« Contrairement à une idée trop répandue, l’État français ne s’est pas enrichi et a renoncé à faire valoir ses droits à l’indemnisation sur ses propriétés. S’agissant d’une dette privée entre l’État haïtien et les colons, il n’a joué qu’un rôle d’intermédiaire entre ceux-ci via la Caisse des Dépôts et Consignations, qui ne s’est pas plus enrichi, ayant reversé la quasi-totalité des montants perçus aux ayants droits des colons jusqu’à extinction des règlements haïtiens.
Dans cette histoire, le remboursement par Haïti des 150 millions ramenés à 90 en 1838, n’a guère profité aux anciens colons et à leurs ayant-droits, qui n’ont été indemnisés qu’à hauteur de 10% de la valeur de leurs biens.
Pas plus qu’à leurs créanciers qui n’ont récupéré que 10% de leurs créances ni guère aux souscripteurs français de l’emprunt d’Haïti de 1825 (de 30 millions pour couvrir la première annuité). Indemnitaires et adjudicateurs ont été les grands perdants de l’affaire et furent sacrifiés par le gouvernement français. »
« Si la dette de l’indépendance a grevé les finances d’Haïti et représenté un handicap majeur, aux effets économiques durables, rien n’indique que sans ce lourd fardeau Haïti aurait connu un essor idyllique et vertueux ou qu’elle aurait retrouvé son aura d’avant 1789. L’effondrement du pays depuis l’indépendance a d’autres causes plus profondes qui existaient avant le problème de la dette et ont aussi perduré bien après le règlement définitif de celle-ci en 1893. »
« Rétablir la vérité des faits concernant le sujet de la dette de l’indépendance d’Haïti ne vise pas à dédouaner la France de toute responsabilité. Il est très facile, aujourd’hui en 2025, de s’autoproclamer avocat des nobles causes et d’accuser la France de tous les maux en accumulant anachronismes, amalgames, contre-sens et raccourcis historiques.
Rien que de plus facile que de juger l’histoire avec les idées généreuses d’aujourd’hui, rien de plus difficile que de l’étudier, la comprendre et la restituer dans son contexte de l’époque.
Quant à rembourser Haïti des 21 milliards – montant avancé sur quelle base d’ailleurs ? – ce n’est pas à l’État français, qui y a laissé des plumes de rembourser une dette privée dont le montant a disparu, éclaté entre des dizaines de milliers de petits bénéficiaires (25838 personnes en 1838 !) qui ne sont pas enrichis pour autant. »