Belle re-gicle ?
Le
13
décembre 2006, le « Bye bye Belgium »
de la RTBF avait surpris tous les belges. Je
sortais une fiction appelée, « La Belle gicle », d’une Belgique divisée en 3
entités indépendantes avec quelques réticences. Je me
retrouvais, ainsi, par l’imagination, le 1er janvier 2031. Mi-janvier, Le Vif sortait sa propre fiction en se positionnant au 20 octobre
2025, mais en ne prenant en considération que la Wallonie dans son
exercice de futurologie.
Le 21 janvier, les artistes organisaient un spectacle au Théâtre flamand à Bruxelles (KVS) avec le thème "La solidarité grandit les cultures" pour rappeler l'intérêt de garder une Belgique unie entre les acteurs flamands et francophones.
Le dimanche qui suit, Flamands, Francophones se mobiliseront dans une manifestation à Bruxelles avec le slogan "Shame" en exigeant un gouvernement. Richesse de la diversité. Organisation jeune, politiquement neutre, est-il dit. Neutralité qui se construit aussi sans propositions concrètes, sans engagements très précis. Le manque de projets excitants n'avait pas donné d'étincelles. Sur Facebook, les réactions ont été nombreuses. Le Belgomaton s'est ouvert tout naturellement. Quelques jeunes cherchaient s'il n'y avait pas quelques arrière-parents au Luxembourg.
La crise de 2007, il y avait 36.000 personnes dans les rues de Bruxelles pour exprimer une volonté unitaire. Cette fois, on en attendrait entre 10.000 et 30.000, dimanche, pour exprimer le ras-le-bol comme l'avait lancé ce jeune flamand, Kris, sous forme de "politieke chaos". Ce fut plus de 35.000.
Benoit Poelvoord se laisse pousser la barbe jusqu'à ce qu'il y ait un gouvernement. Benoit invite Bart De Waver à voir le film "Rien à déclarer". Les barbes s'allongeront-elles grâce ou à cause de la politique qui ne suit plus les envies de sa population ?
"Vive le temps" écrivait Paul Hermant.
Un référendum ? Tout déprendrait des questions posées.
L'imbroglio, c'est una autre flamand, Bert Kruisman, qui nous le révélait, ce vendredi, avec son humour caractéristique.
Beaucoup d'efforts, d'expressions citoyennes, donc. S'il fallait secouer le "cocotier" dans un pays qui se reconnait comme champion des "compromis", cela pourrait être bien parti.
Il faut dire que cela urge. La Belgique est devenue le cheval de Troie de l'Europe d'après le Financial Times.
Dans la même semaine, on apprenait tout à tour que la Belgique était le 16ème pays le plus heureux, que chaque Belge disposait, en moyenne, de 84.000 euros dans son bas de laine et que une personne sur 30 était en défaut de payement. Ne cherchez pas docteur, c'est dans la tête.
Voilà que le Vif ressortait une analyse fictive de ce que serait une Wallonie séparée des autres régions dans 15 ans pour suivre un "rêve wallon".
Avec le titre choc "Défi d"un État wallon indépendant", il était plus réchauffeur d'un esprit nationaliste avec ses vingt rêves et ses cinq cauchemars. Moins arrogant que celui de Bart De Wever, mais tout aussi mêlé d'illusions. Les "comment", cela pouvait faire rêver ou cauchemarder, était en place dans un dossier que je romancerai à peine ci-dessous sans en changer les idées.
En ce 20 octobre 2025, le Président de la République Wallonne prononçait un discours pour fêter le 15ème anniversaire de la séparation longue, complexe et pénible d'avec les trois autres régions de l'"ancienne Belgique" et aussi des 20 ans du Plan Marshall. Sa voix était ferme, heureuse, orgueilleuse presque charmeuse.
Chers concitoyens,
"Défi d'un État wallon indépendant".
Résignés, les Wallons ont pris leur indépendance en adoptant le fameux Plan B dont on avait parlé en 2010.
Grâce à des partenariat avec les universités américaines, les technologies du savoir, on a pu sauver la Wallonie. Le taux de chômage est descendu à 5%. 130.000 emplois ont été créés. Nous sommes dans les dix premiers du classement PISA. Il y aurait même des candidats au Prix Nobel en vue pour l'année prochaine.
Il était dit qu'en définitive, il était plus simple que de gérer une Jérusalem à la Bruxelloise et de subir l'impérialisme flamand. Le cas de la Norvège et de la Suède était mentionné pour rappel d'une séparation réussie. Le choc des cultures et des idéologies était devenu insoutenable. Bruxelles était restée enclavée en Flandre et avait réussi à éviter un nouveau Sarajevo. Mais cela ne nous arrangeais pas. C'est devenu leur problème, plus le nôtre.
Une fusion avec la France n'avait pas été la voie choisie. Le complexe de "petit voisin" perdu entre association ou intégration subsistait et n'avait pas permis de poursuivre dans cette voie.
Facebook avait à l'époque servi de référendum non officiel. La Wallonie était restée avec ses 16.844 km2, ses 3,5 millions d'habitants pour se lancer dans l'aventure. Le parlement monocaméral actuel se prépare à passer de 75 à 120 députés. Mais, il faut bien l'avouer, les maladies de jeunesse ont été nombreuses. Privée des bénéfices de la zone euro pour retrouver une santé budgétaire, la Wallonie a été obligée de faire vivre temporairement un écu wallon.
Dans le zoning de Louvain-La-Neuve, le "double-you+", on s'intéresse à l'innovation avec les retombées du Plan Marchal. Les start-ups sont désormais légions dans la chimie verte, les matériaux de construction, les technologies environnementales. 149 entreprises se sont lancées l'année passée sur les marchés internationaux contrôlés par l'AWEX. Redu est devenu une station de repérage européenne de la NASA et le high-tech y est partout présent. La Wallonie a doublé sa surface en agriculture bio. Elle en exporte les surplus non consommés sur place. Peut-être obtiendra-t-elle le Prix Franqui de l'Agronomie, l'année prochaine. Les nappes phréatiques produit 400 millions de m3 d'eau par an. Si en 2010, un quart de l'eau consommée provenait de Wallonie, elle atteint presque la moitié, aujourd'hui.
PETITe est en croissance exponentielle grâce aux contrats avec la sidérurgie chinoise et les mines sud-africaines. LISAM a été racheté par Lisam American. Atmos a doublé son personnel pour la fabrication de télescopes destinés à Hawaï, a installé sa succursale indienne et se lance en optoélectronique à destination de la Chine...
Je m'arrête ici, la liste des entreprises privées qui ont progressé, n'est pas exhaustive.
La commune d'Amay produit 135% des besoins énergétiques de Wallonie par l'intermédiaire de 25% d'énergies renouvelables énerg-éthiques. On espère le porter à 100% en 2050. L'eau chaude, dans une grande chaudière, est en cogénération et produit l'électricité verte. Mais, le principe de base de la meilleure énergie, reste celui de l'énergie qui n'est pas consommée. Panneaux solaires et photovoltaïques se partagent nos toits. 10% des Wallons roulent aujourd'hui à vélo sur des belles pistes cyclables. Cinq fois plus qu'il y a 15 ans. Changer la vie par la mobilisation et la solidarité, c'est tout une programme que la Transbrabançonne ferroviaire nous permet par la jonction avec les pays-régions des autres. Rester travailler avec des partenaires étrangers, voilà notre vision d'aujourd'hui et de demain.
La banque publique s'est associée avec la Banque d'Investissements européenne pour les projets d'infrastructure routière. Des autoroutes souterraines coûtent très chers.
Dans notre "Wallonicon Valley", les écoles s'autogèrent, se cherchent leurs propres enseignants parmi les meilleurs spécialistes dans le monde. Nous sommes en plein Woogle, même au cinéma.
L'apprentissage des langues préconisée par PISA a fait que les Wallons sont tous devenus trilingues en fin de scolarité. Le néerlandais est étudié depuis les premières années de classe sans correction grammaticale laborieuse. L'anglais vient dès la 10ème année et les échanges obligatoires sont poussés jusque dans les cours de mathématique et de sciences dans lesquels on ne parle plus français.
La justice s'est aidée de prisons informatisées suivant le principe de i-Care. La gouvernance sans corruption nous positionne en 5ème position d'après "Transparency International" après l'instauration récente d'une loi qui se greffe sur l'idée "Whistleblower".
Pour le côté artistique, il y a Liège qui en prenant pour modèle Barcelone, est devenue une destination branchée sur les bords d'Outre Meuse et attire artistes et touristes.
On pense activement à la réduction du temps de travail.
Comme vous pouvez le constater, chers concitoyens, nous sommes dans la bonne voie après ce choix d'il y a 15 ans."
Les spectateurs présents s'apprêtaient à applaudir.
C'est alors qu'un vieux Monsieur s'est levé au fond de la salle. Assez excité, le Monsieur, il a commencé, d'une voix chevrotante, un autre discours qui détonnait avec celui du Président de la République wallonne.
"La Wallonie, Monsieur, est la victime de sa dette. Vous êtes vous demandé si la situation n'aurait-elle pas été encore meilleure dans une Belgique unie ?
Les campagnes n'existent plus. Elles se sont transformées en continuation des villes, enclavées derrière des mégapoles. L'urbanisation est déroutante, incontrôlable, impossible à vivre pour un Monsieur comme moi. Oui, pour les jeunes qui n'ont pas connu un "avant", cela peut rester viable.
Comment êtes-vous arrivé à cette situation ?
Vous avez sabré dans les dépenses sociales pour sauver les dépenses publiques. Les intérêts notionnels étaient déjà en augmentation, il y a 15 ans. Ils ont explosés. Vous ne vous rappelez pas des problèmes de la grenouille irlandaise qui voulait se faire plus grosse que le boeuf ?
Oui, les entreprises étrangères se sont beaucoup implantées sur notre petit "paradis". Ma pension n'est plus qu'une peau de chagrin. Ne parlons pas des allocations de chômage inversement proportionnelle à la durée du travail hebdomadaire. L'eau est devenue plus chère, concurrences fiscales et salariales obligent, puisque la Flandre est prête à payer. La pauvreté des plus défavorisés est passée d'une personne sur cinq à une personne sur deux. Les CPAS ne savent plus où donner de la tête.
La sacro-sainte austérité a ralenti la politique industrielle pro-active sur le long terme. La santé ? Ah, oui, il y a plus d'obèses, ce qui représente aujourd'hui 10% du budget de l'INAMIW.
La sécurité, la trouvez-vous dans nos aéroports, là où la drogue entre par portes et fenêtres ? Quand je vais voir ma fille en Flandre, je paye une deuxième vignette autoroutière et je suis obligé de faire un grand détour pour ne pas payer celle autour de Bruxelles.
Nous sommes passés de Belgicains à Wallonains... pour quels résultats ?
Pourquoi ne pas commencer à parler en latin comme nos voisins du Nord l'ont fait ?
Qu'avons-nous vraiment gagné dans la séparation de corps et de biens depuis 2010 ?
Votre présence, là où vous êtes, actuellement, avec tout votre staff. Avez-vous toutes les compétences nécessaires pour avoir une vue d'ensemble ?
Les bénéfices des entreprises privées profitent à qui ? Aux travailleurs chinois, américains...
De la vie en XXXL, des dizaines de milliers demandeurs d'emplois, des licenciement avec la semaine de préavis, vous n'en parlez pas. L'Europe n'est plus notre "amie". Elle est plus morcelée que jamais et sort complètement de l'idée fusionnelle de sa création. Pourquoi n'avez-vous pas parlé de nos concurrents, des autres régions de cette vieille "Belgique" d'antan ?".
Tout le monde s'était tourné vers lui avec un air désabusé, presque moqueur. Il n'avait pourtant pas tort.
Quelqu'un s'apprêtait à se lever et à poser la question du pourquoi les propositions mentionnées n'avaient pas effleuré les esprits depuis longtemps, bien avant 2010. Mais, il n'osa pas. Se passer tout le monde sur le corps, même avec un autre café serré, faut pas rêver, c'est toujours cauchemarder quelque part.
De toute manière, ce fut un sacré empêcheur de "tourner en rond", ce vieux Monsieur, devait penser la plupart des auditeurs dans la salle.
De "Belgium, twelve points", on en était loin, trop loin.
En tous cas, ce gars qui gâchait cette belle journée d'arrière saison, avait fait beaucoup réfléchir. Certains spéculaient, déjà. Non peut-être...
L'enfoiré,
23/1/2011 ; 14:00 La manifestation "Shame" a commencé. On compte quelques 15.000 personnes.
De 34.000 à 45.000 manifestants.
.Autres photos de la manifestation.
Citations :
- "J'ai de la peine à quitter la ville parce qu'il faut me séparer de mes amis ; et de la peine à quitter la campagne parce qu'alors, il faut me séparer de moi.", Joseph Joubert
- "Les vrais amis sont ceux qui mêlent leur confiance réciproque, leurs pensées et leurs rêves, leurs vertus comme leurs bonheurs et leurs souffrances, libres de se séparer toujours et ne se séparant jamais.", Monseigneur Bougaud
- "Quand beaucoup d'hommes sont ensembles, il faut les séparer par des rites, ou bien ils se massacrent.", Jean-Paul Sartre
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