Jean Mourot
Vous avez tout à fait raison de ne pas penser que « les manifs ponctuelles les plus massives et les mieux réussies puissent créer les conditions d’un sursaut de ceux qui nous dirigent aujourd’hui pieds et poings liés par les engagements internationaux ». En effet, le mouvement social est par essence un mouvement pacifique, voire pacifiste. Il vise simplement à interpeler le gouvernement capitaliste, à faire « sursauter » nos dirigeants capitalistes. Il ne vise pas à renverser le gouvernement pour lui substituer un autre gouvernement disposé à donner droit à ses revendications sociales. Son but est donc très insuffisant. Mais, de tels mouvements sociaux, portés par la masse des déshérités, en se multipliant, peuvent préparer le terrain à d’autres formes de revendications plus appuyées en direction du changement non seulement du gouvernement, mais aussi des institutions dans leur ensemble. Pour qu’une telle mutation politique du mouvement social puisse s’opérer et se pérenniser, il faut l’émergence, au sein de cette masse dolente, endolorie, d’un aiguillon, d’un parti politique spécial et approprié, le Parti Communiste de type bolchevique, comme celui de Lénine et Staline. L’émergence d’un tel parti changera la distribution des cartes sur le champ politique et ouvrira un horizon optimiste au mouvement social.
Vous pronostiquez « un grand chambardement à l’échelle internationale » comme épilogue de ce « système longtemps accepté d’intégration qui dépasse l’Europe ». Là aussi, je partage votre pronostic. Ce chambardement, çà s’appelle la guerre, et pas une petite guerre, mais une grande guerre comme celle de 1914-1918, c’est-à-dire une guerre des pays impérialistes entre eux pour le repartage du monde sans ambiguïté. Vous avez posé la question : le souhaitons-nous vraiment ? Bien évidement, personne ne peut souhaiter une telle horreur, un tel cataclysme pour l’humanité. Même les pays impérialistes eux-mêmes ne le souhaitent pas. Et ils font tout ce qu’ils peuvent pour l’éviter. Mais, quels que soient leurs efforts, quelle que soit leur bonne volonté pour éviter la catastrophe ultime, cette catastrophe arrivera tôt ou tard à cause de la nature contradictoire même du système impérialiste qu’ils s’évertuent à entretenir. En effet :
« La guerre n’est pas en contradiction avec
les principes de la propriété privée ; elle en est le développement direct et
inévitable. En régime capitaliste, le développement égal des différentes
économies et des différents États est impossible. Les seuls moyens possibles,
en régime capitaliste, de rétablir de temps en temps l’équilibre compromis, ce
sont les crises dans l’industrie et les guerres en politique. (...) »
(Lénine – Du mot d’ordre des Etats-Unis d’Europe).
« Le
rapport des forces économiques des puissances impérialistes se modifie avec une
rapidité sans précédent. Il en résulte des modifications très irrégulières du
potentiel de guerre des États impérialistes. La modification du rapport des
forces économiques et militaires va à rencontre de l’ancienne répartition des
colonies et des sphères d’influence, ce qui engendre inévitablement la lutte
pour un nouveau partage du monde déjà partagé. La puissance véritable de tels
ou tels groupes impérialistes est mise à l’épreuve au moyen de guerres
sanglantes et dévastatrices. » (Académie des sciences de l’U.R.S.S. Manuel
d’économie politique).
Et nous savons par ailleurs que, tant que « l’impérialisme demeure debout, reste en vigueur... l’inévitabilité des guerres
reste également entière. Pour supprimer l’inévitabilité des guerres, il faut
détruire l’impérialisme ». (J.Staline- Les problèmes économiques du socialisme en URSS).