Écrire un article sur la Russie sans rien piger au monde russe ni disposer des sources adéquates (puisque le monsieur ne lit pas le russe) ne pouvait que donner un désastre ... Vous vous endormez en écoutant les cassettes de Fabius et Hollande ou quoi ?
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Brève chronologie des événements (je ne remonterai pas à la conquête de la Crimée par Catherine 2, rassurez-vous) :
- 1954 : rattachement de la Crimée (russe) à la RSSU (République Socialiste Soviétique d’Ukraine) sur disposition de Khrouchtchev (ukrainien d’origine, trotskyste et anti-stalinien), sur on ne sait trop quel motif ; indignation générale côté russe, mais bon, comme il devenait impensable que l’URSS puisse ne plus exister, ça finit par se tasser ;
- 1991 : Dissolution de l’URSS, l’impensable devient réalité ;
- 1992 : la Crimée devient une sorte de territoire à large autonomie, avec sa propre constitution, mais formellement rattaché à la nouvelle République Ukrainienne ; les relations entre les deux états sont gérées sur base bilatérale ;
- 1995 : le parlement ukrainien, abolit la constitution criméenne ; en réaction, le parlement criméen vote une série de lois « constitutionnelles », contestées par les autorités ukrainiennes ; commence une bataille législative, idéologique, politique qui se prolongera jusqu’aux années 2004 en gros (révolution « orange ») ;
- février 2014 : crise du Maïdan
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Dès le 23 février, c’est à dire au moment ou Yanoukovitch disparaissait des radars, des drapeaux russes surgissent à Kerch. Le 23 février, pour ceux qui l’ignorent, est pour les Russes, la jounée de commémoration de la création de l’Armée Rouge. C’est la journée des militaires et du « défenseur de la nation ». Vous pensez bien que les gens étaient un peu « remontés » au vu de ce qui se passait à Kiev. Un meeting « antifasciste » réunissant près de 20000 personnes a lieu à Sébastopol. Les gens s’organisent, discutent, parlent de créer une garde civile. Un nouveau maire est élu à main levée, avec mandat pour gérer la ville de façon autonome. Vous ne lisez pas le russe, mais voici tout de même le lien du blog tenu par un type qui vit à Sébastopol et qui était sur place :
http://colonelcassad.livejournal.com/1428328.html#cutid1 . Vous pourrez au moins admirer les photos.
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Le reste est plus ou moins connu. Le vent de révolte « anti-Maïdan », de Sébastopol, gagne très rapidement l’ensemble de la péninsule. Un nouveau parlement régional est élu, ainsi qu’un nouveau premier ministre. La garde civile, formée très rapidement dans la semaine du 23 février, obtient la coopération des principales structures de sécurité (SBU, police, etc.). Encadrée par des anciens militaires, des cosaques ou encore les gens du Berkut, récemment venus se réfugier dans la péninsule, elle se voit également distribuer des armes à feu. Ce n’est pas une blague, ni de la propagande poutinienne.
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Le principe d’un référendum d’autodétermination était dans la tête des gens depuis au moins 1992. Il ne s’agit pas d’une « lubie » ou d’une « annexion » orchestrée « sous la menace d’un pistolet ». En fait, cette revendication était brandie lors de tous les meetings qui ont eu lieu entre le 23 et le 30 février et imposée par la garde civile dès la formation du nouveau parlement.
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L’ « intervention » russe dans la péninsule n’a en fait réellement démarré qu’après la prise de pouvoir populaire. Il eut en effet le 26 ou le 27 un épisode violent devant le parlement, à Simferopol, où quelques milliers de Tatars se sont heurtés à quelques milliers de pro-russes. Bilan - au moins 35 blessés et une jeune femme piétinée à mort par la foule. C’est le lendemain qu’on voit apparaître les individus « armés et polis », que le ballet des débarquements des Spetsnaz par mer et par air commence (l’aéroport de Simferopol est pris le 28).
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La différence entre ces « gens polis » et une éventuelle « garde civile » est tout de même plutôt visible (
http://periskop.livejournal.com/1206681.html  ;). En effet, il y a bien eu une « sécurisation » par l’armée russe, bien davantage qu’une occupation, de la Crimée. Poutine a certes menti comme un arracheur de dents à chaque fois qu’il a nié l’absence de forces armées russes un peu partout dans la péninsule, mais il n’empêche qu’ils ne sont arrivés qu’APRÈS le soulèvement et véritablement pour empêcher que la situation ne dégénère éventuellement. C’est à dire, dès le premier mort. Leurs premiers « faits d’armes » ont consisté à encercler les casernes et éventuelles bases de commandement ukrainiennes sur place (plus de 22000 hommes, paraît-il).
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Vous aviez effectivement de quoi faire un véritable article sur la démocratie (la vraie, celle d’Étienne Chouard) avec cette affaire, c’était bien vu. Dommage que vous soyez totalement à côté de la plaque au bout du compte (sans doute par manque de sources fiables, j’imagine).
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