Distorsions, convulsions et histoires à dormir debout
Regardez moi dans les yeux, fixez bien vos ornières, n’écoutez personne et surtout pas votre propre entendement ; lâchez en libre cours vos peurs, vos hargnes, et surtout évitez tout contact avec la réalité : celle des nombres, des chiffres, des rapports de nos vénérables institutions (Cour des comptes, Conseil constitutionnel, INSERM, INSEE, CNIS, et tant d’autres) et contentez-vous de lire sur mes lèvres. Voilà en quoi ressemble la toute dernière tentative hallucinatoire de Nicolas Sarkozy - en guise de programme ? - de faire croire qu’il a toujours quelque chose à (nous) proposer. Il est plus difficile de désagréger un préjugé qu’un atome disait Albert Einstein. Le président est là dessus bien d’accord.
Durant ses voyages aux quatre coins de la France, il collectionne préjugés, a priori, « évidences » et autres idées reçues et contre-vérités et il les ressort sous forme de propositions sérieuses et responsables. Il en est ainsi pour les fraudes à la sécurité sociale (qui cependant se trouvent tout au bas de l’échelle des fraudes et dont le champion toutes catégories reste celle de l’impôt), pour les chômeurs paresseux dont il nous propose de nous débarrasser par un referendum. Voilà donc le énième chapeau de ce président caméléon qui n’a, il faut bien le reconnaître, pas froid aux yeux : le jour même ou son ex ministre des finances et ex trésorier de sa campagne électorale de 2007 est mis par deux fois en examen pour recel et corruption passive, il projette de mener la suivante sous le signe des « valeurs ».
Sur le mariage homosexuel, il y a encore quelques jours, il se tâtait, nous faisaient croire son entourage éclairé. Il ne se tâte plus. Il est contre. Il est contre aussi le vote des émigrés, « contrairement à François Hollande » dit-il, contrairement à ce qu’il « croyait » lui même aussi en tant que ministre de l’intérieur, contre l’euthanasie, contre la régularisation des sans papiers, etc. C’est un adepte des contre qu’il collectionne chez les détenteurs du bon sens et des platitudes. C’est vrai qu’un déguisement comporte des règles, on ne peut pas s’habiller en père fouettard au dessous de la ceinture et en robin des bois au dessus. Il ya une cohérence à préserver, même pendant le carnaval. Le président a donc choisi le thème central du carnaval, pardon, de sa campagne électorale pour quand il sera candidat : Travail, responsabilité, autorité. En effet, il lui faudra du travail pour restaurer son autorité, et pour la responsabilité, il suffit d’écouter François Bayrou : … l’annonce de Nicolas Sarkozy (sur le referendum) est une idée pernicieuse qui montre à quel point le pouvoir est dans le désarroi. Question programme on est plutôt du genre sauve qui peut, pas de panique dans les naufrage et celui-ci c’en est un.
D’ailleurs le président s’en remet de plus en plus au sacré, aux valeurs et à l’héritage chrétien, de manière sélective cependant : c’est vrai que le Christ portait une Rolex avant ses 33 ans, qu’il était plusieurs fois divorcé, qu’il adorait l’argent et les marchands du Temple. Il prêchait sans doute, comme Dassault, que la précarité est dans la nature des choses, une prédestination pour pauvres. Ou qu’ils doivent, comme disait Marie Antoinette manger du Pain d’Espagne quand la miche manque, ou rester chez eux (c’est-à-dire sous les cartons de fortune) les jours de grand froid comme le dit si bien la ministre chargée des SDF.
Le Nicolas nouveau est donc annoncé. Mais on peut toujours refuser de le boire jusqu’à la lie.
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