L’exemplaire « Mosquée ouverte » du Cap
Le vendredi 19 septembre s’est passé un évènement étonnant dans le contexte d’intolérance et de djihad véhiculé par les fondamentalistes musulmans fanatisés. Cet évènement a été l’ouverture, en Afrique du Sud, d’une « mosquée ouverte » à tous, y compris les homosexuels et les Juifs...
L’homme qui a fondé cette mosquée à Wynberg, un quartier sud de la ville du Cap, est un théologien nommé Taj Hargey. Né en Afrique du Sud, il est directeur du Centre d’éducation musulman d’Oxford. Profondément humaniste et ouvert à tous, quelles que soient les croyances et les orientations sexuelles de chacun, ce musulman œcuménique a dû – on l’imagine aisément ! – faire face, lorsqu’a été connu son projet, à de très nombreuses critiques, et même à des menaces de castration et de décapitation ! Malgré l’hostilité des intégristes, Taj Hargey a pourtant réussi à mener ce projet à son terme. Et c’est ainsi qu’a été inaugurée, le vendredi 19 septembre 2014, une « Open Mosque » dans la ville du Cap : un lieu de culte ouvert à tous, y compris « les homosexuels, les Juifs et les Chrétiens ».
Taj Hargey a également fait un pas décisif en direction des femmes, trop souvent considérées dans le monde musulman comme des personnes de second rang. Selon lui et ses collaborateurs, le Coran est formel : les hommes et les femmes sont égaux. La lecture du chapitre qui leur est consacré sur le site de la Mosquée ouverte est à cet égard on ne peut plus claire : « La Mosquée ouverte est calquée sur le premier lieu de prière fondé par le prophète Mahomet à Médine. En termes d'égalité entre les sexes, ceci signifie qu'il n'y a pas d’entrée distincte pour l'un ou l'autre genre et que les femmes sont présentes dans la même salle de prière sans aucune séparation. »
Taj hargey va encore plus loin. D’une part, en intégrant des femmes au sein du Conseil exécutif de la Mosquée ouverte, une instance où elles jouent un rôle de premier plan à tous les niveaux de l’organisation. D’autre part, en permettant à des femmes de conduire la prière. Des décisions qui sont ainsi expliquées sur le site de la Mosquée ouverte : « L’égalité des genres est un précepte clair du Coran : les droits intrinsèques des femmes ne sont pas subalternes à ceux de leurs homologues masculins. L'Islam est une religion qui reconnaît l’égalité des sexes, mais aussi celle des orientations sexuelles, et réprouve, de manière irrévocable, quelque forme de discrimination sexuelle que ce soit. »
Taj Hargey et ses collaborateurs affirment agir « dans le respect des principes de l’Islam ». Une prise de position étonnante et courageuse dans le contexte géopolitique actuel : on est bien loin, avec l’expérience tout à la fois admirable et insolite de la Mosquée ouverte, du regard posé sur la religion musulmane par les fondamentalistes religieux qui ont une lecture intégriste du Coran, jusqu’à être parfois à l’origine des pires crimes commis par des fanatiques endoctrinés. Une lecture intégriste qui, nous affirme Taj Jargey dans les colonnes de l’hebdomadaire Jeune Afrique, trouve ses racines dans la « théologie pervertie » de pays comme l’Arabie Saoudite ou le Pakistan.
Comme on peut s’en douter, cette vision du culte musulman ne plaît pas à tous les croyants de ce pays, l’Afrique du Sud, qui en compte environ 740 000 sur son territoire. C’est donc sans surprise que, le samedi 4 octobre, un cocktail molotov a été lancé sur la façade de la Mosquée ouverte, en provoquant des dommages au portail. Cet acte d’intimidation n’a pas réussi à impressionner Taj Hargey et ceux qui lui ont emboîté le pas. Bien au contraire, ils entendent poursuivre avec détermination cette expérience que Taj Hargey considère, nous dit Jeune Afrique, comme « "une révolution religieuse", qui doit s'inscrire dans la lignée de la révolution politique que fut la prise de pouvoir par Nelson Mandela en 1994, après des décennies de régime raciste d'apartheid. »
Pourquoi Taj Hargey s’est-il engagé dans cette aventure confessionnelle ? La raison en est simple, et figure sur le site web de la mosquée. On peut, en substance, y lire ceci : « Sans connaissance véritable du texte transcendant lui-même, beaucoup de musulmans souscrivent à une croyance inventée qui est indépendante du Coran. Il résulte de la déformation du texte sacré des idées fausses virulentes qui ont pris un grand ascendant sur les fidèles avec l’influence en hausse du Wahhabisme, du Salafisme, de l’Islam Shi'ah, du Tablighi Jamaat et autres déformations sectaires de l’écriture sacrée. »
La Mosquée ouverte organise des prières quotidiennes et hebdomadaires. Et comme l’a voulu son fondateur Taj Hargey, elle est en passe de devenir « un aimant actif pour le dialogue interconfessionnel ». C’est notamment dans cette optique qu’a été organisée avant Noël une collation destinée aux chrétiens. D’autres initiatives sont prévues en direction de tous, dans le cadre d’une vision universelle qui embrasse « l'éventail entier des philosophies et des croyances religieuses, de l’athéisme au Zoroastrisme, avec pour objectif de promouvoir la compréhension et la tolérance véritable de toutes les croyances. »
Ce message de paix et de communion de tous, hommes et femmes, croyants ou non, peut-il être compris par tous les musulmans ? On peut en douter en observant les dérives sectaires inquiétantes – et en de nombreux lieux sanglantes – qui gangrènent le monde de l’Islam dans un contexte politique perverti par des ambitions souvent bien éloignées des questions théologiques. Ce serait pourtant une formidable avancée dans les relations humaines planétaires.
Et si l’on commençait chez nous, en France, à prendre exemple sur la philosophie de Taj Hargey ? Amis musulmans, à vous de méditer son message...
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