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Accueil du site > Culture & Loisirs > Étonnant > Il était un bois …

Il était un bois …

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À trop vouloir se montrer …

Dans la grande forêt, au cœur d’un mystère souvent impénétrable, il se passe bien des choses qui échappent à la connaissance des humains. Permettez-moi de vous conduire au plus profond de cet univers bruissant de mille et une conversations tenues. Acceptez de vous faire discret pour mieux écouter les murmures des hôtes de l’endroit.

Un petit nouveau venait de sortir de terre. Il découvrait avec une immense curiosité cet environnement dans lequel ses racines avaient fait souche. Il s’émerveillait d’une nature exubérante peuplée d’une multitude d’habitants, tous plus dissemblables les uns des autres. Par essence, il s’intéressa en premier lieu à ceux qui étaient le plus proche de lui.

Il était entouré de géants qui avaient la tête dressée vers le ciel. Leurs troncs étaient massifs. Il y avait là des espèces fort différentes, certains portaient des feuilles, d’autres des épines, certains des aiguilles tout comme lui, beaucoup se couvraient de fruits, d’autres de coques, toutes de formes distinctes. Il ne savait plus où donner de ses branches pour admirer cette incroyable variété.

Bien vite monta en lui une immense jalousie. Il enviait ceux qui le dépassaient, le privant du plaisir d’admirer le ciel et surtout les étoiles durant la nuit. Il gémissait, réclamant de toutes ses forces le pouvoir de grandir bien vite pour tutoyer les anges. Il désirait prendre de la hauteur, aller toujours plus loin pour dépasser les autres cimes.

Un lapin vint s’enquérir des motifs de ses jérémiades. Quand le sympathique rongeur comprit les revendications du petit sapin, il lui conseilla aimablement de prendre patience tout en profitant de l’instant présent. Le rongeur lui tint ce langage : « L’avenir est toujours incertain ici, à la terrible loi de la nature s’ajoute souvent l’impitoyable action des hommes. Fais toi discret et jouis de chaque moment. Je ne puis te donner meilleur conseil, moi qui ne me sens jamais autant en sécurité que dans mon terrier. »

Le sapin n’en eut cure. Il voulait se montrer, dépasser ses voisins quand un curieux animal allant debout sur ses pattes de derrière s’approcha de son secteur. Il y avait là des châtaigniers de belle allure. L’homme en choisit quelques-uns et se munissant d’un étrange objet, curieux prolongement de ses membres antérieurs, il cogna si fort sur les malheureux arbres qu’ils se retrouvèrent à terre. Le sapin n’en menait pas large, il s’interrogeait sur ce spectacle auquel il assistait pour la première fois.

Durant quelque temps, il resta dans l’expectative. Il ne savait que penser ! Qu'étaient devenus ces beaux arbres tombés à terre et que des gros engins étaient venus quérir ? Il interrogea les mammifères qui passaient à sa portée. Aucun ne pouvait le renseigner. C’est un renard, plus malin que tous les autres qui lui conseilla de se tourner vers les oiseaux pour en savoir davantage. « Eux vont et viennent plus aisément. Ils quittent parfois la forêt pour aller dans cette incroyable contrée où poussent des maisons. Demande-leur ce que deviennent nos amis les châtaigniers. »

Le sapin aurait bien voulu écouter le conseil du renard. Hélas, il était si petit que nul oiseau ne venait se poser sur ses branches, trop souples au demeurant pour servir de perchoir. Il passa une année à se renforcer, à puiser dans la terre assez d’énergie pour enfin permettre à un visiteur de trouver refuge sur lui. Il finit par avoir gain de cause quand un rossignol lui rendit visite.

Notre ami s’empressa de l’apostropher : « Bel oiseau, j’ignore ton nom mais je dois avouer que ton chant m’enchante. Pourrais-tu, toi qui vas de par le vaste monde, me dire ce que sont devenus les arbres qui ont été coupés l’an passé en cet endroit ? » Le rossignol qui aime à voyager avait suivi l’affaire avec curiosité. Il informa le sapin : « Les arbres après avoir été emportés loin d’ici ont été débités en planches qui furent transportées. Certaines ont été achetées par des humains qui font métier de menuisier. Ceux-là travaillent le bois pour en faire des objets destinés aux hommes. J’avoue ne pas savoir ce que deviennent les fabrications qui entrent dans les maisons. Par contre je sais que parfois, le bois sert à fabriquer des cabanes pour que les oiseaux, qui vivent chez les humains, puissent disposer d’un abri. Je trouve étrange du reste que nos congénères acceptent ainsi de tels nids en dur ! »

Le sapin ne savait plus que penser. Il remercia l’oiseau qui continua sa route. Ainsi donc, il pouvait s’il grandissait encore, partager la vie d’un couple d’oiseaux. Il envisageait la chose avec plaisir pourvu que ce furent de beaux chanteurs. Il était si sensible à la beauté des trilles. Voilà une perspective qui l’incita à pousser davantage.

Une nouvelle année se passa. Sa croissance n’était d’ailleurs pas exceptionnelle, contrariée qu’elle était par la concurrence que de grands pins lui faisaient. Il manquait d’air et surtout de lumière. Il s’employait pourtant de toutes ses forces à tirer le maximum de tout ce qui pouvait favoriser son dessein.

De nouveaux hommes (puisqu’il avait appris qu’ils s’appelaient ainsi) vinrent dans son territoire. Cette fois ils étaient armés d’un engin menaçant, équipé de grosses dents. Le bruit qui émanait de ce monstre était terrifiant. En l’espace de quelques minutes, des grands pins tombèrent au sol et furent dénudés. Le sapin n’en menait vraiment pas large.

Une fois encore, les dépouilles furent emportées au loin. Le petit arbre aurait voulu en savoir plus, il lui fallait attendre le retour du rouge-gorge. Celui-ci, bien après le départ des tronçonneuses qui avaient fait fuir tous ses congénères, revint se poser sur son nouvel ami. Il se doutait de la question de ce petit curieux et s’empressa de lui avouer son ignorance : « Je ne vole jamais très loin, j’ignore ce que deviennent ces géants abattus. Il te faudrait interroger ceux qui parcourent le monde. On les appelle les migrateurs, ils doivent savoir, eux qui voyagent tant ! »

Le sapin remercia le rossignol et attendit patiemment le passage d’une oie cendrée qui curieusement s’était égarée dans cette forêt. La voyageuse se posa juste au pied du sapin qui s’empressa de l’interroger. « Bon petit, je devine ce que deviennent les pins qui ont été ainsi dénudés. J’en croise souvent quand je remonte la Loire. Ils ornent des bateaux, se dressent vers le ciel pour se couvrir d’une grande voile quand le vent souffle fort. C’est ainsi que grâce à eux, les mariniers remontent le courant. J’ai cru entendre qu’ils appellent ça un mât ! »

Le sapin était éberlué. Quelle chance avaient ces pins. Ils voyageaient sur les flots, partageaient la passion des hommes et voyaient beaucoup de pays tandis que lui était cloué à son petit coin de terre. Oui vraiment il lui fallait encore grandir. Notre petit sapin se rêvait toujours d’avoir la tête dans les étoiles... Le temps passa, l’hiver arriva. Il ne s’était pas écoulé une année qu’un nouveau visiteur, équipé d’une modeste hachette, fit son apparition. Curieusement, c’est vers lui qu’il se dirigea. L’homme en fit le tour, l’examina attentivement et s’exclama : « Ce sapin sera parfait pour les enfants. Ils vont être contents ! » Le petit arbre tomba, il venait d’être séparé de ses racines.

Il se sentit soulevé de terre et se laissa porter par l’homme plein d’espoir. Allait-il voir du pays ? Servirait-il de maison pour des oiseaux. C’est le cœur battant qu’il attendit la suite de cette aventure qu’il espérait tant depuis quelque temps. Ses espoirs allaient être exhaussés. Il rentra dans une maison dans laquelle des enfants l’attendaient avec ferveur.

Aussitôt installé debout grâce à quelques clous qui s’enfoncèrent en lui, lui laissant une étrange impression, il passa dans les mains expertes des gamins qui le parèrent comme jamais il n’aurait pu l’imaginer. Il était couvert de guirlandes et de boules, de bougies et de flocons. Qu’il était beau, qu’il semblait aimé par ceux qui le choyaient ainsi.

C’est alors que son souhait le plus fou se réalisa. Le plus grand de ses nouveaux amis lui fixa quelque chose de doré à sa cime. C’était scintillant, il y avait cinq branches et il entendit « Oh la belle étoile ! ». Il ne pouvait espérer mieux. Il en avait toujours rêvé. Il avait la tête ceinte d’une étoile. Quel bonheur …

Durant quelques jours, il fut le plus heureux des arbres. Choyé, admiré, au centre de toutes les préoccupations. Il était le roi de cette maison, couvert de la plus belle parure qui soit. Puis vint un soir tout particulier. Il avait ressenti une fébrilité toute particulière chez les enfants, ses plus fervents admirateurs. Ils avaient d’ailleurs peiné à se coucher.

Durant la nuit, un curieux personnage s’approcha de lui, vêtu de rouge, portant une énorme barbe blanche, il déposa sous ses branches de gros paquets couverts de rubans et de papiers tous plus chatoyants les uns que les autres. Puis sans faire de bruit le bonhomme s’envola littéralement en passant, c’est du moins ce qui sembla au petit arbre, par la cheminée.

Le lendemain quelle fête ! Les enfants hurlaient, arrachaient furieusement les jolis papiers. Ils s’exclamaient, s’enthousiasmaient, embrassaient les adultes. Bien vite des cris, des larmes, des disputes. Le sapin ne comprenait pas un tel revirement. Puis, le calme revenu, les gamins s’éloignèrent de lui pour ne s'occuper désormais que des cadeaux qu’ils avaient reçus.

Quelques jours passèrent. La sapin n’était plus le centre des préoccupations. Il fut même délesté de ses décorations. Seule son étoile brillait encore à sa cime. Cela lui suffisait même si l’ingratitude des enfants lui faisait peine. Il attendait des jours meilleurs. Il espérait que quelqu’un dans cette maison allait lui réchauffer le cœur. Il ne fut pas déçu. Celui qui précisément l’avait arraché de sa forêt le reprit dans ses bras.

C’est plein d’espoir qu’il attendait sa nouvelle aventure. La première avait été si exaltante ! Soudain il sentit une énorme chaleur tout près de lui. L’homme arracha son étoile, sa belle aventure s’achevait. Il se brûla les branches et tout le reste dans un feu d’enfer. Voilà ce qu’il advient à ceux qui veulent quitter trop vite leur petit bois tranquille !

Sylvestrement sien.

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6 réactions à cet article    


  • Étirév 24 décembre 2018 11:26

    Noël et New-heyl
    Les premières institutrices du genre humain, appelées « Ban-drui » chez les irlandais, les « Mères-ensenseignantes », sont désignées chez les Latins par le mot « Dryades », mot qui signifie dans la mythologie Nymphes des forêts. Les Germains les appellent les Dames des forêts et des eaux. On disait aussi « Hamadryades ».
    Les Dryades étaient logées à portée des forêts sacrées. Le nom de munster que portaient les chefs-lieux de leur résidence est un terme qui signifie lieux consacrés aux Mystères ou à l’observation des astres. Mun-Sterren (ou Mu-Sterren) signifie étoile monitoire, constellation, réunion des Déesses monitoires.
    De ce mot on a fait My-stère, qui doit être écrit Mu-stère, et qui signifie « secret des Déesses », c’est-à-dire un secret qui commandait la vénération des peuples, mais qu’il ne convenait pas d’approfondir, si bien que Mystère signifia choses occultes, ou choses sexuelles, cachées, et, peu à peu, Mun-stère signifia Ecole secrète où on enseigne des choses cachées.
    En latinisant le mot munstère, les prêtres ont fait munsterium ou monastère.
    Voici en Angleterre une forêt (munster) appelée West-Minster.
    Minster, comme munster, indique que sur cet emplacement il y avait une maison religieuse consacrée aux Mystères, et cette maison était un mona-stère, c’est-à-dire qu’elle abritait un seul sexe. Le local, ou le sanctuaire, où il fut bâti, portait le nom de Thorney, qui venait sans doute de Thorah (la Loi). Ce lieu était jadis une forêt sacrée (lucus sacer), d’où le mot LHWN, origine du mot Londres (d’après Gambden), qu’on fait signifier ville construite d’arbres et de bois.
    Londres (London) est nommée par les Cambro-bretons, habitants originaires du pays, Lundain, et par Ammien Marcellin Lundinum ; le mot lund signifie lucus (forêt).
    Lunder signifie une forêt en langue islandaise.
    Rappelons que West-Minster est devenu le Palais du Parlement britannique.
    Sous le régime mythologique grec, cette maison fut consacrée au culte d’Apollon.
    Sulcardus, cité par Cambden, assure qu’il se trouvait là un temple delubrum Apollinis. C’est de ce chef que l’Angleterre porte encore dans ses armoiries la lyre ou la harpe d’Apollon, et que les Eaux de Bath sont appelées, dans l’itinéraire d’Antonin, Aquæ Solis, eaux consacrées au soleil.
    L’ancienne signification du mot mun-stère était avertir, faire ressouvenir, c’est-à-dire instruire. « Men » signifiait conduire, et mener a fait Mentor.
    Les Mystères, qui perpétuaient le culte de la Nature, célébraient une grande fête au solstice d’hiver devenu la Noël. Le jour du solstice d’hiver fut appelé d’abord New-Heyl, mot qui voulait dire nouveau soleil, parce que, à ce moment, le soleil remonte. C’était une représentation symbolique du retour à la vie. Cette date marquait le vrai début de l’année astronomique : c’était en même temps une occasion de rappeler la grande science de Myriam si odieusement dénaturée par Ram (les disciples de Ram étaient appelés Ramsès en Egypte).
    On expliquait, dans les Mystères, que l’Arbre de Vie est, en même temps, l’Arbre de la science, que c’est en étudiant son développement que l’on comprend comment l’homme sort de la terre, croyance qui était générale. On savait que l’homme était arbre avant de devenir homme. Toute la science antique s’éclairait par cette connaissance.
    Au solstice d’hiver, à Noël, on allait en procession, à minuit, visiter les images de Myriam placées dans des petites chapelles sur des arbres. On tenait en main des flambeaux allumés pour symboliser la lumière de l’Esprit et on marchait en chantant des hymnes qu’on a longtemps appelés des « Noëls ». On arrivait ainsi devant l’Arbre qui portait l’image de Marie et, là, les Dryades expliquaient l’Origine végétale, l’Arbre de Vie et les lois de son évolution.
    Par la suite, dans les pays du Nord où le froid était intense au mois de décembre, et où la terre était souvent couverte de neige, on fut obligé, par mesure d’hygiène, de modifier la cérémonie. On décida alors d’apporter l’Arbre à la maison au lieu d’aller le trouver où il était, et de continuer l’antique Mystère dans un lieu couvert et chaud.
    L’Arbre de Noël est une coutume du Nord, les peuples du Midi ne le connaissent pas, ils ont toujours continué à célébrer la fête de l’Arbre en plein air.
    En Egypte, tous les ans le peuple se rendait en foule à Saïs, au Temple d’Isis, pour y célébrer les Mystères de la mort d’une Déesse dont Hérodote veut taire le nom.
    Comme dans les pays du Nord la température rigoureuse de l’hiver avait fait supprimer la procession aux flambeaux, c’est sur l’Arbre qu’on mit les petites lumières que, dans les anciens Mystères, les fidèles tenaient à la main.
    Avec le temps, la cérémonie se modifia encore. Dans les familles pauvres, on se contente d’une bûche au lieu d’un arbre. La bûche de Noël est le tison sacré, image de l’ardeur vivifiante du soleil. On l’allumait au solstice d’hiver et chacun venait y présenter des branches vertes qu’il éteignait ensuite et gardait dans, sa maison pendant l’année.
    Dans l’antiquité, des Temples des déesses existait un Bois sacré.
    C’est que l’enseignement de la Cosmologie donné dans le Temple était complété par un enseignement des sciences naturelles donné dans le Bois sacré.
    Ce Bois est sacré parce qu’on y enseigne l’origine végétale de l’homme et les lois de son évolution, et, pour démontrer ces idées abstraites, on montre à l’étudiant l’Arbre de vie, conservé avec soin, jamais mutilé, afin de pouvoir observer en lui les phases de l’évolution qu’il traverse et qui sont fidèlement reproduites par l’embryon qui se forme dans l’utérus maternel en repassant par les étapes de la vie végétale.
    Des nymphes, les Dryades avaient la garde des arbres et empêchaient de les couper. On disait qu’elles naissaient et mouraient avec l’arbre dont la garde leur était confiée.
    Le culte de l’Arbre est resté dans toutes les traditions, mais on n’en comprend plus la haute portée philosophique. L’arbre révèle les puissances de la Nature. L’homme était arbre avant d’être devenu homme.
    On dit l’Arbre de la science parce qu’il contient en lui tout le mystère de l’évolution et des lois biologiques. Qui connaît ces lois possède la science.
    Les familles des castes supérieures avaient leur arbre sacré qu’on soignait religieusement. De là est venue cette expression : l’arbre généalogique.
    Les Hindous avaient édicté des peines sévères contre ceux qui endommageaient les arbres.
    Les Athéniens punissaient de mort quiconque osait couper des branches aux arbres des Bois sacrés ou des cimetières.
    Joyeux Noël à toutes et à tous


    • C'est Nabum C’est Nabum 26 décembre 2018 15:52

      @Étirév

      Merci

      C’est formidable de culture


    • Sergio Sergio 24 décembre 2018 18:46

      Bonsoir Nabum

      Comment on dit les végans pour arbres, des Elfes ?

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