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Commentaire de easy

sur Rama Yade : Y en a marre ! N'a-t-elle pas un boulot à l'UNESCO ?


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easy easy 26 avril 2011 15:57

Sans doute parce qu’elle est déjà galatéisée par un autre, sans doute parce que je suis jaloux d’elle pour le compte de ma propre Galatée, sans doute parce qu’elle est trop habile, Rama Yade me sort par les trous de nez depuis sa naissance.

Je ne serais donc certainement pas allé à en parler.

Mais quelle drôle d’idée vous avez eue de convoquer Victor Hugo comme témoin à vos côtés dans un procès contre une Esmeralda !

Et même, au-delà de Notre-Dame, quel contresens que de se faire assister de cet humaniste dans un procès contre un comportement humain observé de loin !

Victor Hugo a la particularité de solliciter en nous la fibre de l’embellissement, de l’idéalisation de choses pas forcément magnifiques à la base.

A poser qu’à Guernesey, sa préoccupation profonde ait été de démonter N III, et bien il aura surtout tiré de biais. Au lieu de passer son temps à décortiquer en quoi le slip du roi était sale, il l’a passé à nous rendre amoureux des pieds nus d’Esmeralda. Cette démarche est extrêmement subtile et son impact est bien plus considérable que celui qu’aurait provoqué une attaque permanente dirigée contre l’Empereur.

La Commune, la très étrange Commune traduisait l’impact de cette positivation ou valorisation du gueux par lui-même. Jamais avant lui, le gueux ne s’était vu quelque grâce. 
En 1789, les assertions allaient directement au cassage des aristos et du clergé. Pour autant, personne, absolument personne ne croyait possible de dire quelque beauté de la plèbe. Jean de la Fontaine, Molière, qui avaient tout de même offert grande place à la gouaille, n’avaient pas pour autant jeté quelque aura sur le bouseux. Au mieux on reconnaissait au vagabond son bon sens et son franc-parler mais on n’allait pas jusqu’à le proposer en amant. Pas d’amour, pas de sublime possible chez les disetteux

Avec Victor Hugo, le pire des va-nu-pieds a enfin une âme magnifique. Pas fou du tout, Hugo a la bonne idée de ne pas éclairer la gueusaille seulement de lumières dorées. Il commence par l’éclairage sombre qu’on lui accorde habituellement et progressivement, il inverse la couleur. C’est génial.

Victor Hugo nous a dit « OK, il est sale et puant mais lavez-le et vous verrez sa beauté ».

C’est donc à chacun de laver l’autre au lieu de « l’habiller pour l’hiver »

Ce qui aboutit par exemple à

Après la bataille

Mon père, ce héros au sourire si doux,
Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous
Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
Parcourait à cheval, le soir d’une bataille,
Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.
Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit.
C’était un Espagnol de l’armée en déroute
Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié.
Et qui disait : « A boire ! à boire par pitié ! »
Mon père, ému, tendit à son housard fidèle
Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit : « Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. »
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant : « Caramba ! »
Le coup passa si près que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
« Donne-lui tout de même à boire », dit mon père.


Il est certain que la scène ne s’était pas passée de manière si idéale (si elle a bien eu lieu). Mais Hugo a passé des jours à tailler et retailler l’histoire pour en faire cet objet parfaitement ciselé où le contexte sert de prétexte et d’écrin à l’expression du meilleur de l’homme.
(La balle aurait touché le front...)
Ce que nous enseigne Hugo c’est que l’embellissement de l’homme ne passe pas par sa parure mais par son regard. 

Ce travail de nettoyage, de palimpseste positif du passé, a conduit Hugo à quelque chose de rarissime. Il a si bien idéalisé son père qu’il est parvenu à en faire le personnage essentiel d’un de ses poèmes. A part Pagnol, il n’y a personne qui en ait fait autant. Et pour faire ça il faut laver, il faut décharger les gens, non les accabler et les salir. Il faut les dénoyer non les enfoncer comme l’a fait Bazin.


Quand on s’habitue à embellir les gens, on finit par éprouver un sentiment de pitié (issue de la tendresse) envers le genre humain. On ne hait plus.

Alors qu’il aurait pu, comme les autres, être fasciné par le machinisme, il n’a jamais invité à considérer autre chose que l’Homme. Il n’a jamais dit qu’il y avait de beautés et d’infinis ailleurs que dans l’Homme.
Même quand il place la Lune dans ses poèmes, ce n’est alors qu’un décor pour une humanité de plus. L’astre de pierre n’est pas un objet de désir.




Clair de Lune

La lune était sereine et jouait sur les flots. — La fenêtre enfin libre est ouverte à la brise, La sultane regarde, et la mer qui se brise, Là-bas, d’un flot d’argent brode les noirs îlots.
De ses doigts en vibrant s’échappe la guitare. Elle écoute... Un bruit sourd frappe les sourds échos. Est-ce un lourd vaisseau turc qui vient des eaux de Cos, Battant l’archipel grec de sa rame tartare ?
Sont-ce des cormorans qui plongent tour à tour, Et coupent l’eau, qui roule en perles sur leur aile ? Est-ce un djinn qui là-haut siffle d’un voix grêle, Et jette dans la mer les créneaux de la tour ?
Qui trouble ainsi les flots près du sérail des femmes ? — Ni le noir cormoran, sur la vague bercé, Ni les pierres du mur, ni le bruit cadencé Du lourd vaisseau, rampant sur l’onde avec des rames.
Ce sont des sacs pesants, d’où partent des sanglots. On verrait, en sondant la mer qui les promène, Se mouvoir dans leurs flancs comme une forme humaine... — La lune était sereine et jouait sur les flots.


 





Ah bah, pendant que j’y suis, voici les paroles de
 
Hijo de la Luna


Idiot qui ne comprend pas
La légend’ qui comme ça
Dis qu’une gitane
Implora la lune
Jusqu’au lever du jour
Pleurant elle demandait
Un gitan qui voudrait
L’épouser par amour

Tu auras ton homme, femme brune,
Du ciel répondit la pleine lune,
Mais il faut me donner
Ton enfant le premier
Dès qu’il te sera né
Celle qui pour un homme
Son enfant immole,
Bien peu l’aurait aimé.

[Refrain :]
Lune tu veux être mère
Tu ne trouve pas l’amour
Qui exauce ta prière
Dis moi lune d’argent
Toi qui n’as pas de bras
Comment bercer l’enfant
Hijo de la luna aaa.

D’un gitan cannelle
Naquit l’enfant
Tout comme l’hermine,
Il était blanc,
Ses prunelles grises
Pas couleur olive
Fils albinos de lune
Maudit sois tu, bâtard !
T’es la fils d’un gadjo
T’es le fils d’un blafard.

[Refrain]

Le gitan se croyant déshonoré
Couteau en main sa femme alla trouver,
L’enfant n’est pas de moi,
Tu m’as trompé, je vois !
A mort il l’a blessa
Et l’enfant dans ses bras
La colline il monta,
Là haut l’abandonna...

[Refrain]

Et les soirs où l’enfant joue et sourit,
de joie aussi la lune s’arrondit
Et lorsque l’enfant pleure
Elle décroît pour lui faire
Un berceau de lumière


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