• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de omar

sur Dire non à la burqa, c'est aussi dire non au fondamentalisme Chrétien


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

omar omar 25 juin 2009 10:45
La tête du MAK mise à prix ?

Après l’assassinat du Fils de Ferhat Mehenni, le 18 juin 2004 à Paris, la même question était posée dans tous les organes de presse : « qui a tué Ameziane ? ».

C’est aussi cette question que s’est posée Michel Gurfinkiel, sur son propre site, dès le 8 juillet 2004. Ce journaliste est, entre autres, le président de l’Institut Jean-Jacques Rousseau, un institut européen d’études et de recherches, spécialisé dans les questions stratégiques et géopoliques.

Son analyse des faits et les projections qu’il mettait en évidence, en 2004, notamment les révélations que lui a communiquées un spécialiste Français sur cette « question Kabyle », sont singulièrement en résonance avec l’actuelle machination mise en branle par le pouvoir algérien via sa presse barbouzarde spécialisée en « action psychologique », même si les ficelles sont grosses comme des cordes. En réalité (et zéro pointé pour le barbouze de service) elles ne font que mettre sur la place publique la trouille de la mafia au pouvoir . Ce pouvoir, décidément trop stupide, compte sur « sa rue arabe » fanatisée à l’extrême et bien mieux conditionnée que les chiens de Pavlov, pour empêcher le fleuve détourné de revenir tout naturellement dans son lit.

Lisez, ci-dessous, l’analyse de Gurfinkiel et serrez les dents au mot « maghreb ». Quasiment prémonitoire…

ADN

Qui a tué Améziane ?

« Violence urbaine » ou assassinat politique ? Le meurtre d’Ameziane Mehenni assombrit le climat en Kabylie. Au moment où les autorités cherchent à mettre la presse au pas.

L’assassinat d’Ameziane Mehenni n’en finit pas de susciter l’émotion dans les milieux militants kabyles, tant en Algérie qu’en France. Le jeune homme (trente ans, diplomé de commerce international, étudiant en japonais) a été poignardé voici un mois à Paris, dans la nuit du 18 juin, peu après minuit. Des témoins ont affirmé qu’il aurait été « pris à partie » par deux inconnus au moment où il quittait un restaurant Burger King du boulevard de Clichy, un paquet de sandwiches à la main. Il a été frappé à la poitrine au cours de cette « rixe ». Conduit d’urgence à l’hôpital le plus proche, il devait y décéder quelques heures plus tard.

Selon la police, l’affaire est purement criminelle : une autre agression au couteau (qui n’a pas eu de suite mortelle) se serait produite au même endroit, un peu plus tôt dans la soirée. Mais dans les milieux kabyles, on est d’un autre avis : Ameziane aurait été « attiré dans un piège ». Ferhat Mehenni, son père, est à la fois un barde national et le chef de file du Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie (MAK). Un rôle qui lui a valu de nombreuses inimitiés. Chez les intégristes, qui haïssent le mouvement kabyle pour son caractère laïque. Et dans une partie au moins des milieux dirigeants algériens (civils ou militaires), où l’on considère l’autonomisme kabyle comme une menace pour l’unité nationale. « Ils s’en sont pris d’abord à sa famille », observe un militant du MAK. « Classique ».

Plusieurs centaines de personnes se rassemblaient dès le 22juin sur les lieux du meurtre, pour y déposer des gerbes. Même foule lors de la levée du corps, le 24, à l’Institut Médico-Légal. Le jeune homme a été enterré le 25 à Maraghna, à l’est d’Alger : cette fois, ce sont des milliers de personnes qui se pressaient le long du cortège, en dépit d’une chaleur étouffante.

Ferhat Mehenni a commencé à militer pour la cause berbère et kabyle dans les années 1970 : à travers ses chansons, à mi-chemin du folk-song et du manifeste contestataire. Arrestations répétées, deux séjours au bagne. A la fin des années 1980, Ferhat rejoint le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) de Saïd Sadi, qui croit à la libéralisation réelle du régime. Avant de le quitter quelques années plus tard. L’assassinat de l’autre poète national kabyle, Matoub Lounès, en 1998, et le «  printemps kabyle » de 2001, printemps noir où les forces de sécurité tuent une centaine de jeunes manifestants, le convainquent enfin de lancer son propre mouvement, le MAK, dont il se veut le « porte-parole » plutôt que le président…

Pour l’essentiel, Ferhat est un modéré. Il prône la non-violence. Et ne conçoit pas la Kabylie future comme un Etat indépendant, mais plutôt comme une province semi-souveraine au sein de l’Algérie : un statut qu’il compare à celui dont jouit aujourd’hui la Catalogne au sein du royaume d’Espagne, ou le Québec au sein de la fédération canadienne. Cette modération lui vaut pendant quelque temps de ne pas être inquiété.

Mais la portée à long terme de ses revendications n’en est pas moins considérable. Cela apparaît dans son livre-manifeste publié au début de l’année, Algérie, La Question kabyle (Editions Michalon). Trois idées force :

« Kabylie a été manipulée » depuis l’indépendance de l’Algérie. L’un dans l’autre, les Kabyles représentent un peu moins du tiers de la population algérienne : huit millions d’âmes sur près de trente, dont six millions dans le pays kabyle proprement dit, la région montagneuse grande comme la Belgique située à l’est d’Alger, autour de Tizi-Ouzou et de Boujaïa, un million et demi dans le Grand Alger, cinq cent mille dans le reste du pays ; ils représentent 60 % de la diaspora algérienne, notamment en France, soit un million et demi d’âmes sur près de trois.

Utilisés par le FLN comme le « fer de lance » de la lutte contre les Français, mis au pas sous Ben Bella en 1963, marginalisés par les pouvoirs militaires, de Houari Boumediène à Liamine Zeroual, ils sont tolérés aujourd’hui comme un contrepoids éventuel à l’islamisme. Mais leur identité particulière (et leur mode de vie, proche de l’Occident) ont toujours été niés.

La Kabylie « se revendique désormais comme un peuple à part entière » . Elle veut s’émanciper de l’Etat algérien actuel, marqué à la fois par « l’idéologie jacobine française et le centralisme issu du marxisme », de la même manière que l’Algérie, naguère, s’est émancipée de la France.

De la même façon, la Kabylie ne doit plus faire passer le « combat culturel » de l’ensemble des communautés berbères d’Algérie et du Maghreb avant son propre combat national. Les autres berbérophones du Maghreb parlent des dialectes différents et sont plus marqués par la culture arabe. Ils ne constituent pas des communautés cohérentes, majoritaires sur leur sol. Seuls les Kabyles peuvent constituer une entité politique viable, un Etat-nation moderne, même si ce processus passe par une association étroite avec l’Etat algérien.

« Ferhat demande moins que d’autres militants kabyles ou opposants algériens », note un spécialiste français des affaires maghrébines. « Mais avec plus de réalisme et donc plus de chances de parvenir à ses buts. » Ce qui a accru la nervosité du pouvoir, ce sont les contacts internationaux de haut niveau que le MAK a noués récemment, en France, dans les pays de l’Union européenne, aux Etats-Unis. « Le voyage de Ferhat à Washington,l’automne dernier, a vraiment effrayé beaucoup de gens à Alger . Depuis Boumediène, l’Algérie officielle et les intégristes ont joué la carte américaine pour mieux faire pression sur la France. Ils ont été paniqués à l’idée d’une « conversion » de l’administration Bush à la cause kabyle, a priori beaucoup plus démocratique que la leur . Cela les laisserait sans recours ni marge de manoeuvre face à Paris » .

L’enquête sur l’assassinat d’Ameziane a-t-elle des chances d’aboutir ? Il est trop tôt pour le dire. Le climat qui règne actuellement en Algérie ne fait que renforcer les soupçons du MAK et de ses sympathisants. Depuis sa réélection au printemps dernier, Abdelaziz Bouteflika semble décidé à mettre l’opinion au pas. Les arrestations de journalistes libéraux se multiplient. En contrepoint, le bureau local d’Al Jezirah, la télévision du Golfe considérée comme trop proche d’Al Qaida par les Américains, a été fermé sine die.

Michel Gurfinkiel.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès