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Accueil du site > Tribune Libre > Décryptage de la novlangue néolibérale

Décryptage de la novlangue néolibérale

La Novlangue, terme inventé par George Orwell pour son roman d’anticipation « 1984 », désigne une langue qui a pour objectif d’empêcher de penser et surtout d’empêcher de critiquer l’État. Pour cela, plusieurs techniques sont employées en dehors de la réduction du vocabulaire :

– l’inversion de sens,

– l’occultation de sens,

– l’oblitération des idées.

Avec le néolibéralisme, outre le système économique sur lequel il s’appuie, en l’occurrence le capitalisme, et la croyance que le marché libre et non faussé peut créer un monde harmonieux et juste, il repose aussi sur une anthropologie qui postule que l’humain est un être imparfait qui ne peut s’adapter de lui-même aux besoins du marché.

L’égalité  : il ne s’agit pas de l’égalité sociale mais de l’égalité des chances. Comme si l’égalité des chances était possible dans un monde d’inégalités. Technique de l’inversion de sens.

Le marché : terme fétiche du néolibéralisme. La société de marché tend à faire disparaître la notion de capitalisme. De même que le libéralisme qui n’est, à son origine, pas capitaliste.

Concurrence  : autre fétiche du néolibéralisme et du capitalisme. En fait, il ne s’agit pas de multiplier la concurrence entre petits artisans mais entre des holdings qui se partagent le monopole totalitaire du marché. Technique de l’inversion de sens et de l’occultation.

Réforme  : dans le monde d’avant, la réforme concernait l’amélioration des conditions de travail ou de vie. Désormais, les réformes n’ont d’unique objectif que d’adapter les individus aux besoins du marché. Technique du glissement de sens.

Charges sociales : il s’agit cette fois de faire passer la part du salaire socialisé comme une charge qui pèse comme une taxe. Technique de l’occultation du salaire socialisé qui n’a d’objectif que le détournement de fonds.

Capital humain : autrement dit, une valeur impersonnelle qu’on peut gérer en lieu et place de la valeur humaine qu’est la force de travail. Technique de l’oblitération pour rendre impraticables les notions de conditions de travail, de fierté du travail, de juste rémunération.

La dette publique fait disparaître sa condition qu’est le crédit public et ceux qui n’ont aucun problème pour le financer car un État ne peut faire faillite. Elle oblitère aussi la dette privée qui est réellement dangereuse car quand elle est trop élevée, plus personne n’investit. Ce faisant, elle oblitère l’état réel de l’économie du pays.

La flexibilité porte en elle le changement permanent et la souplesse de l’adaptation. Elle cache en fait, l’inflexibilité de la domination du capital et la permanence de sa domination.

La liberté est le terme central du libéralisme. En néolibéralisme, il s’agit de la donner aux détenteurs du capital et de faire croire aux autres qu’ils ont la liberté en multipliant les situations de choix qui fassent intervenir son libre-arbitre : choix multiples de yaourts ou d’accepter les cookies. Dans le même temps, étant un individu incapable, le néolibéralisme développe l’individualisme pour atomiser le peuple de telle manière que la souveraineté revienne au gouvernement. La liberté de penser et d’agir en tant que citoyen devient impossible. Il faut juste lui faire croire que sa liberté de citoyen est plénier dans le geste du dépôt du bulletin de vote dans l’urne.

Ressources :

La novlangue néolibérale de Alain Bihr

Processus de destruction et de reconstruction du peuple de Jean-Luc Picard-Bachelerie

Image sous Licence Creatives Commons

 


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14 réactions à cet article    


  • Clark Kent Clark Kent 18 octobre 2022 09:37

    Merci pour cet éclairage.

    Deux des mots expliqués sont contenus dans la devise de la République Française, mais quand ils ont été mis en avant pour donner les orientations au bon peuple, ils n’avaient déjà pas le sens qu’on nous a appris à l’école :

    • l’égalité revendiquée et obtenue avec la révolution bourgeoisie de 1790 faisait référence au droit qui, sous l’ancien régime, accordait des « privilèges » aux nobles, au clergé, aux villes franches et aux corporations. La loi n’était pas la même pour tout le monde. Ce qui a été obtenu, c’est l’égalité devant la loi. Ce n’était déjà pas l’égalité des chances.

    • La liberté concernait les finances et l’entreprise. Le « commerce d’argent » était interdit aux chrétiens et dévolu à des minorités chargées les intérêts des puissants et toujours susceptibles d’être neutralisées pour supprimer le problème quand il y en avait un. Créer une entreprises supposait également un aval, un contrôle et une participation aux dividendes d’un tuteur. L’Angleterre ay ant pris une large avance en matière d’industrialisation et de marchés, les opérateurs français ont dû procéder à un changement de régime radical pour ne pas se faire marginaliser et disposer des même conditions que leurs concurrents d’outre-Manche chez qui les aristocrates étaient plus malins. C’était déjà le « libéralisme ».

    Pour ce qui est de la « fraternité », il faut demander aux frères trois points ce que cela signifie.


    • Clark Kent Clark Kent 18 octobre 2022 09:45

      @Clark Kent

      Dommage que vous n’ayez pas donné les définitions de « démocratie » et « droits de l’homme ».


    • Jean-Luc Picard-Bachelerie 18 octobre 2022 10:46

      @Clark Kent
      Pour les Droits de l’homme, je suis un peu sec. Par contre, j’aurai effectivement pu en dire quelque chose. Cela fera l’objet d’un prochain article sur la novlangue néolibérale. 
      En néolibéralisme, la conception de la démocratie est assez particulière. Elle se raccroche directement à son anthropologie et de son postulat d’imperfection de l’espèce humaine. Si l’être humain n’est pas capable de répondre de lui-même aux besoins du marché, il n’a pas non plus la capacité de remplir son rôle de citoyen pour la simple raison qu’il n’a pas le temps d’avoir les connaissances suffisantes pour remplir son rôle et faire des choix appropriés. La cause en est le travail, les loisirs, les enfants et toutes les contingences du quotidien. Mais cela tient aussi à la nature du régime politique. L’Etat néolibéral a pour unique mission d’organiser les marchés libres et non faussés et d’adapter les individus à leurs besoins. Or, c’est un sujet bien trop complexe pour la compréhension des ignares supposés citoyens. De ce fait, l’être humain étant incapable de remplir son rôle de citoyen, le peuple ne peut pas se constituer et donc ne peut être souverain. La souveraineté est donc confiée au gouvernement. Et comme je le dis pour la liberté, le citoyen est cantonné au rôle minimum d’un citoyen qui est celui de voter. 


    • Clark Kent Clark Kent 18 octobre 2022 11:33

      @Jean-Luc Picard-Bachelerie

      "L’Etat néolibéral a pour unique mission d’organiser les marchés libres et non faussés "

      Vous plaisantez ?

      Pour les émules de Milton Friedman et d’Ayn Rand, le rôle de l’état n’est surtout pas économique, domaine qui, pour eux doit être totalement déréglementé et laissé aux opérateurs financiers et industriels. Les marchés sont supposés « libres », mais sont en fait dominés par des monopoles, et ils sont complètement « faussés » par le lobbying.

      L’unique « mission » de l’état néolibéral est d’assurer la protection des biens privés et d’assurer l’« ordre » intérieur via la police (dont le but est de maintenir les privilèges de ceux qui sot nés avec une cuiller d’argent dans la bouche et ont réussi à lui faire faire des petits jusqu’à disposer d’une ou plusieurs ménagères), et l’ordre extérieurs par le biais de l’armée, avec le même but. La prouesse consiste à faire payer ces services d’ordre à ceux qui en sont l’objet via les impôts et les emprunts à des banques privées (la « dette ») dont les intérêts sont remboursés par la TVA, de l’argent public.


    • Jean-Luc Picard-Bachelerie 18 octobre 2022 12:05

      @Clark Kent
      Vous faites la définition de l’ultralibéralisme.


    • Clark Kent Clark Kent 18 octobre 2022 14:29

      @Jean-Luc Picard-Bachelerie

      Néolibéralisme :


      Le néolibéralisme désigne le renouvellement des thèses économiques libérales qui ont inspiré les politiques économiques des pays occidentaux. Ces politiques, devenues dominantes, ont pour objet de créer un environnement propice à l’afflux des mouvements de capitaux — source d’épargne disponible pour l’investissement —, par la dérégulation des marchés, la réduction du rôle de l’État, des dépenses publiques et de la fiscalité (en particulier au bénéfice des entreprises), un contrôle strict de l’évolution de la masse monétaire pour prévenir les effets inflationnistes, la privatisation des entreprises publiques et l’abaissement du coût du travail.


      Employé pour : Politique néo-libérale, Ultra-libéralisme

      Termes génériques : Économie, Idéologie

      Voir aussi : Libéralisme


    • Jean-Luc Picard-Bachelerie 18 octobre 2022 12:04

      Friedman avait de nets panchants pour l’ultralibéralisme. Il a commencé néolibéral et terminé ultra. Il n’est plus la référence néolibérale.


      • Clark Kent Clark Kent 18 octobre 2022 15:03

        @Jean-Luc Picard-Bachelerie

        C’est la même chose ! Friedman a simplement eu le mérite d’appeler un chat un chat et ne ne pas se cacher derrière son petit doigt comme le font les socio-démocrates qui se réfugient derrière des arguties pour justifier une politique économique en opposition avec les idées politiques qu’ils affichent.


      • Jean-Luc Picard-Bachelerie 18 octobre 2022 23:04

        @Clark Kent
        Je maintiens que le néolibéralisme est différent de l’ultralibéralisme car il y a 2 concepts qui font la différence :
         Le gouvernement invisible
         La fabrique du consentement

        A la base du néolibéralisme, il y a le postulat que l’humain est incapable de s’adapter de lui-même aux besoins du marché. D’où les crises financières de la fin du XIXe s. et du début du XXe s. avec le krach boursier de 1929. 

        Le néolibéralisme, et Walter Lippmann son concepteur, a donc besoin que l’humain soit adapté aux besoins du marché. Pour cela, il a besoin d’un « gouvernement invisible » (les mots de Lippmann) qui aident, en douceur, les gens à s’adapter aux besoins du marché par la « fabrique du consentement » (Lippmann). Pour cela, même si le néolibéralisme se débarasse de la plupart des services publics, il en garde 2 que l’ultralibéralisme donne au privé : l’éducation et la santé. Ces 2 ministères ont la tâche de formater les gens aux besoins du marché. L’Etat néolibéral est interventionniste dans les marchés et pas l’ultralibéralisme.

        Intéressez-vous à Walter Lippmann, Edward Bernays.
        Regardez cette vidéo de Barbara Stiegler qui en parle très bien.
        https://www.youtube.com/watch?v=k2PGYu0rvjw&t=2s


      • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 18 octobre 2022 12:40

        Dire qu’élevée dans une famille libérale, j’ai cru très longtemps que ce mot voulait dire : qui nous avait libéré du nazisme. Comme la vision d’un jeune peut être faussée....


        • Clark Kent Clark Kent 18 octobre 2022 15:06

          @Mélusine ou la Robe de Saphir.

          Je connais quelqu’un qui croyait que « souverainiste » signifiait « royaliste » parce qu’il y avait le mot « souverain » dedans.

          Quand on ne sait pas ce que les autres mettent derrière les mots, c’est difficile de se comprendre.


        • amiaplacidus amiaplacidus 18 octobre 2022 14:37

          Moi je pense que le libéralisme tient en une phrase et un mot fétiche :

          Il faut un poulailler libre, avec des poules libres et un renard libre.


          • Clark Kent Clark Kent 18 octobre 2022 17:43

            @amiaplacidus

            Le problème, c’est que, non seulement le renard est rusé, comme on le sait, mais qu’en plus il a fermé à clé le poulailler, engagé à son service une bande de rats armés de LBD et acheté une machine automatique pour plumer les poulets qui s’appelle TVA. Mais en ce moment, il se farcit les derniers poulets sans se soucier de ce qu’il va manger demain. Il est rusé, manipulateur, mais con !


          • troletbuse troletbuse 18 octobre 2022 18:50

            Voilà pourquoi l’élite sataniste occidentale n’aime pas poutine

            https://crowdbunker.com/v/YGr5Y4wZUM

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