@phan
La richesse du Judaïsme et
ses réflexions
Voilà pourquoi je suis Juif
La réflexion sur le bien et le mal, même pour des illustres
érudits s’est posée la question suivante : comment se fait-il que le juste
puisse souffrir, et que le méchant puisse prospérer ? Je pense que le
Judaïsme est l’école de la vie, où on apprend à se hisser au-delà de soi même,
comme un frère vivant dont on attrape la main quand la corde se raidit, aucun
peuple n’a passé autant d’épreuves pour avoir le droit de survivre comme le peuple
Juif, et souvent avec beaucoup de philosophie et d’humour, mais au fait c’est
peut-être ça notre force ?.
Un jour j’ai posé une question à ma mère, quel est le plus
beau jour de ta vie ? Sa réponse fusa, sans ambiguïté, Aujourd’hui mon
fils ! Cette réponse me poursuit, et je me rends bien compte oh combien
elle avait raison, Dieu sait de quoi sera fait demain ? Combien de fois m’a t’elle
répété des milliers de phrases, qui sur le moment même ne m’ont guère
interpellées, et dont je me rends compte aujourd’hui quelles étaient gravées à
jamais dans ma mémoire et font partie de mon patrimoine, et c’est une double
raison pour me rappeler oh combien ma mère était exceptionnelle et unique à la
veille de Kippour.
Il ne faudrait pas croire que l’inquiétude juive est
métaphysique. On l’assimilerait à tort à l’angoisse que provoque en nous la
considération de la condition humaine. Je dirais volontiers que l’inquiétude
métaphysique est un luxe que le Juif, pas plus que l’ouvrier, ne peut
aujourd’hui se permettre. Car les Juifs sont souvent inquiets. Un Israélite
n’est jamais sûr de sa place ou de ses possessions ; il ne saurait même
affirmer qu’il sera encore demain dans le pays qu’il habite aujourd’hui, sa
situation, ses pouvoirs et jusqu’à son droit de vivre peuvent être mis en
question d’une minute à l’autre ; en outre, il est, nous l’avons vu, hanté
par cette image insaisissable et humiliante que les foules hostiles ont de lui.
Son histoire est celle d’une errance de vingt siècles ; à chaque instant,
il doit s’attendre à reprendre son bâton. Mal à l’aise jusque dans sa peau,
ennemi irréconcilié de son corps, poursuivant le rêve impossible d’une
assimilation qui se dérobe à mesure qu’il tente de s’en approcher, il n’a
jamais la sécurité épaisse.
Le Juif est social parce que l’antisémite l’a fait tel. Tel
est donc cet homme traqué, condamné à se choisir sur la base de faux problèmes
et dans une situation fausse, privé du sens métaphysique par hostilité
menaçante de la société qui l’entoure, acculé à un rationalisme de désespoir.
Sa vie n’est qu’une longue fuite devant les autres et devant lui même.
L’inquiétude du Juif n’est pas métaphysicienne, elle est
sociale. Ce qui fait l’objet ordinaire de son souci, ce n’est pas encore la
place de l’homme dans le monde, mais sa place dans la société.
C’est la société, non le décret de Dieu, qui a fait de lui
un Juif, c’est elle qui a fait naître le problème juif et, comme il est
contraint de se choisir tout entier dans les perspectives que définit ce
problème, c’est dans et par le social qu’il choisit son existence même.
En se proclamant Juif, il fait siennes certaines de ces
valeurs et de ces divisions ; il choisit ses frères et ses pairs : ce
sont les autres Juifs ; il parie pour la grandeur humaine puisqu’il
accepte de vivre dans une condition qui se définit précisément comme invivable,
puisqu’il tire son orgueil de son humiliation. Il ôte tout pouvoir et toute
virulence à l’antisémitisme du moment même qu’il cesse d’être passif. Car le
Juif inauthentique fuyait la réalité juive et c’était l’antisémitisme qui le
faisait Juif malgré lui ; au lieu que le Juif authentique se fait juif
lui même et de lui même, envers et contre tous ; il accepte tout jusqu’au
martyre et l’antisémite désarmé doit se contenter d’aboyer sur son passage sans
pouvoir le marquer.
La difficulté aujourd’hui est d’accepter avec exigence
certes, la matérialité sans laquelle la spiritualité ne peut exister. Le
judaïsme justement n’a jamais opposé ces deux termes, au contraire, les a
toujours associés : nous ne sommes pas de purs esprits, le corps doit
trouver où exister aussi. L’esprit n’est pas au-dessus du corps, ils
fonctionnent ensemble, et faire attention à soi c’est d’abord commencer par
préserver sa vie avant de penser à celle des autres (sinon moi, qui ?), et
précisément pour pouvoir penser à celle des autres (si ce n’est que pour moi,
qui suis-je ?). Ce n’est pas en étant mort que l’on peut aller vers
l’autre. L’altruisme inclut soi-même, et soi avant tout. S’en remettre
entièrement à l’autre pour veiller à sa survie matérielle a montré ses limites
très nettes pour le Juif apatride tout comme pour celui citoyen des différents
Etats.
1ère partie