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S’inscrire dans une histoire. Un thème prisé des modernes, bien que tous les anciens aient souscrit à ce principe car l’homme étant pourvu de conscience, de mémoire et de capacité critique, il peut penser, comprendre ou écrire des histoires. Avec des actions et des rencontres. Tout se prête à la production d’histoires. L’homme est le seul animal biographique. Que ce soit dans le monde matériel, dans celui de l’inconscient ou dans l’imaginaire, avec les fictions, qu’elles soient profanes ou religieuses. S’inscrire dans une histoire suppose une aventure personnelle avec des rencontres ou parfois un dessein collectif. Pour ma part, je me souviens avoir animé un site contre le TCE européen en 2005. C’est de l’histoire collective. Et puis les cafés philos que j’anime. C’est de l’histoire personnelle et locale. Savoir écrire et interpréter des histoires, la sienne, celle des autres, celle des peuples, c’est un élément fondamental qui élève l’homme vers une conscience affirmée de l’existence.

Il fut un temps ou les histoires avaient des rôles herméneutiques, livrant des connivences de sens à travers les mythes. Freud ne dirait pas le contraire. Dans les églises du Moyen Age, on pouvait voir des images pieuses mais aussi des scènes de la vie quotidienne. La conscience de l’Histoire avec un H majuscule est arrivée il y a peu de temps, vers 1700, avec Bossuet, Leibniz, Vico. Un siècle plus tard, la conscience de faire l’Histoire est apparue, livrant les peuples et les gouvernants à de grands desseins, politiques, colonialistes, culturels, nationalistes, idéologiques.

Quelques touches pour peindre ce thème. Le communisme, rêve collectif vite enterré avec les désillusions de l’expérience soviétique. L’inscription des hommes dans le fascisme n’a pas donné d’issue viable. Cette affaire s’est décidée entre 1920 et 1945. Ensuite, l’inscription dans une histoire collective fut une sorte de renaissance des rêves utopiques, dans les années 1960 et 1970. Puis, ces rêves ont été enterrés par un nouveau schéma mis en place à partir de 1980 avec une brutalité affirmée et assumée. On peut dire que Reagan, Thatcher, Mitterrand et Kohl ont bien géré la partie tout en créant les conditions pour que se développe un nouvel âge, un nouveau régime, mais n’incriminons pas quelques figures de l’Histoire. Ce nouvel âge repose aussi sur les techniques et les médias de masse avec la nature humaine qui fait le reste. Les médias formatent les consciences en livrant des normes et références permettant aux gens de s’inscrire artificiellement dans leur histoire. C’est certainement calamiteux, mais c’est la réalité.

Les médias de masse véhiculent des options pour l’existence. Les gens dociles s’y réfèrent, les gens libres préférant inventer leur vie. 1990, le grand récit communiste s’est achevé. Les chouettes de Minerve ont glosé sur la victoire de la démocratie, comme Fukuyama. En fait, après la guerre du Golfe, les années Clinton ont vu une autre Histoire se mettre en place. Assez étrange à comprendre puisque le principal ennemi des Etats-Unis était à terre. Clinton a dérégulé les marchés et favorisé l’avènement du capitalisme de casino qui a produit les crises financières de 2000 et 2008. Entre temps, le 11 septembre a plongé les Etats-Unis dans un schéma politique conduisant à la destruction de la démocratie. Les deux piliers de la société autoritaire sont en place. La finance et la sécurité. Le ressort de la civilisation est cassé, celui de l’éducation. Ces deux orientations montrent que les élites avaient des intentions et que le reste n’est que prétexte à justifier les dominations en enfumant les masses. En 2013, les Etats-Unis sont plus proches de la Chine et l’Iran que de la démocratie. Un changement de régime s’est opéré. A l’époque moderne, les régimes se définissent pour une bonne part en référence aux histoires personnelles des individus. La démocratie se pense en référence avec la possibilité pour les citoyens d’être auteurs de leur histoire et de l’Histoire collective. Ce qui n’est plus le cas dans les nations qui se prétendent démocratiques.

Cela n’empêche pas que les gens ont besoin de trouver du sens à leur histoire. Ils se confessent. Même que lors d’incidents fâcheux, les autorités dépêchent des cellules psychologiques qui sert de rustine pour que les gens recollent les morceaux fragmentés de leur histoire. Ils se confessent au prêtre, aux amis, sur le web, sur l’écran, à écrire, causer et dialoguer sans fin. C’est essentiel que de s’inscrire dans une histoire. Et de s’intéresser aux histoires des autres, celles des enfants, des amis. C’est universel et humain. Inventer son histoire est un signe de liberté, inventer à l’écart des normes et des schémas. L’homme qui invente son histoire est libre. Celui qui suit les histoires et les schémas est comme un cheval, un homme domestiqué, dressé, avec des œillères. La société qui se met au service des élites fait en sorte de mettre des œillères aux populations. Elles n’ont pas tort de leur propre point de vue intéressé, une partie de l’humanité étant du genre servile.

Il y aurait matière à écrire un chapitre de livre, voire même un essai sur l’inscription de l’homme dans son histoire avec d’autres histoires et la grande Histoire. Ou à défaut, une méditation estivale. Il va faire chaud aujourd’hui.


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8 réactions à cet article    


  • alinea Alinea 21 août 2013 11:03

    C’est curieux, j’écrivais il n’y a pas longtemps :
    "On cherche plus à s’inscrire qu’à s’inscrire en faux et le peu de vigilance qu’il reste est toute entière tendue dans ce but ; et ceux qui ne sont pas inscrits, ceux qui restent en marge trouvent dignité et justesse à leur non choix."
    ... inscrire quelque chose dans une liste, dans un livre, pour transmettre ou se souvenir...mais aussi : noter des noms sur un registre !
    oui, s’inscrire me fait plutôt penser à une démission de soi au profit de la pensée commune et de vouloir s’y faire reconnaître, voire protéger.
    Car la liberté comme la vérité semble trop impermanente ; c’est peut-être cette habitude de s’inscrire partout qui rend les engagements si volages aujourd’hui.....
    j’y réfléchirai plus avant


    • lionel 21 août 2013 12:11

      Dugué, 


      Tout ce que vous écrivez n’est pas « génial », mais vous l’écrivez et nous le lisons... Nous réfléchissons, nous avalisons, nous ne sommes pas d’accord...

      Veuillez accepter l’expression d’une... Bise.

      (Celle ci vous sera remise au cas où l’univers nous mettrait en communication directe)

      PS : Bien sur, vous pourrez refuser...à condition de partager un verre de vin de qualité.

      Respect Maximum

      Lionel

      • Loatse Loatse 21 août 2013 12:53

        C’est curieux, (je reprend l’expression d’Alinéa), j’écrivais hier soir encore sur l’idéal communisme dans l’élaboration d’un article sur l’athéisme que j’hésite à proposer à la modération...en me relisant j’ai enlevé le passage.. ne sachant comment inscrire celui ci dans l’Histoire... ce qui aurait justifié un autre article.. smiley

        Un idéal chasse l’autre, c’est comme si nous devions faire l’expérience de tous ces idéaux pour trouver enfin un équilibre... les extrêmes auraient en quelque sorte leur raison d’être tant que nous n’avons pas trouvé cet équilibre par nous mêmes... économiquement, spirituellement etc...

        A l’instar de ce qu’il se passe en Egypte oscillant entre dictature militaire et dictature religieuse, entre passéisme et modernité sauf que l’histoire ne peut revenir en arrière puisqu’elle n’est pas étanche, ni indifférente aux influences des autres cultures plus « aventureuses »

        Une petite anecdote à ce propos..

        Le caire 2010.. un « frère couleur locale » (barbe, kamis, etc..) prend un taxi.. Dans le véhicule une station de radio diffuse de la musique.. le frère en prend ombrage et exige du conduteur qu’il éteigne celle ci, se référant à je ne sais quel passage qui justifierait son exigence...
         C’est alors que le chauffeur sans obtempérer stoppe net son véhicule, agacé et se retournant vers le moraliste en babouches lui rétorque :
        Non, mon frère, je n’éteindrais pas mon poste, par contre toi tu vas descendre de mon taxi illico et attendre le prochain chameau qui passera par là...


        • Demian West 21 août 2013 15:29

          Certes, le mot histoire est martelé à chaque phrase de ce texte, mais sans jamais décoller vers une vraie histoire qui saurait fonder un sens ou une aventure plus intelligible. Peut-être, vouloir résumer l’histoire depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours en 50 lignes est un peu présomptueux et tout à fait impossible. Si bien qu’il n’en reste presque rien. Vous avez déjà produit bien mieux, mais il est vrai qu’un 21 août, vous pouvez vous permettre une sorte de réflexion pastis en terrasse sans aucune téléologie sous ce soleil qui écrase toutes perspectives. smiley

          Je sais que vous êtes honnête et que vous accepterez ma critique mordante et bienveillante à la fois. Parce qu’elle est probablement assez juste.

          • L'enfoiré L’enfoiré 21 août 2013 18:40

            Salut Demian,


             C’est le retour du Jedi auquel nous assistons ? smiley

          • L'enfoiré L’enfoiré 21 août 2013 18:30

            Indignez-vous, disait l’autre... 

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