Musique : de « Sones de Mariachi » à « Huapango »
Malgré les turbulences diplomatiques autour de l’Affaire Cassez et la suppression de l’Année du Mexique en France, un certain nombre de manifestations ont heureusement été maintenues ici et là. Elles permettront au public français de découvrir une partie de l’immense richesse culturelle de ce grand pays de métissage dont les racines plongent tout à la fois dans les fondations des temples Mayas ou Aztèques et dans les apports hispaniques. Mais au-delà d’une merveilleuse architecture, tant indienne que coloniale, d’une statuaire prodigieuse et d’une grande richesse picturale*, le Mexique est également un pays de tradition musicale...

Progressivement, des formes nouvelles ont été élaborées puis se sont développées dans les différentes provinces. Parmi elles, le huapango (ou son huasteco), apparu dès le 17e siècle dans les États mexicains du centre-est sous la forme, quelque peu controversée, d’une sorte de dérivé du flamenco fait d’accords européens plaqués sur des fonds mélodiques indiens. En réalité, un genre original qui a profondément marqué la culture musicale du pays.
Suivra la ranchera (à l’origine musique de fête des ranchs), née à la fin du 19e siècle, dans le nord-ouest du Mexique. Héritée de la tradition mariachi, l’exemple le plus connu en est le célébrissime Cielito Lindo, écrit en 1882 par Quirino Mendoza. Autre genre important : le norteño, apparu dans le Texas mexicain durant les premières décennies du 20e siècle et indissociable de l’accordéon des immigrants d’Europe centrale ainsi que des rythmes importés de polka et de mazurka. Moins connu, le son jarocho, directement inspiré de la musique cubaine et principalement implanté dans l’État de Vera Cruz. Son titre le plus connu est sur toutes les lèvres : La Bamba.
Né dans l’État de Jalisco au 19e siècle, le mariachi trouve son origine dans la musique locale, le son jalisciense dont le thème le plus connu est incontestablement La Negra. Le mariachi n’est toutefois pas un genre musical à proprement parler, mais une manière de jouer la musique et de la véhiculer dans le pays, comme le faisaient les groupes de musiciens paysans qui allaient autrefois de ranch en ranch animer les fêtes. Des musiciens qui, peu à peu, ont contribué à élaborer l’image de la formation traditionnelle, de ces fameux groupes de mariachis aux larges sombreros devenus l’un des symboles les plus forts du Mexique et incontestablement l’une des attractions les plus prisées des touristes qui affluent chaque année dans ce pays remarquable à bien des égards.
Des mariachis à l’orchestre symphonique
On reste là toutefois dans la musique dite folklorique, une musique dont les accents, principalement interprétés par les violons, les guitares et les trompettes sont mondialement connus et définitivement indissociables du Mexique, trop souvent à l’exclusion de toute forme de musique plus ambitieuse. Des compositeurs mexicains de qualité ont pourtant marqué de leur empreinte le répertoire classique, à commencer par Ricardo Castro (1864-1907). Mort prématurément à l’âge de 41 ans, ce précurseur de talent a laissé des opéras, des symphonies et des œuvres concertantes dont deux concertos pour piano, le n°1 en mi mineur, manifestement influencé par l’œuvre de son modèle Frédéric Chopin, ayant été la première composition du genre en Amérique latine.
1899 a marqué une date importante pour la musique mexicaine. Cette année-là, deux des plus importants compositeurs de la jeune nation ont vu le jour : Silvestre Revueltas et surtout Carlos Chávez dont la renommée a très largement dépassé les frontières de son pays d’origine. Éclectique, le premier a laissé de la musique de chambre et des œuvres symphoniques, mais également des musiques de films et des chansons avant de disparaitre en 1940, à l’âge de 41 ans comme son aîné Castro. Plus ancré dans l’écriture musicale classique et d’une remarquable fécondité créatrice, le talentueux Chávez a, quant à lui, légué à la postérité près de... 200 numéros d’opus ! Parmi eux : six symphonies, plusieurs concertos pour instruments divers, des ballets et un opéra. Décédé en 1978, il reste l’une des figures emblématiques du patrimoine mexicain.
Curieusement, ce sont pourtant deux de ses cadets, Blas Galindo (1910-1993) et José Pablo Moncayo (1912-1958), qui connaissent aujourd’hui la plus grande notoriété au delà du cercle restreint des « mélomanes » curieux ou des spécialistes du répertoire musical contemporain. Comme Chávez, Galindo et Moncayo ont laissé derrière eux des œuvres remarquables, que ce soit en musique de chambre ou en musique symphonique, le premier ayant notamment légué des concertos de qualité malheureusement peu présents dans les bacs français. Ce n’est toutefois pas à ces œuvres qu’ils doivent leur notoriété mais à deux monuments de la musique symphonique mexicaine écrits à un an d’intervalle : Sones de Mariachi en 1940 et Huapango en 1941. Deux œuvres superbes dans lesquels l’orchestre classique se met au service des thèmes populaires, telle La Negra, omniprésente dès les premières mesures de Sones de Mariachi. Deux œuvres inspirées qui magnifient l’âme du Mexique et donnent incontestablement envie de mieux connaître son patrimoine musical. Á découvrir ou à redécouvrir de toute urgence !
* Voir notamment l’exposition Frida Kahlo et Diego Rivera prévue à l’Orangerie à compter du 5 octobre 2011 (si toutefois cet évènement culturel est maintenu)
Liens musicaux :
José Pablo Moncayo : Huapango
Blas Galindo : Sones de Mariachi
Ricardo Castro : concerto pour piano en mi mineur (1er mvt : allegro moderato)
Silvestre Revueltas : Sensemay
Documents joints à cet article

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