A69, un stop au chantier en coup de tonnerre : pour une écologie qui arrête d’exclure l’homme !
Les juges administratifs portant jugement sur le fond, ont suivi l’avis de la rapporteuse publique qui leur avait demandé "l’annulation totale" de l’arrêté préfectoral ayant permis le début du chantier de l’A69 (1). À l’audience du 18 février, cette magistrate, Mona Rousseau, avait réaffirmé que les gains espérés de la future autoroute Toulouse-Castres – environ 20 minutes – n’étaient pas suffisants pour établir "une raison impérative d’intérêt public majeur", justifiant les atteintes à l’environnement commises par le projet. Comme si la réalisation de cette autoroute se résumait à un temps réduit de parcours au regard de l’essor d’une région.
L’État fait appel pour que prévale « la déclaration d’utilité publique » sur « Dame nature »
Comme l’explique dans une interview, Pierre-André Durand, préfet de la Haute-Garonne et de la région Occitanie (2), qui est à l’origine de l’un des arrêtés d’autorisation des travaux, « l'État ne partage pas du tout les motivations qui figurent dans ce jugement. (…) Donc, très logiquement (…) va interjeter appel dans les plus brefs délais et va assortir sa demande d'appel d'une demande de sursis à exécution de la décision du tribunal administratif de Toulouse (NDLR : c'est-à-dire demander la reprise des travaux). « Nous avons d'ores et déjà décelé un certain nombre de failles dans le jugement. » dit le préfet. "C'est une décision, je dirais, qui met en lumière une contradiction entre deux concepts juridiques. La déclaration d'utilité publique, validée à plusieurs reprises par les mêmes juridictions jusqu'au Conseil d'État. Et cette RIIPM (NDLR : raison impérative d'intérêt public majeur), qui est ce qui a été mis en avant pour contester l'autorisation environnementale. (…) et je crois savoir que le gouvernement envisage de réorganiser en tout cas ces deux procédures."
L’appréciation de proportionnalité pointe cette fameuse RIIPM, mettant en balance le « pas touche à l’environnement » (alors que certaines mesures prenaient en compte cet aspect dans le dossier), et les besoins de dizaines de milliers d’habitants dans un ensemble de plusieurs centaines de milliers, des enjeux d’accessibilité, d’emplois, de développement, relatifs à une « Déclaration d’utilité publique » sans obstacle jusqu’alors. Un projet inscrit dans un « désenclavement » du Tarn Sud, en lien avec un ralentissement de l’accroissement de la population du département du Tarn qui entre 2015 et 2024 a atteint son plus bas niveau, + 0,3 % par an, selon l’INSEE. En fait, la lecture de l’utilité ou non de cette autoroute, on le voit bien, s’apparente à un simple jugement de valeur qui donne la primeur à « Dame nature ».
Comment ne pas le voir ainsi, alors que cette décision s'est faite sur une fable, « sauver l'environnement », puisque les travaux propres à l'A69 sont avancés à 70 % des ouvrages d’art et 45 % du terrassement (source concessionnaire Atosca), avec tous ses impacts. La recherche de cette décision tient plus qu’en elle-même, dans la jurisprudence qu’on a espérée lui faire jouer, comme Marine Tondelier, Secrétaire nationale d'EELV, le crie sur tous les toits aujourd'hui (3), contrairement aux dires précédant cette décision. Autrement dit, que l’on en obtienne une sorte de « droit opposable » à tous les grands travaux d’utilité publique.
Un arrêt en fin de chantier pour cause d’environnement qui signifie destruction massive
Suite à la décision du tribunal, France info interviewe l’un des meneurs écologistes les plus radicaux, Thomas Brail, membre du Groupe national de surveillance des arbres (GNSA) (4). Est critiquée une décision tardive, pour dire que « les juristes appellent cela la politique "du fait accompli". On aurait dû dire « des », car tous sont loin d’être d’accord. Cela pour qu’il affirme, "Ce n'est pas courageux de prendre des décisions une fois que le projet est terminé. Je pense qu'il faut stopper les projets. Il faut se pencher rapidement sur les autorisations environnementales". Et voilà, le tour est joué, plane sur notre pays le risque de tout bloquer. Le scandale viendrait de laisser se dérouler un chantier alors qu’il y a encore des recours en cours, sans fin avec ce genre d’association. Mais comment peut-on vouloir nous faire croire que des investisseurs, des entreprises, tout un tissu de développement qui mobilise matériellement, humainement et économiquement les choses sur des années, puisse s’engager si on en arrivait là, avec cette gabegie ?
Prend-on la mesure du démantèlement de tout ce qui a été construit, avec quels ravages, et ainsi, de « l’empreinte carbone » que cela constitue, alors qu’ailleurs on ne cesse de nous en rebattre les oreilles sur le moindre détail. Ceci, avec mille ouvriers au chômage et des familles derrière, des pertes financières énormes qu’il faudra bien rembourser… La décroissance, si on voulait la matérialiser, la voilà !
Le journaliste qui interviewe le préfet du Tarn, déjà cité, dit : « Mais vous parlez de contradictions. Est-ce que ce n'est pas aussi celle du moment, de notre époque, à la fois continuer le développement et puis de respecter l'environnement ? Aujourd'hui, la justice vous dit que faire des autoroutes, ce n'est pas respecter l'environnement. » Cette sorte de leçon faite au préfet, généralisant la portée de cet arrêt, dit ce que n’a nullement affirmé le tribunal dans sa décision circonstanciée, à moins de pouvoir prendre ses désirs pour la réalité.
Une décision que l’on rêve jurisprudentielle avec une démocratie confisquée
Marine Tondelier avance l’argument de « l’effondrement de la biodiversité », alors que selon d’aucuns, la décision du tribunal tiendrait moins d’une évolution du droit que de ce que disent « les scientifiques » (des), et d’une sensibilisation progressive au thème de l'environnement. En réalité, ce genre de grande thématique au nom de sauver la planète, fréquemment maniée sur le mode du catastrophisme, de la peur, n’a pas grand-chose à voir avec l’impact de l’arrêt de ces travaux sur le cours des choses tel qu’il est exagérément présenté, au regard d'espaces qui n'ont déjà rien de naturel, car de longue date anthropisés. Encore plus, au regard de pays de centaines de millions voire de milliards d’habitants où rien n’est fait ou presque dans ce domaine. Une vision très occidentale loin de la réalité, comme de « couper le robinet » pour préserver l’eau de la planète quand celle qui n’est pas utilisée n’arrivera jamais dans la bouche du moindre enfant africain dénutri et assoiffé, juste nourrissant la bonne conscience d'ici.
Cela étant, cette situation inédite donne à réfléchir à nos concitoyens, mieux à même de voir les dangers de ces chiffons rouges qui paraissaient derrière la couleur verte inoffensifs. Notre solde officiel de la population en France est positif d’environ 250.000 individus par an, et donc, de deux millions et demi tous les 10 ans, 5 millions tous les 20 ans. Mais comment va-t-on donc relever alors ce défi auquel fait face notre pays ? Lorsque l’on se remémore que les mêmes écologistes sont pour un accueil inconditionnel des migrants et des régularisations massives ? On voit combien on nous fait marcher sur la tête ! Rappelons aussi, qu’ils ont déjà obtenu le principe de zéro artificialisation nette (5), autrement dit l’interdiction d’étendre les villes au nom de « l’environnement ». Mais comment peut-on les suivre dans cette dérive ? Trop, c'est trop, il faut savoir dire stop !
On fabrique avec tout ça un ressentiment des populations condamnées à l'aphasie, avec une perte de confiance dans l'État, ce qui constitue un danger majeur. On soulignera d’un côté, l’État de droit utilisé jusqu’à la corde pour bloquer un projet, et de l’autre, une démocratie lésée avec les besoins sociaux du grand nombre. Des élus de la population et des pouvoirs publics dépossédés ainsi de leurs prérogatives, discrédités après des années de travaux dont la livraison était prévue cette année. Que devient ce peuple souverain qui, dans nos institutions, est la seule source du pouvoir politique, et donc l’intérêt de tous, concernant les affaires de la cité ? L’État de droit apparaît sous ce jour, comme justifiant une décision prise pour notre bien. Mais cela ne commence-t-il pas à constituer une sorte de registre faisant bande à part au regard de notre démocratie ? Il serait temps de penser à associer les populations aux décisions de portée collective, pour contrer ces minorités au militantisme bien rodé à parler au nom des autres et bruyantes, pour orienter des décisions qui concernent finalement toute notre société, en confisquant par ce biais la démocratie.
En finir avec cette divinisation de la nature pour faire le choix de l’homme
Un commentaire sur la dernière pétition de Greenpeace « Exploitation des Océans, animaux en danger », avançait que la solution, je ne plaisante pas, était que « pour sauver la planète (…) l’homme disparaisse, elle s’en portera que bien mieux sans nous »… Comme si elle allait continuer à « exister » après l'homme pour elle-même, ce qui n'a aucun sens en dehors d'une conscience qui la pense, et d’un monde du vivant auquel appartient l’homme. Ce dernier est ainsi éliminé par une vision mythifiée autant que divinisée de la nature, qui conduit à cette forme de déviance qui frôle l’invocation du suicide collectif. Il ne faut pas sous-estimer la puissance d'influence, d'emprise de cela, dans un monde en perte de sens, de valeurs.
Par-delà le droit, le vrai fond sur lequel cela repose se trouve ailleurs. Il faut renverser cette vision qui évacue l’homme comme le mal, ainsi que le progrès, qui élimine son développement du tableau, et avec, ses facultés extraordinaires d'adaptation, d'invention, comme solutionniste. Avec une écologie grande cause au-dessus de tout, y compris de la démocratie, c’est la même configuration qu'avec la religion, avec ses idoles et son absolutisme, son jugement dernier qui légitime tout. C’est de l’homme dont il faut repartir, dans lequel il faut redonner confiance au lieu de ces procès, et l’écologie d’être un domaine du champ politique ainsi, selon une place raisonnable. En faisant porter, résolument, les responsabilités des désordres à ceux qui les commettent, essentiellement ailleurs, au lieu de ces incantations à se battre la coulpe en coupant en France dans l’intérêt général pour satisfaire une idéologie.
Cette écologie-là se condamne elle-même par ses excès, poussant à voir rouge bien des citoyens, et par son absurdité dangereusement dans les bras du RN. Elle n’a pas à prendre les commandes de notre société au nom d’un combat placé au-dessus de tout, alors qu'en sacrifiant la France, son avenir, on ne résoudra rien. C'est bien un enjeu de société, mais aussi de la raison qui est au tournant de notre temps : le choix de l’homme.
Notes :
1- Autoroute A69 : raisons, appel de l’État, décision historique… coup de tonnerre en région, la justice stoppe le chantier https://www.midilibre.fr/2025/02/28/autoroute-a69-raisons-appel-de-letat-decision-historique-coup-de-tonnerre-en-region-la-justice-stoppe-le-chantier-12539982.php?M_BT=9267177634699#at_medium=Email%20marketing&at_campaign=Newsletter&at_email_send_date=2025-02-28
2-Autoroute A69 : le préfet de la Haute-Garonne assume l'appel et veut que les travaux reprennent https://www.francebleu.fr/infos/environnement/suspension-du-chantier-a69-le-prefet-de-la-haute-garonne-assume-l-appel-et-veut-que-les-travaux-reprennent-1779117
3-https://www.youtube.com/watch?v=MI0g8vSEBUY
4-Chantier de l'A69 : "C'est une décision historique, on ne s'attendait pas à ça", réagit un opposant https://www.francetvinfo.fr/environnement/crise-climatique/chantier-de-l-autoroute-a69/chantier-de-l-a69-c-est-une-decision-historique-on-ne-s-attendait-pas-a-ca-reagit-un-opposant_7100013.html
5- La loi climat et résilience du 22 août 2021 a fixé l’objectif d’atteindre le « zéro artificialisation nette des sols » (ZAN) en 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction de moitié de la consommation d’ENAF dans les dix prochaines années (2021-2031). Cette trajectoire progressive doit être déclinée territorialement dans les documents de planification et d’urbanisme. (On parle de « consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers » (ENAF), quand on utilise ces espaces pour la création ou l'extension d'espaces urbanisés.)
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