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Accueil du site > Tribune Libre > Éloge de la radicalité

Éloge de la radicalité

Au plan étymologique, le mot "radical" (Du latin radicalis, dérivé de radix) renvoie à la notion de "racine". Et comme il est bon d'entamer avec légèreté l'approche d'un mot si puissant, on peut le dire : la racine de "radical" est un radis.
En ce sens, "radical" et "orthodoxe" sont des notions analogues dont il n'est pas rare qu'elles soient accompagnées du fanatisme propre à celui qui se pense au plus proche de la source (LA Vérité). Les mots "gauche radicale", "droite radicale", ou le malheureusement trop d'actualité "radicalisation" sont là pour le rappeler et confèrent au mot lui même, et auprès du grand public, une connotation de violence aveugle et écervelée.

Or, cela est à la fois navrant et prévisible de voir cette notion ainsi salie car, en vérité je vous le dis : la radicalité est salutaire (clin d'oeil neotestamentaire).

Mais "radical" est aussi, et avant tout, un mot valise. En effet, sur le site wiktionary, par exemple, on ne dénombre pas moins de 11 définitions dont plusieurs ne sont pas de simples nuances mais sont "profondément" (pour ne pas dire radicalement) différentes : https://fr.wiktionary.org/wiki/radical
Ainsi, nous parlerons de radicalité au sens défini par les points 5, 6 et 7 du lien ci-dessus, et considérant la définition suivante :

Radical  : Qui a rapport au principe d'une chose, à son essence. Qui est essentiel, fondamental, absolu.

Nous vivons dans un monde en quête de sens, de repères et d'absolus. Le temps n'est pas à retirer les mots "radical" et "radicalité" de nos vocabulaires, et ce quelque soit le nombre de djihadistes dont on nous contera les radicalisations.

  • Lorsque vous vous enfermez dans une dispute épouvantable avec votre femme, que d'un coup vous avez un moment de lucidité, et que vous la prenez dans vos bras en disant : "Allez, on arrête nos conneries." : C'EST un moment de radicalité.
  • Lorsqu'à un dîner de famille, quelqu'un ose crever l'abscès en parlant de ce qui gâche l'ambiance depuis des années sans que personne n'ose intervenir : C'EST un moment de radicalité.
  • Lorsque le lion comprend que, même avec un bâton, son dompteur n'est pas plus fort que lui, et lui passe à tout jamais l'envie de dominer : C'EST un moment de radicalité.
  • Lorsque un peuple comprend que ceux qui l'aliènent ne sont que quelques hommes faits de chair et de sang : PEUT AVOIR LIEU un moment de radicalité...

En cela, le point 7 de la définition de wiktionary : "qui révolutionne" n'est pas une définition mais un corollaire. En effet, ce qui est radical est nécessairement révolutionnaire. Et quand on y réfléchit, ce qui est révolutionnaire est nécessairement radical.

Stephen Hessel a publié "Indignez vous !" avec le succès qu'on lui connait. Oui ! C'est bien ! Mais un peu passif. Un "je m'indigne" évoque davantage "je ronchonne" qu'autre chose...

Non, le temps passe et l'heure est grave alors il ne s'agit plus de rouspéter dans son coin. Là il y a urgence. Il y a état d'urgence. Alors : Soyons bons ! Et soyons radicaux !


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6 réactions à cet article    


  • Jonas Jonas 25 novembre 2017 15:50

    « ou le malheureusement trop d’actualité »radicalisation" sont là pour le rappeler et confèrent au mot lui même, et auprès du grand public, une connotation de violence aveugle et écervelée.« 

     »Radicalisation« est un terme novlangue pour détourner l’attention et cacher les véritables problèmes.
    Il signifie musulman ou groupe de musulmans voulant appliquer les principes coraniques dans les sociétés occidentales.
    On ne peut pas le dire directement, pour ne pas  »stigmatiser les musulmans« et éviter de »faire monter l’extrême-droite."


    • Clark Kent Jeussey de Sourcesûre 26 novembre 2017 08:35

      « radicalisme » a la même étymologie que « radicalité », mais ça ne veut pas dire la même chose.En sémiologie, l’étymologie n’a ni plus ni moin d’importance que la généalogie en psychologie ou sociologie.


      D’après son étymologie , le mot « illusion » désigne « l’action de se jouer ou de se moquer » (in-ludere). Or, ce mot signifie soit l’interprétation fausse d’une donnée des sens, soit une croyance fausse qui abuse l’esprit par son aspect séduisant.

      Il faut se méfier de l’étymologie pour définir les mots : les usages socio-culturels et les idéologies sont passés par là.

      • Robin des villes Robin des villes 26 novembre 2017 15:41

        @Jeussey de Sourcesûre


        Les choses sont simples. Ce qui définit un mot c’est sa définition.
        L’étymologie permet de retrouver l’origine du mot, c’est sa seule fonction.
        Et dans l’origine du mot, on peut retrouver un sens un peu perdu, qu’on avait un peu oublié, mais qui est toujours là.

        Je reprends ton exemple et ses définitions : « ILLUSION »
        - Définition du dictionnaire : 1) Interprétation fausse d’une donnée des sens. 2) Croyance fausse qui abuse l’esprit par son aspect séduisant.
        - Apport de sens de l’étymologie : « action de se jouer ou de se moquer » (in-ludere)

        On voit bien ici que la définition du dictionnaire est la définition « objective », elle est assez froide car n’y est présent que le sujet de l’illusion, les facteurs extérieurs étant dans un cas « une donnée des sens » donc une information trompeuse provenant de son propre corps, dans l’autre une « croyance » donc une information trompeuse provenant de son propre esprit.
        L’apport de l’étymologie est celui de la relation à l’autre. En effet, on peut avoir une illusion, mais on peut aussi entretenir une illusion, parfois pour se moquer de quelqu’un, pour le mener en bateau, pour lui vendre une voiture ou un crédit, ou bien pour l’émerveiller si on en a fait sa profession ; On est alors « illusioniste » ou « prestidigitateur ».

        Mais avec la « méthode dictionnaire », il faudrait oublier qu’il y a un lien entre les mots « illusioniste » et « illusion », aller scolairement à la page « illusioniste », et considérer indépendamment sa définition : « Illusioniste » : « Personne qui possède un talent ou un don pour la magie, notamment pour la prestidigitation, art de créer l’illusion, c’est-à-dire de faire voir l’invisible. »

        Alors on voit bien l’intérêt de l’étymologie, sans nous donner les définitions des mots, elle crée un lien entre eux. On comprend que l’illusion est une altération des perceptions que l’on peut ressentir, mais également que l’on peut créer chez l’autre. Et le fait que les illusions résultent le plus souvent d’interactions entre les individus nous parait alors plus évident.

      • Robin des villes Robin des villes 26 novembre 2017 16:41

        @Jeussey de Sourcesûre


        Désolé, j’avais oublié le début :
        Pour « radicalisme » et « radicalité » il est clair que quand on a dit « ça vient du latin radicalis » on n’a rien dit. smiley
        Mais l’étymologie ne se limite quand même pas à ça :
        - Radicalisme : on voit bien ici le suffixe « isme » dont le dictionnaire nous dit qu’il est « Utilisé pour former un nom correspondant à une doctrine, un dogme, une idéologie ou une théorie. »
        Et ce que l’étymologie nous indique, l’histoire nous le confirme : « A l’origine, le radicalisme désigne, en Grande-Bretagne, la doctrine politique de ceux qui, comme Jeremy Bentham (1748-1842), David Ricardo (1772-1823), John-Stuart Mill (1806-1873), prônent des réformes libérales extrêmes dans l’organisation sociale du pays ».
        Et là on en revient à nos moutons (la politique), et tu vois que « the radicalism » trouve davantage ses sources lexicales dans le free world qu’en terres d’islam. smiley
        - Radicalité lui est le simple substantif. Et ce qu’est un substantif est intéressant aussi.
        Là encore, pour en revenir à nos moutons, « radicalité » on peu y mettre dedans ce qu’on veut, le mot est neutre. Comme j’essaye de le dire dans mon article, il s’agit d’être fermes, droits, déterminés dans nos intentions et soudés. C’est cet aspect là de la radicalité qu’il faut mettre en avant, et sans vouloir y coller son idéologie sinon cela gâche tout.

        Non, franchement, l’étymologie c’est pratique, je regrette de ne pas avoir fait de grec ou de latin au collège, je comprends mieux pourquoi on l’enseigne (ou on l’enseignAIT, je ne sais même pas), et je comprends mieux la démarche d’une Natacha Polony qui semble vouloir faire un peu d’éducation populaire sur le sens des mots. Allez, je file, je vais lire son livre ! smiley Merci pour ton commentaire, il m’a fait réfléchir.

      • L'enfoiré L’enfoiré 27 novembre 2017 11:10

        @Robin des villes

        Tout à fait.
        6 ans de latin, un an de grec laissent quelques traces indélébiles sur la construction des mots et pas comme disent certains sur l’orthographe qui elle jouent à la difficulté fransquillonne du Parisien pour les alliances entre les mots...
        Le seul bénéfice du grec, c’est de pouvoir le lire même si je ne le comprends pas
        .
        Les mots qui se terminent par « -isme » sont sujet à caution à dysfonction tout comme ceux qui commencent par « dis- »..
        Tiens, cela me rappelle « Les mots de l’étrange » 


      • Robin des villes Robin des villes 10 décembre 2017 17:17

        @L’enfoiré L’article en lien m’a passionné. Merci.

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