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Accueil du site > Tribune Libre > C’est l’argent qui fait la loi

C’est l’argent qui fait la loi

Michel Onfray a dit sur une chaîne d’information « C’est l’argent qui fait la loi » sans creuser la force de sa phrase qui véhicule le drame de notre société : c’est le faux argent qui crée la fausse loi. La majorité des Français commence à prendre conscience de la fausseté de la loi devenue cancéreuse par sa prolifération, émotive et incontrôlée ; le législateur remplace la qualité par la quantité. Mais cette majorité n’a pas encore réalisé que ce cancer législatif ne fait que tenter de réparer les dégâts que crée la fausse monnaie, soit en les justifiant soit en tentant de les limiter, et en creusant partout un ravin entre les décideurs enfermés dans leurs théories, et leurs peuples confrontés quotidiennement au réel. Le face à face Chevènement Zemmour sur Cnews illustre parfaitement ce ravin.

La loi est une définition et une reconnaissance du beau, du bien et du vrai, par et dans le groupe qui la crée et qui s’y soumet au travers d’obligations et d’interdictions. Le fait que le volume de tous les codes ait été multiplié par au moins 4 depuis 50 ans, rendant totalement mensonger l’adage « nul n’est censé ignorer la loi », doit interroger.

Jusqu’à récemment le beau, le bien et le vrai avaient toujours été définis par la religion qui mettait à l’intérieur des individus toutes ces définitions. Elles n’avaient pas besoin d’être écrites pour être connues et respectées ; elles étaient de toute éternité et elles venaient de Dieu. Il n’était écrit que le mode d’emploi collectif de toutes ces vérités intimes. Ainsi se sont créées toutes les civilisations, chacune avec sa religion. Toutes les religions sans exception génèrent le doute dans une toute petite élite intellectuelle et le dogme ou « la foi du charbonnier » dans le peuple. Partout ceux qui doutaient l’exprimaient peu et laissaient le peuple croire à une vérité éternelle non écrite et indiscutable car ils approuvaient cette vérité sans avoir à la formuler. Partout cette vérité se réputait universelle (catholique en grec), voulait que l’on s’y soumette (islam en arabe) et ses adeptes se partageaient partout entre une majorité qui voulait simplement vivre sa vérité, et deux minorités qui voulaient soit propager cette vérité soit éliminer la concurrence.

En occident sont nées assez récemment une folie et une technique.

La folie, avec une très mauvaise compréhension de Darwin et son instrumentalisation, a été de réduire le mystère à la création des bactéries pour ne pas en être trop dérangé, et de faire semblant de croire que seuls le hasard et la nécessité ont, des milliards de fois toutes indépendantes, fabriqué des machines autonomes, autoreproductrices et autoréparatrices que l’on a appelé animales ou humaines. Cette négation d’une puissance créatrice supérieure, quel que soit le nom qu’on lui donne, n’apparait même plus chez beaucoup comme un signe d’aliénation.

La technique est celle de communication par fil, par ondes, par terre, par mer ou par air. Cette technique s’est tellement développée qu’elle en a fait oublier ses buts qui sont l’action et la réflexion, et ses nourritures qui sont aussi l’action et la réflexion. La communication lorsqu’elle est déconnectée de l’action et de la réflexion, n’est plus que délirante.

Aliénation et délire sont devenus les mamelles de nos vies, notre nouvelle religion sans origine et nous avons tenté de l’imposer aux autres civilisations qui se sont toutes fracturées entre la soumission, la révolte et la résistance.

Nous avons appelé cette religion la République dont le vide a cru pouvoir être rempli par sa répétition comme un mantra dans les bouches qui se montrent et par une avalanche législative ininterrompue pour tenter de lui donner un corps qu’elle ne peut pas avoir. Rien ne peut se construire sur l’aliénation et le délire si ce n’est une tentative éternellement stérile et toujours en chantier par de nouvelles obligations, de nouvelles interdictions et de nouvelles destructions de barrières naturelles.

Mais pour pouvoir continuer à tout fonder sur l’aliénation et le délire, nous avons besoin d’une énergie qui n’est plus la nôtre laissée au chômage, au jogging et aux salles de sport. Ce sera l’énergie monétaire qui de tous temps n’avait été que notre propre énergie accumulée dans la monnaie. En mettant la charrue avant les bœufs nous avons cru pouvoir décider que l’énergie monétaire viendrait de notre énergie future et serait donc par définition illimitée.

La boucle est bouclée et l’aliénation et le délire vont évidemment pouvoir s’accomplir puisque l’énergie monétaire qui les autorise est sans limites. L’énergie monétaire autorise notre aliénation et notre délire. Oui, sur ce point, Michel Omfray a raison, l’argent fait la loi.

Pour l’application concrète, il n’y a qu’à ouvrir les yeux.

Comment réagir ? En prenant conscience car il n’y a jamais de solution à un problème mal posé.


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11 réactions à cet article    


  • Opposition contrôlée Opposition contrôlée 19 octobre 2020 11:43

    Essayez d’intégrer le concept de « lutte des classes » dans vos réflexions, vous verrez comme soudain tout sera plus clair. 


    • Clark Kent Séraphin Lampion 19 octobre 2020 11:57

      @Opposition contrôlée

      C’est beaucoup demander à l’auteur. Mais il pourrait commencer par établir la relation entre l’argent et le capital :
      « Leur valeur, c’est-à-dire leur cote au cours de la Bourse, tend à monter lorsque le taux de l’intérêt baisse (pour autant que cette baisse soit uniquement la conséquence de la baisse du taux du profit et ne résulte pas du mouvement du capital-argent), de sorte que cette richesse imaginaire, dont-chacune des parties a une valeur déterminée à l’origine, s’accroit avec l’expansion de la production capitaliste. » (Karl Marx « Le Capital »)


    • zygzornifle zygzornifle 19 octobre 2020 13:04

      Ceux qui détiennent l’argent détiennent aussi le pouvoir et ils le défendront bec et ongle quitte a mette des pays a genoux si cela sert leurs intérêts ....


      • Clark Kent Séraphin Lampion 19 octobre 2020 13:47

        @zygzornifle

        et ils font comme les jardiniers expérimentés : ils arrosent, mais pas trop, juste ce qu’il faut, sinon ça pourrit !


      • Kapimo Kapimo 19 octobre 2020 15:07

        @zygzornifle

        Oui, ils sont meme prets à inventer de fausses pandémies pour terroriser les gens et les voler en tout impunité.


      • binary 19 octobre 2020 17:43

        Je ne crois pas que la religion des dirigeants des banques qui fabriquent la dette des autres, soit nouvelle.


        • Florian LeBaroudeur Florian LeBaroudeur 19 octobre 2020 19:43

          Comment réagir ?

          Surtout quand les serviteurs zélés de Mammon occupent tous les postes clés des institutions nationales et internationales et que chaque objection pertinente est impitoyablement tourné en dérision, y compris par ceux qui se savent écrasés et qui pensent pouvoir obtenir quelques cacahuètes en récompense de leur servitude et de leur lâcheté.

          Ou est donc passer le discernement, le courage et l’honneur dans ce bas-monde ?

          Je vois mal comment nous allons sortir de ce merdier sans dommages collatéraux, trop de mensonges et trop d’inepties ont été disséminé et intégrer comme allant de soi, trop de couleuvres ont été avalés et digérés.

          La lumière est désormais trop ensevelie pour être vu et la vérité trop couvert pour être entendue.


          • Xenozoid Xenozoid 19 octobre 2020 19:52

            c’est l’accumulation de la propriété privé qui fait la loi


            • Xenozoid Xenozoid 19 octobre 2020 19:58

              L’ ennui, pour employer un euphémisme , avec laquelle la personne ordinaire est confrontée a la politique : est-ce en rapport avec les conditions spécifiques de l’Italie ou est-il en quelque sorte inévitable ?

              Je pense qu’ aujourd’hui, nous sommes confrontés à un nouveau phénomène qui va au-delà du désenchantement et de la suspicion mutuelle entre les citoyens et le pouvoir, un phénomène qui touche l’ensemble de la planète . Ce qui se passe est une transformation radicale des catégories avec lesquelles nous avons l’habitude pensé à la politique. Le nouvel ordre de la puissance mondiale est basée sur un modèle de gouvernance qui se définit comme démocratique , mais qui n’a rien de commun avec ce que ce terme signifie . Le fait que ce modèle est , du point de vue de la puissance , plus économique et plus efficace , est prouvé par le fait qu’il a été adoptée même par les régimes qui étaient jusqu’à tout récemment des dictatures . Il est beaucoup plus facile de manipuler l’opinion des gens par le biais des médias et de la télévision que d’avoir à imposer de façon permanente toutes les décisions au moyen de la violence . Les formes politiques que nous connaissions - le une fois état nation , la souveraineté , la participation démocratique , les partis politiques , droit international, sont arrivés à la fin de leur histoire . Ils continuent à faire partie de nos vies comme des formes vides , mais la politique contemporaine prend la forme d’ une « économie » , c’est à dire un gouvernement de choses et d’hommes . Alors que notre seul recours est de penser d’un seul tenant , sur la base du principe que nous avons précédemment défini par l’expression , qui est d’ailleurs aussi obscure , de la « vie politique » .

              L’état d’exception dont vous avez lié à la notion de souveraineté semble prendre aujourd’hui le caractère d’une situation normale , mais les citoyens sont toujours perdant face à l’incertitude de leur vie quotidienne : est-il possible d’atténuer ce sentiment ?

              Nous avons vécu pendant des décennies dans un état ?d’exception, qui est devenu la règle, comme dans le cas de l’économie ,dont la crise est l’état normal . L’état d’exception qui devait être limitée dans le temps à pris la place du modèle normal de la gouvernance aujourd’hui et cela est vrai mêmes dans les Etats qui se disent démocratiques . Peu de gens sont conscients du fait que les règlements de sécurité introduites après le 11 Septembre (ils avaient été mis en place en Italie depuis les années de plomb ) sont pires que ceux qui étaient imposés sur les livres sous le fascisme . Et les crimes contre l’humanité commis sous le nazisme ont été rendue possible par le fait que Hitler ayant pris le pouvoir et avait alors proclamé un état d’exception qui n’avait jamais été abrogé. Hitler, cependant, n’a pas eu les mêmes possibilités de contrôle (données biométriques , caméras de surveillance , les téléphones cellulaires , cartes de crédit) qui sont à la disposition de nos Etats contemporains . On pourrait très bien dire aujourd’hui que l’Etat considère chaque citoyen comme étant un terroriste virtuel . Cela peut avoir comme conséquence de diminuer et rendre impossible la participation à la vie politique qui est censé définir la « démocratie ». Une ville dont les places et les rues sont contrôlées par des caméras de surveillance ne peut pas être un lieu public : c’est une prison .

              l’avenir sera-t-il meilleur que le présent ?

              L’optimisme et le pessimisme ne sont pas des catégories utiles pour la réflexion. Comme l’écrivait Marx dans une lettre à Ruge : « c’est précisément la situation désespérée qui me remplit d’espoir ".

              16 août 2012


              • Xenozoid Xenozoid 19 octobre 2020 20:04

                @Xenozoid

                Dieu n’est pas mort, il a été transformé en argent « - Entretien avec Giorgio Agamben - Peppe Sava

                Peppe Sava : Le gouvernement Monti invoque la crise et la situation d’urgence et il semble être la seule solution à la fois pour la catastrophe financière ainsi que les formes indécentes assumées par le pouvoir en Italie : le point de vue de M. Monti ,est il la seule solution ou pourrait-il à la contraire devenir un prétexte pour imposer des restrictions graves sur les libertés démocratiques ?

                Giorgio Agamben : Ces jours-ci , les mots « crise » et « économie » ne sont pas utilisés comme des concepts , mais plutôt comme des mots de commande qui facilitent l’imposition et l’acceptation de mesures et restrictions que les gens n’accepteraient pas autrement. Aujourd’hui , la « crise » signifie « vous devez obéir ! » Je pense qu’il est très évident pour tous que la soi-disant « crise » est continue depuis des décennies et qu’elle n’est en fait rien d’autre que le fonctionnement normal du capitalisme à notre époque . Et il n’y a rien de rationnel sur la fonctionnement du capitalisme a l’heure actuelle .

                Pour comprendre ce qui se passe , nous devons interpréter l’idée de Walter Benjamin que le capitalisme est véritablement devenu une religion , la religion la plus féroce , implacable et irrationnelle qui ait jamais existé , car il ne reconnaît ni les trêves ni rachat . Un culte permanent est célébrée en son nom , un culte dont la liturgie est la main-d’œuvre et son objet , l’argent . Dieu n’est pas mort , il a été transformé en argent. La Banque avec ses drones sans visage et ses experts - a pris la place de l’église et de ses prêtres , et par sa commande sur le crédit ( comme les prêts à l’Etat, qui a si allègrement abdiqué sa souveraineté ) , manipule et gère la foi —la rare et incertaine foi qui reste encore de notre temps . D’ailleurs , l’affirmation selon laquelle le capitalisme d’aujourd’hui est une religion est plus efficacement démontrée par le titre qui est apparu sur la première page d’un grand journal national , il y a quelques jours : « sauver l’euro Quel que soit le coût » . Voyez vous, le « salut » est un concept religieux , mais qu’est-ce que « quel que soit le coût » signifie ? Même jusqu’a sacrifier des vies humaines ? Car seulement dans une perspective religieuse ( ou, plus exactement , une perspective pseudo-religieuse ) pourrait -on faire de telles déclarations manifestement absurdes et inhumaines .

                La crise économique qui menace maintenant de nombreux pays européens : peut être elle generalement conçue comme une crise de la modernité dans son ensemble ?

                La crise qui affecte désormais l’Europe n’est pas tant un problème économique, comme on nous dit, mais avant tout une crise de notre rapport au passé . La connaissance du passé est la seule façon d’avoir accès au présent . C’est grâce à leur quête pour comprendre le présent que les hommes , ou du moins les Européens - se sont senti obligé d’interroger le passé. J’ai précisé que cela impliquait « nous, Européens, » parce qu’il me semble, en admettant que le mot ’Europe ait un sens, il semble maintenant évident que ce sens ne peut pas être politique, ou religieux , ou même beaucoup moins économique , mais consiste dans le fait que l’ homme européen , contrairement , par exemple , aux Asiatiques et Américains , dont l’histoire et le passé ont un tout autre sens - ne peut approcher sa vérité que par la voie d’une confrontation avec le passé , et donc , par le règlement de comptes avec son histoire. Le passé n’est pas seulement un patrimoine d’objets et de traditions , de souvenirs et de connaissances , mais surtout une composante anthropologique essentielle de l’homme européen, qui ne peut accéder au présent seulement en regardant ce qui s’est passé dans le passé. La relation spéciale que les pays européens (Italie et bien sûr Sicile sont exemplaires de ce point de vue ) ont , avec leurs villes , avec leurs œuvres d’art , et avec leurs paysages, n’est pas une question de préserver le plus ou moins précieux , mais externe et accessible, des choses : il s’agit de la vraie réalité européenne , sa survie incontestable . C’est pourquoi, en détruisant la campagne italienne avec le béton des routes et des trains à grande vitesse, les spéculateurs, tout en refusant de se priver de leurs bénéfices , sont en train de détruire notre identité. L’expression même, « biens culturels » est trompeuse, car elle suggère que le terme englobe certaines marchandises et en exclut d’autres, des biens qui peuvent être exploités économiquement et même vendus , comme si on pouvait liquider et offrir sa propre identité à la vente.

                Il ya plusieurs années, un philosophe qui fut aussi un haut fonctionnaire de l’ Europe, naissante , Alexandre Kojève, a soutenu que l’homo sapiens avaient atteint la fin de son histoire et qu’il n’avait que deux choix : l’accès à une animalité post-historique ( comme en témoigne l’ American Way of Life ) ou snobisme ( comme illustré par les Japonais ) qui continue à célébrer la cérémonie du thé , vide et dépourvue de tout sens historique . Entre un aux États-Unis intégralement re- animalisé et un Japon qui reste humain en renonçant à tout le contenu historique , l’Europe peut offrir l’alternative d’une culture qui reste humaine et vitale, même après la fin de l’histoire , car il est capable de faire face à sa propre histoire dans sa totalité afin de procéder à partir de là pour atteindre un nouveau futur

                Votre livre le plus célèbre, Homo Sacer , est une étude de la relation entre le pouvoir politique et la vie mise a nue et révèle les difficultés que ces deux termes impliquent. Quel est le point de possible de convergence entre ces deux pôles ?

                ce que mes recherches m’ont montré est que le pouvoir souverain a été fondée depuis ses origines sur la séparation entre la vie nue (la vie biologique en Grèce a eu lieu à la maison ) et de la vie tel qu’elle défini politiquement ( qui a lieu dans la ville ). La vie nue a été exclu de la vie politique et était en même temps inclus et capturée par son propre exclusion : en ce sens , la vie nue est la base de la puissance négative. Cette séparation atteint sa forme la plus extrême en bio-politique moderne . Ce qui s’est passé dans les États totalitaires du 20ème siècle est que le pouvoir ( peut-être par le biais de la science ) a décidé exactement ce que , en fin de compte , est une vie humaine et ce qui n’est pas une vie humaine . En opposition à ce point de vue , ce que nous avons à faire est de concevoir une politique de formes vitales , c’est une vie qui ne peut être séparé de sa forme , qui ne sera jamais nue à nouveau .


              • beo111 beo111 19 octobre 2020 23:50

                Je suis d’accord que la corruption des élus, en particulier des députés, est le problème principal.

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