@La Bête du Gévaudan
Encore une
fois, ce que vous avez du mal à comprendre, en restant sur une lecture
atrophiée, simpliste, et donc paradoxalement « dogmatique », pour un
non-marxiste, de Marx, c’est qu’il ne faisait nullement de la valeur-travail un
dogme intangible !
Pour
Marx, la notion de valeur-travail, telle qu’il la décrit dans les premiers
chapitres du Capital, est tout à fait contextualisée dans le cadre de la
révolution industrielle en cours, et qui en est, il faut le rappeler
systématiquement, non seulement à vous, mais surtout à tous les pseudos-« marxistes »,
au stade de la motricité et de l’énergie à vapeur, non seulement pour les
débuts du chemin de fer et de la navigation à vapeur, mais pour l’ensemble du
fonctionnement de l’industrie, chaque usine reposant sur une ou deux « machines
à vapeur », rarement plus, pour entraîner tout le processus industriel
interne de fabrication, avec des jeux complexes de poulies, courroies,
engrenages, arbres de transmission, etc..
En
observant ainsi ce qui est un début de processus d’automatisation, Marx arrive
à en déduire ce qui est l’effet économique et social de l’automatisation
complète, à terme, de l’industrie, et que nous appelons aujourd’hui soit
automatisation, informatisation, soit robotisation, ce qui est équivalent en termes
de modification des rapports économiques et sociaux.
Pour Marx
ce stade d’évolution est clairement la fin de la loi de la valeur telle que
décrite dans les premiers chapitres du Capital, qui est, contrairement à ce que
prétendent les pseudo-« marxistes », non pas son œuvre ultime et
achevée, mais seulement une première étape de sa réflexion sur l’économie
concrète de son époque, et pour ainsi dire, quasiment une œuvre de « circonstances »,
essentiellement destinée à soutenir le mouvement ouvrier, ce qui pouvait
légitimement se comprendre dans le contexte social et politique de l’époque.
« L’erreur »
d’appréciation de Marx consistait donc à penser que la victoire politique du
mouvement ouvrier était possible, à plus ou moins brève échéance, mais
vraisemblablement, vu le contexte de l’époque, avant que l’industrie n’en
arrive à ce stade d’automatisation.
Pour
autant, dans les Grundrisse il examine assez indifféremment les conséquences de
l’automatisation sur un contexte de relative « pérennité » des
rapports de production capitalistes, même s’il semble penser que l’automatisation
peut favoriser des relations sociales positives, de nature que l’on peut donc
considérer comme « socialistes », sinon carrément « communistes »
au sens qu’il entendait donner à ce terme, comme étape future du développement
économique et social.
La notion
marxiste de plus-value, au sens de Capital,I,1, c’est la notion du « quantum
de travail » directement intégré à la marchandise au cours du processus
productif, et qui a donc connu son « apogée », par la suite, avec la « taylorisation »
et les divers type de production « à la chaîne ».
Un
processus globalement en voie de « réduction », et en fait, à court
ou moyen terme, en voie de disparition, avec l’extension de l’automatisation,
informatisation, robotisation. Ce qui se produit actuellement dans l’industrie,
c’est exactement la domination du capital fixe sur le travail vivant, en tant
que travail humain productif directement intégré à la marchandise fabriquée, au
cours du processus même de fabrication. C’est donc exactement le processus
décrit dans les Grundrisse, dix ans avant Le Capital.
C’est
pourquoi, au sens réellement marxiste du terme, le capitalisme tel que défini
par Marx, en tant que capitalisme industriel productif, est déjà « mort »,
pour l’essentiel, avec une telle domination du capital fixe dans tous les
processus productifs.
C’est
bien pourquoi le capitalisme « classique », et donc au sens
précisément marxiste du terme, a déjà fini sa période historique pour laisser
place à ce que j’appelle le banco-centralisme, et que vous appelez « socialo-keynésianisme »,
avec une relative justesse dans la mesure où ses « théoriciens » qui
ont en grande partie « inspiré » les politiques monétaires
banco-centralistes étaient en fait plutôt des « sociaux-démocrates »
eux-mêmes inspirés par la MMT, « modern monetary theory », se
revendiquant effectivement comme l’héritière du keynésianisme, ce que les
diverses chapelles se voulant « orthodoxes », dans le genre
keynésien, contestent évidemment avec véhémence !
Luniterre