« C’est Fourier seul – Marx et Engels l’ont eux-mêmes reconnu – qui a fait voir le premier la différence qualitative qu’il y a entre la société libre et la société non libre, et qui n’a pas eu crainte – alors que Marx l’a eue en partie – de parler d’une société possible dans laquelle le travail deviendrait jeu. Une société dans laquelle le travail – même le travail socialement nécessaire – s’organiserait en accord avec les aspirations libérées, les besoins instinctifs, les inclinations spontanées de l’homme. » (Herbert Marcuse, « Fin de l’utopie »)
Sans aller jusqu’à ce que le travail soit jeu à proprement parler, quoique cette notion soit en elle-même la plus séduisante, on peut concevoir qu’il soit pour chaque individu en accord avec ses aspirations profondes ou ses capacités voulues, ce qui devrait être l’espérance de chacun. En même temps celui-ci devrait être aussi une sorte de monnaie d’échange. Une monnaie différente, alors « monnaie de consommation » (André Gorz) correspondant à la valeur de la fabrication marchande ainsi produite par le travail. Il est évident que cette valeur d’échange ne serrait pas tributaire du marché puisque établie avant qu’elle devienne véritablement une marchandise mise en concurrence.
Comme on le voit on repousse alors la notion de marché hors de la valeur estimable du travail. Cela va sans conteste en opposition au principe capitaliste qui considère le travail comme une variable d’ajustement du capital. Capital tirant ses bénéfices de l’évolution des marchés ou la quantité et la valeur horaire du travail rémunéré seront alors réduit au minimum pour avoir une marge nécessairement plus élevé. En fait, si les matières premières sont incontournables en quantité dans la fabrication, le travail lui sera variable en fonction de la rentabilité voulue de la production.
Donc, dans ce genre de raisonnement, il n’est aucunement mis en avant les aspirations de l’humain, la seul productivité de l’entreprise comptant, on considère alors que le centre de l’existence est celle-ci, par conséquence le travail productif devient l’unique moteur sociétal de l’individu. Conséquence qui aliène l’homme à la rentabilité et ne permet la reconnaissance social qu’en fonction du travail. D’ailleurs ce n’est plus la qualité de l’œuvre accompli qui compte, mais le rang obtenu dans l’entreprise par la rentabilité apporté au service de son expansion, le meilleur qui aura valorisé le capital de l’actionnariat
On connaît alors les excès de ce principe, esclavagisme moderne, obsession de la rentabilité, formatage de l’individu pour le travail devenu la centralité de l’existence. Centralité dont on connaît les ravages, perte de confiance envers lui-même de l’individu, le stress ou autres symptômes de fatigue intellectuelle et morale, quand cela ne conduit pas à certaines extrémités irréversible. Cause de l’aliénation par le travail que l’on n’aurait pas s’il était jeu
C’est pourquoi il faut sortir de la logique marchande et de la société ne privilégiant que les biens. Une humanité ou les liens seront le moteur des relations humaines ne pourra donc se faire que hors le capitalisme, c’est en redonnant au travail sa véritable quintessence, celle des échanges ce qui conduira nécessairement à moins de travail ou du moins celui-ci sera sorti de fait du concept de rentabilité au service du capital, ce n’est que dans ces conditions que l’on redonnera à l’homme sa dignité et sa liberté…
Le slogan, « travailler plus pour gagner plus » que l’on doit à l’un des plus virulents serviteurs du capitalisme est donc une nouvelle aliénation pour servir les intérêts d’une oligarchie. Une opposition forte à ce genre de concept remettra le travail à sa juste valeur !
*« Mettre la production au service de l’épanouissement au lieu de mettre ceux-ci au service de la production……, nous avons à nous libérer de la production et pas seulement dans la production. »
*En italique, propos de Jean-Marie Vincent cités par André Gorz dans le N°50 de mouvement de juin 2007.
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