurs courent et ne s’arrêtent jamais. On dit que Jacques Chirac aurait été un des premiers au courant de ces fausses listes d’accusation et que c’est lui même qui aurait demandé, à la discrétion de tous, que de Villepin exige une enquête pour savoir si Sarkozy détenait ou non un compte luxembourgeois.
Le général Rondot, affirme également, que Michelle Alliot-Marie, contrairement à ce qu’elle prétend, savait l’existence des listings dès 2003 et qu’elle n’avait pourtant pas informé Sarkozy.
Le Trio gaullien voulait-il faire trébucher le petit Nicolas ?
C’est ce que l’on suspecte de plus en plus en 2008. En plus de cela, Imad Lahoud, affirme la même année que c’est Yves Bertrand (ancien directeur des renseignements généraux de 1992 à 2003) qui a ajouté devant lui , le nom de Sarkozy sur la fausse liste. Ce que l’accusé a fermement contesté en déposant une plainte pour diffamation contre les révélations de Lahoud et du Point… qu’il a retiré en 2009... Encore étrange...
Ce que cache cette affaire politico-médiatique
Rappelons que Villepin est mis en accusation et poursuivi par N.Sarkozy.
Et que celui-ci a tout fait pour que l’on retienne une seule chose : Que c’est la principale victime de l’affaire. Faisant oublier dans le même temps le scandale ELF, l’affaire des frégates de Taïwan
Enfin et c’est sans doute le plus grave, Nicolas Sarkozy a peu à peu, pris conscience de l’intérêt qu’il pouvait tirer de cette affaire.
Après son élection à la présidence de la République, il a prolongé le juge Henri Pons (qui s’occupe désormais de l’affaire) dans ses fonctions au pôle financier de Paris ; Dominique de Villepin avait alors saisi le conseil d’Etat afin de dénoncer cet « intérêt à agir » de Nicolas Sarkozy.
Sarkozy juge et partie
Dans ce procès, rappelons-le, Nicolas Sarkozy est partie civile, allant à l’encontre de la prévision de l’article 67 de la Constitution qui affirme que le Président de la République « ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite ». Dans l’affaire concernant le piratage de ses comptes bancaires, le tribunal de Nanterre a d’ailleurs rappelé cet article et a déclaré que « l’immunité pénale dont bénéficie Nicolas Sarkozy dans la Constitution introduisait une atteinte au principe d’égalité des armes avec les prévenus ». Par ailleurs, les juges rappellent que le président de la République est toujours à la tête du Conseil supérieur de la magistrature, qui règle les carrières des magistrats. Du fait de ce lien avec les magistrats, il est possible que les justiciables considèrent qu’ils n’ont pas affaire à des juges impartiaux lorsqu’ils ont le chef de l’Etat comme plaignant dans un dossier.
Pour conclure,
Le procès est aussi complexe qu’incertain.
Complexe, parce qu’il concerne de grandes figures, nombreuse et disparates et que les conflits d’intérêts sont multiples. Incertaine, parce que l’issu du procès ne sera sûrement pas la vérité et que le doute planera longtemps sur les intentions des protagonistes que sont surtout Sarkozy et de Villepin.
D.Perrotin
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