Généalogie des super-héros américains
La sortie du film de Ryan Coogler « Black Panther » remet au goût du jour la mythologie moderne des « Super-Héros » américains. C’est l’occasion de se pencher sur les origines de ces icônes venues de la bande dessinée.
Batman, Superman et Wonderwoman sont les ainés de la famille. Ils ont vu le jour à la fin des années 1930, et c'est en 1940 que le journal « Timely Comics » (l’ancêtre de Marvel Comics) a lancé « Captain America ». Dessiné par Jack Kirby sur un scénario de Joe Simon au début, puis de Stan Lee, ce magazine était diffusé à 1 million d'exemplaires par mois.
En intégrant une profondeur sociale à « Marvel Comics », Stan Lee en a fait une marque emblématique. Il était issu d’une famille juive récemment immigrée, à New York, où, dans les années 1920, les ouvriers du textile comme ses parents étaient favorables aux mouvements progressistes et souvent à la tête d’organisations combattant le fascisme qui les avait chassés d’Europe.
Comme beaucoup de personnes de sa génération, Stan Lee était un « libéral » américain, avec toutes les contradictions que cela implique, comme le fait d’être interventionniste sur le plan économique et libertaire sur le plan des mœurs. Un libéral américain n’est pas un libéral français, c’est même le contraire, c’est une sorte de social-démocrate sans base arrière idéologique, un homme de gauche qui n’aurait jamais entendu parler de Marx, pour qui Lénine est un épouvantail. Un libéral américain est avant tout et paradoxalement un étatiste. Persuadé que le bonheur de l’homme peut être amélioré dans une société en progrès constant, il fait confiance au gouvernement central pour y parvenir.
Les idées progressistes de Captain America l’avaient poussé à se battre contre des espions et des saboteurs nazis avant même l'attaque de Pearl Harbor qui avait amené les États-Unis dans la seconde guerre mondiale.
Dans les années 1960, Captain America a vaincu la société secrète « Hydra » fasciste (et fanatique, forcément). Plutôt que de subir l’humiliation de la captivité, les agents de l’organisation malfaisante avalaient une pilule de poison en clamant : "Si une tête est coupée, deux autres prendront sa place. Salut HYDRA ! Ugh !! "
Hydra était présentée comme une secte apparentée au parti nazi, elle était dirigée par l'ennemi juré du capitaine héros, le Crâne Rouge. Après la guerre, ce têtre démoniaque avait infiltré les échelons les plus élevés des services de sécurité américains et soviétiques pour voler les dernières technologies et créer autant de chaos que possible dans le monde. L'antagonisme Est-Ouest de la guerre froide était dépeint dans l'univers du magazine Marvel comme ayant été délibérément mis en œuvre et entretenu par une conspiration fasciste.
Captain America était toujours prêt à défendre la démocratie et l'opprimé. Il ne s’est jamais attribué la victoire à lui seul. Dans une aventure de 1941, il était aidé par une jeune femme, un agent spécial britannique, l’ Agent X, dont le personnage a évolué plus tard sous les traits de l’agent Peggy Carter qui vit une idylle attendrissante avec le super-héros.
À la fin de la guerre, l'avion de Captain America s'écrasait dans l'Arctique et il s’est trouvé conservé dans un bloc de glace jusqu'à sa résurrection en 1964. Et là, il est tombé amoureux de la nièce de Peggy, agent du Shield, une autre organisation secrète mise en place pour protéger le monde des menaces globales telles que celles d’Hydra. Pour cette nouvelle période d’aventures, Captain America faisait équipe avec un héros noir de Harlem, le Faucon, pour lutter contre la discrimination raciale, la pauvreté et la toxicomanie.
Les héros des bandes dessinées de 1940 avaient été bien améliorés grâce aux avancées de la science. Le sérum de super-soldat qui avait transformé Steve Rogers en puissant Capitaine America avait été développé par un scientifique juif qui s’était réfugié aux États-Unis pour empêcher la formule de tomber entre les mains des nazis.
Ensuite, "l'ère atomique" avait inauguré une nouvelle génération d'hommes et de femmes surpuissants. Les rayons gamma avaient transformé Bruce Banner en Incroyable Hulk, les rayons cosmiques avaient créé les Quatre Fantastiques et une araignée radioactive avait transformé l'étudiant timide Peter Parker en un Spider-Man époustouflant.
Il y avait aussi des femmes super-héros et pas seulement des copines ou des conjointes de seconde zone. Natasha Romanoff était une tueuse soviétique connue sous le nom de Black Widow avant de rejoindre les Avengers. Elle a eu droit à sa propre bande dessinée pour une courte période en 1970 et, comme Captain America, a réglé des problèmes sociaux et combattu des super méchants. Le personnage était joué par Scarlett Johansson dans les films de Marvel Studios.
À partir de 2000, les histoires éditées par Marvel avaient pris un tour plus libertarien, défendant les libertés civiles contre l'empiétement de l'Etat. Les mutants des histoires de X-Men souffraient de discrimination et subissaient des "traitements" obligatoires » pour corresponde aux normes en vigueur en corrigeant leurs différences congénitales. Ceux qui refusaient de s'enregistrer, comme Captain America, étaient traqués. En 2007, alors âgé de 88 ans, mais toujours au summum de la forme physique, Captain America a été abattu par Sharon Carter, un serviteur de l’axe du mal.
Mais les super héros, comme tous les personnages de bandes dessinées, ne meurent jamais vraiment et leur histoire se poursuit avec la sortie des films à succès. La famille des libéraux américains leur doit une fière chandelle.
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