Cinéma : Match Point, de Woody Allen
Lorsqu’il sort de la salle après avoir vu Match Point, un fidèle du réalisateur new-yorkais ne peut qu’être perplexe. D’un côté, il a vu un film plutôt intéressant ; d’un autre, il n’a pas aimé le dernier Woody Allen. Celui-ci a-t-il à ce point digéré tant d’années de psychanalyse qu’il soit maintenant capable de transformer en deux petites heures le moindre fan en schizophrène torturé ? Notons que notre New-yorkais préféré avait lui-même souffert d’une pathologie comparable en début d’année, qui l’avait conduit à tourner Miranda et Miranda. Dans ces conditions, a-t-il choisi, pour guérir, de nous rendre malades ? Si c’est le cas, c’est réussi.
Match Point est un film plutôt intéressant. Certains diront peut-être qu’il est très facile de faire un bon film lorsque s’y trouve Scarlett Johansson, qu’il suffit de laisser tourner la caméra et de la faire marcher devant l’objectif, puis sourire. Ce n’est pas faux. Il faudra d’ailleurs bien un jour que quelqu’un se décide à prélever une part des cachets de l’actrice pour compenser financièrement le rôle non-négligeable qu’elle joue dans le réchauffement de la planète. Mais ne nous égarons pas. Match Point est un film assez réussi sur l’ambition, sur le mensonge, sur la jalousie, sur la lâcheté, sur la peur... Jonathan Rhys Meyers, assez inexpressif dans l’ensemble, s’en sort malgré tout, même si la décision qu’il prend et qu’il exécute n’est sans doute pas justifiée suffisamment en amont par le comportement de son personnage. Scarlett - Haut Ira - Johansson est très convaincante dans un rôle assez difficile de maîtresse jalouse. Emily Mortimer est pour sa part tout à fait charmante, mais juste assez agaçante pour que l’on puisse trouver quelques excuses à son mari. Enfin, tout ce beau monde évolue dans un monde beau, du moins en apparence, et la fin du film est des plus cyniques, ce qui est aussi inattendu que rafraîchissant.
Je n’ai pas aimé le dernier Woody Allen. Je sais bien que quand on apprécie un artiste, on se doit de prendre les œuvres qu’il nous propose sans regretter qu’elles ne répondent pas à nos attentes ; ce n’est pas du commerce après tout. Je tremble de ce que je me vois écrire : cela voudrait donc dire que je ne souhaite pas que Woody Allen soit un artiste, mais qu’il reste le faiseur surdoué et jouissif qui nous fait rire et nous bouleverse depuis tant d’années maintenant... C’est pour moi une triste révélation. Le fait est que j’ai envie de le voir et de l’entendre jouer dans ses propres films. J’ai envie de me promener dans New York au hasard des déambulations de ses personnages. J’ai envie de rire à ses névroses, pour moins pleurer sur les miennes. Dans le dernier Woody Allen, certaines scènes se passent aux pieds des ponts qui enjambent la rivière, les personnages se rencontrent en marchant dans la rue, vont à l’opéra et mangent tous ensemble dans des fancy restaurants. Mais tout se passe à Londres... Mais il n’est pas là... Mais on ne rit pas... sauf à un seul moment, où le réalisateur fait alors de nous les plus cyniques des spectateurs. Le coup de grâce.
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